Le vote stratégique

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Ingénierie électorale

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Jun 26, 2017, 7:40:21 AM6/26/17
to votede...@googlegroups.com

Sylvain Spinelli : "Le problème de la "manipulabilité" est fondamental dans le cadre d'un jury, il est problématique dans le cadre d'un vote "en réunion", mais il est à mon sens non pertinent et sans objet dans le contexte d'une élection démocratique. Le Vote de Valeur que nous proposons ne s'intéresse qu'au contexte de l'élection démocratique."

Le vote est dit stratégique lorsque, au lieu d'exprimer les préférences sincères, il prend en compte les tendances supposées des autres votants et les règles du scrutin, afin d'optimiser son effet.

Voici comment sa prépondérance varie, selon la taille de l'électorat :

  • jury : les individus sont seuls face à leur choix, ils ignorent le plus souvent comment voteront les autres, et sont donc peu capables de stratégie ; il reste toutefois la possibilité d'une entente préalable, ce qui est souvent considéré comme de la triche ; les résultats, rendus publics, obligent les juges à pouvoir se justifier objectivement, sous peine de sanctions
  • en réunion : les individus ne sont généralement pas seuls, car dans un conseil on peut observer différentes factions ; la stratégie arrive alors nécessairement, d'autant plus lorsque ces factions ont une part décisive dans le conseil
  • élection libre moderne : les électeurs ne connaissent ni les candidats, ni les autres électeurs, et sont donc esseulés... mais les médias les "informent" des préférences des autres par la suggestion (temps de parole, appels au vote utile, sondages), et avant que l'électeur n'ait voté stratégiquement, les médias lui parlent de son propre comportement stratégique.
On aboutit donc à la conclusion inverse : l'expression des choix est d'autant plus trafiquée que le choix est collectif, ou disons plutôt, que le choix est médié (car n'est pas ce qu'on voit dans une foule).

Pour le comprendre, il faut oublier toute vision éthérée des choses et se remettre dans l'ambiance pestilentielle d'une campagne électorale.

Bien sûr, le contexte, et le scrutin, c'est-à-dire l'enjeu et la règle du jeu, jouent un rôle dans cette ambiance. Mais même dans les meilleurs cas l'enjeu reste le pouvoir, rien de moins.

L'élection moderne est donc une guerre civile, mais avec des règles particulières qui font que l’État n'est pas censé intervenir sauf pour organiser la compétition, comme dans un marché. Il va de soi que dans ce marché l'offre politique (les candidats) et la demande (les groupes de pression, plus ou moins puissants) doit se rationaliser au maximum, sous peine d'en "payer le prix" : c'est-à-dire l'éloignement du pouvoir. Aussitôt que change la loi électorale, ces acteurs doivent s'adapter.

Les médias, ici, jouent un rôle comparable aux intermédiaires en bourse, c'est-à-dire qu'ils font se rencontrer l'offre et la demande, exagèrent les tendances du marché, et commettent des délits d'initié (ayant tous tissé des liens avec le monde de l'offre politique). Comme les spéculateurs, leur omniprésence est regrettable, mais leur présence est nécessaire. Car si nous détestons entendre des journalistes répéter qu'untel "n'a aucune chance", et appeler au "vote utile", nous n'aimerions pas non plus découvrir le soir des résultats que l'optimisation des préférences fut imparfaite.

C'est pourquoi, s'il y a possibilité d'une stratégie, elle aura lieu.

Ce n'est pas de notre ressort. Ce n'est pas une question de volonté personnelle. C'est constitutif de l'élection moderne.

Si le vote stratégique permet à un groupe d'intérêts d'avancer ses pions, il en fera une consigne, et les groupes d'intérêts qui lui son directement opposés devront la contrer par une autre consigne de vote stratégique. Comme cette réaction en chaîne est déjà anticipée par les journalistes, les directeurs de campagne et les militants, elle devient très vite une institution et c'est ainsi qu'on peut dire que le mode de scrutin fabrique la vie politique.

D'où l'intérêt, n'est-ce pas, de percevoir le type de stratégie propre à chaque mode de scrutin.

I.E.

> Le 22 juin 2017 à 23:17, Sylvain Spinelli <sylvain....@gmail.com> a écrit :

> Bonjour,

> Il est fondamental de différencier le contexte et l'objectif d'un vote avant d'évaluer les défauts et qualités des systèmes mis en œuvre.

> Le problème de la "manipulabilité" est fondamental dans le cadre d'un jury, il est problématique dans le cadre d'un vote "en réunion", mais il est à mon sens non pertinent et sans objet dans le contexte d'une élection démocratique. Le Vote de Valeur que nous proposons ne s'intéresse qu'au contexte de l'élection démocratique.


Adrien Fauré

unread,
Jun 27, 2017, 5:40:13 AM6/27/17
to Vote de valeur, ingenierie...@laposte.net


Le lundi 26 juin 2017 20:40:21 UTC+9, Ingénierie électorale a écrit :
On aboutit donc à la conclusion inverse : l'expression des choix est d'autant plus trafiquée que le choix est collectif, ou disons plutôt, que le choix est médié (car n'est pas ce qu'on voit dans une foule).

