LA BIOGRAPHIE DE PAUL GUSTAVE RAPHAEL MAGLOIRE

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Paul G Magloire

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May 8, 2024, 12:17:52 PMMay 8
to Paul G Magloire

LA BIOGRAPHIE DE PAUL GUSTAVE RAPHAEL MAGLOIRE

(Le parcours d’un autodidacte, d’un entrepreneur et d’un patriote.)

07- 05- 2024

Conseiller Spécial de la Transition de 2004-2006

Ministre de l’Intérieur du Gouvernement Alexandre-Latortue, 2004-2006.

 

Je me souviens avoir lu quelque part la déclaration de trois éducatrices émérites de l’école maternelle en Haïti C’étaient Madame Collimon, Madame Poujole-Oriol et Madame Odette Roy Fombrun, qui allaient dans le sens de ceci : « Confiez-nous vos enfants avant l’âge de 7 ans et nous vous donnerons en retour des adultes intègres et honnêtes ». Je crois qu’elles voulaient mettre l’accent sur l’importance de l’éducation des enfants dans le devenir d’une société.

Ainsi, je voudrais vous parler de mon intention de me présenter comme candidat pour le poste de Premier Ministre du pays dans le cadre de l’Accord Politique Pour Une Transition Politique Pacifique et Ordonnée signé le 3 avril 2024 entre les différents organisations et partis politiques, pour régir la transition jusqu’au 7 février 2026. Mais avant, je voudrais vous parler un peu de mon parcours dans la vie depuis mon enfance jusqu’à aujourd’hui

Je suis né dans une famille originaire d’une petite ville du département de l’Artibonite : La Petite-Rivière. Mon père l’a chanté dans un petit poème : « Ma Petite-Rivière, je t’aimerai toujours ». C’était une famille de classe moyenne avec beaucoup d’enfants. Mon père était un agriculteur qui au fil des ans est devenu le Maire de sa ville natale, ensuite le Député de la circonscription, sous le gouvernement de Paul Eugene Magloire. À la chute du gouvernement de Paul E. Magloire, mon père fut arrêté et conduit à la prison de Saint-Marc. J’ai rencontré le Lieutenant qui l’avait arrêté, il m’a tout raconté, tout sur la façon dont cela s’était passé. C’était très folklorique !

Il m’a dit avoir fait plusieurs tentatives pour arrêter mon père, sans succès. La première fois, il est arrivé chez le Député un dimanche matin. Il était dans la salle à manger en train de prendre sa soupe de giraumon (joumou) avec sa famille. Moi, son dernier garçon, j’étais assis sur ses genoux. Il a présenté à mon père le mandat d’arrestation lancé contre lui pour un soi-disant complot contre le nouveau gouvernement. Mon père lui a demandé la permission de prendre quelques effets personnels dans sa chambre. Le lieutenant m’a dit avoir attendu un bon moment, et mon père n’est pas ressorti de la chambre. Alors à ce moment-là, il est entré dans la chambre, mais mon père n’y était pas. Il a demandé aux soldats de fouiller toute la maison et toujours rien de mon père. Alors, il a crié au sergent s’il avait bien suivi ses instructions de faire surveiller toutes les portes et fenêtres. Les instructions avaient été suivies à la lettre. Mais, le sergent a ajouté, mais. Alors, mais quoi, il a dit au sergent avec une certaine impatience. Alors, le sergent de lui dire : « Mon commandant, tu as laissé sortir de la chambre un gros chat noir, sans donner l’ordre de l’arrêter… Alors, le lieutenant m’a dit qu’il a interrogé tous les domestiques pour savoir tous les endroits où le Député aurait pu se cacher. Il a fouillé tous les lieux suspects de l’habitation. Rien. Absolument rien... Alors tard dans l’après-midi, il est retourné à Saint-Marc, son district. De là, il a télégraphié le commandant des Casernes Dessalines à Port-au-Prince pour faire son rapport. Le commandant des Casernes Dessalines lui a dit d’envoyer un message à la Petite-Rivière et de leur dire si on ne trouvait pas le Député dans les 48 heures, les troupes allaient revenir. Et cette fois-ci l’ordre sera donné d’arrêter toute la famille, et de tuer chiens et chats dans la maison.… Alors, le lieutenant m’a dit quand il a envoyé l’information à la maison de mon père, il a accepté de se rendre. Surtout, les gendarmes en poste à la Petite-Rivière avaient déjà commencé à arrêter ses amis. Ainsi, mon père avait accepté de se rendre, mais à condition qu’on libère ses amis, et que l’on ne l’arrête pas en présence de sa famille. Le jour de l’arrestation,  m’a conté le lieutenant, il avait pris la précaution de faire monter le Député à cheval et d’éviter du même coup que les sabots du cheval ne touchent de l’eau sur la route. Sinon mon père se serait échappé en disparaissant dans l’eau. Il avait conclu que lui aussi, il a de ces « connaissances ». (A la kote ou tande koze, se an Ayiti !!)

Je ne me souviens pas très bien du reste de l’évènement. Des parents à ma mère sont venus nous chercher. Je suis allé vivre chez un oncle à Port-au-Prince où j’ai commencé mes premières classes du primaire. C’était dans l’école de ma tante, La Bergerie, qui était logée dans la même maison. Les classes commençaient au lever du jour et finissaient en faisant sa prière avant d’aller au lit. C’était un régime rigoureux qui m’a marqué positivement jusqu’aujourd’hui. Je n’ai pas d’enfants, mais j‘ai élevé des enfants. Mon pays, Haïti, est le seul enfant, auquel j’ai toujours donné toute mon affection ! Aux enfants que j’ai élevés, je leur ai toujours répété, c’est la discipline qui fait la différence entre toi et quelqu’un d’autre. C’est ce sur quoi tu dois compter pour réussir dans la vie. Tout le reste est secondaire.

Je n’allais plus revoir mon père, ma mère, mes frères et sœurs pendant longtemps. Ce que j’ai appris de cette première période de ma vie : « En Haïti, la politique est une activité très dangereuse », et quant au gré des circonstances, j’ai eu des responsabilités en politique, j’ai fait de mon mieux pour apporter un peu plus de tolérance et de savoir vivre dans les affaires politiques, et les négociations sont nécessaires pour sortir avec des solutions de compromis. La transition politique très difficile de 2004 à 2006 peut en témoigner.

Dans la première période de ma vie, j’ai beaucoup appris avec les amis du quartier. Car, j’ai passé très peu de temps dans les salles de classes. Le quartier était aussi ma salle de classe et ma famille étendue. Dieu m’a fait la grâce de rencontrer et de me reconnecter de temps en temps avec des amis de mon enfance. Je me souviens des 2 frères Anacréon que, sur ma route venant de Martissant, je passais prendre à Cité Beauboeuf pour descendre en ville chez les Frères Salésiens. Je me souviens aussi de ce petit enfant frêle qui est devenu aujourd’hui cet intellectuel, journaliste très connu, et Ministre de la Culture. AdyJeanGuardy, pour ne pas le nommé, m’a raconté, une fois sur la Grand-Rue, on s’était arrêté pour acheter des pâtées chinoises à la viande de poulet avec l’argent que nos parents nous avaient donné pour prendre le bus de Miyotte. Ady m’a dit, intrigué par le grand bâtiment de l’école Saint-Louis de Gonzague, il m’a demandé : qu’est-ce-que c’est ? Je lui ai répondu sans avoir froid aux yeux que c’est la Citadelle Laferrière, où sont enterrées dans un coin secret les dépouilles de Henry Christophe, le grand Roi d’Haïti. Le bon roi avait promis que si un jour une autre personne voulait développer Haïti, il allait lui donner tout l’or qu’il a caché dans la Citadelle pour construire Haïti comme Londres. On dit que le bon Roi Henri I aimait beaucoup l’Angleterre. Ainsi, quand je suis devenu Ministre de l’Intérieur dans le gouvernement Alexandre/Latortue et que j’ai inauguré, avec les Travaux Publics, la construction de la route de Cap-Ouanaminthe, dans les houmforts des péristyles, on disait que j’étais à la recherche du trésor du Roi Henri Premier.

J’ai beaucoup de souvenir de la première période de ma vie. Aux Salésiens, je me souviens de Bertrand qui était enfant-de-cœur et gardien de but. Il était très frêle et flânait dans son short et son maillot. Il ne parlait pas beaucoup et se déplaçait toujours quand on commençait á parler du conflit entre Castro et Kennedy. La vie est vraiment étrange. Qui aurait dit que le frêle Bertrand allait devenir Jean-Bertrand Aristide. Je continuais mon bonhomme de chemin en passant beaucoup de temps sans aller à l’école à cause des crises politiques, pour un oui et pour un nom. Par exemple, un cousin de mon âge, qui était fils d’un kamoken avait été arrêté à l’âge de 9 ans au Petit-Séminaire Saint-Martial. Il a été envoyé à Fort-Dimanche pour en sortir après 7 années. Il avait toutes les peines du monde à se reconnaitre dans un miroir. Mais, lors de cet évènement horrible mon oncle Roland Magloire est venu chez moi pour dire à ma maman de ne plus m’envoyer à l’école des Frères Salésiens. Car, le cadavre du père de Reginald avait été exposé sur un fauteuil avec un cigare à la bouche au carrefour qui sépare les Frères Salésiens du terrain d’aviation Broomfield. Ainsi, les enfants ont toujours fait les frais de nos désordres politiques, jusqu’à aujourd’hui.

(Réginald, le combat que je mène pour aider à changer Haïti est aussi pour toi, mon cousin.) Ce changement ne pourra pas se faire par la violence, ce qui n’engendra que la violence. J’ai vu un jour, en revenant de l’école de Saint-Jean Bosco et traversant du côté de l’abattoir qui était logé à La Saline, deux jeunes se battant avec deux longs couteaux de boucher et leur chair se répandant sur le sol, pendant qu’une foule de badauds était en train d’applaudir le sang qui giclait à chaque mauvais coup. J’ai vu, revenant de Martissant dans l’autobus de Miyotte pour aller aux Salésiens, deux jeunes, un noir et un mulâtre, (sans discrimination) amarrés à deux poteaux, s’effondrer sous les feux d’un peloton d’exécution. J’ai vu tant de choses encore qu’il en serait bien trop long à raconter. Nous devons nous engager à faire cesser la violence et à vivre en paix entre nous. Cela est nécessaire, si nous voulons vivre dans un pays développé et moderne. C’est possible. Vous connaissez la Suède, le pays des Vikings. L’histoire des vikings est l’une des plus violentes au monde. Aujourd’hui, c’est à Oslo qu’on décerne le Prix Nobel de la paix.

La violence dans le pays ne s’est jamais arrêtée depuis plus de deux siècles. Les périodes d’apaisement sont rares. Sur le gouvernement Boniface/Latortue, entre 2004 et 2006, nous avons fait face à une violence de militants politiques armés. J’étais alors Ministre de l’Intérieur et Conseiller Spécial du gouvernement. Nous avons répondu avec une grande rigueur, et lancé parallèlement un processus d’inclusion au processus électoral, en invitant les représentants de l’opposition à participer à un dialogue, Car, on ne peut pas faire une démocratie de parti unique. Les premières tentatives avaient échouées, mais nous avons persisté, malgré qu’à un moment donné nous étions pris entre les feux croisées de nos adversaires comme de nos partisans. Mais, nous avons maintenu le cap sur le dialogue, car comme gouvernement de transition nous n’étions pas au service d’aucun parti ni d’aucun clan. Finalement, sur la demande de l’opposition on a mis en place une structure de garantie électorale. Apres de longue discussion au Palais National un accord a été signé. Cet accord prévoyait aussi le financement de tous les candidats et les partis politiques, sans distinction. J’avais servi comme facilitateur de ces négociations. Et tous les secteurs et les partis ont signés cet accord dans une grande rencontre au Palais National. De bonnes choses sont possibles même si on n’en parle pas trop. Pour vivre en paix, le dialogue doit devenir une institution permanente dans le pays. Feu Président Moise y croyait. Il s’est arrêté en route. Il a payé le prix.

Maintenant, aller aux élections dans 21 mois, ne va pas être une mince affaire. Les bandits/gangues sont beaucoup plus armés que les forces de sécurités et sont d’une férocité qui défie l’imagination. A Martissant, à Carrefour, sur la Route de la Petite-Rivière de l’Artibonite, du côté de Mirebalais, du Nord au Sud et de l’Est à l’Ouest du pays, presque partout, les femmes et les enfants sont violées et puis tués. Des milliers de familles sont chassées de leur maison et dépouillées de tous leurs biens, passant du statut de classe moyenne à celui de classe misérable d’un jour au lendemain, sans même pouvoir contempler comment elles vont revenir à une vie décente. Le gouvernement ne dit rien, probablement par honte. Ainsi, ceux qui gouvernent ont abandonné la population qui attend qu’on leur dise, au moins, qu’Haïti peut redevenir, un jour, un endroit sain et décent, où il fait bon vivre. Les gens doivent arriver à vivre en dignité dans la paix et la prospérité. La solution à ces problèmes ne sera pas facile. Mais, c’est possible !

Au centre de toutes considérations pour le futur de notre cher pays, le bien-être du peuple haïtien doit avoir la première priorité. Nous devons tous haïtiens, vivant au pays ou dans la diaspora, nous rappeler les mots célèbres de nos ancêtres « l’union fait la force », immortalisés sur notre bicolore. Nous devons tous haïtiens nous rallier autour de notre drapeau pour montrer au monde entier que nous sommes prêts à abandonner nos intérêts mesquins, nos luttes intestines, pour le bien collectif du peuple haïtien.

PARLONS PAYS ! PRÔNONS LE BIEN-ÊTRE DU PEUPLE HAITIEN !

Martin Luther King nous aurait dit qu’on a besoin de La Force d’Aimer les uns les autres, afin de cesser de s’entretuer. Je sais que dans de telles situations même le mot aimer n’a pas beaucoup de sens. Mais, ceux qui gouvernent doivent trouver la capacité de servir de modèle afin de redresser la confiance de la population, et sortir le pays de ce mauvais pas. Oui c’est possible !

J’ai grandi en passant de quartier en quartier au gré des moyens de ma mère qui élevait 8 enfants. On ne vivait pas. On survivait. Je pense que cela à activer le sens de l’entreprise chez moi. Je ne jouais pas aux billes, mais j’achetais des billes en gros et je les vendais à ceux qui en jouaient. Le vent de printemps était aussi mon allié. Car, c’est la saison des cerfs-volants. Je vendais le matériel pour en fabriquer. Et, j’en achetais des fabricants pour les revendre à ceux qui les revendaient à leur tour sur la route de Lalue. Et ceci et cela.

