Si vous n'avez pas vu Alien (Ridley Scott, 1979), ne lisez pas ce post,
il est truffé de REVELATIONS
Je vais d'abord parler du concept 'Alien' en général, puis de chacun des
films de la série.
I - "J'admire sa pureté. Un survivant qui n'est pas souillé par la
conscience, le remords, ou les illusions de la moralité."
Qu'est-ce qui fait peur dans Alien ?
Tout d'abord l'alien est, par définition, ce qui est autre, ce qui est
différent de nous, l'étranger. L'alien réveille nos peurs xénophobes.
L'alien est l'inconnu - mais aussi l'inconnu dangereux. On se rend vite
compte qu'il peut faire mal, qu'il peut tuer. Il est le monstre par
excellence. D'une complexité effarante (jusque dans ses entrailles, qui
ont la faculté de dissoudre toute matière, comme quoi l'alien peut
encore tuer après sa mort), mais d'une fin simplissime : il ne veut que
tuer et se reproduire.
Et sa reproduction nécessite la mort d'un être humain, cela va donc plus
loin encore. L'alien a besoin d'un hôte humain pour se développer, c'est
là toute la force du concept. Cela réveille cette fois la peur de la
maladie, la peur du cancer même, qui nous ronge de l'intérieur. On se
sent impuissant face à l'alien comme face à la maladie. On ne peut rien
faire sauf attendre la mort ... Terrifiant.
Mais Alien ne se limite pas à cela. Une allusion y est faite dans le
premier opus et dans le troisième, et c'est le leitmotiv du second et du
dernier : L'alien est un arme. La science-fiction
post-seconde-guerre-mondiale a vu fleurir les réflexions sur
l'utilisation des hautes technologies durant les guerres (comme le
nucléaire bien sûr), et les cataclysmes qui peuvent en découler. Alien
se place dans la continuité de ces réflexions. Il veut nous montrer le
danger des armes bactériologiques (car l'alien en est une). Alien nous
montre aussi le mythe de la créature qui échappe à son créateur (dans
tous les Aliens, les scientifiques sont les dindons de la farce, seule
Ripley sauvera le monde), la science qui échappe aux scientifiques. On
peut trouver ce message naïf, ou trop simple, mais il apporte plutôt une
force à des films avant tout fantastiques / de science fiction.
II - "Minou ? Minou, Minou, Minou ?"
TITRE : Alien
ANNEE : 1979
REALISATEUR : Ridley Scott
MUSIQUE : Jerry Goldsmith
INTERPRETES : Sigourney Weaver (Ripley), Tom Skerritt (Dallas), Ian Holm
(Ash), Veronica Cartwright (Lambert), ...
Je regrette sincèrement de ne pas avoir vu le premier Alien de R. Scott
au cinéma. Je trouve que le film, par la qualité de son image et de ses
effets spéciaux, possède une photographie proche de '2001' ou 'Star
Wars'. Mais il y a autre chose, le plus que Giger, le designer de
l'alien, a rajouté au film. Cet aspect gluant, mélange de mécanique et
d'anatomie humaine. Du design de l'alien jusqu?au vaisseau perdu, en
passant par le champ d'oeufs ou encore les couloirs du Nostromo, tout
est visuellement parfait.
Les premières images donnent le ton : planètes, étoiles, nébuleuses,
énorme vaisseau spatial, images servies par la musique lente, douce et
profonde de Jerry Goldsmith. Car c'est la lenteur qui domine le début du
film. La caméra s'attarde partout, sur les habitants du vaisseau qui
sortent de l'hyper sommeil, sur un chat qui se lèche une patte, sur le
soleil au dessus d'une montagne étrangère. C'est long, très long, mais
d'une rare beauté : beauté de l'espace étoilé, beauté des paysages
désolés de la planète sur laquelle ils se posent, même beauté des longs
couloirs du vaisseau spatial Nostromo. Ce qu'on ne sait pas encore,
c'est que cela sert Ridley Scott. Il nous endort, le bougre, pour mieux
nous surprendre. Plongé que nous sommes dans la grandeur de ce vaisseau
perdu aux allures biomécaniques (d'ailleurs, quand les "scaphandriers"
marchent à coté du jockey de l'espace, ce sont en fait les enfants de
Scott qui sont dans les scaphandres: le jockey nous paraît alors bien
plus grand !), nous ne pouvons qu'être envoûtés par cette lumière
bleuâtre, ces voix étouffées par les scaphandres, ces caméras
subjectives dans un univers inconnu. Tout est étrange, cette fumée, ces
murs osseux, ces oeufs qui bougent presque.
