Santé : proclamons l'état d'urgence

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Dec 5, 2008, 5:50:57 PM12/5/08
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Le champ de la santé connaît des bouleversements considérables, dus, entre autres, aux progrès des sciences du vivant. L'approche des pathologies, de leur prévention et de leur traitement en est transformée : spécialisation toujours plus grande de la médecine et remise en question de l'exercice médical traditionnel ; patients devenus acteurs de leur santé ; entrée dans l'ère de la chronicité dont le vieillissement n'est qu'un aspect ; information accrue de la population toujours plus exigeante en ce qui concerne sa santé ; extension de la demande de santé qui soulève des problèmes éthiques et de définition du périmètre de la couverture sociale...

Les avancées, scientifiques, thérapeutiques et démocratiques, sont des chances inouïes que nous risquons de gâcher par faiblesse et ignorance politique. Au lieu de permettre à notre système de santé d'opérer les ajustements nécessaires à l'accompagnement de ces transformations, les réformes proposées ces dernières années accroissent son délabrement. L'écart entre l'image du système de santé français comme symbole de réussite mondiale et la réalité devient chaque jour un gouffre plus béant.

Les inégalités devant la santé, en termes d'espérance comme de qualité de vie, ne cessent de croître. Les déremboursements, la progression des dépassements d'honoraires, la chute de la démographie médicale concourent à remettre en cause l'égalité devant les soins (près de quatre Français sur dix ont déjà renoncé ou retardé un soin, en raison de son coût).

Tout indique que ni le PLFSS (projet de loi de financement de la Sécurité sociale) ni la loi HPST (hôpital, patients, santé, territoire) ne seront capables de répondre à ces enjeux. Or il y a péril en la demeure. La dégradation de tout l'environnement sanitaire s'accélère. L'hémorragie financière s'aggrave. Il est évident qu'il n'existe pas de solution miracle. Mais que l'éternel rafistolage budgétaire soit un placebo inefficace l'est aussi. C'est une réforme en profondeur qu'il est nécessaire d'engager, dans le cadre d'un processus global et démocratique, étalé dans le temps et éclairé par un projet.

Il faut ainsi investir dans la santé et expliquer cette option politique nécessaire à nos concitoyens. Il s'impose de mobiliser la dépense collective et la dépense privée. Prétendre refuser l'augmentation des prélèvements obligatoires, comme l'a souvent fait la droite avant le RSA, est un faux semblant. Mais se contenter d'abonder un système d'autant plus inflationniste qu'il dysfonctionne est tout aussi erroné : investir et réformer doivent aller de pair.

Il faut fonder une politique de santé publique donnant notamment la priorité aux urgences sociales que sont la santé au travail, la prévention de l'obésité infantile, le vieillissement et la santé mentale.

Il faut opérer un transfert des charges et des compétences au sein des professions de santé et limiter les monopoles corporatistes qui freinent la diffusion et l'évolution des pratiques. Pour prendre acte de l'évolution de la qualification de chacune des professions, valoriser leur activité et rendre plus efficace l'organisation de la production de soins (travail en équipe et rationalisation des procédures qu'exige la médecine moderne).

Il faut accompagner l'évolution des pratiques et des statuts des professionnels de santé en permettant de nouveaux modes de rémunération et d'association des compétences. Cela signifie clairement mettre fin à la pratique conventionnelle actuelle, dernier avatar d'une médecine libérale désormais caduque.

Il est nécessaire de revoir notre politique du médicament en recentrant sa rémunération sur les molécules réellement innovantes pour récompenser la recherche et assurer une information des professionnels transparente et indépendante.

Il faut arrêter de financer l'hyperprofitabilité des cliniques privées, devenues objets de spéculation des fonds de pension, et donner les moyens à l'hôpital public de poursuivre sa réforme, en prenant en compte sa spécificité.

Enfin, il est nécessaire de favoriser l'information des usagers sur leur situation personnelle comme sur les traitements, notamment en développant l'éducation à la santé et en reconnaissant des droits aux associations d'usagers.

Les fruits d'une telle réforme ne se cueillent pas immédiatement au lendemain du vote d'un texte au Parlement. Il s'agit d'un investissement essentiel et exigeant pour les décennies à venir. La santé est une condition nécessaire au développement du potentiel humain d'une société. Tergiverser, c'est prendre le risque d'une perte de cohésion de la société française. La gauche doit imposer l'actualité de ces enjeux en faisant de la santé à côté de l'éducation les piliers d'un projet alternatif.

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