Je n’étais pas très fort en Karaté. Mais, mon ami Samuel que je connaissais depuis Saint-Jean Bosco était un vrai Maitre. Donc, je louais des chambres dans des maisons vides pour en faire des dojos. Mon ami Samuel enseignait les techniques et les zens. Moi, j’étais fort en palabre. J’enseignais alors la philosophie et les principes des maitres japonais et coréens aux disciples. Le premier principe des arts martiaux étaient de se défendre sans principalement chercher à faire du mal. En plus des jeunes de mon quartier, on avait des disciples qui étaient des marchands de pains. En fait, ils sortent tôt le matin et se faisaient parfois dévalisés par des truands sur leur route. On leur apprenait le cri du tigre en colère des grands maitres pour effrayer les voleurs, sans les blesser et se faire eux-mêmes arrêter. Je prenais mon job très au sérieux. Cela marchait très bien. Je gagnais ma vie honnêtement, et je donnais la confiance en soi à d’autres. Notre réseau s’étendait sur toute la zone de Fort-National, Saint-Michel, Solino, Nazon, et graduellement on arrivait sur le territoire des deux frères Abellard aux Bas-Peu-de-Chose. Ils défendaient jalousement leur territoire. Ainsi, ils nous ont lancé un défi pour prouver que leur karaté était bien meilleur au nôtre. Ils voulaient se mesurer à nous dans un tournoi en 3 niveaux de Premier Dan. Samuel m’a demandé de lui trouver un livre de Premier Dan. Cela fut vite fait. Donc la compétition a eu lieu et des 2 côtés, on avait gagné. Car, en vrai habitude haïtienne, les matchs qui sont perdus viennent de la faute de l’arbitre qui avait triché en faveur de l’adversaire. Mais, le tournoi était si vigoureux qu’en bon homme d’affaire, j’ai dit à Samuel que le risque était trop grand. On a pris la décision d’affaire de replier du Bas-Peu-De-Chose. Et, comme les frères Abellard voulaient continuer le combat jusqu’à être déclaré vainqueur, Samuel et moi ont trouvé qu’il était plus sage de fermer boutique une fois pour toute. Ma carrière comme karateka avait pris fin. J’ai appris que le jeune Hénoch Kafe-Anme, avait pris notre succession dans la zone et était devenu si vaillant qu’il avait enseigné son art aux soldats du Camp des Léopards. J’ai toujours oublié de demander au Colonel Himmler Rebu s’il connaissait Hénoch. Colonel Rebu m’avait conseillé un peu durant la transition de 2004-2006,

Ensuite, Samuel que je connaissais depuis les Salésiens, a été habité à la Ruelle Nazon où ses parents avaient construit une maison, près des Languichatte. Vous voyez qui ? Tortor, Boukman experience ? Le fils de Theodore Beaubrun. Je crois que la  vogue des arts martiaux commençait à perdre du fil, Les quartiers tournaient beaucoup plus vers la musique et l’Art. Vous voyez ce que je veux dire.

Le malheur vient aussi parfois avec une opportunité, si on était en train de chercher une opportunité. J’avais beaucoup de temps libre en main, car je n’allais pas à l’école vraiment. Les dernières fois que je faisais semblant d’aller à l’école, c’était pour recruter des adeptes de karaté, ou rencontrer des camarades qui étaient intéressés à discuter des questions politiques, principalement de la lutte syndicale sur les salaires. C’est dans l’une de ses rencontres que j’avais rencontrée Gasner Raymond. pour la première fois. En effet, les jeunes s’intéressaient de plus en plus àux questions sociales. Car, on commençait à avoir dans le pays les entreprises d’assemblage dans le secteur textile. Rien de très sérieux. Les jeunes filles allaient à la factorie prendre du travail. Il s’agissait de coudre des boutons, des fleurs en toile, des dentelles sur des chemises et des robes de chambre, et un tas de petites choses en crochet. Les travailleuses se plaignaient de ne pas gagner suffisamment, et certains parmi mes amis étaient intéressés à voir si en organisant ces travailleurs les patrons de ces entreprises ne pourraient pas payer un peu plus, Mais, c’était loin d’être une activité intense, car en majorité ces jeunes filles étaient beaucoup plus intéressées à trouver quelque chose à faire pour gagner un peu d’argent que de revendiquer contre les salaires trop bas.

Donc, comme activiste, je n’avais pas trop de chose à faire. Pour tuer le temps, je cherchais à fabriquer une guitare avec 2 morceaux de plywood. Chilber, un ami du quartier m’a vu en train de faire sortir un son de mes morceaux de plywood surmonté de quelques fils de nylon. Il m’a dit qu’à côté de la maison de Claudie Germain (notre ancien Ministre de l’Environnement du gouvernement de Préval) un jeune vient d’arriver dans le quartier. Il a une belle guitare, m’a dit Chilbert. Il m’a demandé si je voulais qu’on aille le visiter. J’ai senti qu’une nouvelle partie de ma vie allait commencer. Je venais de perdre mon activité de karateka. Ensuite, le quartier avait été fouillé à la recherche des livres que je louais aux jeunes du quartier et ainsi j’avais perdu tout mon investissement. Car, quand ma mère a entendu que les soldats des Casernes Dessalines allaient fouiller le quartier à la recherche de livres, elle a jeté tous mes livres aux latrines. Mes fonds de commerce étaient indignement noyés...

Donc, j’ai été voir Amos Coulanges. Après qu’il m’avait joué un morceau de Chopin, je lui ai dit qu’il était le plus grand guitariste classique du pays. Il m’avait donné un grand sourire. Ce genre de sourire qui disait clairement qu’il ne croyait pas dans ma radote. Qu’importe, je croyais pour deux et même pour 1000 en chiffre. Car, je lisais beaucoup, et j’avais appris que la première chose sur le chemin de la réussite, c’est de croire que vous avez la possibilité de réussir. Je me souviens comme-ci c’était hier. Donc, j’ai dit à Amos qu’il devait acheter des livres de musique. Il m’a dit qu’il n’a pas d’argent. Je lui ai dit de ne pas s’en faire. S’il a une bonne chose à vendre, son seul souci est de trouver quelqu’un qui a besoin de ce qu’il veut vendre. La façon dont Amos me regarda, je crois qu’il était en train de se dire, « Il ne va pas vendre sa musique ». Dans la vie, si vous n’avez pas quelque chose dont quelqu’un d’autre a besoin, vous pouvez mourir de faim. En fait, j’ai convaincu un beau-frère à moi, Pierrot, qu’il devait apprendre la guitare. Et que j’avais trouvé un professeur génial, Amos Coulanges. Pierrot a payé le premier mois pour les cours. Amos a été acheté son premier livre de guitare. Donc, la carrière de Amos avait dérapé. De cours en cours, de petits concerts de salon en petits concerts de salon. Amos, s’est établi une renommée de virtuose de la guitare. Un jour il a été invité à participer à la Carifesta des Caraïbes. Il est revenu avec la médaille d’or. Travailler dur et le succès arrivera un jour. Oui, c’est possible.

De plus en plus les gens me demandaient où j’allais à l’école. Je ne savais que dire. En fait, je cherchais toujours des bourses d’études pour les jeunes du quartier dans des écoles où les directeurs étaient toujours prêts à se convaincre que vous avez un frère ou, une sœur qui attend une bourse pour venir à leur écolé. Des directeurs comme Maitre Grégoire Eugene, Pongnon, Wetzel Pierre-Louis et autres étaient suffisamment généreux pour vous donner de 5 à 10 bourses et demi-bourses quand les cours commençaient et les classes étaient à moitié vide.

La misère de la classe moyenne ne date pas d’hier. Une année comme ça, j’ai été cherché des bourses chez Me Grégoire Eugene à Lalue. Le fils de Me. Grégoire Eugene m’a dit qu’il n’avait plus de bourse. Il lui en restait une seule pour la quatrième. Et, il m’a demandé si je la voulais. Avant même de répondre, il m’a demandé quel est mon nom. Je lui ai dit, Paul Magloire. Grégy m’a dit, « Ah du Cap ? ». Donc, bienvenu chez nous. Les Eugène sont du Cap-Haitien. Me voilà avec en main un certificat d’inscription, sans frais payer, pour la classe de quatrième. Je me demandais que voulait dire ceci. J’avais passé trois années en Sixième afin de recruter des adeptes pour mes dojos. Voilà que Grégy venait de m’envoyer en classe de Quatrième... Quelle est cette histoire ? Mais, au fond de moi-même, je me disais toujours que ma vie a été un tel « brigandage ». Si j’étais encore en vie, c’est que Dieu dans Sa sagesse aurait quelque chose pour moi à faire sur cette terre. Donc, je suis allé au Censorat pour savoir ce que j’aurais à faire pour entrer dans la classe de quatrième. Une secrétaire a pris le certificat que Grégy m’avait donné. Elle m’a dit que j’aurai à venir dans le weekend pour prendre un examen de Français. J’ai souri, car j’avais peur qu’on me demande de prendre un examen de Math. Je ne savais pas encore quel genre de math on faisait en classes secondaires.

Je suis passé de la classe de Quatriéme à la Troisième. J’ai rencontré Gary Eugene qui est devenu plus tard Chef de Police à Miami. J’ai rencontré aussi Yves Bastien qui est devenu sous le gouvernement de Privert, Ministre des Finances. Quelqu’un m’a dit que Privert était là aussi en classe de Troisième. Je ne me souviens pas l’avoir connu. Comme aussi, je ne me souviens pas pourquoi je n’avais pas continué chez Grégoire Eugene. Bastien m’a dit c’est dans ce collège qu’il a eu sa Philo. Bon, c’est tout ce qui existe dans ma mémoire de mon expérience en classes secondaires. Je me rappelle qu’Amos allait régulièrement au Collège Omega. Pierre-Louis Opont et son frère Frédérique allaient au Canado. Je ne souviens pas pour ce qui a trait à Claude Germain et les autres. Ah, j’oubliais de dire que j’ai fait la Classe de 6eme au Juvénat de Carrefour. Ma mère avait convaincu Père Poux de Saint-Martial que je voulais devenir prêtre. Oui, je voulais rencontrer Dieu pour lui demander pourquoi Il avait créé une terre si mal-foutue. C’est beaucoup plus tard que Frère Romain, un Frère Témoin de Jéhovah m’avait expliqué : « Si Dieu dans sa Sagesse avait créé un monde parfait, à quoi auraient servi ma vie et mon intelligence. Il m’a dit de chercher à être utile. (Foutez-nous la paix !) J’avais compris. Donc, je faisais plein de chose et je pensais que je pouvais changer le monde. Mais, je ne me souviens pas encore pourquoi j’avais quitté le Collège Grégoire Eugene. Je me souviens pourtant que j’avais pris la décision d’aller au Baccalauréat. C’était pour relever un défi.

J’admirais un jeune homme de la zone. C’était Erick Senat. Il était à l’école au Centre d’Études Secondaires, dirigée par Dr. Pradel Pompilus, Professeur Jean Claude et Professeur Riché. Dans tous les quartiers de Port-au-Prince, le Centre d’Études Secondaires était le symbole de la perfection. Elle était aussi devenue l’école mythique, où, grâce au professeur Riché, tous les élèves étaient forts en Math. J’étais aussi très fier d’avoir un cousin qui avait fréquenté cette école. Erick Senat, je ne me souviens pas trop bien pourquoi, venait assez souvent dans le quartier. Peut-être pour écouter la musique d’Amos, ou le Grand-Discours de Denis Germain, le père de Claudie qui aimait parler de Wagner qui disait, disait-il, « Je veux créer une musique, quand le monde l’écoutera, il disparaitra ».

Je parlais aussi des anciennes civilisations et de l’avenir du monde. Un soir, Erick Senat était là. Il m’a cinglé après un de mes discours : « Paul, ce que je n’arrive pas à comprendre, pourquoi tu peux parler de tout cela, et tu n’arrives pas à faire, comme tout le monde, et retourner à l’école et passer ton examen de bac ». J’avais reçu une gifle. J’avais un défi à relever. Le lendemain, j’ai été voir mon ami Mario Lavelanet qui habitait à Nazon. Je lui ai demandé s’il pouvait trouver le temps pour me donner des leçons de Math. Il m’a demandé pourquoi. Je lui ai dit que j’allais passer les examens de Bac. Il m’a raconté plus tard qu’il s’était demandé qu’elle est cette histoire. Il s’avait que j’étais un karateka. Je pouvais parler de tout. Mais, il ne m’a jamais entendu parler de retourner à l’école. Mario était étudiant en médecine et était un ancien élève de Saint-Martial. Donc, il m’a dit que je devais trouver un élève qui avait de bons cahiers de note de la Troisième à la Rhéto et il fera le reste. Il m’a fait remarquer qu’on était déjà en juin et que je n’aurais que 3 mois pour couvrir un programme de 2 années et plus. Je lui ai dit que je pourrai le faire.

J’avais un ami Joel Ducasse, qui habitait dans un quartier plus aisé de la zone et qui avait été au bac à Saint-Louis de Gonzague une année de cela. Le genre de personne qui a tous ses cahiers de note en ordre. Donc, je me suis mis au travail avec Mario avec les cahiers de notes de Joel. Tout s’alignait en ma faveur. Les Professeurs Rene Philoctète, Jean-Claude Fignolé et Victor Benoit venaient d’ouvrir des cours de classes de Rhéto et de Philo dans un établissement à la Ruelle Chrétien. J’ai été accepté. Je connaissais déjà les écrits de Fignolé et de Philoctète et j’ai appris à apprécier la puissante analyse historique du professeur Victor Benoit. Sur le plan académique, ce fut une excellente année. Cest la que j’ai rencontré Pierre André Clitandre. J’ai vu de loin Michel Soukar. Savoir pourquoi, nous nous ne sommes jamais parlé. Mais, il arrivé bien vite le moment de l’inscription pour les examens officiels. Le Directeur Général de l’Éducation Nationale, Céphas Théodore, refusa d’accepter mon inscription. Pourquoi ? Parce que je ne figurais qu’une seule fois dans les registres de l’Éducation Nationale. Il dira à Professeur Victor Benoit que je serais un mauvais exemple pour le système d’éducation du pays. Monsieur Céphas Théodore dira à ma mère qui avait été le voir, qu’il voulait considérer l’année pour la classe de seconde et je pourrais m’inscrire pour le Bac la prochaine année. Quand ma mère a insisté pour dire que j’étais un bon élève qui avait passé tous les examens. Monsieur Theodore avait répondu que ce n’était pas le fond mais la forme. « Donc, j’attendrai votre fils, Madame, l’année prochaine ». Ma mère m’a dit de prendre le compromis. Je l’ai écouté et ai agi en conséquence.