[...]
 
C'est pourquoi, s'il y a possibilité d'une stratégie, elle aura lieu.

Ce n'est pas de notre ressort. Ce n'est pas une question de volonté personnelle. C'est constitutif de l'élection moderne.

Je ne peux pas parler pour Sylvain, mais je pense que ça revient exactement à ce qu'il disait, en fait :

- Dans le contexte d'un jury, la question se pose parce que se pose celle de la triche — les jurés sont censés suivre des règles communes, et on veut s'assurer que c'est bien le cas. Qu'un juré qui aurait été acheté ne pourrait « manipuler » le résultat dans son sens. On s'attend à ce que les évaluations convergent, et les rendre publiques, ou choisir la médiane plutôt que la moyenne peuvent être des solutions.

- Dans une élection au contraire, il n'existe aucune règle a priori, aucun critère permettant de définir un bon ou un mauvais candidat. Chacun peut chercher à « manipuler » le résultat  dans le sens qui lui convient, ici cette « manipulation » est légitime. Et notamment, le choix de la médiane semble peu pertinent — on n'a aucune raison de s'attendre à ce que les opinions convergent, et donc encore moins d'écarter celles qui divergeraient.


D'où l'intérêt, n'est-ce pas, de percevoir le type de stratégie propre à chaque mode de scrutin.

Tout à fait. C'est d'ailleurs à mon sens un des problèmes du mode de scrutin à deux tours ou des scrutins par classements : leur non-linéarité rend difficile la construction d'une stratégie qui favorise réellement le point de vue de l'électeur. Le vote par note, sans éliminer tout à fait le problème, le simplifie grandement.

Cordialement,

Adrien.

Sylvain Spinelli

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Jun 27, 2017, 7:07:28 AM6/27/17
to votede...@googlegroups.com

Bonjour,

Vous adoptez là une définition très restrictive du vote dit "stratégique", en ne retenant que les stratégies relatives aux postures des autres votants. Je vous rejoins sur la prépondérance selon la taille de l'électorat lorsqu'on n'intégre que cet aspect de la manipulabilité.

Pour garder votre définition du vote stratégique, disons alors que le problème de "manipulabilité" est un sur-ensemble plus large qui est la possibilité que des électeurs aient intérêt, dans certains cas, à produire un bulletin qui ne corresponde pas à leurs véritables opinions.

Dans un jury, dont l'objectif est de faire émerger une vérité, il est fondamental que le système de vote soit le plus robuste possible vis à  vis de cette manipulabilité pour préserver l'intégrité du jury et ne pas inciter les membres à s'éloigner de leur véritable opinion pour des raisons non avouables comme le chauvinisme, la corruption, etc.

Dans une réunion, comme un conseil d'administration, le vote est précédé de discussions ouvertes où chacun s'exprime. La notion même de "véritable opinion" a moins de sens, car il ne s'agit plus faire émerger une vérité mais d'opérer des choix. Ces choix sont parfois purement subjectifs, parfois plus objectifs consistant à faire émerger LA meilleur solution (on revient alors à une forme de recherche de vérité objective à priori). Mais contrairement à un membre du jury, il est en droit de changer d'avis au fil de la discussion. Le participant à la réunion peut cependant être malhonnête vis à vis de ses acolytes en ne votant pas conformément à ce qu'il affirmait (non pas suite à un changement d'avis, mais par calcul et anticipation des votes des autres participants), voire, avec encore plus d'anticipations, mentir sur son opinion pendant les discussions pour influencer les autres membres et faire échec à leur propre malhonnêteté... bonjour l'ambiance ;) mais c'est la triste réalité dans certains contextes...

Le vote de valeur étant très expressif, il laisse naturellement une très grande place à la manipulation aussi. C'est pourquoi le vote de valeur n'est pas forcément recommandable dans ces deux premières situations.

Venons-en à l'élection démocratique. En politique, par principe,  il n'y a pas de vérité à priori et l'électeur est seul avec son bulletin. Donc, concernant l'électeur, exit les enjeux de corruption ou tricherie (jury) et mensonges ou malhonnêteté (réunion). Comme vous l'évoquez, ces déviances peuvent être mises en œuvre par les organisateurs du scrutin, les partis et tous les intermédiaires que vous citez, mais pas l'électeur.

Cependant, votre définition du vote stratégique évoque la notion de "préférences sincères" en contradiction avec une "optimisation de l'efficacité". Contrairement à ce que j'énonce précédemment, considérez-vous qu'il y a des "électeurs honnêtes" (ou "sincères") qui voteraient selon leurs préférences sincères  et des "électeurs malhonnêtes" qui optimisent leur vote en s'écartant de leurs préférences sincères ? Votre définition le laisse entendre mais le reste de votre propos exonère plutôt l'électeur pour reporter cette responsabilité (et cette "faute morale") sur le système et les acteurs politiques au travers de pressions exercées sur les électeurs. Avant d'aller plus loin dans le raisonnement, j'aurai besoin d'une clarification sur cette ambiguïté car la nature des arguments change radicalement en fonction de cette réponse.


