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Guy NICOLAS

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Oct 5, 2021, 7:45:23 AM10/5/21
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Bonjour !

Le grand méchant loup dans la bergerie (j’me marre) France…

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Guy

La stratégie d’influence chinoise dans l’enseignement supérieur

Soazig Le Nevé

Une mission sénatoriale alerte sur l’activisme de Pékin, qui cherche à « neutraliser ses ennemis » et à capter des données scientifiques

Dans la pensée chinoise ancienne, zhong guo (le « pays du milieu ») est au centre du monde civilisé et tient à distance la barbarie. Cette position, centrale, est par essence l’aspiration du régime communiste chinois, qui déploie « une stratégie systémique » d’influence sur les autres pays, notamment la France, souligne le rapport d’information de la mission sénatoriale sur les influences étatiques extra-européennes dans le monde universitaire et académique français et leurs incidences, publié mardi 5 octobre.

D’autres pays comme la Russie, la Turquie, certains Etats du golfe Persique sont également mentionnés par la mission, « mais aucun ne peut se targuer des moyens et de l’ampleur de la stratégie chinoise, qui joue sur de multiples tableaux et ne dissimule plus sa volonté d’occuper une position centrale dans les relations internationales et de faire prévaloir ses vues », expliquent le rapporteur André Gattolin, sénateur LRM des Hauts-de-Seine, et Etienne Blanc, président de la mission, sénateur LR du Rhône.

Le document relate trois cas illustrant cette emprise. L’annulation, par Sciences Po, d’une conférence du dalaï-lama en septembre 2016 et le maintien par l’Inalco de cette même visite programmée dans son établissement, malgré « des lettres de l’ambassade » et « des menaces sous-entendues d’arrêt, voire de retrait de bourses ». Ensuite, la mise en cause publique du chercheur Antoine Bondaz, traité de « petite frappe », de « troll idéologique » et enfin de « hyène folle » par Lu Shaye, ambassadeur de Chine en France en mars, en conséquence de sa dénonciation des pressions de la Chine sur des sénateurs qui voulaient se rendre à Taïwan.

Dernier cas, celui du piratage en direct d’un cours en ligne, rendu illisible par un groupe pro-turc, alors que la chercheuse Claire Mouradian présentait l’image d’un monument patrimonial arménien menacé, le 3 décembre 2020.

Plus grande diaspora étudiante

L’activisme dans le monde académique vise deux objectifs : d’abord « l’influence », passant par le façonnage de l’image ou de la réputation d’un Etat, en priorité par l’instrumentalisation des sciences humaines et sociales, notamment de l’histoire. Ensuite, « la captation », induisant l’accès à des données scientifiques protégées par la propriété intellectuelle, et leur transfert, en priorité dans les sciences liées à la technologie, à l’ingénierie et à la mécanique.

Avec un effectif estimé à 47 500 étudiants par l’ambassade de Chine, l’empire du Milieu est le premier pays d’origine des étudiants internationaux en France. Sur le plan de la recherche, « la volonté chinoise de nouer des partenariats tous azimuts avec les unités de recherche occidentales tient au contexte de rattrapage dans lequel la Chine se trouve », cadre le rapport.

Principal outil d’influence de la Chine sur le monde académique, le Front uni, un organe rattaché au parti qui est aussi « une doctrine stratégique » consistant à « mobiliser ses amis pour neutraliser ses ennemis ». Ses relais s’incarnent dans les ambassades, les consulats mais aussi les associations de la diaspora étudiante chinoise. 

« Il est fortement “conseillé” que les étudiants adhèrent aux bonnes associations, et qu’ils fassent des études et des stages dans des lieux intéressants pour le développement stratégique de leur pays », notent les sénateurs. Des missions de renseignement sont régulièrement confiées à ces étudiants, « surtout au sujet d’autres étudiants chinois qui auraient manifesté des opinions dissidentes ».

Deuxième pièce de l’échiquier, les Instituts Confucius – 525, dont 17 en France, conçus en 2004 sur le modèle de l’Alliance française, dans le but de développer un « soft power » par l’enseignement du mandarin et la diffusion de la culture chinoise. En leur sein, « des sujets sont activement évités, et en particulier les thèmes dits “sensibles” comme le Tibet, Taïwan ou la répression des Ouïgours », relate le rapport. Ces stratégies d’évitement conduisent à de l’autocensure, comme l’indique à la mission Guillaume Giroir, directeur de l’institut Confucius de l’université d’Orléans : « Si je voulais parler du Tibet au sein de l’institut Confucius, cela risquerait de poser des problèmes. »

Enfin, le plus connu des programmes de recrutement chinois, appelé « programme des 1 000 talents », se mêle aux politiques d’influence et d’espionnage. Ainsi, « des chercheurs qui sont passés par ces programmes peuvent devenir dépendants de la Chine, que ce soit au niveau financier ou professionnel, et devenir des relais d’influence », alertent les sénateurs.

Dans ce contexte, pourtant, seulement une dizaine de cas auraient fait l’objet d’un signalement dit « sérieux » de tentative d’influence en 2020, selon les données communiquées à la mission d’information par les établissements d’enseignement supérieur. Les « points de fragilité » le plus souvent identifiés sont les conventions passées avec les établissements étrangers et l’origine des financements obtenus par les doctorants et postdoctorants.

Seuil de vigilance trop bas

La mission sénatoriale s’est aussi intéressée au dispositif interministériel de protection du patrimoine scientifique et technique de la nation. Il est dirigé au sein de chaque ministère par un haut fonctionnaire de défense et de sécurité qui anime un réseau de fonctionnaires de sécurité et de défense au niveau des établissements. Les sénateurs regrettent que le seuil de vigilance « ne s’applique qu’à des risques très élevés de captation de savoirs et savoir-faire (intérêts économiques et militaires, prolifération et terrorisme) », ignorant les nouvelles stratégies d’influence qui ciblent les sciences humaines et sociales et qui « restent largement sous les radars des institutions académiques et judiciaires ».

Parmi 26 recommandations, la mission pousse à « élever le sujet des interférences étrangères au rang de priorité politique » en constituant un « observatoire des influences étrangères et de leurs incidences sur l’enseignement supérieur et la recherche ». Les sénateurs proposent d’instaurer l’obligation pour les chercheurs de signaler dans leurs thèses, travaux postdoctoraux et publications scientifiques les éventuelles aides directes et indirectes dont ils ont pu bénéficier de la part d’Etats extra-européens et de créer un régime de transparence sur l’origine des financements extra-européens des projets de colloques, contrats doctoraux et autres chaires.


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