Mon ami Mario, qui aujourd’hui est médecin, avait eu une période pareille dans sa vie. Il avait été étudié la Comptabilité à la Maison de Commerce Maurice Laroche, Cela lui a grandement servi. Je me suis dit, voilà un bon exemple à suivre. Cependant, je suis un super-actif de nature. Donc, je considérais que ma journée n’était pas suffisamment remplie. Amos Coulanges, qui était un élève modelé, avait tranquillement passé ses examens de Bac, première partie et deuxième partie, et avait quitté le pays pour Montréal. Je crois que Pierre-Louis Opont en avait fait de même, ainsi que Shubert et beaucoup d’autres. En ce qui me concerne, ma mère aussi avait laissé la Ruelle Estimé pour Bourdon. Car, une de mes sœurs était partie pour New York, et envoyait quelque chose pour la famille chaque mois. Ma mère, de qui j’ai hérité le sens des affaires, avait construit un four à l’arrière de la maison de Bourdon, et créé une pâtisserie dont les produits une dizaine de marchands livraient dans les écoles de la zone. La maison fut devenue un vrai centre d’activités commerciales. Le garage de la maison devint une boutique, et un centre de distribution de colas glacés pour la maison Hakim. Je commençais à me poser des questions, telle que : est-ce que c’était la bonne façon de faire dans un quartier résidentiel ? Comme d’autres maisons dans le quartier commençaient à imiter les initiatives de ma mère, la réponse de ma mère : « c’est légal », car, les représentants du bureau des Contributions sont déjà venus lui faire payer des taxes. Bien sûr, ma mère a ajouté, ferme-la avec tes questions politiques et occupe-toi de l’inventaire et du « payroll ». Rends-toi utile. Pas besoin de vous dire que ma mère n’aimait pas les politiciens, mon feu père en premier. Car, il avait été en prison. Son exploitation agricole avait fait faillite. Ma mère ne cessait de répéter que mon père, à sa sortie de prison, avait refusé de servir le régime dans une position diplomatique à l’étranger. Car lui et ses amis se disaient que le régime de ces gens-là, n’allait pas duré. Mais toutes les tentatives de le renverser ne faisaient que le renforcer. Donc, chez ma mère, il fallait se lever tôt et travailler pour vivre. Faire de la politique était un gaspillage de temps. Sa boutique avait très bien marché jusqu’à ce qu’elle aussi a choisi de quitter le pays qui ne marchait pas très bien.

La plupart de mes collègues de l’École Normale connaissait ma mère, tels que Claudine Michel, Claude Constant, Anthony Virginie Saint-Pierre, Auguste D’Meza, Jocelerme Privert… Apres que ma mère avait quitté le pays, beaucoup de mes amis artistes, intellectuels et professionnels me visitaient à Bourdon aussi : Les Valcin II (j’ai créé le label) Simil, Jean-René Jérôme, Jean-Paul Hector, Cayotte Bissainte, Jean Coulanges, Herve Denis, Dany Laferrière, Carl-Henry Guiteau, Richard Brisson, Toto Lofficial, Ralph Chapoteau, mon frère de combat Gasner Raymond et tant d’autres.

Dans cette maison plusieurs choses inoubliables sont arrivées dans ma vie. Un jour je sortais pour aller travailler avec des amis pour les examens de Philo, j’ai vu des tableaux accrochés à une boutique de vêtements prêt-à-porter. Ils étaient d’une belle facture. Mais, le style était naïf. Intrigué, j’ai demandé qui était le peintre ? Valcin travaillait à son studio à l’arrière de la boutique. Il était sorti pour me voir, pensant avoir affaires à un éventuel acheteur. J’ai commencé à lui dire ce qui m’intriguait dans sa peinture et le peu que j’avais vu me disait qu’il avait un très grand potentiel qui sous peut allait exploser. Je lui ai expliqué que sa peinture reflétait les grands courants artistiques, mais je n’avais pas vu suffisamment pour déterminer là où son art pouvait trouver toute sa puissance. Il m’a dit, si j’avais le temps, il pourrait m’inviter à son studio à l’arrière. Je me suis dit pourquoi pas. À l’arrière, dans le studio de Fravrange Valcin, c’était une explosion de couleurs et de formes, allant dans toutes les directions. Je lui ai dit que le génie est là. Mais, pourquoi il essayait de l’étouffer dans une mystification d’art naïf. Il m’a expliqué qu’il devait vivre. Il a trois enfants et il a un oncle qui est un grand peintre naïf connu. Donc, les galeries lui dit de peindre comme son oncle, s’il veut vendre ses tableaux. Je lui ai expliqué que le succès vient avec des sacrifices. Donc, s’il veut je serai son conseiller artistique. Il me donne une année au plus et je l’aiderai à réaliser son potentiel. Le lendemain, je passais devant la boutique, j’ai vu Fravrange Valcin. Et il m’a dit qu’il m’attendait. Je l’ai suivi à son studio et j’ai vu par terre un lot de tableaux coupés aux ciseaux. Surpris, je lui ai demandé pourquoi il a fait ça ? Il m’a dit après mon départ, il a réfléchi et a pris la décision d’aller à la recherche de son génie. Je lui ai demandé, un peu surpris, qu’est-ce que cela a à voir avec moi ? Il m’a répondu : est-ce que je voudrais devenir son conseiller artistique ? Je lui ai dit, pourquoi pas. Il m’a dit, et tes examens de Philo ? Je lui ai dit, cela attendra. Je lui ai demandé et pour toi, comment tu vas vivre ? Il m’a dit qu’il a deux voitures, qu’il va en vendre l’une d’elles. Mais, il n’avait pas d’argent pour le moment pour acheter la toile et les couleurs. Je lui ai dit je vais voir pour cela. J’avais un ami militaire avec qui je commençais à discuter des changements qui devraient se faire dans le pays pour que nous avancions vers la démocratie. Le Président Jean-Claude Duvalier parlait des changements. Mais, il y avait une arrière-garde qui ne voulait pas du tout entendre parler de ça. J’avais déjà testé le terrain avec mon commandant. Je lui avais demandé une fois de faire libérer un ami qu’on avait arrêté injustement ; il l’avait fait. En effet, je lui ai parlé du projet que j’avais avec Valcin. Il m’a demandé pourquoi ? Je lui ai dit que la peinture de Valcin peut porter la société haïtienne à s’interroger sur elle-même. Il m’a donné tout ce qu’il avait de disponible, en me promettant qu’il comptait faire mieux le mois prochain. Je n’avais pas eu de succès avec tout le monde. Beaucoup de mes amis me disaient que c’était trop risqué. Car, l’arrière-garde va gagner la partie. Un ami a sauvé la partie. Frantz Lofficial, Toto Thébaud pour les intimes, m’avait dit que Valcin doit s’éloigner de sa forme marchande de peindre. Il peut continuer à peindre quelques tableaux commerciaux, m’a-t-il dit. C’est stratégiquement viable. Et il a pris l’engagement d’acheter un de ces tableaux chaque mois. Il a tenu parole.

Mon aventure avec la peinture avait commencé.

Valcin avait choisi de peindre la revendication des masses haïtiennes : le paysan abandonné qui rêve de descendre de la montagne et d’habiter la ville, l’enfant abandonné qui pleure l’absence de ses parents ; la population du Tiers-Monde qui regarde désespérée, tandis-que les puissances industrielles se préparent à faire une guerre absurde pour satisfaire leur ambition de domination. Le thème principal était le poème de René Philoctète : Ils sont venus de loin les gens de Prévilé dans un grelot de chant et de frais pompeia, ils sont venus de loin les gens de Digotrie, dans leur chemise claire, comme des coins de ciel

Valcin et moi avions choisi de nous hiberner dans son studio du Bas-De-Bourdon. En parfaite symbiose avec l’actualité du pays et du monde, on acceptait de recevoir juste quelques rares amis : Toto Thibaud, Jean-René Jérôme et Simil. Quand les 10 tableaux que Valcin comptait présenter était finis, on a invité Pierre Monosiet du Musée d’Art Haïtien du Collège Saint-Pierre à venir voir. Il était en admiration et a conclu que le Conseil d’Administration n’était pas encore prêt à exposer une peinture avant-gardiste. Nous n’avions pas trouvé une Galerie pour exposer. Le bruit courait qu’on voulait faire la promotion d’une révolution. Un jour, nous avons reçu la visite de Herve Méhu, de la Galerie Méhu. Il a regardé les 10 tableaux d’un air soucieux pendant une bonne heure. Et finalement, Herve de nous dire, « si une société ne peut même pas exposer une œuvre artistique progressiste, c’est une société foutue qui ne va nulle part ».

Le jour du vernissage à la Galerie Méhu, l’atmosphère était tendue. Les premiers arrivés étaient un groupe d’amis du Président Duvalier, surnommés la Septième Flotte. L’un d’eux que je connaissais m’a glissé à l’oreille, « Sauve-toi ». Il y avait des hommes portant des lunettes noires qui commençaient à circuler dans la salle. Des amis comme Gasner Raymond, Carl Henry Guiteau, Simil, Ronald Mevs, Bob Manuel et Méhu bien sûr, y etaient le premiers. Ensuite le grand monde commençait à arriver, Michèle Montas, Roger Gaillard…

Et brusquement, une dame entrait dans la salle avec puissance en criant « Oh, c’est magnifique, magnifique, magnifique ! » Et elle de crier encore, « où est Valcin ? » Valcin de répondre « je suis là Madame ». Je suis Madame Sheila Hisham, la femme de l’Ambassadeur Américain. « Je veux réserver 3 tableaux pour la résidence de l’ambassade. Et Je vous invite pour la Fête de l’Indépendance des États-Unis le 4 juillet ». « Êtes-vous seul ? », demande Mme Hisham à Valcin. J’ai mon manager avec moi. Et, Madame Hisham d’ajouter, « Monsieur, vous êtes aussi invité à venir fêter avec nous l’Indépendance de la plus grande démocratie du monde… »,

À SUIVRE

 

Projet de modernisation d'Haïti (youtube.com)

 

 

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Paul G Magloire

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May 8, 2024, 10:59:49 PMMay 8
to Paul G Magloire

LA BIOGRAPHIE DE PAUL GUSTAVE RAPHAEL MAGLOIRE

(Le parcours d’un autodidacte, d’un entrepreneur et d’un patriote.)

07- 05- 2024

Conseiller Spécial de la Transition de 2004-2006

Ministre de l’Intérieur du Gouvernement Alexandre-Latortue, 2004-2006.

 

Je me souviens avoir lu quelque part la déclaration de trois éducatrices émérites de l’école fondamentale. C’étaient Madame Collimon, Madame Poujole-Oriol et Madame Odette Roy Fombrun qui allaient dans le sens de dire ceci : « Confiez-nous vos enfants avant l’âge de 7 ans et nous vous donnerons en retour des adultes intègres et honnêtes ». Je crois qu’elles voulaient mettre l’accent sur l’importance de l’éducation des enfants dans le devenir d’une société.

Ainsi, je voudrais vous parler de mon intention de me présenter comme candidat pour le poste de Premier Ministre du pays dans le cadre de l’Accord Politique Pour Une Transition Politique Pacifique et Ordonnée signé le 3 avril 2024 entre les différents organisations et partis politiques, pour régir la transition jusqu’au 7 février 2026. Mais avant, je voudrais vous parler un peu de mon parcours dans la vie depuis mon enfance jusqu’à aujourd’hui

Je suis né dans une famille originaire d’une petite ville du département de l’Artibonite : La Petite-Rivière. Mon père l’a chanté dans un petit poème : « Ma Petite-Rivière, je t’aimerai toujours ». C’était une famille de classe moyenne avec beaucoup d’enfants. Mon père était un agriculteur qui au fil des ans est devenu le Maire de sa ville natale, ensuite le Député de la circonscription, sous le gouvernement de Paul Eugene Magloire. À la chute du gouvernement de Paul E. Magloire, mon père fut arrêté et conduit à la prison de Saint-Marc. J’ai rencontré le Lieutenant qui l’avait arrêté, il m’a tout raconté, tout sur la façon dont cela c’était passé. C’était très folklorique !

Il m’a dit avoir fait plusieurs tentatives pour arrêter mon père, sans succès. La première fois, il est arrivé chez lui un dimanche matin. Il était dans la salle à manger en train de prendre sa soupe de giraumon (joumou) avec sa famille. Moi, son dernier garçon, j’étais assis sur ses genoux. Il a présenté à mon père le mandat d’arrestation lancé contre lui pour un soi-disant complot contre le nouveau gouvernement. Mon père lui a demandé la permission de prendre quelques effets personnels dans sa chambre. Le lieutenant m’a dit avoir attendu pendant un bon moment, et mon père n’est pas ressorti de la chambre. Alors là, il est entré dans la chambre, et mon père n’y était pas. Il a demandé aux soldats de fouiller toute la maison et toujours rien de mon père. Alors, il a crié au sergent s’il avait bien suivi ses instructions de faire surveiller toutes les portes et fenêtres. Les instructions avaient été suivies à la lettre. Mais, le sergent a ajouté, mais. Alors, mais quoi, il a dit au sergent. Alors, le sergent de lui dire : « Mon commandant, tu as laissé sortir de la chambre un gros chat noir, sans donner l’ordre de l’arrêter… Alors, le lieutenant m’a dit qu’il a interrogé tous les domestiques pour savoir tous les endroits où le Député aurait pu se cacher. Il a fouillé tous les lieux suspects de l’habitation. Rien. Absolument rien... Alors tard dans l’après-midi, il est retourné à Saint-Marc, son district. Là, il a télégraphié le commandant des Casernes Dessalines à Port-au-Prince pour faire son rapport. Le commandant des Casernes Dessalines lui a dit d’envoyer un message à la Petite-Rivière et de leur dire si on ne trouvait pas le Député dans les 48 heures, les troupes allaient revenir. Et cette fois-ci l’ordre sera donné d’arrêter toute la famille, et de tuer chiens et chats dans la maison.… Alors, le lieutenant m’a dit quand il a envoyé l’information à la maison de mon père, il a accepté de se rendre. Surtout, les gendarmes en poste à la Petite-Rivière avaient déjà commencé à arrêter ses amis. Ainsi, mon père avait accepté de se rendre mais à condition qu’on libère ses amis, et que l’on ne l’arrête pas devant sa famille. Le jour de l’arrestation, le lieutenant m’a dit qu’il avait pris la précaution de faire monter le Député à cheval et d’éviter que les sabots du cheval touchent de l’eau sur la route. Sinon mon père se serait échappé en disparaissant dans l’eau. Il avait conclu que lui aussi, il a de ces « connaissances » (A la kote ou tande koze, se an Ayiti !!)

