LE TESTAMENT DES LIBÉRAUX
Rappelons-nous, Libéraux, que le 10 Avril 1848, le Général Faustin Soulouque, Président d’Haïti, naturellement incapable et complètement ignorant dans les affaires gouvernementales, en proie à la jalousie et à la haine, et par un coup d’état, extermina nos frères mulâtres en les faisant égorger dans toutes les rues de la capitale et dans plusieurs villes de la République afin de se cramponner au pouvoir et de s’assurer la fidélité de ses partisans : les chiens de sa couleur.
Il disait avoir en main l’alphabet de notre intelligence et de notre esprit. Qu’importe la date qui doit apprendre à nos fils et à beaucoup des nôtres la voie à prendre et l’énergie qu’il faut pour anéantir ces ambitieux, ces inhumains qui entourent Soulouque. Depuis le 16 Avril 1848, nous nous taisions et, comme Samson notre force revient peu à peu. Au 29 Avril 1848, par une combinaison bien préparé, nous le fîmes proclamer Empereur d’Haiti sous le nom de FAUSTIN 1er ; mais notre combinaison fut vaine à cause d’un homme éclairé qui fut dans son ministère. Le 10 Décembre 1855 pour avoir l’occasion de faire tomber nos têtes les plus éclairées dans le dessein arrêté de nous décimer une nouvelle fois, Soulouque entreprit une guerre contre la Partie de l’Est. Ce fut sa dernière tentative ; dès lors, le pays perdit de son état d’héroisme qu’il n’espère plus retrouver. Cet événement permit au brave Geffrard ; que le Maître des Mondes n’avait pas cru nécessaire de laisser davantage sous la fureur du monstre infernal. Ce Dragon à la face humaine dont le cœur est aussi noir que sa peau de penser à NOUS VENGER.
En effet, le 20 Décembre 1858, Geffrard s’esquiva de la capitale, se rendit aux Gonaïves où les choses s’arrangeaient pour lui. Il y proclama la République le 15 Janvier et fit son entrée triomphale à la Capitale. Ainsi parut pour nous le jour de la revendication de nos droits politiques de la résurrection de notre liberté.
A peine commençions-nous à respirer grâce aux bras vengeurs du valeureux Fabre Nicolas Geffrard que les suppots du diable essayèrent d’effrayer la société. On eut vite raison de leur mauvaise tendance tant à la capitale en la même année qu’aux Cayes, en 1862, ils croyaient que leur lion Soulouque pouvait avoir l’étoffe d’un Napoléon. Leur combinaison fut d’écrivailler, de pérorer, de reparodier, de disserter à tort et à travers sur des choses qu’ils ne comprenaient pas, car Geffrard élevé à la première Magistrature de l’Etat sut réparer les maux que nous subissions et nous mettre en mesure de découvrir notre face du voile de honte et d’humiliation que ces nègres nous avaient porté à garder ; aussi la société dont il assura le respect et le repos se ressaisit. Honte à jamais à ces mauvais mulâtres, aux mulâtres ingrats qui avaient accepté le mélange par l’hyménée de nègres avec le produit de leur race.
Depuis cette génération les nègres furent à la dérive, consternés, silencieux, acceptant le sort d’être INFERIEURS qu’ils sont. Mais le misérable Salnave, ce tyran plus ingrat à sa nuance que personne, se mit en révolution et renversa le gouvernement de Geffrard, le revendicateur des droits de la classe mulâtres ; Salnave rassembla à ses coté ces DEMI-HOMMES et les rétablit dans la plénitude de nos droits ; aussi a-t-elle été courte la durée de son gouvernement NEGRO-MULATRES et mérite sa mort.
Dans Domingue nous croyons trouver un autre Geffrard en nous groupant à ses cotés. Mais Septimus Rameau, caméléon astucieux au dernier degré après s’être mis avec nous sans se souvenir du mal qui, malheureusement il avait souffrir aux Libéraux, arrivé au pouvoir s’y attacha, et se croyant invulnérable, il se hasarda à parler de Panthéon à Dessalines et à faire publier par M. Bird (blanc) ministre de la religion protestante à la Capitale un volume intitulé : L’HOMME NOIR ET L’INDEPENDANCE HAITIENNE. Comme si le nègre Dessalines. LE SANGUINAIRE, L’ANTHROPOPHAGE était le libérateur d’Haiti sans égard à Pétion, Boyer Borgella. Eh bien, il s’est montré, nous avons deviné ce qu’il est. Pourquoi ne s’était-il pas appliqué à adoucir notre sort au lieu de nous assujettir à un régime de fort ? Si Septimus Rameau avait été franc et moins prodigue du sang de nos frères mulâtres, il n’aurait pas eu son triste sort. Où donc est-il ? Terrible façon que cette fin tragique de Septimus Rameau. Grâce à nos Dupont et nos Geffrard rappelons-le, qui ont toujours su faire leurs devois en épargnant les leurs, nous avons aujourd’hui cette heure profitable et belle qui est à nous ; ne la salissons pas, car si elle nous échappe cette fois elle ne nous reviendra que tard et peut être jamais. Il y a des occasions qu’on ne trouve qu’une seule fois durant le cours d’un siècle. Rallions-nous Libéraux, faisons un vaisseau fraternel et nous parviendrons à exterminer les débris de ces barbares, nos ennemis irréconciliables, ces ambitieux qui, habitués à bêcher la terre en brillant dans cet art selon les règlements du Code Noir de Toussaint Louverture se croient des hommes et essaient de se poser en maîtres, en mathématiciens, en savants orateurs ; en Cicéron. Dussions-nous disparaître, nous n’accepterons jamais d’être les Alter Ego de ces Noirs comme on nous le propose. Notre devoir nous commande de maintenir les traditions de nos Ancêtres en ne transigeant pas avec ces bêtes fauves. Transiger avec eux c’est renoncer à nos convictions, à nos sentiments. Loin de les subir au pouvoir, ces sales nègres, nous aimons mieux nous joindre à nos frères consanguins de l’Est pour travailler avec eux à la revendication de nos droits. Autrement nous mettrons le pays en protectorat, et nos droits il est vrai nous les exercerons en second ; en sous-main, mais il seront les nègres, en dessous de nous.
Qu’importe après les souvenirs de 1802 et 1804 ! Si nos tyrans les nois protestent, nous, nous étoufferons leurs protestations sous le sarcasme et le ridicule.
Nous continuerons d’arrêter leur mouvement de culture intellectuelle et morale. Heureux serons-nous, quand ces tyrans auront disparu comme la population autochtone des Iles Sandwich. Qu’importe alors, Nos Pères après avoir dépensé leur sang en 1804 et tant d’argent et de sueur depuis 1825, pour voir flotter sous l’azur du ciel d’Haïti l’étendard bicolore ont élévé les héritiers de leur vaillance au rang de citoyens libres d’un Etat autonome. Les tyrans de notre peau qui méprisent la liberté pensent pouvoir nous traiter à l’instar des regnicoles d’une colonie et aspirent aussi à nous voir descendre de notre role pour jouir de notre droit et de nos privilèges. Quelle ingratitude ! Haïti est notre sol et non le leur.
Haïti est le Domaine de nos Ancêtres ; le Pays de nos Pères. L’oublient-ils ?
Que ces nègres sachent une fois pour toutes qu’Haïti n’est point l’Afrique idiote d’où ils ont été tirés et où habitent les leurs.
Fait à Miragoane le 16 Avril 1878 par un groupe de Mulâtres assiégés par l’armée du Président Salomon.
|