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Edito Edito de la Toussaint.
La dernière cabine téléphonique publique de France se situe au pied de l'abbaye de Murbach en Alsace. Il suffit de composer le 03 89 74 11 XX…le téléphone se met à sonner. Depuis que cette info a été rendue publique par la télé régionale, la cabine ne cesse de sonner. Les habitants eux, sont habitués mais le plus étonnant c’est que les touristes viennent y faire la queue pour pouvoir répondre. Cette histoire pittoresque m’a fait me remémorer une autre anecdote mais plus triste et ô combien humaine « le téléphone du vent » ou le mystère d’une cabine téléphonique branchée… sur l’au-delà.
Au Nord Est du Japon, dans le village d’Otsuchi, il existe un jardin. Isolée dans les camélias, une cabine téléphonique reliée… à rien ou si peu... Le fil de connexion pend inexorablement dans le vide. Après la catastrophe du tsunami du 11 mars 2011, un retraité a installé dans son jardin, un peu à l’écart, cette cabine munie d’un téléphone antédiluvien vers l’au-delà. Vous savez, ces vieux appareils à cadran en bakélite noir qui délivraient ces cliquetis caractéristiques. Les anciens comme moi s’en souviennent…C’est là que commence le rituel. Après avoir attendu son tour assis sur une pierre, chacune, chacun pénètre dans la cabine, fait un numéro puis raconte sa vie d’après. On y pleure, on y reste muet de douleur, on y parle de sa vie et de ses tracas, chagrins, inquiétudes, doutes… Parfois le vent rapporte des bribes de conversations chuchotées. « Allo, je t’appelle de la cabine du vent … »«… je ne sais pas ce que tu ferais à ma place… non, ne t’inquiètes pas… oui, regarder devant moi… oublier… pourquoi ne t’es-tu pas enfui ?... je suis désolé de t’avoir abandonné… es-tu bien installée là-haut ?... si tu es au paradis pense à nous… tu sais, je fais de mon mieux… tu me manques… ». La tristesse, la peine, la douleur sont palpables mais dans une dignité toute japonaise. D’autres lisent des lettres que personne jamais ne recevra. Entre les mots, entre les silences, il y a de la place pour soi, pour l’autre, pour ce qui n’est pas dit… on se raccroche à l’indicible. À distance respectable, on attend souvent car la cabine est très utilisée. Ressorti on retrouve ses voisins et on parle…toujours et encore de la catastrophe et des disparus. Dans cette commune, sur 1300 morts, seulement 50 corps ont été retrouvés. Un cataclysme mental insurmontable. Certains reviennent régulièrement. On fait comme si…On confie son chagrin au téléphone du vent… 風の電話.
Alors, nous qui sommes pendus à nos téléphones du matin au soir, n’aurions-nous que des choses importantes à nous dire ? En tout cas, si nous n’avons pas de cabine téléphonique branchée sur le vent, pensons simplement à nos morts et profitons de chaque seconde…et portez-vous bien. p
Merci Pierre pour ce bel édito et l'évocation des personnes qui nous sont chères en ce week-end du souvenir.
Julie pour Porteurs de vivres
A bient