Cordialement,
Sylvain
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Gérard Bodin

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Jun 29, 2017, 8:57:59 AM6/29/17
to Sylvain Spinelli, Vote de valeur
Je découvre après coup le texte d'I.E. J'aime beaucoup, je crois que je vais l'encadrer :-)

Adrien : Pas d'accord avec ton dernier argument. Je pense que les électeurs ont maintenant bien intégré la notion de "vote utile", i.e. il faut voter pour un candidat qui a une chance d'être au second tour sinon le vote est gâché. Le fait que le mécanisme de vote est simple (choisir un seul candidat) facilite la compréhension de la stratégie optimale ; à l'opposé, un mécanisme plus expressif type vote par notations éloigne l'électeur de la stratégie optimale. J'entends par là que, pour peu que l'électeur ait une indication de la préférence des autres électeurs, il existe pour lui une stratégie optimale consistant à ne distribuer que des notes extrêmes, donc lui proposer des notes intermédiaires ne peut que l'inciter à l'"erreur".

Sylvain : Je ne vois pas en quoi déterminer "à qui la faute" change la question. Le fait est que le vote de valeur récompense / encourage les votes optimisés par rapport aux votes sincères. Imaginons qu'un groupe politique A suive scrupuleusement les consignes d'un parti tandis que le groupe B se contente d'exprimer sincèrement ses opinions, le groupe A se retrouveraient à gagner plus facilement les élections et B s'en rendrait assez rapidement compte, quel que soit le système et les acteurs. Il me semble que notre responsabilité à nous, théoriciens des jeux, est de proposer un système de vote qui non seulement permet l'expression d'un vote sincère mais aussi l'encourage, autrement on s'exposerait à ce que la pratique électorale réduise à néant l'intérêt théorique du changement de mode de scrutin.

Gérard




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Sylvain Spinelli

unread,
Jun 29, 2017, 4:00:27 PM6/29/17
to votede...@googlegroups.com

Sylvain : Je ne vois pas en quoi déterminer "à qui la faute" change la question. Le fait est que le vote de valeur récompense / encourage les votes optimisés par rapport aux votes sincères.

Vous actez donc bien l'idée qu'un vote que vous qualifiez de "sincère" est plus glorieux / noble / satisfaisant / moral / sain (terme au choix) pour la démocratie qu'un vote "optimisé". Il y a quelque chose de mal / honteux / inavouable / immoral / malsain (terme au choix) pour la démocratie avec des votes "optimisés". Idéalement, à vos yeux, il faudrait parvenir à éradiquer ces votes "optimisés". C'est bien ça ?



Imaginons qu'un groupe politique A suive scrupuleusement les consignes d'un parti tandis que le groupe B se contente d'exprimer sincèrement ses opinions, le groupe A se retrouveraient à gagner plus facilement les élections et B s'en rendrait assez rapidement compte, quel que soit le système et les acteurs.

Pouvez-vous nous donner des exemples concrets de ce que pourrait être une consigne du parti pour le groupe A que le groupe B n'aurait pas imaginé et s'en rendrait compte après coup ? J'avoue ne pas bien comprendre, car si le parti souhaite réellement gagner l'élection, la seule consigne évidente est la plus triviale qui soit : donner le maximum au candidat du parti (+2), et le minimum à tous les autres (-2). Qui pourrait ne pas comprendre cela dans le groupe B ? Avez-vous en tête d'autres stratégies avec le VdV plus "vicieuses" ou "subversives" pour la démocratie qui piègeraient ainsi le groupe B ?

@IE, vous avancez me semble-t-il la même idée de réactions en chaine de stratégies et contre-stratégies des différents groupes d'intérêts. Auriez-vous des exemples qui illustrent de telles réactions en chaîne ?


Il me semble que notre responsabilité à nous, théoriciens des jeux, est de proposer un système de vote qui non seulement permet l'expression d'un vote sincère mais aussi l'encourage, autrement on s'exposerait à ce que la pratique électorale réduise à néant l'intérêt théorique du changement de mode de scrutin.

Je suis tout à fait d'accord avec vous sur ce point: si vous jugez la "sincérité" moralement supérieure à "l'optimisation" et que vous en faites un critère prépondérant, alors je dirai qu'il ne reste à la démocratie que le mode de scrutin uninominal à un seul tour car le potentiel de vote stratégique d'un système est directement corrélé au pouvoir d'expression offert à l'électeur. Plus le bulletin permet d'émettre un message riche (comme le VdV), plus il permet d'élaborer une stratégie de vote. Inversement, bien évidemment, plus le bulletin est pauvre, moins il laisse de place à la stratégie. Le scrutin uninominal à un tour est le système plus pauvre qui soit, donc logiquement le moins manipulable.

