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unread,Jan 28, 2011, 3:23:44 AM1/28/11Sign in to reply to author
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to infos : administration, production et politique culturelle
Le régime des intermittents du spectacle ne figure a priori pas au
programme de la négociation sur l'assurance-chômage qui s'est ouverte
lundi. Son déficit récurrent dépasse pourtant 1 milliard d'euros, en
dépit des réformes précédentes.
C'est le grand non-dit de la négociation sur l'Unedic qui a démarré
entre le patronat et les syndicats lundi dernier : le déficit
récurrent de l'assurance-chômage des intermittents du spectacle.
Chacun sait que qui veut toucher à ce régime s'expose à de graves
ennuis. Le souvenir du conflit qui avait provoqué l'annulation de
plusieurs grands festivals pendant l'été 2003 reste gravé dans les
mémoires. Et le gouvernement n'est donc pas le dernier, dans le
contexte social tendu actuel, à se satisfaire du silence pudique qui
entoure sa situation financière.
Obtenir des données sur le sujet relève du parcours du combattant.
Selon le dernier bilan annuel qui porte sur 2009, que se sont procuré
« Les Echos », 105.826 allocataires ont été indemnisés au cours de
l'année. L'Unedic leur a versé 1,276 milliard d'euros. Pour 223
millions de cotisations versées. Soit un déficit de 1,054 milliard
d'euros. Les règles spécifiques d'indemnisation sont plus souples que
celles du régime général puisque, pour en bénéficier, il faut avoir
travaillé 507 heures en 10 mois ou 10,5 mois, selon la profession
(lire ci-contre).
Paradoxe
Depuis la dernière réforme du régime, entrée en vigueur en avril 2007,
la situation est étale, le déficit toujours aussi important (voir
graphique). Là n'est pas le moindre des paradoxes : alors que la crise
a provoqué une explosion du chômage en 2009, avec plus de 400.000
demandeurs d'emploi supplémentaires sur douze mois, le nombre
d'allocataires des annexes 8 et 10 (régime des intermittents) n'est
passé que de 104.208 à 105.826 entre 2008 et 2009. L'industrie du
spectacle a-t-elle été impactée avec retard ? Cela se verra sur les
données de 2010, qu'il serait très intéressant que l'Unedic publie.
Elles ne pourront en tout cas pas être meilleures que 2009.
Le déficit du régime des intermittents pèse avec constance sur les
finances de l'assurance-chômage. En 2009, les deux déficits ont même
presque correspondu, celui de l'Unedic atteignant 1,172 milliard
d'euros. Les deux réformes du régime des intermittents de 2003 et de
2006 n'auront donc clairement pas permis de rééquilibrer les finances.
Pour autant, il ne faudrait pas résumer le problème à la préservation
d'avantages acquis. Ce régime constitue de fait un financement de la
politique culturelle française, que l'Etat ne veut surtout pas voir
supprimé. D'ailleurs, le Fonds de professionnalisation et de
solidarité qu'il a mis en place pour contribuer aux dépenses de
chômage des intermittents plafonne à 5 millions d'euros par an. Le
déficit du régime renvoie aussi au problème posé par les pratiques de
certaines entreprises qui usent et abusent du statut de
l'intermittence. Le résultat est qu'on ne voit pas trace des 60
millions d'euros d'économies que devait procurer la dernière
modification des règles.
LEÏLA DE COMARMOND, Les Echos
28/01/11
L'insoutenable spectacle
Edito de JEAN-FRANCIS PÉCRESSE (Les Echos)
Pour une partie du monde de la culture, bien sûr, ce ne sera jamais
qu'une vulgaire histoire de gros sous. L'élément des comptes de
l'assurance-chômage révélé par « Les Echos » est pourtant un spectacle
à lui seul. Aux arrondis près, les chiffres sont éloquents.
Techniciens et artistes du spectacle vivant représentent 3 % des
allocataires de Pôle emploi, mais 33 % du déficit de l'assurance-
chômage. Cent mille personnes couvertes, 1 milliard d'euros de pertes.
On comprend mieux pourquoi les artistes n'aiment guère que le public
aille regarder en coulisse.
Or la renégociation de la convention d'indemnisation du chômage
contraint à braquer les projecteurs sur le caractère insoutenable de
ce régime accordé à ceux qui vivent par intermittence du spectacle,
derrière ou sur la scène. Puisque aucun autre pays européen ne leur
réserve pareil traitement, exclusif et surmesure, puisque leurs
cotisations et prestations sont enviables par le commun des salariés,
puisque l'on voit mal en quoi l'art serait un passe-droit dans la
galère ordinaire du chômage, il faut bien parler de privilège.
Un privilège dont le principe n'est toutefois pas condamnable si l'on
veut bien y voir une légitime contribution de l'économie marchande à
une production culturelle censée ignorer les lois économiques. Ainsi
permet-on à de jeunes talents d'émerger, en surnageant d'un contrat
précaire à l'autre. Le régime particulier des intermittents du
spectacle n'est pas condamnable, mais son abus l'est. Car, au fil des
ans, la générosité publique à l'endroit des artistes, érigée en acquis
social par leurs turbulents représentants, a été détournée de son
objet.
Avec la complicité d'employeurs utilisant l'indemnisation de
l'intermittence comme un mode permanent de rémunération, confondant
salaire et allocation, le système est devenu une machine à
subventionner l'emploi artistique. Et les engagements pris n'ont pas
été tenus. Contraints d'éponger ces déficits, l'Etat et les salariés
ne sont pas les seules victimes de cette coûteuse licence. Transformés
en fonctionnaires du spectacle, subventionnés par la collectivité
publique, les intermittents y perdent cette indépendance qui devrait
asseoir leur dignité. Il devient urgent d'infliger des taux de
cotisation pénalisants aux employeurs et aux salariés qui abusent du
système.