Au milieu du champs d'oeufs où Kane a atterri, c'est comme si le son
avait baissé, le film avait ralenti. Et bam ! cette formidable explosion
vient nous réveiller, nous sauter au visage, nous, spectateurs. Ce n'est
pas Kane que la chose vient attraper, c'est bien nous les spectateurs,
agrippés aux visage, tout d'un coup plongés dans le film.
Moment de peur et de jouissance énorme : on sent que cela va arriver,
mais on ne sait pas quand. On sursaute, mais on est presque heureux que
ça arrive. On a plus à attendre. Et Scott va dans le sens du spectateur.
Aussitôt la scène de l'oeuf passée, plan lent sur le paysage de la
planète. Scott nous laisse le temps de respirer, de reprendre nos
esprits. La musique avait servi ce moment de tension, elle se refait
alors douce et tranquille, quoique encore inquiétante.
Ce moment passé, les relations entre personnages apparaissent plus
claires. Ripley, autoritaire, tiens tête à Dallas et à Ash lors de la
scène de l'ouverture de la porte du vaisseau. Ash est l'un des plus
intéressant à mon goût. C'est un robot qui n'a qu'un seul but, ramener
un alien sur Terre. Et pourtant, parmi l'équipage, c'est presque lui le
plus humain. Il paraît tout du long inquiet, ses phrases sont hésitantes
; il est tendu : avant la sortie du vaisseau, sur la planète, il
s'échauffe rapidement les muscles. Ensuite, il s'effacera plusieurs
fois devant Parker (le technicien noir), auquel il avait pris la place à
table. Ses discussions avec Ripley au sujet de l'alien le montrent peu
sûr de lui, très peu 'scientifique', poste qu'il est pourtant sensé
occuper dans le vaisseau.
Quand il se rend compte que Ripley pourrait bien freiner ses plans, on
assiste à un revirement magistral, magnifiquement filmé par Scott ! Ce
n'est plus le savant peu sûr de lui qui rudoie Ripley, mais un tueur
implacable, à la sueur si réelle qu'on la croirait solide. Surprenant à
bien des égards pour le spectateur : la menace ne vient plus seulement
de l'alien, mais de l'équipage même.
Une fois le robot mis hors service (et rebranché), on a droit à l'une
des plus belles répliques de la saga :
ASH : Un parfait organisme. Et sa perfection structurale n'a d'égale que
son hostilité.
LAMBERT : Tu l'admires n'est-ce pas ?
ASH : J'admire sa pureté. Un survivant qui n'est pas souillé par la
conscience, le remords, ou les illusions de la moralité.
La tension ne quitte pas le film d'une semelle. Tension qu'on
retrouvera, une fois Dallas, Kane et Lambert revenus, dans la scène de
la dissection, sur le visage de Kane (puis quand la goutte d'acide
descendra un à un les étages du vaisseau), dans la scène où Brett
cherche le chat (quelle tension encore quand l'eau coule sur le visage
de Brett... Et si ... ?), ou encore dans la scène du repas (la dernière
cène devrait-on dire).
Scène magnifique, O combien terrifiante, une fois de plus. Suite au
retour de Kane, les conversations autour de la table se font plus
sereines, plus détendues, les sourires sont sur les visages. Et le
dénouement n'en est que plus fort, plus surprenant. Le spectateur ne
peut que subir cette mort en direct, cette naissance en même temps. Il
faut qu'un homme meurt pour que l'alien vive. L'horreur atteint son
paroxysme : on voit Kane mourir, les traits déformés, et comme une
victoire, le jeune alien exploser de vitalité devant nous.
Et cela est tellement /réel/ ! Durant la prise de vue, les comédiens,
les cadreurs, le personnel étaient eux-mêmes effrayés par ce qu'ils
venaient de voir (selon des interviews de Scott et Giger, le sursaut
d'horreur de Lambert n'est même pas 'joué', elle était réellement morte
de trouille)
Le petit alien s'enfuit en criant, et commence alors une
course-poursuite, d'abord gentillette à l'aiguillon électrique, puis
sanglante à coup de lance-flammes. Toute la force réside ici dans le
fait qu'on ne voit que très peu l'alien. Ridley Scott s'attarde sur
tout, sur les longs couloirs obscurs du vaisseau, sur le visage liquide
de Ripley, sur le chat qui assiste à la mort de Lambert. Les scènes les
plus horribles se passent hors-champ, et tout n'en est que plus
puissant. Certains ont cru voir la créature évoluer, grandir, mais c'est
bien le même costume depuis le début. Les rares indices laissés par
Scott ne sont là que pour mieux nous laisser imaginer l'horreur de ce
qui se passe dans le Nostromo.