IE, Gérard, plutôt que de me lancer dans un long monologue, je préfère attendre vos retours sur les deux questions soulevées précédemment avant de poursuivre nos échanges que j'espère constructifs.

Sylvain

Gérard Bodin

unread,
Jul 3, 2017, 12:44:41 AM7/3/17
to Sylvain Spinelli, Vote de valeur
Bonjour Sylvain

Je ne mets aucune moralité dans mon propos, je reste logique de bout en bout.

Mon prémisse tacite était qu'un bon système de vote se doit d'être fidèle a la volonté des électeurs.
Le problème est qu'une partie des électeurs votent de manière "sincère" ou "naive" en choisissant le bulletin de vote le plus proche de leurs convictions, tandis qu'une autre votent de manière "optimisée" en fabriquant un bulletin maximisant les chances de satisfaire au mieux leur intérêt.
C'est un problème dans la mesure ou considérer à tort un bulletin "optimisé" comme un bulletin "sincère" peut conduire le système de vote à désigner un candidat moins apprécié de l'ensemble des électeurs.

Le problème ainsi posé, il y a plusieurs manières de le régler : éradiquer le vote "sincere", éradiquer le vote "optimisé" ou assurer que le système de vote est indifférent à la sincérité des électeurs.

J'insiste : je ne prétends pas "il faut", je poursuis simplement ce raisonnement : en supposant qu'on ne maîtrise pas la sincérité des électeurs, pour être fidèle à la volonté générale un système de vote doit rester indifférent à la sincérité des votes exprimés.

Revenons à l'exemple que j'ai donné. Je ne prétends pas que A arriverait à piéger B. Vous écrivez "Qui pourrait ne pas comprendre dans B ?" Vous admettez donc que le vote de valeur favorise si bien le vote optimisé que même le groupe B des électeurs les plus sincères s'en rendrait compte et finirait par adopter lui aussi un vote stratégique ou tout le monde voterait +2 à son candidat et -2 à tous les autres.

Ainsi, dans la pratique d'un monde politique organisé par des partis "stratèges", le vote de valeur serait exactement identique au scrutin majoritaire et n'amènerait donc strictement rien de mieux, CQFD.

Si quelque chose ne reste pas clair, n'hésitez pas.

Gérard










Loïc Alejandro

unread,
Jul 3, 2017, 12:02:44 PM7/3/17
to votede...@googlegroups.com

Salut,

intéressant tout ça :)

La distinction entre vote "sincère" et vote "optimisé" ne me paraît pas aussi facile à déterminer. Et la distinction "sincère"/"optimisé" laisse entendre qu'il y en a un correct et un l'autre non.

Il me semble que la distinction se situe sur un autre plan.

Au moment de voter nous faisons, je crois, tous et toutes un équilibre entre deux considérations : "ce que je pense des candidatxs" et "ce que je souhaite comme résultat des élections". Ce sont deux choses bien différentes qui peuvent mener à voter de manière différente effectivement.

Pour certainxs la première phase a beaucoup plus de poids que la seconde, pour d'autres c'est le contraire, et pour d'autres chaque phase a son importance. Et en plus, cet équilibre peut changer d'un contexte à l'autre.

Exemple : unx votantx pourrait très bien avoir voté pour Hamon (sachant qu'il n'y avait presque aucune chance d'arriver au second tour), c-a-d en donnant plus de poids à "ce que je pense des candidatxs", puis voter Macron au second tour pour éviter que LePen soit élue, c-a-d en donnant plus de poids à "ce que je souhaite comme résultat". Ce n'est ni bien ni mal, c'est son choix.

Unx votantx de Mélenchon parcontre, en restant sur un mode "ce que je pense des candidatxs" exclusif, peut très bien s'abstenir au second tour. Ce n'est ni bien ni mal, c'est son choix.

Est-ce mal de donner plus de poids à "ce que je souhaite comme résultat" face à "ce que je pense des candidats" ? À mon avis non. Chacun vote selon ses propres critères. Et même si pour quelqu'un le critère prépondérant est "ce que je souhaite comme résultat", ça n'est pas pour autant un vote moins sincère.

L'intérêt du/de la votantx militantx radicalx sera de maximiser les chances de victoire de son/sa candidatx, ok très bien. Et l'intérêt du/de la votantx non militantx sera d'exprimer son vote sur une base "ce que je pense des candidatx", très bien aussi.

Gérard, tu sembles considérer que si une partie de la population ne fonctionne que sur le critère "ce que je souhaite comme résultat" alors cela va pousser le reste de la population à fonctionner de même sur ce critère uniquement.

Je suis d'accord avec toi dans des structures de petites dimensions où un secteur sais qu'il peut faire pencher la balance avec une consigne de vote coordonné. Je le sais parce que je l'ai vécu.

Dans le cas d'une élection présidentielle, je ne pense pas que ça puisse être le cas. Les militants radicaux sont une minorité et la grande majorité de la population vote plutôt en suivant le critère "ce que je pense des candidats". C'est ce que démontrent les expérimentations, mais aussi la typologie de vote aux élections législatives allemandes ou luxembourgeoise.