Je ne me souviens pas très bien le reste de l’évènement. Des parents à ma mère sont venus nous chercher. Je suis allé vivre chez un oncle à Port-au-Prince où j’ai commencé mes premières classes du primaire. C’était dans l’école de ma tante, La Bergerie, qui était logée dans la même maison. Les classes commençaient au lever du jour et finissaient en faisant sa prière avant d’aller au lit. C’était un régime rigoureux qui m’a marqué positivement jusqu’à aujourd’hui. Je n’ai pas d’enfants, mais j‘ai élevé des enfants. Mon pays, Haïti, est mon seul enfant, auquel j’ai toujours donné toute mon attention ! Aux enfants que j’ai élevés, je leur ai toujours répété que c’est la discipline qui fait la différence entre toi et quelqu’un d’autre. C’est sur quoi tu dois compter pour réussir dans la vie. Tout le reste est secondaire.

Je n’allais plus revoir mon père, ma mère, mes frères et sœurs pendant longtemps. Ce que j’ai appris de cette première période de ma vie : « En Haïti, la politique est une activité très dangereuse », et quant au gré des circonstances, j’ai eu des responsabilités en politique, j’ai fait de mon mieux pour apporter un peu plus de tolérance et de savoir vivre dans les affaires politiques, et les négociations sont nécessaires pour sortir avec des solutions de compromis. La transition politique très difficile de 2004 à 2006 peut en témoigner.

Dans la première période de ma vie, j’ai beaucoup appris avec les amis du quartier. Car, j’ai passé très peu de temps dans les salles de classes. Le quartier était aussi ma salle de classe et ma famille étendue. Dieu m’a fait la grâce de rencontrer et de me reconnecter de temps en temps avec des amis de mon enfance. Je me souviens des 2 frères Anacréon que, sur ma route venant de Martissant, je passais prendre à Cité Beauboeuf pour descendre en ville chez les Frères Salésiens. Je me souviens aussi de ce petit enfant frêle qui est devenu aujourd’hui cet intellectuel, journaliste très connu, et Ministre de la Culture. AdyJeanGuardy, pour ne pas le nommé, m’a raconté, une fois sur la Grand-Rue, on s’était arrêté pour acheter des pâtées chinoises à la viande de poulet avec l’argent que nos parents nous avaient donné pour prendre le bus de Miyotte. Ady m’a dit, intrigué par le grand bâtiment de l’école Saint-Louis de Gonzague, il m’a demandé : qu’est-ce-que c’est ? Je lui ai répondu sans avoir froid aux yeux que c’est la Citadelle Laferrière, où sont enterrées dans un coin secret les dépouilles de Henry Christophe, le grand Roi d’Haïti. Le bon roi avait promis que si un jour une autre personne voulait développer Haïti, il allait lui donner tout l’or qu’il a caché dans la Citadelle pour construire Haïti comme Londres. On dit que le bon Roi Henri I aimait beaucoup l’Angleterre. Ainsi, quand je suis devenu Ministre de l’Intérieur sur le gouvernement Alexandre/Latortue et que j’ai inauguré, avec les Travaux Publics, la construction de la route de Cap-Ouanaminthe, dans les houmforts des péristyles, on disait que j’étais à la recherche du trésor du Roi Henri Premier.

J’ai beaucoup de souvenir de la première période de ma vie. Aux Salésiens, je me souviens de Bertrand qui était enfant-de-cœur et gardien de but. Il était très frêle et flânait dans son short et son maillot. Il ne parlait pas beaucoup et se déplaçait toujours quand on commençait á parler du conflit entre Castro et Kennedy. La vie est vraiment étrange. Qui aurait dit que le frêle Bertrand allait devenir Jean-Bertrand Aristide. Je continuais mon bonhomme de chemin en passant beaucoup de temps sans aller à l’école à cause des crises politiques, pour un oui et pour un nom. Par exemple, un cousin de mon âge, qui était fils d’un kamoken avait été arrêté à l’âge de 9 ans au Petit-Séminaire Saint-Martial. Il a été envoyé à Fort-Dimanche pour en sortir après 7 années. Il avait toutes les peines du monde à se reconnaitre dans un miroir. Mais, lors de cet évènement horrible mon oncle Roland Magloire est venu chez moi pour dire à ma maman de ne plus m’envoyer à l’école des Salésiens. Car, le cadavre du père de Reginald avait été exposé sur un fauteuil avec un cigare à la bouche au carrefour qui sépare les Frères Salésiens du terrain d’aviation Broomfield. Ainsi, les enfants ont toujours fait les frais de nos désordres politiques, jusqu’à aujourd’hui.

(Réginald, le combat que je mène pour aider à changer Haïti est aussi pour toi, mon cousin.) Ce changement ne pourra pas se faire par la violence, ce qui n’engendra que la violence. J’ai vu un jour, en revenant de l’école de Saint-Jean Bosco et traversant du côté de l’abattoir qui était logé à La Saline, deux jeunes se battant avec deux longs couteaux de boucher et leur chair se répandant sur le sol, pendant qu’une foule de badauds était en train d’applaudir le sang qui giclait à chaque mauvais coup. J’ai vu, revenant de Martissant dans l’autobus de Miyotte pour aller aux Salésiens, deux jeunes, un noir et un mulâtre, (sans discrimination) amarrés à deux poteaux, s’effondrer sous les feux d’un peloton d’exécution. J’ai vu tant de choses encore qu’il en serait bien trop long à raconter. Nous devons nous engager à faire cesser la violence et à vivre en paix entre nous. Cela est nécessaire, si nous voulons vivre dans un pays développé et moderne. C’est possible. Vous connaissez la Scandinavie, la terre des Vikings, regroupant originellement le Danemark, la Norvège et une partie de la Suède. L’histoire des vikings est l’une des plus violentes au monde. Aujourd’hui cette région est l’une des plus paisibles et des plus développées au monde. C’est à Oslo, capitale de la Norvège qu’on décerne le Prix Nobel de la paix. Il faut le vouloir.

La violence dans le pays ne s’est jamais arrêtée depuis plus de deux siècles. Les périodes d’apaisement sont rares. Sur le gouvernement Boniface/Latortue, entre 2004 et 2006, nous en avons fait face à une violence de militants politiques armés. J’étais alors Ministre de l’Intérieur et Conseiller Spécial du gouvernement. Nous avons répondu avec une grande rigueur, et lancé parallèlement un processus d’inclusion au processus électoral, en invitant les représentants de l’opposition à participer à un dialogue, Car, on ne peut pas faire une démocratie de parti unique. Les premières tentatives avaient échouées, mais nous avons persisté, malgré a un moment donné nous étions pris entre les feux croisées de nos adversaires comme de nos partisans. Mais, nous avons maintenu le cap sur le dialogue, car comme gouvernement de transition nous n’étions pas au service d’aucun parti ni d’aucun clan. Finalement, sur la demande de l’opposition on a mis en place une structure de garantie électorale. Apres de longue discussion au Palais National un accord a été signé. Cet accord prévoyait aussi le financement de tous les candidats et les partis politiques sans distinction. J’avais servi comme facilitateur de ces négociations. Et tous les secteurs et les partis ont signés cet accord dans une grande rencontre au Palais National. De bonnes choses sont possibles même si on n’en parle pas trop. Pour vivre en paix, le dialogue doit devenir une institution permanente dans le pays. Le Feu Président Moise y croyait. Il s’est arrêté en route.

Maintenant, aller aux élections dans 21 mois, ne va pas être une mince affaire. Les bandits/gangues sont beaucoup plus armés que les forces de sécurités et sont d’une férocité qui défie l’imagination. A Martissant, à Carrefour, sur la Route de la Petite-Rivière de l’Artibonite, du côté de Mirebalais, du Nord au Sud et de l’Est à l’Ouest du pays, presque partout, les femmes et les enfants sont violées et puis tués. Des milliers de familles sont chassées de leur maison et dépouillées de tous leurs biens, passant du statut de classe moyenne à celui de classe misérable d’un jour au lendemain, sans même pouvoir contempler comment elles vont revenir à une vie décente. Le gouvernement ne dit rien, probablement par honte. Ainsi, ceux qui gouvernent ont abandonné la population qui attend qu’on leur dise, au moins, qu’Haïti peut redevenir, un jour, un endroit sain et décent, où il fait bon vivre. Les gens doivent arriver à vivre en dignité dans la paix et la prospérité. La solution à ces problèmes ne sera pas facile. Mais, c’est possible !

Au centre de toutes considérations pour le futur de notre cher pays, le bien-être du peuple haïtien doit avoir la première priorité. Nous devons tous haïtiens, vivant au pays ou dans la diaspora, nous rappeler les mots célèbres de nos ancêtres « l’union fait la force », immortalisés sur notre bicolore. Nous devons tous haïtiens nous rallier autour de notre drapeau pour montrer au monde entier que nous sommes prêts à abandonner nos intérêts mesquins, nos luttes intestines, pour le bien collectif du peuple haïtien.

PARLONS PAYS ! PRÔNONS LE BIEN-ÊTRE DU PEUPLE HAITIEN !

Martin Luther King nous aurait dit qu’on a besoin de La Force d’Aimer les uns les autres, afin de cesser de s’entretuer. Je sais que dans de telles situations même le mot aimer n’a pas beaucoup de sens. Mais, ceux qui gouvernent doivent trouver la capacité de servir de modèle afin de redresser la confiance de la population, et sortir le pays de ce mauvais pas. Oui c’est possible !

J’ai grandi en passant de quartier en quartier au gré des moyens de ma mère qui élevait 8 enfants. On ne vivait pas. On survivait. Je pense que cela à activer le sens de l’entreprise chez moi. Je ne jouais pas aux billes, mais j’achetais des billes en gros et je les vendais à ceux qui en jouaient. Le vent de printemps était aussi mon allié. Car, c’est la saison des cerfs-volants. Je vendais le matériel pour en fabriquer. Et, j’en achetais des fabricants pour les revendre à ceux qui les revendaient à leur tour sur la route de Lalue. Et ceci et cela.

Je n’étais pas très fort en Karaté. Mais, mon ami Samuel que je connaissais depuis Saint-Jean Bosco était un vrai Maitre. Donc, je louais des chambres dans des maisons vides pour en faire des dojos. Mon ami Samuel enseignait les techniques et les zens. Moi, j’étais fort en palabre. J’enseignais alors la philosophie et les principes des maitres japonais et coréens aux disciples. Le premier principe des arts martiaux étaient de se défendre sans principalement chercher à faire du mal. En plus des jeunes de mon quartier, on avait des disciples qui étaient des marchands de pains. En fait, ils sortent tôt le matin et se faisaient parfois dévalisés par des truands sur leur route. On leur apprenait le cri du tigre en colère des grands maitres pour effrayer les voleurs, sans les blesser et se faire eux-mêmes arrêter. Je prenais mon job très au sérieux. Cela marchait très bien. Je gagnais ma vie honnêtement, et je donnais la confiance en soi à d’autres. Notre réseau s’étendait sur toute la zone de Fort-National, Saint-Michel, Solino, Nazon, et graduellement on arrivait sur le territoire des deux frères Abellard aux Bas-Peu-de-Chose. Ils défendaient jalousement leur territoire. Ainsi, ils nous ont lancé un défi pour prouver que leur karaté était bien meilleur au nôtre. Ils voulaient se mesurer à nous dans un tournoi en 3 niveaux de Premier Dan. Samuel m’a demandé de lui trouver un livre de Premier Dan. Cela fut vite fait. Donc, la compétition a eu lieu et des 2 côtés, on avait gagné. Car, en vrai habitude haïtienne, les matchs qui sont perdus viennent de la faute de l’arbitre qui avait triché en faveur de l’adversaire. Mais, le tournoi était si vigoureux qu’en bon homme d’affaire, j’ai dit à Samuel que le risque était trop grand. On a pris la décision d’affaire de replier du Bas-Peu-De-Chose. Et, comme les frères Abellard voulaient continuer le combat jusqu’à être déclaré vainqueur, Samuel et moi ont trouvé qu’il était plus sage de fermer boutique une fois pour toute. Ma carrière comme karateka avait pris fin. J’ai appris que le jeune Hénoch Kafe-Anme, avait pris notre succession dans la zone et était devenu si vaillant qu’il avait enseigné son art aux soldats du Camp des Léopards. J’ai toujours oublié de demander au Colonel Himmler Rebu s’il connaissait Hénoch. Colonel Rebu m’avait conseillé un peu durant la transition,

Ensuite, Samuel que je connaissais depuis les Salésiens, a été habité à la Ruelle Nazon où ses parents avaient construit une maison, près des Languichatte. Vous voyez qui ? Tortor, Boukman Ekspérience ? Le fils de Theodore Beaubrun. Je crois que la  vogue des arts martiaux commençait à perdre du fil, Les quartiers tournaient beaucoup plus vers la musique et l’Art. Vous voyez ce que je veux dire.

Le malheur vient aussi parfois avec une opportunité, si on était en train de chercher une opportunité. J’avais beaucoup de temps libre en main, car je n’allais pas à l’école vraiment. Les dernières fois que je faisais semblant d’aller à l’école, c’était pour recruter des adeptes de karaté, ou rencontrer des camarades qui étaient intéressés à discuter des questions politiques, principalement de la lutte syndicale sur les salaires. C’est dans l’une de ses rencontres que j’avais rencontré Turneb Délpé pour la première fois En effet, les jeunes s’intéressaient de plus en plus à ce sujet. Car, on commençait à avoir dans le pays les entreprises d’assemblage dans le secteur textile. Rien de très sérieux, les jeunes filles allaient à la factorie prendre du travail. Il s’agissait de coudre des boutons, des fleurs en toile, des dentelles sur des chemises et des robes de chambre, et un tas de petites choses en crochet. Les travailleuses se plaignaient de ne pas gagner suffisamment, et certains parmi mes amis étaient intéressés à voir si en organisant ces travailleurs les patrons de ces entreprises ne pourraient pas payer un peu plus, Mais, c’était loin d’être une activité intense, car en majorité ces jeunes filles étaient beaucoup plus intéressées à trouver quelque chose à faire pour gagner un peu d’argent que de revendiquer contre les salaires trop bas.