Le film reste très obscur jusqu'à la fin, mais le spectateur suit Ripley
au milieu de la fumée, des clignotements et autres éclairs bizarrement
lumineux du vaisseau, des bruits incessants de l'alien comme du
vaisseau. Cacophonie et délire visuel magistralement orchestrés. En cela
le film fait preuve d'une originalité frappante : la fin n'est pas un
déluge d'action ou d'effets spéciaux. C'est avec lenteur mais précision
que Ripley expulsera l'alien hors de la navette.
L'alien, dans cette dernière scène, incarne parfaitement le monstre
caché dans le noir, celui que l'on redoute depuis tout petit, le monstre
intérieur de Ripley, qui l'effraie depuis la mort de Kane. Expulser
Alien hors du vaisseau revient pour elle ici à expulser sa terreur (ses
peurs enfouies depuis trop longtemps) hors de son corps, et c'est
d'ailleurs en fredonnant une comptine enfantine qu'elle le fera.
Conclusion grandiose.
Le film peut se voir comme la métaphore du cauchemar. Il commence sur
des vues des passagers du Nostromo endormis, dans leurs scaphandres
d'hyper-sommeil, sereins, et se termine sur Ripley se recouchant dans la
navette, avec le chat, heureuse d'avoir vaincu l'alien. L'épisode alien
ne fut peut-être qu'un simple cauchemar dans la vie de Ripley, cauchemar
où elle aurra réussi à expulser son monstre intérieur, ses propres
terreurs.
Au final, Ridley Scott nous offre donc un film fantastique contemplatif
à souhait (et qui n'est pas sans rappeler Blade Runner dans son
esthétique), mais terriblement effrayant, et orchestré de main de
maître.
III - "Ne la touche pas, sale pute !"
TITRE : Aliens
ANNEE : 1986
REALISATEUR : James Cameron
MUSIQUE : James Horner
INTERPRETES : Sigourney Weaver, Paul Reiser, Michael Biehn, Lance
Henriksen, ...
Après le chef d'oeuvre qu'est Alien, quelle déception dans Aliens...
Cette critique se base ici sur la version longue du film de Cameron
(DVD), qui aurait du rester courte, d'ailleurs.
Le début du film (l'inciput filmique, cher à Alexandre Tylski :-) laisse
présager la même ambiance que dans le film de Ridley Scott. Prises de
vue lentes sur la navette de Ripley perdue au milieu de l'espace, sur la
station orbitale, puis sur le découpage de la porte de la navette,
jusqu'aux premières scènes de l'hôpital, où les paroles se font rares.
Mais dès l'arrivée de Burke, le représentant de la corporation, tout
tombe. Burke est sensé représenter l'industriel cynique, sûr de lui,
mentant aussi facilement qu'un politicien. Au lieu de cela, on a droit à
un Paul Reiser qu'on dirait tout droit sorti d'une comédie, aussi épais
qu'un sanwitch SNCF, et qui, dès qu'il parle, perd toute crédibilité
(peut-être est-ce du au doublage français ?).
<Version longue>
La rencontre dans le 'jardin' de l'hôpital entre Ripley et Burke est par
trop parachutée. Elle ne sert que de justification à la relation future
entre Ripley et Newt : on y apprend en effet que Ripley avait une fille,
mais qu'elle est morte de vieillesse du fait du décalage de l'hyper
sommeil. Cela ne sert à rien, rajoute juste du 'pathos' à outrance.
</Version longue>
La suite n'est qu'un film d'action comme tant d'autres, un brin teinté
d'humour, pas si mauvais que ça, mais sans grande originalité. Et là où
pêche Cameron, c'est à vouloir trop montrer les Aliens. Ils pleuvent de
partout, ils sont tous pareils, ils se jettent sur les mitrailleuses. Où
est la machine à tuer du premier opus, froide et efficace, mystérieuse à
souhait ? Ce n'est qu'un déluge de monstres, plus du tout effrayants.