J'irais même plus loin : avec un VdV, sans l'assurance de gagner en faisant un vote coordonné et radical, le militant (non fanatique) utiliserait aussi les notes intermédiaires au moment de voter. Pour la raison suivante :

Prenons 3 candidats : A que j'aime beaucoup, B que j'aime bof, et C que je n'aime pas du tout.

Si je fais A+2, B-2 et C-2, ne sachant pas ce que va faire le reste de la population, je risque de faire élire C, que j'aime le moins, à cause de mon -2 à B qui, s'il avait eu plus d'appui, aurait pu l'emporter.

En d'autres termes, à vouloir privilégier exclusivement le meilleur, je peux m'exposer au pire.

Par ailleurs, si le VdV était implémenté, les candidatxs et les partis se positionneraient de manière différente par rapport aux autres candidats et partis. En effet, avec le système actuel il suffit de récolter plus d'appuis que les autres pour gagner. Avec un VdV il faut récolter plus d'appuis et/ou moins de rejet. Ceci inciterait les partis à faire campagne de manière à minimiser l'usage des notes négatives à leur encontre.

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L @_ï c
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"Une société prête a sacrifier un peu de liberté contre un peu de sécurité ne mérite ni l'une, ni l'autre, et finit par perdre les deux" - Benjamin Franklin

Sylvain Spinelli

unread,
Jul 11, 2017, 6:55:35 AM7/11/17
to Gérard Bodin, Vote de valeur

Bonjour Gérard,

Merci pour le développement de votre point de vue.

Pour ma part, ma vision d'une élection démocratique est éloignée de la théorie des jeux où le postulat est que tous les joueurs ne cherchent qu'à gagner.

Je ne partage pas l'idée que celui qui ne vote pas "optimisé" serait le "naïf" ou le "dindon de la farce". Le vrai problème serait que l'électeur ne comprenne pas cette dimension. Mettre en place le Vote de Valeur exigera de la pédagogie pour expliquer ces différentes approches du vote (même si cela reste très simple comparé à des systèmes par classement notamment).

Avec le Vote de Valeur, le seul point à bien comprendre est que si vous n'utilisez pas au moins une fois la valeur minimale et une fois la valeur maximale, alors vous n'avez pas exploité toute la puissance d'expression que votre bulletin vous offre. C'est comme si vous aviez voté "un peu blanc". Certes cela pourrait être le résultat d'une incompréhension du système (à résoudre par de la pédagogie), mais cela est aussi et surtout le résultat d'un choix délibéré de l'électeur :

  • en donnant -2 à tous les candidats, l'électeur choisi d'exprimer radicalement son mécontentement, sans peser dans le calcul du vainqueur ;
  • en se limitant à des valeurs entre -1 et +1 pour tous les candidats il adopte une démarche mesurée, il se moque que son bulletin pèse moins que celui d'un autre électeur qui aurait des convictions plus affirmées, il exprime ici simplement ses doutes indiquant quelques préférences, sans rejeter pour autant l'offre politique...
On peut multiplier ainsi les exemples où la recherche de l'optimisation maximale du bulletin n'est pas la finalité de l'électeur. Pourquoi la lui imposer ? Vous dites "Mon prémisse tacite était qu'un bon système de vote se doit d'être fidèle a la volonté des électeurs". Voilà des exemples concrets où le VdV reste bien fidèle à la volonté des électeurs lorsqu'on adopte une vision de l'élection démocratique dont le but est certes de sélectionner un vainqueur mais en laissant à chaque électeur la liberté de s'exprimer "un peu, beaucoup, passionnément...". Liberté qui m'apparait démocratiquement saine.

 

Ainsi, dans la pratique d'un monde politique organisé par des partis "stratèges", le vote de valeur serait exactement identique au scrutin majoritaire et n'amènerait donc strictement rien de mieux, CQFD.

Si la société se trouve fracturée au point où tous les électeurs seraient les godillots de leur parti incapables d'émettre un bulletin qui s'écarte de leur consigne, en effet, le Vote de Valeur reviendrait à un vote mono-nominal (scrutin majoritaire). Je rappelle que toutes les expériences menées jusqu'à présent (y compris celles de 2017) invalident cette hypothèse : cette pratique est très minoritaire, correspondant vraisemblablement aux militants de chaque parti.

La théorie des jeux avance d'autres approches d'optimisation avec notamment la stratégie du "leader rule", généralement jugée comme la plus "efficace", intégrant les sondages dans le processus d'optimisation. Si tous les électeurs adoptent une telle stratégie, alors le VdV se "transforme" en un "vote par approbation", à savoir un vote par valeur ramené à sa forme la plus pauvre avec 2 valeurs possibles (tous les candidats sont répartis sur les 2 valeurs extrêmes du VdV).

