Le Monde : L’université doit dénoncer l‘offensive antisémite

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Guy Nicolas

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Nov 17, 2022, 7:47:32 AM11/17/22
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Bonjour !

Il y a cette tribune dans Le Monde daté au 18 novembre 2022 :

A plus.
Guy

L’université doit dénoncer l‘offensive antisémite

Alors que des symboles nazis ont été retrouvés dans plusieurs établissements d’enseignement supérieur, trois universitaires dénoncent une banalisation de la violence antisémite et appellent à une mobilisation de tous

Anne-Laure Chaumette, Vincent Duclert Et Thomas Hochmann

Fin octobre, des symboles nazis ont été retrouvés dans un établissement d’enseignement supérieur francilien. Relevant de la justice, poursuivis pénalement, de tels faits s’en prennent à la communauté universitaire tout entière, qui y est confrontée de plus en plus : université de Nanterre, université de Grenoble, université de Créteil, HEC, fronton de Sciences Po à Paris…

Cet antisémitisme dans le milieu universitaire s’inscrit dans un contexte plus large : inscriptions dans les rues de France, sur les portes d’appartements, crimes répétés contre des Français visés comme juifs, implacablement assassinés. La violence des mots exposés est autant d’actes de terreur, menaçant l’existence au quotidien et la vie même de concitoyens traqués par la haine raciale.

L’antisémitisme apparaît pour ce qu’il est dans notre pays, sans fin. On l’a vu lors des premières manifestations des « gilets jaunes », fin 2018, dans les défilés contre le passe sanitaire, durant les démonstrations de force contre le mariage pour tous. La radicalité de certaines luttes semble devoir en appeler à l’expression de l’antisémitisme.

Ce phénomène contribue à banaliser la violence antisémite et sa signification historique et philosophique. Et ce, alors que l’extrême droite part à la conquête des esprits et des urnes, partout dans le monde et notamment en France, où le Rassemblement national lorgne désormais la présidence du groupe de travail sur l’antisémitisme à l’Assemblée nationale.

De Zola à Camus

L’antisémitisme se transformerait-il en une expression publique comme une autre ? La France n’a pas manqué de plumes courageuses pour souligner l’indignité nationale de l’antisémitisme et de ceux qui le professent, d’Emile Zola dans l’affaire Dreyfus à Albert Camus écrivant, en janvier 1952, que « l’antisémitisme ne peut se prévaloir d’une tradition intellectuelle. Il n’est rien, sur le plan de l’intelligence. (…) Le problème n’est donc pas tant de savoir pourquoi l’antisémitisme se perpétue mais bien plutôt comment cet appétit affreux (cette difformité, comme disait Nietzsche) ne s’est pas trouvé apaisé par les millions de victimes qui lui ont été offertes en présent ».

L’auteur de La Peste rappelle une évidence dont on se défend souvent, prétextant qu’elle est trop extrême, qu’elle méconnaît les spécificités de l’antisémitisme contemporain, qu’elle ne distingue pas entre ses formes variées, qu’elle culpabilise à outrance les sociétés. Et, pourtant, l’évidence est historiquement vraie : l’antisémitisme conduit à l’extermination.

Les démocraties d’après-guerre, en France comme en Allemagne, se sont précisément construites contre ces systèmes totalitaires qui avaient mis en œuvre un programme de destruction humaine menaçant toute l’humanité. Le sort des juifs d’Europe et des Tutsi du Rwanda fait comprendre jusqu’où mène la persécution organisée contre un groupe minoritaire : l’extermination, à l’issue d’un processus génocidaire.

Réduire la portée historique de la Shoah à ses seules victimes, c’est se condamner à ne rien comprendre des mécanismes de l’extermination, à permettre donc qu’ils se reproduisent. L’extinction programmée des Ouïgours dans la Chine de Xi Jinping, la menace d’anéantissement de l’Arménie par son voisin azerbaïdjanais en sont les illustrations contemporaines et doivent nous alerter.

Risques pour la France entière

L’antisémitisme sans fin prépare de nouvelles catastrophes humaines. Mais, désormais, nous savons d’où il vient et où il mène. C’est notre force pour inventer les combats d’aujourd’hui et de demain. Quand le nazisme est réapparu ouvertement en France avec l’offensive négationniste sur les chambres à gaz, Raymond Aron et François Furet ont décidé, en 1982, de réunir en Sorbonne une grande conférence internationale sur « l’Allemagne nazie et l’holocauste des juifs ».

Aujourd’hui, face à l’offensive antisémite dans des lieux de savoir et de connaissance, les établissements universitaires doivent réagir pour dénoncer et informer. Des universitaires de Paris-Nanterre ont choisi d’agir, le 27 janvier 2023, jour de commémoration de la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau, où périt plus d’un million de juifs d’Europe – dont des juifs livrés par l’Etat français.

Il faut mesurer les risques que représente l’antisémitisme pour la France tout entière. Il s’agit d’une question de vie ou de mort pour les sociétés démocratiques. Au-delà du réflexe éminemment moral de solidarité pour les victimes qui nous commande d’agir, le souci de l’intérêt national pourrait et devrait gouverner les décisions individuelles de combat contre l’antisémitisme, afin qu’il demeure la honte de l’humanité, plutôt que son tombeau.

Anne-Laure Chaumette est professeure de droit public, université Paris-Nanterre ;Vincent Duclert, chercheur au Centre d’études sociologiques et politiques Raymond-Aron ; Thomas Hochmann, professeur de droit public, université Paris-


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