Donc, je n’avais pas trop de chose à faire. Pour tuer le temps, je cherchais à fabriquer une guitare avec 2 morceaux de plywood. Chilber, un ami du quartier m’a vu en train de faire sortir un son de mes morceaux de plywood surmonté de quelques fils de nylon. Il m’a dit qu’à côté de la maison de Claudie Germain (notre ancien Ministre de l’Environnement du gouvernement de Prèval) un jeune vient d’arriver dans le quartier. Il a une belle guitare, m’a dit Chilbert. Il m’a demandé si je voulais qu’on aille le visiter. J’ai senti qu’une nouvelle partie de ma vie allait commencer. Je venais de perdre mon activité de karateka. Ensuite, le quartier avait été fouillé à la recherche des livres que je louais aux jeunes du quartier et ainsi j’avais perdu tout mon investissement. Car, quand ma mère a entendu que les soldats des Casernes Dessalines allaient fouiller le quartier à la recherche de livres, elle a jeté tous mes livres aux latrines. Mes fonds de commerce étaient indignement noyés...

Donc, j’ai été voir Amos Coulanges. Après qu’il m’avait joué un morceau de Chopin, je lui ai dit qu’il était le plus grand guitariste classique du pays. Il m’avait donné un grand sourire. Ce genre de sourire qui disait clairement qu’il ne croyait pas dans ma radote. Qu’importe, je croyais pour deux et même pour 1000 en chiffre. Car, je lisais beaucoup, et j’avais appris que la première chose sur le chemin de la réussite, c’est de croire que vous avez la possibilité de réussir. Je me souviens comme-ci c’était hier. Donc, j’ai dit à Amos qu’il devait acheter des livres de musique. Il m’a dit qu’il n’a pas d’argent. Je lui ai dit de ne pas s’en faire. En fait, j’ai convaincu un beau-frère à moi, Pierrot, qu’il devait apprendre la guitare, et que j’avais trouvé un professeur génial, Amos Coulanges. Pierrot a payé le premier mois pour les cours. Amos a été acheté son premier livre de guitare. Donc, la carrière d’Amos avait dérapé, de cours en cours, de petits concerts de salon en concerts de salon. Amos, s’est établi une renommée de virtuose de la guitare. Un jour il a été invité à participer à la Carifesta des Caraïbes. Il est revenu avec la médaille d’or.

De plus en plus les gens me demandaient ou j’allais à l’école. Je ne savais que dire. En fait, je cherchais toujours des bourses d’études pour les jeunes dans des écoles où les directeurs étaient toujours prêts à se convaincre que vous avez un frère ou une sœur qui attend une bourse pour venir à leur école. Des directeurs comme Grégoire Eugene, Pongnon, Wetzel Pierre-Louis et autres étaient suffisamment généreux pour vous donner de 5 à 10 bourses et demi-bourses quand les cours commençaient et les classes étaient à moitié vides.

La misère de la classe moyenne ne date pas d’hier. Une année comme ça, j’ai été cherché des bourses chez Me Grégoire Eugene à Lalue. Le fils de Me. Grégoire Eugene m’a dit qu’il n’avait plus de bourse. Il lui en restait une seule pour la quatrième. Et, il m’a demandé si je la voulais. Avant même de répondre, il m’a demandé quel est mon nom. Je lui ai dit, Paul Magloire. Grégy m’a dit, « Ah du Cap ? ». Donc, bienvenu chez nous. Les Eugène sont du Cap-Haitien. Me voilà avec en main un certificat d’inscription pour la classe de quatrième. Je me demandais que voulait dire ceci. J’avais passé trois années en Sixième afin de recruter des adeptes pour mes dojos. Voilà que Grégy venait de m’envoyer en classe de Quatrième... Quelle est cette histoire ? Mais, au fond de moi-même, je me disais toujours que ma vie a été un tel « brigandage ». Si j’étais encore en vie, c’est que Dieu dans Sa sagesse aurait quelque chose pour moi à faire sur cette terre. Donc, je suis allé au Censorat pour savoir ce que j’aurais à faire pour entrer dans la classe de quatrième. Une secrétaire a pris le certificat que Grégy m’avait donné. Elle m’a dit que j’aurai à venir dans le weekend pour prendre un examen de Français. J’ai souri, car j’avais peur qu’on me demande de prendre un examen de Math. Je ne savais pas encore quel genre de math on faisait en classes secondaires.

Je suis passé de la classe de Quatrième à la Troisième. J’ai rencontré Gary Eugene qui est devenu plus tard Chef de Police à Miami. J’ai rencontré aussi Yves Bastien qui est devenu sous le gouvernement de Privert, Ministre des Finances. Quelqu’un m’a dit que Privert était là aussi en classe de Troisième. Je ne me souviens pas l’avoir connu. Comme aussi, je ne me souviens pas pourquoi je n’avais pas continué chez Grégoire Eugene. Bastien m’a dit c’est dans ce collège qu’il a eu sa Philo. Bon, c’est tout ce qui existe dans ma mémoire de mon expérience en classes secondaires. Je me rappelle qu’Amos allait régulièrement au Collège Omega. Pierre-Louis Opont et son frère Frédérique allaient au Canado. Je ne souviens pas pour ce qui a trait à Claude Germain et les autres. Ah, j’oubliais de dire que j’ai fait la Classe de 6eme aussi au Juvénat de Carrefour. Ma mère avait convaincu Père Poux de Saint-Martial que je voulais devenir prêtre. Oui, je voulais rencontrer Dieu pour lui demander pourquoi Il avait créé une terre si mal-foutue. C’est beaucoup plus tard que Frère Romain, un Frère Témoin de Jéhovah m’avait expliqué : « Si Dieu dans sa Sagesse avait créé un monde parfait, à quoi auraient servi ma vie et mon intelligence. Il m’a dit de chercher à être utile. (Foutez-nous la paix !) J’avais compris. Donc, je faisais plein de chose et je pensais que je pouvais changer le monde. Mais, je ne me souviens pas encore pourquoi j’avais quitté le Collège Grégoire Eugene. Je me souviens pourtant que j’avais pris la décision d’aller au Baccalauréat, c’était pour relever un défi.

J’admirais un jeune homme de la zone. C’était Erick Senat. Il était à l’école au Centre d’Études Secondaires, dirigée par Dr. Pradel Pompilus, Professeur Jean Claude et Professeur Riché. Dans tous les quartiers de Port-au-Prince, le Centre d’Études Secondaires était le symbole de la perfection. Elle était aussi devenue l’école mythique, où, grâce au professeur Riché, tous les élèves étaient forts en Math. J’étais aussi très fier d’avoir un cousin qui avait fréquenté cette école. Erick Senat, je ne me souviens pas trop bien pourquoi, venait assez souvent dans le quartier, et il était du Centre d’Etudes Secondaire. Peut-être pour écouter la musique d’Amos, ou le Grand-Discours de Denis Germain, le père de Claudie qui aimait parler de Wagner qui disait, disait-il, « Je veux créer une musique, quand le monde l’écoutera, il disparaitra ».

Je parlais aussi des anciennes civilisations et de l’avenir du monde. Un soir, Erick Senat était là. Il m’a cinglé après un de mes discours : « Paul, ce que je n’arrive pas à comprendre, pourquoi tu peux parler de tout cela, et tu n’arrives pas à faire, comme tout le monde, et retourner à l’école et passer ton examen de bac ». J’avais reçu une gifle. J’avais un défi à relever. Le lendemain, j’ai été voir mon ami Mario Lavelanet qui habitait à Nazon. Je lui ai demandé s’il pouvait trouver le temps pour me donner des leçons de Math. Il m’a demandé pourquoi. Je lui ai dit que j’allais passer les examens de Bac. Il m’a raconté plus tard qu’il s’était demandé qu’elle est cette histoire. Il s’avait que j’étais un karateka. Je pouvais parler de tout. Mais, il ne m’a jamais entendu parler de retourner à l’école. Mario était étudiant en médecine et était un ancien élève de Saint-Martial. Donc, il m’a dit que je devais trouver un élève qui avait de bons cahiers de note de la Troisième à la Rhéto et il fera le reste. Il m’a fait remarquer qu’on était déjà en juin et que je n’aurais que 3 mois pour couvrir un programme de 2 années et plus. Je lui ai dit que je pourrai le faire.

J’avais un ami Joël Ducasse, qui habitait dans un quartier plus aisé de la zone et qui avait été au bac à Saint-Louis de Gonzague une année de cela. Le genre de personne qui a tous ses cahiers de note en ordre. Donc, je me suis mis au travail avec Mario. avec les cahiers de note de Joël. Tout s’alignait en ma faveur. Les Professeurs René Philoctète, Jean-Claude Fignolé et Victor Benoit venaient d’ouvrir des cours de classes de Rhéto et de Philo dans un établissement à la Ruelle Chrétien. J’ai été accepté. Je connaissais déjà les écrits de Fignolé et de Philoctète et j’ai appris à apprécier la puissante analyse historique du professeur Victor Benoit. Sur le plan académique, ce fut une excellente année. C’est à Jean Price Mars que j’ai rencontré Pierre André Clitandre pour la première fois. Mais, arrivé le moment de l’inscription, le Directeur Général de l’Éducation Nationale, Céphas Théodore, refusa d’accepter mon inscription. Pourquoi ? Parce que je ne figurais qu’une seule fois dans les registres de l’Éducation Nationale. Il dira que je serais un mauvais exemple pour le système d’éducation du pays. Monsieur Céphas Théodore dira à ma mère qui avait été le voir pour plaide ma cause, qu’il voulait considérer l’année en cours pour la classe de seconde, et je pourrais m’inscrire pour le Bac la prochaine année.. Ma mère m’a dit de prendre le compromis. Je l’ai écouté.

Mon ami Mario, qui aujourd’hui est médecin, avait eu une période pareille dans sa vie. Il avait été étudié la Comptabilité à la Maison de Commerce Maurice Laroche, Cela lui a grandement servi. Je me suis dit, voilà un bon exemple à suivre. Cependant, je suis un super-actif de nature. Donc, je considérais que ma journée n’était pas suffisamment remplie. Amos Coulanges, qui était un élève modèle, avait tranquillement passé ses examens de Bac, première et deuxième partie, et avait quitté le pays pour Montréal. Je crois que Pierre-Louis Opont en avait fait de même, ainsi que Schubert et beaucoup d’autres. En ce qui me concerne, ma mère aussi avait laissé la Ruelle Estimé pour Bourdon. Car, une de mes sœurs était partie pour New York, et envoyait quelque chose pour la famille chaque mois. Ma mère, de qui j’ai hérité le sens des affaires, avait construit un four à l’arrière de la maison a Bourdon et créé une pâtisserie. Une dizaine de marchands ambulants livraient les produits dans les écoles de la zone. La maison était devenue un vrai centre d’activités commerciales. Le garage de la maison devint une boutique, et un centre de distribution de colas glacés pour la maison Hakim. Je commençais à me poser des questions, telle que : est-ce que c’était la bonne façon de faire dans un quartier résidentiel ? Comme d’autres maisons dans le quartier commençaient à imiter les initiatives de ma mère, la réponse de ma mère : « c’est légal », car, les représentants du bureau des Contributions sont déjà venus lui faire payer des taxes. Bien sûr, ma mère a ajouté, ferme-la avec tes questions politiques et occupe-toi de l’inventaire et du « payroll ». Tu es un comptable. Rends-toi utile. Pas besoin de vous dire que ma mère n’aimait pas les politiciens, mon père en premier. Car, il avait été en prison. Son exploitation agricole avait fait faillite. Ma mère ne cessait de répéter que mon père, à sa sortie de prison, avait refusé de servir le régime dans une position diplomatique à l’étranger. Car lui et ses amis se disaient que le régime de ces gens-là, n’allait pas duré. Mais toutes les tentatives de le renverser ne faisaient que le renforcer. Donc, chez ma mère, il fallait se lever tôt et travailler pour vivre. Faire de la politique était un gaspillage de temps. Sa boutique avait très bien marché jusqu’à ce qu’elle aussi a choisi de quitter le pays qui ne marchait pas très bien.

La plupart de mes collègues de l’École Normale connaissait ma mère, tels que Claudine Michel, Claude Constant, Anthony Virginie Saint-Pierre, Auguste D’Meza, Jocelerme Privert… Apres que ma mère avait quitté le pays, beaucoup de mes amis artistes, intellectuels et professionnels me visitaient à Bourdon aussi : Les Valcin II (j’ai créé le label) Simil, Jean René  Jérôme, Jean-Paul Hector, Cayotte Bissainte, Jean Coulanges, Herve Denis, Dany Laferrière, Carl-Henry Guiteau, Lyonel Trouillot, Richard Brisson, Toto Lofficial, Ralph Chapoteau, mon frère de combat Gasner Raymond et tant d’autres.

Dans cette maison plusieurs choses inoubliables sont arrivées dans ma vie. Un jour je sortais pour aller travailler avec des amis pour les examens de Philo, j’ai vu des tableaux accrochés à une boutique de vêtements prêt-à-porter. Ils étaient d’une belle facture. Mais, le style était naïf. Intrigué, j’ai demandé qui était le peintre ? Valcin travaillait à son studio à l’arrière de la boutique. Il était sorti pour me voir, pensant avoir affaires à un éventuel acheteur. J’ai commencé à lui dire ce qui m’intriguait dans sa peinture et le peu que j’avais vu me disait qu’il avait un très grand potentiel qui sous peut allait exploser. Je lui ai expliqué que sa peinture reflétait les grands courants artistiques, mais je n’avais pas vu suffisamment pour déterminer là où son art pouvait trouver toute sa puissance. Il m’a dit, si j’avais le temps, il pourrait m’inviter à son studio à l’arrière. Je me suis dit pourquoi pas. À l’arrière, dans le studio de Fravrange Valcin, c’était une explosion de couleurs et de formes, allant dans toutes les directions. Je lui ai dit que le génie est là. Mais, pourquoi il essayait de l’étouffer dans une mystification d’art naïf. Il m’a expliqué qu’il devait vivre. Il a trois enfants et il a un oncle qui est un grand peintre naïf connu. Donc, les galeries lui dit de peindre comme son oncle, s’il veut vendre ses tableaux. Je lui ai expliqué que le succès vient avec des sacrifices. Donc, s’il veut je serai son conseiller artistique. Il me donne une année au plus et je l’aiderai à réaliser son potentiel. Le lendemain, je passais devant la boutique, j’ai vu Fravrange Valcin. Et il m’a dit qu’il m’attendait. Je l’ai suivi à son studio et j’ai vu un lot de tableaux coupés aux ciseaux. Surpris, je lui ai demandé pourquoi il a fait ça ? Il m’a dit après mon départ, il a réfléchi et a pris la décision d’aller à la recherche de son génie. Je lui ai demandé, un peu surpris, qu’est-ce que cela a à voir avec moi ? Il m’a répondu : est-ce que je voudrais devenir son conseiller artistique ? Je lui ai dit, pourquoi pas. Il m’a dit, et tes examens de Philo ? Je lui ai dit, cela attendra. Je lui ai demandé et pour toi, comment tu vas vivre ? Il m’a dit qu’il a deux voitures, qu’il va en vendre l’une d’elles. Mais, il n’avait pas d’argent pour le moment pour acheter la toile et les couleurs. Je lui ai dit je vais voir pour cela. J’avais un ami militaire avec qui je commençais à discuter des changements qui devraient se faire dans le pays pour que nous avancions vers la démocratie. Le Président Jean-Claude Duvalier parlait des changements. Mais, il y avait une arrière-garde qui ne voulait pas du tout entendre parler de ça. J’avais déjà testé le terrain avec mon commandant. Je lui avais demandé une fois de faire libérer un ami qu’on avait arrêté injustement ; il l’avait fait. En effet, je lui ai parlé du projet que j’avais avec Valcin. Il m’a demandé pourquoi ? je lui ai dit que la peinture de Valcin peut porter la société haïtienne à s’interroger sur elle-même. Il m’a donné tout ce qu’il avait de disponible, en me promettant qu’il comptait faire mieux le mois prochain. Je n’avais pas eu de succès avec tout le monde. Beaucoup de mes amis me disaient que c’était trop risqué. Car, l’arrière-garde va gagner la partie. Un ami a sauvé la partie. Frantz Lofficial, dit Toto Thiébaud pour les intimes. Il m’avait dit que Valcin doit s’éloigner de sa forme marchande de peindre. Il peut continuer à peindre juste quelques tableaux commerciaux, m’a-t-il dit. C’est stratégiquement viable. Et, il a pris l’engagement d’acheter un de ces tableaux chaque mois. Il a tenu parole.