Quelques bonnes idées traînent quand même ici ou là. Tout d'abord la
présence de Newt (magnifiquement campée par Carrie Henn) donne une drôle
de fraîcheur au film. Elle est simple du début à la fin, et c'est elle
qui dira à Ripley :
"Ma maman disait qu'ça existait pas les monstres, qu'c'était pour rire.
Mais y en a..."
<Version longue>
On rencontre Newt pour la première fois sur la colonie LV-426, lorsque
ses parents vont explorer l'épave du vaisseau échoué sur la planète.
Cette scène n'est qu'une pâle copie de la même scène du film de Scott.
Et elle n'apporte pas grand chose ... Le spectateur pouvait très bien
imaginer comment les aliens avaient investi la cité humaine.
</Version longue>
C'est d'ailleurs le personnage de Newt qui, plus tard, dans la scène de
l'enlèvement dans l'eau (ou Cameron s'essaie au hors-champ, avec l'image
des ronds dans l'eau), introduira le second atout du film : la reine
alien.
Ripley se doit de secourir Newt, et c'est dans le générateur d'oxygène
où Newt s'est 'échouée' qu'elle rencontrera la marâtre des aliens, la
Reine Mère. On apprend enfin comment l'alien se reproduit (à la manière
des fourmis ou des abeilles), et on découvre le 'chaînon manquant', qui
n'a rien à envier dans son design à ses enfants les warriors. Stan
Winston et son équipe ont créé la bête, et c'est impressionnant. La
scène de la bataille entre la reine et Ripley, au commande du robot de
manutention, est tout simplement épique.
Mais ça ne sauve malheureusement pas le film. Cela reste un film
d'action moyen, aux jeux d'acteurs médiocres (Paul Reiser/Burke et
Michael Biehn/Hicks déçoivent constamment), et où l'alien ne fait
décidément plus peur.
IV - "65 ? C'est son QI !"
TITRE : Alien 3
ANNEE : 1992
REALISATEUR : David Fincher
MUSIQUE : Elliot Goldenthal
INTERPRETES : Sigourney Weaver, Charles Dance, Lance Henriksen, ...
6 ans après Cameron, Fincher reprend le flambeau.
On replonge presque (presque...) dans l'ambiance du premier opus, dans
un épisode très très sombre, où tout y est glauque. Comme dans le film
de Scott, l'alien est seul, pratiquement intuable, très sensuel dans ses
déplacement et dans sa relation avec Ripley.
Fincher ne fait pas la même erreur que Cameron : trop en montrer. Le
début du film reste mystérieux, la planète prison est parfaite de
mystère et de bizarreries, ces cranes rasés inquiétants (très bien
justifiés d'ailleurs), cette religion plus ou moins fanatique où les
prêches s'élèvent avec force, une Ripley encore une fois très 'présente'
sur l'écran.
Ripley tente de vivre, difficilement, sur cette planête-prison, où elle
subit constament les quolibets et les avances des détenus, qui n'ont
pour la plus part jamais vu femme depuis belle lurette. Et bien sûr elle
se doute que l'alien l'a suivie jusqu'ici. Elle essaie au début
d'oublier ses aventures, mais rapidement les indices sont trop nombreux
et le spéctateur, tout comme elle, sait qu'un alien est présent sur la
planête (on est dans Alien 3 tout de même :-)
L'intrigue devient alors très linéaire. Quelques détenus disparaissent
ici
ou là, avec des traces plus ou moins explicites. Ripley enquète, essaie
de persuader les autres qu'un monstre est présent ici, voit son amant
mourir devant ses yeux (scène d'ailleurs intéressante et très sensuelle
dans la relation Alien/Ripley), et monte peu à peu une résistance avec
les détenus. Mais c'est trop prévisible. On a l'impression de revoir le
premier 'Alien' (les pesronnages qui disparaissent un à un, Ripley qui
se bat contre l'alien), sans aucun effet de surprise, avec une
réalisation assez commune de la part de Fincher. Quelques plans
pourraient être intéressants, comme les vues subjectives depuis l'oeil
de l'alien, mais cela va décidément trop vite.
Le plus vient encore de Ripley elle-même, qui apprend, presque de
l'alien, qu'elle est 'enceinte' d'un alien, et pas n'importe lequel,
puisque c'est une reine. Elle sait donc qu'elle va mourir quand son
enfant naîtra, mais en plus qu'il faut qu'elle empêche ce moment, car
elle ne peut laisser une reine former une nouvelle colonie. Et le seul
moyen pour elle de tuer son enfant est de se tuer avant sa naissance.