Une autre stratégie encore, dirigée par la peur de certains candidats amène l'électeur à donner le minimum au(x) candidat(s) qu'il craint particulièrement et le maximum à tous les autres. A nouveau cette stratégie ramène le VdV à un vote par approbation.

En affinant, il existe potentiellement autant de stratégies qu'il y a d'électeurs. Bien que ces stratégies soient contradictoires, leur point commun est d’appauvrir le message en n'exploitant que les 2 valeurs extrêmes du VdV (-2 et +2), ce qui ramènerait le VdV à un vote par approbation (si 100% des électeurs adoptaient de telles stratégies). Ce foisonnement de stratégies de votes est inévitable et naturel, mais je pense qu'il restera minoritaire car les électeurs préfèrent user pleinement de la richesse du bulletin du VdV (comme les expériences le montrent).

Posons à présent l'hypothèse que je me trompe. Imaginons... 20 ans après la mise en place du VdV en France, par assimilation de toutes ces stratégies, une majorité d'électeurs finit par les adopter systématiquement... Nous serions alors proche d'un vote par approbation qui est un système déjà très satisfaisant, bien meilleur qu'un vote mono-nominal. Dans ce scénario, il faut alors renverser la question : quel danger démocratique voyez-vous à ce qu'une minorité continue d'utiliser les valeurs intermédiaires ? A moins d'adopter un jugement moral sur les votes optimisés, je ne parviens pas à trouver de défauts à cette liberté offerte aux électeurs de produire un bulletin plus subtile (exploitant aussi les valeurs intermédiaires) ou plus mesuré (n'exploitant pas les valeurs extrêmes). Bien au contraire !


Sylvain

Gérard Bodin

unread,
Jul 12, 2017, 6:14:12 PM7/12/17
to Sylvain Spinelli, Vote de valeur
Bonjour Sylvain

Voici ce que j'ai répondu à Loïc qui soulevait une objection similaire (on a oublié de laisser le groupe en copie, désolé) :

 Je peux très bien imaginer, mettons, un scénario où un parti au pouvoir et les médias s'entendraient pour faire passer l'idée selon laquelle un parti extrême serait en position de gagner, ce qui conduirait des électeurs ainsi volontairement mal informés à mettre des +2 à tous les "républicains" tandis que des partisans du pouvoir passeraient en douce la consigne de descendre leur principal opposant modéré pour assurer leur réélection. C'est à ce genre d'"accident" que je pense avant de vouloir changer les règles.

 Je vais détailler un peu plus.
 
Prenons une population composée de 3 groupes d'électeurs :
 - G (52%) qui n'aime pas D mais qui déteste beaucoup plus ED
 - D (30%) proche de ED, contre G
 - ED (18%) proche de D, contre G

Que diront les sondages ? « les trois candidats au coude-à-coude, proche d'une moyenne de 0 tous les trois »
Voyant cela, une "consigne" va apparaître : pour "faire barrage" à ED, il faut donner la note maximale à G ET D.

G détestant ED, ce groupe va plutôt bien suivre cette consigne.
En revanche une grande partie de D préfère ED à G et va donc donner la note minimale à G.

Résultat de l'élection :
- G proche de 0
- ED un peu dans le négatif
- D largement devant grâce au soutien combiné de G+D

Ainsi, dans ce scénario, une minorité (groupe D de 30% de la population) aurait manipulé avec succès le mode de scrutin utilisé pour gagner contre G qui disposait pourtant d'une majorité absolue.

C'est cela, le danger démocratique que je vois.

Gérard

Gérard Bodin

unread,
Jul 13, 2017, 4:50:32 AM7/13/17
to Sylvain Spinelli, Vote de valeur
Re-bonjour

Désolé, je n'avais pas eu le temps de bien conclure hier.

Le problème n'est évidemment pas que l'électeur puisse s'exprimer sincèrement de manière plus précise, on est bien d'accord là-dessus Sylvain.

Mon problème est avec le mode de calcul de la préférence collective à partir des bulletins de vote exprimés.

SI tous les électeurs sont sincères, alors le candidat préféré par l'ensemble du collectif des électeurs est celui qui aura la meilleure moyenne, d'accord.

En revanche, si au moins une partie des électeurs vote de manière stratégique, plus rien ne garantit que le candidat obtenant la meilleure moyenne soit un "bon" choix.

J'ai donné hier un exemple élaboré mais crédible où une majorité absolue arrive à perdre une élection, ce qui pose question dans le cadre d'une démocratie.

Voici un autre exemple plus trivial :
 - électeur 1 préfère un peu A à B et vote de manière stratégique
 - électeur 2 préfère beaucoup B à A et vote de manière sincère
Avec le vote de valeur, c'est A qui est élu.
Est-ce vraiment une bonne chose ?

De mon point de vue, en admettant qu'au moins une partie des électeurs vote de manière stratégique, il n'y a aucune raison d'élire le candidat désigné par le vote de valeur plutôt que le gagnant d'un vote majoritaire ou de tout autre mode de scrutin.