Mon aventure avec la peinture avait alors commencé.

Valcin avait choisi de peindre la revendication des masses haïtiennes : le paysan abandonné qui rêve de descendre de la montagne et d’habiter la ville ; l’enfant abandonné qui pleure l’absence de ses parents ; la population du Tiers-Monde qui regarde désespérée, tandis-que les puissances industrielles se préparent à faire une guerre absurde. Mais, le thème principal était le poème de René Philoctète : Ils sont venus de loin les gens de Prévilé dans un grelot de chant et de frais pompeia, ils sont venus de loin les gens de Digotrie, dans leur chemise claire, comme des coins de ciel

Valcin et moi avions choisi de nous hiberner dans son studio du Bas-De-Bourdon, en parfaite symbiose avec l’actualité du pays et du monde, On acceptait de recevoir juste quelques rares amis : Simil, Toto Thébaud, Jean-René Jérôme.,, Quand les 10 tableaux que Valcin comptait présenter était finis, on a invité Pierre Monosiet du Musée d’Art Haïtien du Collège Saint-Pierre à venir voir. Il était en admiration et a conclu que son Conseil d’Administration n’était pas encore prêt à exposer une peinture avant-gardiste. Nous n’avions pas trouvé une Galerie pour exposer. Le bruit courait qu’on voulait faire la promotion d’une révolution. Un jour, nous avons reçu la visite de Herve Méhu, de la Galerie Méhu. Il a regardé les 10 tableaux d’un air soucieux pendant une bonne heure. Et finalement, Herve de nous dire, « si une société ne peut même pas exposer une œuvre artistique progressiste, c’est une société foutue qui ne va nulle part ».

Le jour du vernissage à la Galerie Méhu, l’atmosphère était tendue. Les premiers arrivés étaient un groupe d’amis du Président Duvalier, surnommés la Septième Flotte. L’un d’eux que je connaissais m’a glissé à l’oreille, « Sauve-toi ». Il y avait des hommes portant des lunettes noirs qui commençaient à circuler dans la salle. Des amis comme Gasner Raymond, Carl Henry Guiteau, Simil, Ronald Mevs, Robert Manuel y étaient et Méhu bien sûr. Ensuite le grand monde commençait à arriver, Michèle Montas, Roger Gaillard, Victor Benoit…Et brusquement, une dame entrait dans la salle avec puissance en criant « Oh, c’est magnifique, magnifique, magnifique ! » Et elle de crier encore, « où est Valcin ? » Valcin de répondre « je suis là Madame ». Je suis Madame Sheila Hisham, la femme de l’Ambassadeur Américain. « Je veux réserver 3 tableaux pour la résidence de l’ambassade. Et Je vous invite pour la Fête de l’Indépendance des États-Unis  le 4 juillet.». « Êtes-vous seul ? », demande Mme Hisham à Valcin. J’ai Paul Magloire avec moi. Et, Madame Isham d’ajouter, « Monsieur Magloire, vous êtes aussi invité à venir fêter avec nous l’Indépendance de la plus grande démocratie du monde… »

Sheila Isham, elle-même une excellente peintre dont les œuvres ont été exposées dans des prestigieux musées à travers le monde, était une personne extraordinaire qui aimait charnellement Haïti. Malheureusement, elle nous a quitté le mois dernier…

A suivre

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LA BIOGRAPHIE DE PAUL GUSTAVE RAPHAEL MAGLOIRE

(Le parcours d’un autodidacte, d’un entrepreneur et d’un patriote.)

07- 05- 2024/ Mise à jour 05-09/2024

Conseiller Spécial de la Transition de 2004-2006

Ministre de l’Intérieur du Gouvernement Alexandre-Latortue, 2004-2006.

 

Je me souviens avoir lu quelque part la déclaration de trois éducatrices émérites de l’école fondamentale. C’étaient Madame Collimon, Madame Poujole-Oriol et Madame Odette Roy Fombrun qui allaient dans le sens de dire ceci : « Confiez-nous vos enfants avant l’âge de 7 ans et nous vous donnerons en retour des adultes intègres et honnêtes ». Je crois qu’elles voulaient mettre l’accent sur l’importance de l’éducation des enfants dans le devenir d’une société.

Ainsi, je voudrais vous parler de mon intention de me présenter comme candidat pour le poste de Premier Ministre du pays dans le cadre de l’Accord Politique Pour Une Transition Politique Pacifique et Ordonnée signé le 3 avril 2024 entre les différents organisations et partis politiques, pour régir la transition jusqu’au 7 février 2026. Mais avant, je voudrais vous parler un peu de mon parcours dans la vie depuis mon enfance jusqu’à aujourd’hui

Je suis né dans une famille originaire d’une petite ville du département de l’Artibonite : La Petite-Rivière. Mon père l’a chantée dans un petit poème intitulé : « Ma Petite-Rivière, je t’aimerai toujours ». C’était une famille de classe moyenne avec beaucoup d’enfants. Mon père était un agriculteur qui au fil des ans est devenu le Maire de sa ville natale, ensuite le Député de la circonscription, sous le gouvernement de Paul Eugene Magloire. À la chute du gouvernement de Paul E. Magloire, mon père fut arrêté et conduit à la prison de Saint-Marc. J’ai rencontré quelques années plus tard le Lieutenant qui l’avait arrêté, il m’a tout raconté, tout sur la façon dont cela c’était passé. C’était très folklorique !

Il m’a dit avoir fait plusieurs tentatives pour arrêter mon père, sans succès. La première fois, il est arrivé chez lui un dimanche matin. Il était dans la salle à manger en train de prendre sa soupe de giraumon (joumou) avec sa famille. Moi, son dernier garçon, j’étais assis sur ses genoux. Il a présenté à mon père le mandat d’arrestation lancé contre lui pour un soi-disant complot contre le nouveau gouvernement. Mon père lui a demandé la permission de prendre quelques effets personnels dans sa chambre. Le lieutenant m’a dit avoir attendu pendant un bon moment, et mon père n’est pas ressorti de la chambre. Alors là, il est entré dans la chambre, et mon père n’y était pas. Il a demandé aux soldats de fouiller toute la maison et toujours aucun signe de mon père. Alors, il a crié au sergent s’il avait bien suivi ses instructions de faire surveiller toutes les portes et fenêtres. Les instructions avaient été suivies à la lettre. Mais, le sergent a ajouté, mais. Alors, mais quoi ? A-t-il dit au sergent. Alors, le sergent de lui dire : « Mon commandant, tu as laissé sortir de la chambre un gros chat noir, sans donner l’ordre de l’arrêter… Alors, le lieutenant m’a dit qu’il a interrogé tous les domestiques pour savoir tous les endroits où le Député aurait pu se cacher. Il a fouillé tous les lieux suspects de l’habitation. Rien. Absolument rien... Alors tard dans l’après-midi, il est retourné à Saint-Marc, son district. Là, il a télégraphié au commandant des Casernes Dessalines à Port-au-Prince pour faire son rapport. Le commandant des Casernes Dessalines lui a dit d’envoyer un message à la Petite-Rivière et de leur dire si on ne trouvait pas le Député dans les 48 heures, les troupes allaient revenir. Et cette fois-ci l’ordre sera donné d’arrêter toute la famille, et de tuer chiens et chats dans la maison.… Alors, le lieutenant m’a dit quand il a envoyé l’information à la maison de mon père, celui-ci a accepté de se rendre. Surtout, les gendarmes en poste à la Petite-Rivière avaient déjà commencé à arrêter ses amis. Ainsi, mon père avait accepté de se rendre mais à condition qu’on libère ses amis, et que l’on ne l’arrête pas devant sa famille. Le jour de l’arrestation, le lieutenant m’a dit qu’il avait pris la précaution de faire monter le Député à cheval et d’éviter que les sabots du cheval touchent de l’eau sur la route. Sinon mon père se serait échappé en disparaissant dans l’eau. Il avait conclu que lui aussi, il a de ces « connaissances » (A la kote ou tande koze, se an Ayiti !!)

Je ne me souviens pas très bien du reste de l’évènement. Des parents à ma mère sont venus un jour nous chercher. Je suis allé vivre chez un oncle à Port-au-Prince où j’ai commencé mes premières classes du primaire. C’était dans l’école de ma tante, La Bergerie, qui était logée dans la même maison. Les classes commençaient au lever du jour et finissaient en faisant sa prière avant d’aller au lit. C’était un régime rigoureux qui m’a marqué positivement jusqu’à aujourd’hui. Je n’ai pas d’enfants, mais j‘ai élevé des enfants. Mon pays, Haïti, est mon seul enfant, auquel j’ai toujours donné toute mon attention ! Aux enfants que j’ai élevés, je leur ai toujours répété que c’est la discipline qui fait la différence entre toi et quelqu’un d’autre. C’est sur quoi tu dois compter pour réussir dans la vie. Tout le reste est secondaire.

Je n’allais plus revoir mon père, ma mère, mes frères et sœurs pendant longtemps. Ce que j’ai appris de cette première période de ma vie : « En Haïti, la politique est une activité très dangereuse », et quant au gré des circonstances, j’ai eu des responsabilités en politique, j’ai fait de mon mieux pour apporter un peu plus de tolérance et de savoir vivre dans les affaires politiques, et les négociations sont nécessaires pour sortir avec des solutions de compromis. La transition politique très difficile de 2004 à 2006 peut en témoigner.

Dans la première période de ma vie, j’ai beaucoup appris avec les amis du quartier. Car, j’ai passé très peu de temps dans les salles de classes. Le quartier était aussi ma salle de classe et ma famille étendue. Dieu m’a fait la grâce de rencontrer et de me reconnecter de temps en temps avec des amis de mon enfance. Je me souviens des 2 frères Anacréon que, sur ma route venant de Martissant, je passais prendre à Cité Beauboeuf pour descendre en ville chez les Frères Salésiens. Je me souviens aussi de ce petit enfant frêle qui est devenu aujourd’hui cet intellectuel, journaliste très connu, et Ministre de la Culture. Ady Jean-Gardy, pour ne pas le nommer, m’a raconté, une fois sur la Grand-Rue, on s’était arrêté pour acheter des pâtées chinoises à la viande de poulet avec l’argent que nos parents nous avaient donné pour prendre le bus de Miyotte. Ady m’a dit, intrigué par le grand bâtiment de l’école Saint-Louis de Gonzague, il m’a demandé : qu’est-ce-que c’est ? Je lui ai répondu sans avoir froid aux yeux que c’est la Citadelle Laferrière, où sont enterrées dans un coin secret les dépouilles de Henry Christophe, le grand Roi d’Haïti. Le bon roi avait promis que si un jour une autre personne voulait développer Haïti, il allait lui donner tout l’or qu’il a caché dans la Citadelle pour construire Haïti comme Londres. On dit que le bon Roi Henri I aimait beaucoup l’Angleterre. Ainsi, quand je suis devenu Ministre de l’Intérieur sur le gouvernement Alexandre/Latortue et que j’ai inauguré, avec les Travaux Publics, la construction de la route de Cap-Ouanaminthe, dans les houmforts des péristyles, on disait que j’étais à la recherche du trésor du Roi Henri Premier.

J’ai beaucoup de souvenirs de la première période de ma vie. Aux Salésiens, je me souviens de Bertrand qui était enfant-de-cœur et gardien de but. Il était très frêle et flânait dans son short et son maillot. Il ne parlait pas beaucoup et se déplaçait toujours quand on commençait á parler du conflit entre Castro et Kennedy. La vie est vraiment étrange. Qui aurait dit que le frêle Bertrand allait devenir Jean-Bertrand Aristide. Je continuais mon bonhomme de chemin en passant beaucoup de temps sans aller à l’école à cause des crises politiques, pour un oui et pour un nom. Par exemple, un cousin de mon âge, qui était fils d’un kamoken avait été arrêté à l’âge de 9 ans au Petit-Séminaire Collège Saint-Martial. Il a été envoyé à Fort-Dimanche pour en sortir après 7 années. Il avait toutes les peines du monde à se reconnaitre dans un miroir. Mais, lors de cet évènement horrible mon oncle Roland Magloire est venu chez moi pour dire à ma maman de ne plus m’envoyer à l’école des Salésiens. Car, le cadavre du père de Reginald avait été exposé sur un fauteuil avec un cigare à la bouche au carrefour qui sépare les Frères Salésiens du terrain d’aviation Broomfield. Ainsi, les enfants ont toujours fait les frais de nos désordres politiques, jusqu’à aujourd’hui.