Idée intéressante donc, qui aboutit sur le plan final, où Ripley sert
l'alien naissant contre elle tandis qu'elle sombre dans la lave. Et on
ne peut qu'avoir une pincée au coeur quand on a suivi Ripley dans ses
mésaventures depuis 3 films déjà :-)
On sent que cela s'essoufle. Le concept 'alien' peut être très riche de
situations et d'implications (voir ma première partie), et il semble
évident qu'on a atteint le fond du sac. Fincher, qui joue des ambiguités
entre Ripley et l'alien, qui les fait se chercher et se caresser pendant
tout un film, a donc raison de donner le coup de grâce à la série. Dans
son final, l'alien et Ripley meurent ensembles, serrés l'un contre
l'autre, et sonnent donc le glas de la saga, qui s'éteindra, faute
d'acteurs.
Alien 3 cloture vraissemblablement la série. Beaucoup moins démonstratif
que "Aliens", il est cependant plus intimiste dans les relations
alien/Ripley que le premier "Alien", presque mystique même. Après la
déception de "Aliens", cet épisode ravit, même s'il souffre de quelques
défauts, et de par son final grandiose laisse une impression de
cohérence et d'unité à toute la série.
V - "C'est une reine. Elle va pondre. Vous mourrez."
TITRE : Alien la résurrection
ANNEE : 1997
REALISATEUR : Jean Pierre Jeunet
MUSIQUE : John Frizzel
INTERPRETES : Sigourney Weaver, Winona Rider, Ron Perlman, ...
On se demande bien pourquoi tout recommence, 5 ans après le 3ème Alien,
à la fin duquel tout s'était achevé de la meilleure façon qui soit. Le
film a bénéficié à sa sortie d'un grand plan marketting : "Soyez là pour
sa résurrection". J'y suis allé, naïf, et je dois dire que j'ai été
séduit par le film. Mais après quelques visionnages en video, il est
clair que le film ne tiens nullement la comparaison.
Ripley est donc ressussitée. L'idée du clônage est intéressante (ce
devait être la période Dolly quand le film est sorti), et pourrait poser
les bases pour une vraie réflexion, mais que nenni. On assiste incrédule
à une déferlante de clichés tous plus affligeants les uns que les
autres, jusqu'au final débiloïde. Ripley n'est donc ressussitée que pour
produire un blockbuster Oh ! Lit ! Woodien ! de plus, et le fait que le
réalisateur soir français n'y change rien.
Le scénario du film tient sur un timbre poste : Des scientifiques
clônent Ripley et son alien depuis des cellules du cadavre, mais (bien
sûr) tout fout le camp et chacun doit ensuite sauver sa peau contre une
floppée d'aliens déchaînés. Les personnages sortent tout droit du carton
à clichés : la bonne, la brute et le truand, l'handicapé, la timide, le
scientifique à moitié fou, on a droit à tout.
Une fois les aliens évadés, nos héros doivent s'enfuir de la base et
s'échapper avec leur vaisseau. Au passage on en perdra quelques un, on
aurra droit à notre lot d'hémoglobine gratuite, de blagues vaseuses, de
bon sentiments (notament dans cette scène qui aurait pu être
intéressante, la rencontre de Ripley avec ses doubles, mais non c'est
trop triste il faut que je les tue pour pas qu'elles souffrent), bref de
rabachages et de déjà-vus. Quelques scènes sont intéressantes, notament
sous l'eau, ou encore quand l'androïde, dans une chapelle, discutera
avec l'ordinateur central de la base. Mais ça passe vraiment trop vite.
Le dernier alien n'est pas inintéressant. Fils d'une reine alien (elle
même descendante directe de Ripley) et d'hommes sortis d'on ne sait où,
il va lui aussi (comme dans l'épisode 3) avoir une relation presque
charnelle avec Ripley, et à la limite de l'inceste. Mais sa mort
(prévisible, bien sûr), rappelle trop celle de l'alien du premier opus,
éjecté dans le vide intersidéral.
La fin du film voit l'énorme vaisseau s'écraser sur Terre, tuant ainsi
tous les aliens restants, et du même coup toutes les populations locales
(Afrique du sud il me semble), mais ça on s'en contre fout. Et zou,
l'happy-end de rigueur, accompagné de son lot de bons mots et autres
pitreries.
Un épisode inutile donc, bête et sans presque aucun intéret. Dommage.