Pour être complet je réponds enfin à ceci :

 * "les expériences montrent que" => non, les conditions des expériences en question ne sont pas réalistes, les électeurs savent que c'est "pour de faux". Il faut plutôt regarder ce qui se passe en condition réelle, il me semble que 80% des Australiens votent de manière stratégique non ? D'accord ça laisse toujours 20% de sincères, mais est-ce que ça vaut le coup de changer de mode de scrutin pour mieux prendre en compte 20% des bulletins ? Je ne pense pas.

 * "quel danger à autoriser des notes intermédiaires ?" => j'insiste, mon problème n'est pas de laisser les électeurs s'exprimer mais dans le mode de désignation du candidat élu. Si on permet aux électeurs de noter tous les candidats mais qu'on dit que seront qualifiés pour un deuxième tour les deux candidats ayant obtenu la meilleure note du plus grand nombre d'électeurs (équivalent au mode de scrutin actuel), ça m'ira très bien.

Gérard

Gérard Bodin

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Jul 13, 2017, 10:40:31 PM7/13/17
to Sylvain Spinelli, Vote de valeur
Pour ceux qui voudraient aller plus loin sur cette question du jeu stratégique : 

Gérard

Sylvain Spinelli

unread,
Jul 17, 2017, 6:01:44 PM7/17/17
to Gérard Bodin, Vote de valeur

Bonjour Gérard,

Vos exemples et cette dernière vidéo (excellente, merci pour le lien) montrent clairement que votre vision est malgré tout ancrée sur cette idée qu'il y a un côté nocif aux votes "stratégiques" par rapport aux votes "sincères". Je laisse les guillemets sur ces 2 termes car, comme le relève très bien Loïc, je considère qu'ils sont mal appropriés dans un contexte démocratique.

Bien sûr que les votes "stratégiques" peuvent changer le résultat d'une élection. Il est amusant de constater que dans l'exemple G/D/ED, ce sont ceux qui votent "stratégiques" qui y perdent (les électeurs de G qui ont survalorisé D). Un vote "stratégique" est toujours un jeu à quitte ou double... Raison pour laquelle je ne crois pas qu'une majorité d'électeurs adopteraient systématiquement et sur le long terme une telle posture (en Australie, je pense que c'est leur système de vote fondé sur le classement qui est une approche malsaine et qui contraint l'électeur à déformer son opinion). Autre remarque, même avec un système le moins manipulable possible comme un référendum, les électeurs peuvent voter "stratégiques" (au sens où il n'ont pas exprimé ce qu'ils souhaitaient vraiment) et faire basculer le vote : je pense ici aux britanniques qui ne croyaient pas que le Brexit l'emporterait et qui ont regretté leur vote 'oui' au lendemain du résultat...

Je pense à présent bien comprendre votre vision et je vous remercie pour ces longs échanges. Pour conclure, voilà pourquoi je n'y adhère pas...

Premièrement, parce que cette vision me parait philosophiquement intenable, je m'explique... Le fondement de la démocratie est que le peuple est souverain. Ma vision de l'élection démocratique correspond à cette idée : en nous dotant d'un système souple et puissant en terme d'expressivité, nous ne pouvons plus critiquer les défauts du système et nous avons les élus que nous méritons ! Si trop d'électeurs ont voté "n'importe comment" (par stratégie, inconscience ou négligence), nous devons néanmoins assumer ce choix collectif, c'est le revers de la démocratie ! Dans votre vision, l'élection cherche à sélectionner "le meilleur" ou "le bon" candidat, actant que ce "meilleur" n'est pas forcément ce qui est inscrit dans le bulletin, puisque les électeurs peuvent voter "stratégiquement". Ainsi un bon système électoral dans votre approche chercherait d'une manière ou d'une autre à recadrer ou corriger les "errements" des électeurs. C'est contradictoire avec le principe fondamental de souveraineté du peuple et donc philosophiquement difficilement défendable.

Deuxièmement, parce que les objectifs que je juge prioritaires pour une élection démocratique sont, jusqu'à preuve du contraire, les mieux mis en œuvre par le Vote de Valeur, je m'explique... Faire émerger le "bon" choix est un objectif chimérique par construction puisque le vote est anonyme et que les électeurs peuvent ne pas indiquer leurs "vraies" préférences. Se fixer un tel but inatteignable s'avère au final spécieux et amène certains à des aberrations comme prôner le Jugement Majoritaire... A mes yeux, au delà du système de vote, l'enjeu fondamental d'une démocratie est de préserver la cohésion sociale d'une nation. De cet enjeu, je tire 3 objectifs prioritaires à un système d'élection démocratique:

  1. Éliminer les candidatures qui s'appuient sur des stratégies de clivages de la société.
  2. Éliminer les candidatures dont les projets sont jugés particulièrement dangereux ou irréalistes par une proportion importante d'électeurs.
  3. Inciter et favoriser la participation de tous à la vie démocratique de la nation (objectif qui est une exigence pour sa propre survie).