(Réginald, le combat que je mène pour aider à changer Haïti est aussi pour toi, mon cousin.) Ce changement ne pourra pas se faire par la violence, ce qui n’engendra que la violence. J’ai vu un jour, en revenant de l’école de Saint-Jean Bosco et traversant du côté de l’abattoir qui était logé à La Saline, deux jeunes se battant avec deux longs couteaux de boucher et leur chair se répandant sur le sol, pendant qu’une foule de badauds était en train d’applaudir le sang qui giclait à chaque mauvais coup. J’ai vu, revenant de Martissant dans l’autobus de Miyotte pour aller aux Salésiens, deux jeunes, un noir et un mulâtre, (sans discrimination) amarrés à deux poteaux, s’effondrer sous les feux d’un peloton d’exécution. J’ai vu tant de choses encore qu’il en serait bien trop long à raconter. Nous devons nous engager à faire cesser la violence et à vivre en paix entre nous. Cela est nécessaire, si nous voulons vivre dans un pays développé et moderne. C’est possible. Vous connaissez la Scandinavie, la terre des Vikings, regroupant originellement le Danemark, la Norvège et une partie de la Suède. L’histoire des vikings est l’une des plus violentes au monde. Aujourd’hui cette région est l’une des plus paisibles et des plus développées au monde. C’est à Oslo, capitale de la Norvège qu’on décerne le Prix Nobel de la paix. Il faut le vouloir.

La violence dans le pays ne s’est jamais arrêtée depuis plus de deux siècles. Les périodes d’apaisement sont rares. Sur le gouvernement Boniface/Latortue, entre 2004 et 2006, nous en avons fait face à une violence de militants politiques armés. J’étais alors Ministre de l’Intérieur et Conseiller Spécial du gouvernement. Nous avons répondu avec une grande rigueur, et lancé parallèlement un processus d’inclusion au processus électoral, en invitant les représentants de l’opposition à participer à un dialogue, Car, on ne peut pas faire une démocratie de parti unique. Les premières tentatives avaient échouées, mais nous avons persisté, malgré a un moment donné nous étions pris entre les feux croisés de nos adversaires comme de nos partisans. Mais, nous avons maintenu le cap sur le dialogue, car comme gouvernement de transition nous n’étions au service d’aucun parti ni d’aucun clan. Finalement, sur la demande de l’opposition on a mis en place une structure de garantie électorale. Apres de longue discussion au Palais National un accord a été signé. Cet accord prévoyait aussi le financement de tous les candidats et les partis politiques sans distinction. J’avais servi comme facilitateur de ces négociations. Et tous les secteurs et les partis ont signés cet accord dans une grande rencontre au Palais National. De bonnes choses sont possibles même si on n’en parle pas trop. Pour vivre en paix, le dialogue doit devenir une institution permanente dans le pays. Le Feu Président Moise y croyait. Il s’est arrêté en chemin.

Maintenant, aller aux élections dans 21 mois, ne va pas être une mince affaire. Les bandits/gangs sont beaucoup mieux armés que les forces de sécurités et sont d’une férocité qui défie l’imagination. A Martissant, à Carrefour, sur la Route de la Petite-Rivière de l’Artibonite, du côté de Mirebalais, du Nord au Sud et de l’Est à l’Ouest du pays, presque partout, les femmes et les enfants sont violées et puis tués. Des milliers de familles sont chassées de leur maison et dépouillées de tous leurs biens, passant du statut de classe moyenne à celui de classe misérable d’un jour au lendemain, sans même pouvoir contempler comment elles vont revenir à une vie décente. Le gouvernement ne dit rien, probablement par honte. Ainsi, ceux qui gouvernent ont abandonné la population qui attend qu’on leur dise, au moins, qu’Haïti peut redevenir, un jour, un endroit sain et décent, où il fait bon vivre. Les gens doivent arriver à vivre en dignité dans la paix et la prospérité. La solution à ces problèmes ne sera pas facile. Mais, c’est possible !

Au centre de toutes considérations pour le futur de notre cher pays, le bien-être du peuple haïtien doit avoir la première priorité. Nous devons tous haïtiens, vivant au pays ou dans la diaspora, nous rappeler les mots célèbres de nos ancêtres « l’union fait la force », immortalisés sur notre bicolore. Nous devons tous haïtiens nous rallier autour de notre drapeau pour montrer au monde entier que nous sommes prêts à abandonner nos intérêts mesquins, nos luttes intestines, pour le bien collectif du peuple haïtien.

PARLONS PAYS ! PRÔNONS LE BIEN-ÊTRE DU PEUPLE HAITIEN !

Martin Luther King nous aurait dit qu’on a besoin de La Force d’Aimer les uns les autres, afin de cesser de s’entretuer. Je sais que dans de telles situations même le mot aimer n’a pas beaucoup de sens. Mais, ceux qui gouvernent doivent trouver la capacité de servir de modèle afin de redresser la confiance de la population, et sortir le pays de ce mauvais pas. Oui c’est possible !

J’ai grandi en passant de quartier en quartier au gré des moyens de ma mère qui élevait 8 enfants. On ne vivait pas. On survivait. Je pense que ces facteurs culturels, socioéconomiques, politiques et ma vie quotidienne ont contribué à faire de moi la personne que je suis sur le plan moral, avec un sens aigu des opportunités et aussi le sens de l’entreprise. Je ne jouais pas aux billes, mais j’achetais des billes en gros et je les vendais à ceux qui en jouaient. Le vent de printemps était aussi mon partenaire. Car, c’est la saison des cerfs-volants. Je vendais le matériel pour en fabriquer. Et, j’en achetais des fabricants pour les revendre à ceux qui les revendaient à leur tour sur la route de Lalue. Et ceci et cela.

Je n’étais pas très fort en Karaté. Mais, mon ami Samuel que je connaissais depuis Saint-Jean Bosco était un vrai Maitre. Donc, je louais des chambres dans des maisons vides pour en faire des dojos. Mon ami Samuel enseignait les techniques et les zens. Moi, j’étais fort en palabre. J’enseignais alors la philosophie et les principes des maitres japonais et coréens aux disciples. Le premier principe des arts martiaux était de se défendre sans principalement chercher à faire du mal. En plus des jeunes de mon quartier, on avait des disciples qui étaient des marchands de pain. En fait, ils sortaient tôt le matin et se faisaient parfois dévaliser par des truands sur leur route. On leur apprenait le cri du tigre en colère des grands maitres pour effrayer les voleurs, sans les blesser et se faire eux-mêmes arrêter. Je prenais mon job très au sérieux. Cela marchait très bien. Je gagnais ma vie honnêtement, et je donnais la confiance en soi à d’autres. Notre réseau s’étendait sur toute la zone de Fort-National, Saint-Michel, Solino, Nazon, et graduellement on arrivait sur le territoire des deux frères Abellard aux Bas-Peu-de-Chose. Ils défendaient jalousement leur territoire. Ainsi, ils nous ont lancé un défi pour prouver que leur karaté était bien meilleur au nôtre. Ils voulaient se mesurer à nous dans un tournoi en 3 niveaux de Premier Dan. Samuel m’a demandé de lui trouver un livre de Premier Dan. Cela fut vite fait. Donc, la compétition a eu lieu et des 2 côtés, on avait gagné. Car, en vrai habitude haïtienne, les matchs qui sont perdus viennent de la faute de l’arbitre qui avait triché en faveur de l’adversaire. Mais, le tournoi était si vigoureux qu’en bon homme d’affaires, j’ai dit à Samuel que le risque était trop grand. On a pris la décision d’affaires de replier du Bas-Peu-De-Chose. Et, comme les frères Abellard voulaient continuer le combat jusqu’à être déclaré vainqueur, Samuel et moi ont trouvé qu’il était plus sage de fermer boutique une fois pour toute. Ma carrière comme karateka avait pris fin. J’ai appris que le jeune Hénoch Kafe-Anme, avait pris notre succession dans la zone et était devenu si vaillant qu’il avait enseigné son art aux soldats du Camp des Léopards. J’ai toujours oublié de demander au Colonel Himmler Rebu s’il connaissait Hénoch. Colonel Rebu m’avait conseillé un peu durant la transition,

Ensuite, Samuel que je connaissais depuis les Salésiens, a été habité à la Ruelle Nazon où ses parents avaient construit une maison, près des Languichatte. Vous voyez qui ? Tortor, Boukman Ekspérience ? Le fils de Theodore Beaubrun. Je crois que la  vogue des arts martiaux commençait à perdre du fil, Les quartiers tournaient beaucoup plus vers la musique et l’Art. Vous voyez ce que je veux dire.

Le malheur vient aussi parfois avec une opportunité, si on était en train de chercher une opportunité. J’avais beaucoup de temps libre en main, car je n’allais pas à l’école vraiment. Les dernières fois que je faisais semblant d’aller à l’école, c’était pour recruter des adeptes de karaté, ou rencontrer des camarades qui étaient intéressés à discuter des questions politiques, principalement de la lutte syndicale sur les salaires. C’est dans l’une de ses rencontres que j’avais rencontré Turneb Délpé pour la première fois En effet, les jeunes s’intéressaient de plus en plus à ce sujet. Car, on commençait à avoir dans le pays les entreprises d’assemblage dans le secteur textile. Rien de très sérieux, les jeunes filles allaient à la factorie prendre du travail. Il s’agissait de coudre des boutons, des fleurs en toile, des dentelles sur des chemises et des robes de chambre, et un tas de petites choses en crochet. Les travailleuses se plaignaient de ne pas gagner suffisamment, et certains parmi mes amis étaient intéressés à voir si en organisant ces travailleurs les patrons de ces entreprises ne pourraient pas payer un peu plus, Mais, c’était loin d’être une activité intense, car en majorité ces jeunes filles étaient beaucoup plus intéressées à trouver quelque chose à faire pour gagner un peu d’argent que de revendiquer contre les salaires trop bas.

Donc, je n’avais pas trop de chose à faire. Pour tuer le temps, je cherchais à fabriquer une guitare avec 2 morceaux de plywood. Chilber, un ami du quartier m’a vu en train de faire sortir un son de mes morceaux de plywood surmonté de quelques fils de nylon. Il m’a dit qu’à côté de la maison de Claudie Germain (notre ancien Ministre de l’Environnement du gouvernement de Prèval) un jeune vient d’arriver dans le quartier. Il a une belle guitare, m’a dit Chilbert. Il m’a demandé si je voulais qu’on aille le visiter. J’ai senti qu’une nouvelle partie de ma vie allait commencer. Je venais de perdre mon activité de karateka. Ensuite, le quartier avait été fouillé à la recherche des livres que je louais aux jeunes du quartier et ainsi j’avais perdu tout mon investissement. Car, quand ma mère a entendu que les soldats des Casernes Dessalines allaient fouiller le quartier à la recherche de livres, elle a jeté tous mes livres aux latrines. Mes fonds de commerce étaient indignement noyés...

Donc, j’ai été voir Amos Coulanges. Après qu’il m’avait joué un morceau de Chopin, je lui ai dit qu’il était le plus grand guitariste classique du pays. Il m’avait donné un grand sourire. Ce genre de sourire qui disait clairement qu’il ne croyait pas dans ma radote. Qu’importe, je croyais pour deux et même pour 1000 en chiffre. Car, je lisais beaucoup, et j’avais appris que la première chose sur le chemin de la réussite, c’est de croire que vous avez la possibilité de réussir. Je me souviens comme-ci c’était hier. Donc, j’ai dit à Amos qu’il devait acheter des livres de musique. Il m’a dit qu’il n’a pas d’argent. Je lui ai dit de ne pas s’en faire. En fait, j’ai convaincu un beau-frère à moi, Pierrot, qu’il devait apprendre la guitare, et que j’avais trouvé un professeur génial, Amos Coulanges. Pierrot a payé le premier mois pour les cours. Amos a été acheté son premier livre de guitare. Donc, la carrière d’Amos avait dérapé, de cours en cours, de petits concerts de salon en concerts de salon. Amos, s’est établi une renommée de virtuose de la guitare. Un jour il a été invité à participer à la Carifesta des Caraïbes. Il est revenu avec la médaille d’or.

De plus en plus les gens me demandaient ou j’allais à l’école. Je ne savais que dire. En fait, je cherchais toujours des bourses d’études pour les jeunes dans des écoles où les directeurs étaient toujours prêts à se convaincre que vous avez un frère ou une sœur qui attend une bourse pour venir à leur école. Des directeurs comme Grégoire Eugene, Pongnon, Wetzel Pierre-Louis et autres étaient suffisamment généreux pour vous donner de 5 à 10 bourses et demi-bourses quand les cours commençaient et les classes étaient à moitié vides.

La misère de la classe moyenne ne date pas d’hier. Une année comme ça, j’ai été cherché des bourses chez Me Grégoire Eugene à Lalue. Le fils de Me. Grégoire Eugene m’a dit qu’il n’avait plus de bourses. Il lui en restait une seule pour la quatrième. Et, il m’a demandé si je la voulais. Avant même de répondre, il m’a demandé quel est mon nom. Je lui ai dit, Paul Magloire. Grégy m’a dit, « Ah du Cap ? ». Donc, bienvenu chez nous. Les Eugène sont du Cap-Haitien. Me voilà avec en main un certificat d’inscription pour la classe de quatrième. Je me demandais que voulait dire ceci. J’avais passé trois années en Sixième afin de recruter des adeptes pour mes dojos. Voilà que Grégy venait de m’envoyer en classe de Quatrième... Quelle est cette histoire ? Mais, au fond de moi-même, je me disais toujours que ma vie a été un tel « brigandage ». Si j’étais encore en vie, c’est que Dieu dans Sa sagesse aurait quelque chose pour moi à faire sur cette terre. Donc, je suis allé au Censorat pour savoir ce que j’aurais à faire pour entrer dans la classe de quatrième. Une secrétaire a pris le certificat que Grégy m’avait donné. Elle m’a dit que j’aurai à venir dans le weekend pour prendre un examen de Français. J’ai souri, car j’avais peur qu’on me demande de prendre un examen de Math. Je ne savais pas encore quel genre de math on faisait en classes secondaires.

Je suis passé de la classe de Quatrième à la Troisième. J’ai rencontré Gary Eugene qui est devenu plus tard Chef de Police à Miami. J’ai rencontré aussi Yves Bastien qui est devenu sous le gouvernement de Privert, Ministre des Finances. Quelqu’un m’a dit que Privert était là aussi en classe de Troisième. Je ne me souviens pas l’avoir connu. Comme aussi, je ne me souviens pas pourquoi je n’avais pas continué chez Grégoire Eugene. Bastien m’a dit c’est dans ce collège qu’il a eu sa Philo. Bon, c’est tout ce qui existe dans ma mémoire de mon expérience en classes secondaires. Je me rappelle qu’Amos allait régulièrement au Collège Omega. Pierre-Louis Opont et son frère Frédérique allaient au Canado. Je ne souviens pas en ce qui a trait à Claude Germain et les autres. Ah, j’oubliais de dire que j’ai fait la Classe de 6eme aussi au Juvénat de Carrefour. Ma mère avait convaincu Père Poux de Saint-Martial que je voulais devenir prêtre. Oui, je voulais rencontrer Dieu pour lui demander pourquoi Il avait créé une terre si mal-foutue. C’est beaucoup plus tard que Frère Romain, un Frère Témoin de Jéhovah m’avait expliqué : « Si Dieu dans sa Sagesse avait créé un monde parfait, à quoi auraient servi ma vie et mon intelligence. Il m’a dit de chercher à être utile. (Foutez-nous la paix !) J’avais compris. Donc, je faisais plein de choses et je pensais que je pouvais changer le monde. Mais, je ne me souviens pas encore pourquoi j’avais quitté le Collège Grégoire Eugene où j’avais rencontré les jumelles, Gina et Ginou, des danseuses extraordinaires. Je me souviens très bien pourtant pourquoi j’avais pris la décision d’aller au Baccalauréat, c’était pour relever un défi.