VI - Conclusion
J'espère vous avoir donné envie de revoir et revoir cette saga, certes
très inégale, mais intéressante dans l'évolution du traitement du thème
et de la psychologie de l'héroïne, le Lt. Ripley. C'est aussi ça la
grande force de la série, la relation ambigue et sensuelle entre Ripley
et l'alien, cette bête immonde.
Cela dit, je ne me suis nullement attardé sur les (très nombreux)
aspects sexuels que comportent chacun des épisodes, je sais pertinement
que certain contributeur du forum en parlerait beaucoup mieux que moi :)
A bientôt !
Julien,
--
http://juliengourdon.free.fr
"C'est véritablement utile puisque c'est joli."
Le Petit Prince
eh eh eh ... :-)))
bon excuse moi, mais c'était trop tentant... j'ai juste remplacé
quelques mots dans ton intro par des mots plus adéquats... ;-)
Julien Gourdon <gour...@cti.ecp.fr> n'a pas écrit mais il aurait pu :
-----------------
Tout d'abord le phallus est, par définition, ce qui est autre, ce qui
est différent de nous, l'étranger. Le phallus réveille nos peurs
xénophobes. Le phallus est l'inconnu - mais aussi l'inconnu dangereux.
On se rend vite compte qu'il peut faire mal, qu'il peut pénétrer. Il est
le monstre par excellence. D'une complexité effarante (jusque dans ses
entrailles, qui ont la faculté de dissoudre toute matière, comme quoi le
phallus peut encore agir après sa mort), mais d'une fin simplissime : il
ne veut que jouir et se reproduire.
Et sa reproduction nécessite la pénétration d'un être humain, cela va
donc plus loin encore. Le phallus a besoin d'un hôte humain pour se
développer, c'est là toute la force du concept. Cela réveille cette fois
la peur de la maladie, la peur du cancer même, qui nous ronge de
l'intérieur. On se sent impuissant face au phallus comme face à la
maladie. On ne peut rien faire sauf attendre la pénétration ...
Terrifiant.
Mais le phallus ne se limite pas à cela. Une allusion y est faite dans
le premier opus et dans le troisième, et c'est le leitmotiv du second et
du dernier : Le phallus est un arme. La science-fiction
post-seconde-guerre-mondiale a vu fleurir les réflexions sur
l'utilisation des métaphores phalliques durant les guerres (comme le
nucléaire bien sûr), et les cataclysmes qui peuvent en découler. "Alien"
se place dans la continuité de ces réflexions. Il veut nous montrer le
danger des armes bactériologiques (car le phallus en est une). Le
phallus nous montre aussi le mythe de la créature qui échappe à son
créateur (dans tous les "Aliens", les scientifiques sont les dindons de
la farce, seule la femme sauvera le monde), la science qui échappe aux
scientifiques. On peut trouver ce message naïf, ou trop simple, mais il
apporte plutôt une force à des films avant tout fantastiques / de
science fiction.
II - "Minou ? Minou, Minou, Minou ?"
--------------
> Je regrette sincèrement de ne pas avoir vu le premier Alien de R. Scott
> au cinéma.
Oui, t'as raté quelquechose, c'était un grand moment.
A la rentrée, il était en salle à Paris sans qu'on sache de quoi il
était question.
Le métro était couvert d'affiches nous annonçant que dans l'espace on
nous entendrait pas crier...
J'ai donc fait partie des premiers spectateurs qui ont eu la chance
d'entrer dans la salle sans rien savoir de ce qu'ils allaient voir.
L'une des choses qui m'a le plus marqué à l'époque, c'était
effectivement comme tu le souligne, le début... et en particulier la
qualité du design...
Enfin un vaisseau spatial sale et usé qui ne ressemblait pas à un jouet
en plastique, enfin un équipage avec des costumes et un jeu d'acteur
crédible... (un des éléments les plus remarquable c'était le détachement
blasé de l'équipage. on était loin des emphases surjouées de la guerre
des étoiles ou de star trek.
ça ressemblait aux ambiances de régie ou de directe... même dans des
conditions difficiles, une équipe rodée parle calmement, presque en
chuchotant... avec des attitudes et des gestes en apparence
décontractés... exactement le jeu d'acteur de l'équipage du Nostromo
lorsqu'ils prennent les commandes du vaisseau.
La lenteur du début et la découverte du vaisseau Alien était un monument
de jouissance immersive pour l'époque, sans oublier comme tu l'as
souligné la magnifique étrangeté des créations de Giger. Je me rappelle
m'être dit à ce moment qu'on avait la enfin une oeuvre digne de 2001.