Je pense que le Vote de Valeur répond au mieux à ces 3 objectifs prioritaires. Commençons par le dernier point : le bulletin du VdV nous permet d'exprimer librement notre ressenti, ne nous oblige pas à un vote utile en contradiction avec nos opinions; cette liberté devrait sensiblement faire diminuer l'abstention et favoriser la dynamique démocratique. Pour le 1er objectif, toutes les expériences montrent que les systèmes de vote par valeurs répond à cet enjeu d'éliminer les postures clivantes, je crois pouvoir dire qu'il est aujourd'hui acté par la communauté scientifique. La preuve est moins bien établie pour le 2ème objectif car il n'est pas aisé de caractériser un projet politique "irréaliste", mais la démarche intellectuelle de l'électeur est équivalente, voire encore plus naturelle que pour les candidatures clivantes. Ce qui est important de relever ici est que la tendance inévitable de l'électeur à développer des stratégies de votes avec le VdV favorisera et renforcera généralement ces 3 objectifs !

Le Vote de Valeur répond donc bien à ma vision des enjeux d'une élection démocratique et les votes que vous jugez négativement "stratégiques" y contribuent plus qu'ils ne les combattent !

Mais je ne prétend pas détenir la vérité. D'autres conceptions de la démocratie peuvent amener à établir d'autres objectifs à un système électoral...


Encore merci pour ces échanges,

Bien à vous,

Sylvain

Gérard Bodin

unread,
Jul 18, 2017, 1:48:26 PM7/18/17
to Sylvain Spinelli, Vote de valeur
Bonjour Sylvain

Je me permets de corriger votre conclusion : pour moi, la démocratie devrait être indifférente au caractère stratégique ou non des votes exprimés et par conséquent donner la même importance à tous les électeurs quels qu'ils soient. Dans ce sens le mode de scrutin actuel me convient.

C'est au contraire le vote de valeur qui veut "corriger" le vote démocratique :
 * en ne changeant rien pour les votes stratégiques
 * en attribuant un poids inférieur aux votes sincères

En ce sens, votre raisonnement peut se comprendre ainsi :
 * un certain nombre d'électeurs va persister à voter sincèrement en attribuant une note non-minimale aux candidats adverses
 * il faudrait donc '"récompenser" cette sincérité en élisant un candidat que ces électeurs sincères aiment moins.

Je vous remercie d'avoir pris le temps de visionner la vidéo qui fait un parallèle intéressant avec un procès dans un tribunal.

Pour vous, ce qui compte c'est que chaque partie puisse s'exprimer aussi librement sur la forme que sur le fond, et que si le juge tranche en faveur du plaidoyer le plus clairement exprimé sans vraiment tenir compte du fond des arguments, c'est tout aussi bien puisque c'est la liberté, donc la responsabilité, de chacun d'adopter la forme qui lui conviendra le mieux.

Notre désaccord est donc là : pour moi, dans la justice comme en démocratie, on ne peut pas pré-supposer que tous les citoyens ont les mêmes capacités et aptitudes. Tout comme certains ont de meilleurs talents de logique et d'éloquence pour s'exprimer dans un tribunal, d'autres ont une plus grande propension au calcul et à la stratégie dans le cadre de l'isoloir. C'est pourquoi, tout comme se faire défendre par un avocat professionnel est le moyen d'assurer un procès équitable, utiliser un mode de scrutin indifférent au caractère stratégique ou non des votes exprimés est un moyen d'assurer une élection équitable.

Enfin, je ne suis pas d'accord non plus sur les autres points que vous soulevez :

 * le mode de scrutin ne change rien au phénomène du vote utile : ceux qui votent "utile" avec le mode de scrutin actuel voteront tout aussi bien "utile" avec un vote de valeur (comme dans mon exemple G/D/ED) et inversement, ceux qui voteraient "librement" avec un vote de valeur choisissent tout aussi librement leur candidat préféré ou l'abstention avec le mode de scrutin actuel. Les expériences de terrain étant biaisées (ceux y participant étant plus favorables aux modes de scrutins alternatifs que l'ensemble de la population), que changer de mode de scrutin suffise à faire baisser l'abstention reste à prouver (je parierais plutôt sur le contraire)

 * quant aux objectifs 1. et 2. , rappeler que Mélenchon aurait pu gagner l'élection de 2017 suffit, selon moi, à prouver que le vote de valeur ne les favorise nullement. Le point 2. est certes difficilement mesurable mais, si vous voulez, on peut regarder les résultats détaillés des expériences de cette année pour vérifier que le vainqueur n'est pas forcément celui qui est le moins clivant.

Enfin, pour ouvrir un peu la question, je dirais que démocratie et élections sont deux concepts contradictoires de toute façon. Pour moi une démocratie idéale ne devrait pas se choisir un chef par le combat (qui fait toujours une minorité de vaincus opprimés) mais par le débat, type sociocratie. Concrètement il faudrait surtout laisser aux citoyens la possibilité de désigner librement le président de leur choix au lieu de ne leur laisser que départager les candidats préalablement choisis par les partis.

Merci à vous !

Gérard
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