J’admirais un jeune homme de la zone. C’était Erick Senat. Il était à l’école au Centre d’Études Secondaires, dirigée par Dr. Pradel Pompilus, Professeur Jean Claude et Professeur Riché. Dans tous les quartiers de Port-au-Prince, le Centre d’Études Secondaires était le symbole de la perfection. Elle était aussi devenue l’école mythique, où, grâce au professeur Riché, tous les élèves étaient forts en Math. J’étais aussi très fier d’avoir un cousin qui avait fréquenté cette école. Erick Senat, je ne me souviens pas trop bien pourquoi, venait assez souvent dans le quartier, et il était du Centre d’Etudes Secondaire. Peut-être pour écouter la musique d’Amos, ou le Grand-Discours de Denis Germain, le père de Claudie qui aimait parler de Wagner qui disait, disait-il, « Je veux créer une musique, quand le monde l’écoutera, il disparaitra ».

Je parlais aussi des anciennes civilisations et de l’avenir du monde. Un soir, Erick Senat était là. Il m’a cinglé après un de mes discours : « Paul, ce que je n’arrive pas à comprendre, pourquoi tu peux parler de tout cela, et tu n’arrives pas à faire, comme tout le monde, et retourner à l’école et passer ton examen de bac ». J’avais reçu une gifle. J’avais un défi à relever. Le lendemain, j’ai été voir mon ami Mario Lavelanet qui habitait à Nazon. Je lui ai demandé s’il pouvait trouver le temps pour me donner des leçons de Math. Il m’a demandé pourquoi. Je lui ai dit que j’allais passer les examens de Bac. Il m’a raconté plus tard qu’il s’était demandé qu’elle est cette histoire. Il s’avait que j’étais un karateka. Je pouvais parler de tout. Mais, il ne m’a jamais entendu parler de retourner à l’école. Mario était étudiant en médecine et était un ancien élève de Saint-Martial. Donc, il m’a dit que je devais trouver un élève qui avait de bons cahiers de note de la Troisième à la Rhéto et il fera le reste. Il m’a fait remarquer qu’on était déjà en juin et que je n’aurais que 3 mois pour couvrir un programme de 2 années et plus. Je lui ai dit que je pourrai le faire.

J’avais un ami Joël Ducasse, qui habitait dans un quartier plus aisé de la zone et qui avait été au bac à Saint-Louis de Gonzague une année de cela. Le genre de personne qui a tous ses cahiers de note en ordre. Donc, je me suis mis au travail avec Mario. et avec les cahiers de note de Joël. Tout s’alignait en ma faveur. Les Professeurs René Philoctète, Jean-Claude Fignolé et Victor Benoit venaient d’ouvrir des cours de classes de Rhéto et de Philo dans un établissement à la Ruelle Chrétien, sous le Nom de Collège Jean-Price Mars.. J’ai été accepté. Je connaissais déjà les écrits de Fignolé et de Philoctète et j’ai appris à apprécier la puissante analyse historique du professeur Victor Benoit. Sur le plan académique, ce fut une excellente année. C’est à Jean Price Mars que j’ai rencontré Pierre André Clitandre pour la première fois. Mais, arrivé le moment de l’inscription, le Directeur Général de l’Éducation Nationale, Céphas Théodore, refusa d’accepter mon inscription. Pourquoi ? Parce que je ne figurais qu’une seule fois dans les registres de l’Éducation Nationale. Il dira que je serais un mauvais exemple pour le système d’éducation du pays. Monsieur Céphas Théodore dira à ma mère qui avait été le voir pour plaider ma cause, qu’il voulait considérer l’année en cours pour la classe de seconde, et je pourrais m’inscrire pour le Bac la prochaine année.. Ma mère m’a dit de prendre le compromis. Je l’ai écouté.

Mon ami Mario, qui aujourd’hui est médecin, avait eu une période pareille dans sa vie. Il avait été étudié la Comptabilité à la Maison de Commerce Maurice Laroche, Cela lui a grandement servi. Je me suis dit, voilà un bon exemple à suivre. Cependant, je suis un super-actif de nature. Donc, je considérais que ma journée n’était pas suffisamment remplie. Amos Coulanges, qui était un élève modèle, avait tranquillement passé ses examens de Bac, première et deuxième partie, et avait quitté le pays pour Montréal. Je crois que Pierre-Louis Opont en avait fait de même, ainsi que Schubert et beaucoup d’autres. En ce qui me concerne, ma mère aussi avait laissé la Ruelle Estimé pour Bourdon. Car, une de mes sœurs était partie pour New York, et envoyait quelque chose pour la famille chaque mois. Ma mère, de qui j’ai hérité le sens des affaires, avait construit un four à l’arrière de la maison a Bourdon et créé une pâtisserie. Une dizaine de marchands ambulants livraient les produits dans les écoles de la zone. La maison était devenue un vrai centre d’activités commerciales. Le garage de la maison devint une boutique, et un centre de distribution de colas glacés pour la maison Hakim. Je commençais à me poser des questions, telle que : est-ce que c’était la bonne façon de faire dans un quartier résidentiel ? Comme d’autres maisons dans le quartier commençaient à imiter les initiatives de ma mère, la réponse de ma mère : « c’est légal », car, les représentants du Bureau des Contributions sont déjà venus lui faire payer des taxes. Bien sûr, ma mère a ajouté, ferme-la avec tes questions politiques et occupe-toi de l’inventaire et du « payroll ». Tu es un comptable. Rends-toi utile. Pas besoin de vous dire que ma mère n’aimait pas les politiciens, mon père en premier. Car, il avait été en prison. Son exploitation agricole avait fait faillite. Ma mère ne cessait de répéter que mon père, à sa sortie de prison, avait refusé de servir le régime dans une position diplomatique à l’étranger. Car lui et ses amis se disaient que le régime de ces gens-là, n’allait pas duré. Mais toutes les tentatives de le renverser ne faisaient que le renforcer. Donc, chez ma mère, il fallait se lever tôt et travailler pour vivre. Faire de la politique était un gaspillage de temps. Sa boutique avait très bien marché jusqu’à ce qu’elle aussi a choisi de quitter le pays qui ne marchait pas très bien.

La plupart de mes collègues de l’École Normale connaissait ma mère, tels que Claudine Michel, Claude Constant, Anthony Virginie Saint-Pierre, Auguste D’Meza, Jocelerme Privert… Apres que ma mère avait quitté le pays, beaucoup de mes amis artistes, intellectuels et professionnels me visitaient à Bourdon aussi : Les Valcin II (j’ai créé le label), Simil, Jean René Jérôme, Jean-Paul Hector, Cayotte Bissainte, Jean Coulanges, Herve Denis, Dany Laferrière, Carl-Henry Guiteau, Lyonel Trouillot, Richard Brisson, Toto Lofficial, Ralph Chapoteau, mon frère de combat Gasner Raymond et tant d’autres.

Dans cette maison plusieurs choses inoubliables sont arrivées dans ma vie. Un jour je sortais pour aller travailler avec des amis pour les examens de Philo, j’ai vu des tableaux accrochés à une boutique de vêtements prêt-à-porter. Ils étaient d’une belle facture. Mais, le style était naïf. Intrigué, j’ai demandé qui était le peintre ? Valcin travaillait à son studio à l’arrière de la boutique. Il était sorti pour me voir, pensant avoir affaires à un éventuel acheteur. J’ai commencé à lui dire ce qui m’intriguait dans sa peinture et le peu que j’avais vu me disait qu’il avait un très grand potentiel qui sous peut allait exploser. Je lui ai expliqué que sa peinture reflétait les grands courants artistiques, mais je n’avais pas vu suffisamment pour déterminer là où son art pouvait trouver toute sa puissance. Il m’a dit, si j’avais le temps, il pourrait m’inviter à son studio à l’arrière. Je me suis dit pourquoi pas. À l’arrière, dans le studio de Fravrange Valcin, c’était une explosion de couleurs et de formes, allant dans toutes les directions. Je lui ai dit que le génie est là. Mais, pourquoi il essayait de l’étouffer dans une mystification d’art naïf. Il m’a expliqué qu’il devait vivre. Il a trois enfants et il a un oncle qui est un grand peintre naïf connu. Donc, les galeries lui dit de peindre comme son oncle, s’il veut vendre ses tableaux. Je lui ai expliqué que le succès vient avec des sacrifices. Donc, s’il veut je serai son conseiller artistique. Il me donne une année au plus et je l’aiderai à réaliser son potentiel. Le lendemain, je passais devant la boutique, j’ai vu Fravrange Valcin. Et il m’a dit qu’il m’attendait. Je l’ai suivi à son studio et j’ai vu un lot de tableaux coupés aux ciseaux. Surpris, je lui ai demandé pourquoi il a fait ça ? Il m’a dit après mon départ, il a réfléchi et a pris la décision d’aller à la recherche de son génie. Je lui ai demandé, un peu surpris, qu’est-ce que cela a à voir avec moi ? Il m’a répondu : est-ce que je voudrais devenir son conseiller artistique ? Je lui ai dit, pourquoi pas. Il m’a dit, et tes examens de Philo ? Je lui ai dit, cela attendra. Je lui ai demandé et pour toi, comment tu vas vivre ? Il m’a dit qu’il a deux voitures, qu’il va en vendre l’une d’elles. Mais, il n’avait pas d’argent pour le moment pour acheter la toile et les couleurs. Je lui ai dit je vais voir pour cela. J’avais un ami militaire avec qui je commençais à discuter des changements qui devraient se faire dans le pays pour que nous avancions vers la démocratie. Le Président Jean-Claude Duvalier parlait des changements. Mais, il y avait une arrière-garde qui ne voulait pas du tout entendre parler de ça. J’avais déjà testé le terrain avec mon commandant. Je lui avais demandé une fois de faire libérer un ami qu’on avait arrêté injustement ; il l’avait fait. En effet, je lui ai parlé du projet que j’avais avec Valcin. Il m’a demandé pourquoi ? je lui ai dit que la peinture de Valcin peut porter la société haïtienne à s’interroger sur elle-même. Il m’a donné tout ce qu’il avait de disponible, en me promettant qu’il comptait faire mieux le mois prochain. Je n’avais pas eu de succès avec tout le monde. Beaucoup de mes amis me disaient que c’était trop risqué. Car, l’arrière-garde va gagner la partie. Un ami a sauvé la partie. Frantz Lofficial, dit Toto Thiébaud pour les intimes. Il m’avait dit que Valcin doit s’éloigner de sa forme marchande de peindre. Il peut continuer à peindre juste quelques tableaux commerciaux, m’a-t-il dit. C’est stratégiquement viable. Et, il a pris l’engagement d’acheter un de ces tableaux chaque mois. Il a tenu parole.

Mon aventure avec la peinture avait alors commencé.

Fravange Valcin était devenu Valcin II. Il avait choisi de peindre la revendication des masses haïtiennes : le paysan abandonné qui rêve de descendre de la montagne et d’habiter la ville ; l’enfant abandonné qui pleure l’absence de ses parents ; la population du Tiers-Monde qui regarde désespérée, tandis-que les puissances industrielles se préparent à faire une guerre absurde. Mais, le thème principal était le poème de René Philoctète : Ils sont venus de loin les gens de Prévilé dans un grelot de chant et de frais Pompeia, ils sont venus de loin les gens de Digotrie, dans leur chemise claire, comme des coins de ciel

Valcin et moi avions choisi de nous hiberner dans son studio du Bas-De-Bourdon, en parfaite symbiose avec l’actualité du pays et du monde, On acceptait de recevoir juste quelques rares amis : Simil, Toto Thébaud, Jean-René Jérôme. Quand les 10 tableaux que Valcin comptait présenter était finis, on a invité Pierre Monosiet du Musée d’Art Haïtien du Collège Saint-Pierre à venir voir. Il était en admiration et a conclu que son Conseil d’Administration n’était pas encore prêt à exposer une peinture avant-gardiste. Nous n’avions pas trouvé une Galerie pour exposer. Le bruit courait qu’on voulait faire la promotion d’une révolution. Un jour, nous avons reçu la visite de Herve Méhu, de la Galerie Méhu. Il a regardé les 10 tableaux d’un air soucieux pendant une bonne heure. Et finalement, Herve de nous dire, « si une société ne peut même pas exposer une œuvre artistique progressiste, c’est une société foutue qui ne va nulle part ».

Le jour du vernissage à la Galerie Méhu, l’atmosphère était tendue. Les premiers arrivés étaient un groupe d’amis du Président Duvalier, surnommés la Septième Flotte. L’un d’eux que je connaissais m’a glissé à l’oreille, « Sauve-toi ». Il y avait des hommes portant des lunettes noirs qui commençaient à circuler dans la salle. Des amis comme Gasner Raymond, Carl Henry Guiteau, Simil, Ronald Mevs, Robert Manuel y étaient et Méhu bien sûr. Ensuite le grand monde commençait à arriver, Michèle Montas, Roger Gaillard, Victor Benoit, Lamartiniere Honorat…Et brusquement, une dame entrait dans la salle avec puissance en criant « Oh, c’est magnifique, magnifique, magnifique ! » Et elle de crier encore, « où est Valcin ? » Valcin de répondre « je suis là Madame ». Je suis Madame Sheila Isham, la femme de l’Ambassadeur Américain. « Je veux réserver 3 tableaux pour la résidence de l’ambassade. Et Je vous invite pour la Fête de l’Indépendance des États-Unis  le 4 juillet.». « Êtes-vous seul ? », demande Mme Isham à Valcin. J’ai Paul Magloire avec moi. Et, Madame Isham d’ajouter, « Monsieur Magloire, vous êtes aussi invité à venir fêter avec nous l’Indépendance de la plus grande démocratie du monde… »

000007+ LA BIOGRAPHIE DE PAUL GUSTAVE RAPHAEL MAGLOIRE.docx

Paul G Magloire

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May 9, 2024, 9:21:30 PMMay 9
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