Ce qui fait que lorsque le film a basculé dans le film d'horreur, je n'y
étais pas préparé, tellement je savourais la qualité de ce dépaysement
immersif digne des meilleurs romans de SF.
Bref, j'ai marché à fond... bien plus que tous les spectateurs qui l'ont
vu ensuite en sachant par le bouche à oreille quel type de film c'était.
Et puis l'époque était importante... on ne pourra plus jamais voir Alien
comme nous l'avons découvert...
Cependant ta description décrit très bien les éléments clefs de ce grand
moment...
>
> TITRE : Alien la résurrection
>
> On se demande bien pourquoi tout recommence, 5 ans après le 3ème Alien,
> à la fin duquel tout s'était achevé de la meilleure façon qui soit. Le
> film a bénéficié à sa sortie d'un grand plan marketting : "Soyez là pour
> sa résurrection". J'y suis allé, naïf, et je dois dire que j'ai été
> séduit par le film. Mais après quelques visionnages en video, il est
> clair que le film ne tiens nullement la comparaison.
Si, si tu as en tête les métaphores sexuelles mise en place
volontairement par Sigourney Weaver... le film devient franchement
drôle... et renoue magistralement AMHA avec le premier... :-))
> Cela dit, je ne me suis nullement attardé sur les (très nombreux)
> aspects sexuels que comportent chacun des épisodes, je sais pertinement
> que certain contributeur du forum en parlerait beaucoup mieux que moi :)
Ah oui ? qui ça ?....
Yann qui n'a pas pu se retenir... c'était trop bon... ;-)
> eh eh eh ... :-)))
>
> bon excuse moi, mais c'était trop tentant... j'ai juste remplacé
> quelques mots dans ton intro par des mots plus adéquats... ;-)
>
> Julien Gourdon <gour...@cti.ecp.fr> n'a pas écrit mais il aurait pu :
Très très drôle, et pas si loin que ça de la réalité :)
> > Je regrette sincèrement de ne pas avoir vu le premier Alien de R. Scott
> > au cinéma.
>
> Oui, t'as raté quelquechose, c'était un grand moment.
> A la rentrée, il était en salle à Paris sans qu'on sache de quoi il
> était question.
Septembre 1979 en france ?
> Le métro était couvert d'affiches nous annonçant que dans l'espace on
> nous entendrait pas crier...
Merci du témoignage. La bande annonce, présente sur le DVD, est
d'ailleurs un petit bijou de sobriété et de montée en tension. On en
fait plus des comme ça :)
C'est clair qu'Alien ne peut plus être vu de la même manière à notre
époque, où la violence est devenu commune sur les écrans. Bizarrement,
j'ai été assez impressionné par la projection d'Alien 4 (j'ai tremblé
pendant une bonne partie du film :-), alors qu'une fois revu en video,
il est bien moins subversif que le premier opus. J'étais jeune,
dirons-nous...
> > TITRE : Alien la résurrection
> >
> > On se demande bien pourquoi tout recommence, 5 ans après le 3ème Alien,
> > à la fin duquel tout s'était achevé de la meilleure façon qui soit. Le
> > film a bénéficié à sa sortie d'un grand plan marketting : "Soyez là pour
> > sa résurrection". J'y suis allé, naïf, et je dois dire que j'ai été
> > séduit par le film. Mais après quelques visionnages en video, il est
> > clair que le film ne tiens nullement la comparaison.
>
> Si, si tu as en tête les métaphores sexuelles mise en place
> volontairement par Sigourney Weaver... le film devient franchement
> drôle... et renoue magistralement AMHA avec le premier... :-))
Comment sais-tu que c'est S W qui a délibérément mis cela en place ?
Je veux bien croire que les métaphores sexuelles sont présentes dans le
film (j'ai lu tes posts à ce sujet), mais je ne trouve pas du tout cela
évident (je veux dire, ce n'est pas du tout ce qu'on voit en premier).
Ca reste quand même un film d'action plutot mauvais.
Erf, je suis bon pour un revisionnage :-)
> > Cela dit, je ne me suis nullement attardé sur les (très nombreux)
> > aspects sexuels que comportent chacun des épisodes, je sais pertinement
> > que certain contributeur du forum en parlerait beaucoup mieux que moi :)
>
> Ah oui ? qui ça ?....
>
> Yann qui n'a pas pu se retenir... c'était trop bon... ;-)
Au fait, c'est vrai qu'ils veulent faire un Alien 5 ? Pitié...
Cependant, tu es tombé dans la critique facile pour La Résurrection, en
effet, c'est le n°4 et la fin du 3 n'appelait pas vraiment une suite, en
outre, je suis d'accord l'idée de base de cloner Ripley a éveillé en moi un
"oh non..." de désespoir...et pourtant ! Tu dois savoir que Jean-Pierre
Jeunet n'est pas n'importe qui et qu'il a développé un sens assez
extraordinaire de la photographie et du mouvement avec son ex-collaborateur,
Marc Caro. Tout ça pour dire que le n°4 est loin d'être un échec
(personnellement, c mon préféré, après le n°1 évidemment). Les personnages
sont des clichés en effet, regarde les autres films de Jeunet, il n'y pas de
personnage sans teint ou sans type, il renoue un peu par là avec les films
de genre mais de manière assez subtile et il joue, il s'amuse avec tous ses
clichés : il est complice du spectateur puis crée des décalages (le savant
fou monstrueux pleure parce qu'il ne rêve pas, la malade guérit puis se
remet à éternuer, l'infirme est armé jusqu'aux dents et le clown joue avec
l'Australien). Tiens, ça me rapelle un peu Cube aussi...
Quant au scénario, il est délirant mais certainement pas téléphoné,
Jeunet recrée son univers auquel il est familier : la galerie des horreurs
et Ripley devient une de ces horreurs, un monstre pire que le monstre car
plus proche de nous et capable de communiquer ("tue-moi, tue-moi"). Et le
clonage a déjà été visité par Caro et Jeunet dans "La cité des enfants
perdus", clonage qui échoue chaque fois, le savant devient fou et élimine
ses clones...
En un mot, l'arme de Jeunet c'est l'humour noir, cet opus est le plus
original, il est effrayant parce que certaines scènes mettent mal à l'aise
mais Jeunet dépasse les bornes et nous amènent le sourire aux lèvres. Il
outrepasse la souffrance lui donne sa seule issue : l'élimination brutale,
Ripley est déshumanisée, elle est horrible, elle tue son semblable plutôt
que de vouloir le sauver, c'est horrible vraiment horrible, trop horrible et
finalment on n'y croit pas, on se détache, on sourit. Et au vu de ses
précédents films, croyez-moi c'est l'effet voulu !
Cet épisode est le plus intelligent, indispensable à la série car elle
s'accorde une vie éternelle en revenant sur ses erreurs ou sur ses propres
clichés justement et est d'un intérêt immense ! (je m'emballe...) Magnifique
!
> > Oui, t'as raté quelquechose, c'était un grand moment.
> > A la rentrée, il était en salle à Paris sans qu'on sache de quoi il
> > était question.
>
> Septembre 1979 en france ?
ça devait être ça, tout ce dont je me souviens c'est que je revenais de
vacance pour continuer mes études d'art plastique, et il y avait toutes
ces affiches qui recouvraient les stations de métro, et quand on posait
la question aux copains sur ce que c'était que ce film, personne n'était
au courant... black -out total dans les media, même la presse
spécialisée n'étaient pas informée semble-t-il (à vérifier). Je ne
crois même pas qu'il y ait eu des Bandes annonces de diffusées les mois
précédents... en tous cas, comme j'étais en vacance, je les ai pas vu...
> > Si, si tu as en tête les métaphores sexuelles mise en place
> > volontairement par Sigourney Weaver... le film devient franchement
> > drôle... et renoue magistralement AMHA avec le premier... :-))
>
> Comment sais-tu que c'est S W qui a délibérément mis cela en place ?
c'est Jeunet qui le dit dans une ITW donnée à Karen Guillorel du fanzine
Chasseur de Rêves. Faudrait que je leur demande si je peux le poster...
> Je veux bien croire que les métaphores sexuelles sont présentes dans le
> film (j'ai lu tes posts à ce sujet), mais je ne trouve pas du tout cela
> évident (je veux dire, ce n'est pas du tout ce qu'on voit en premier).
ben oui, heureusement que c'est pas évident :-))
c'est un "truc" scénaristique, comme le jeu avec la règle des 180°, les
plans subliminaux, les raccords par analogie formelle, les effets
sonores et autres...(1), c'est quelquechose qui doit rester en dessous
du seuil de conscience, sinon l'immersion dans la narration est cassée,
soit l'attention est détournée, soit t'es mort de rire d'un bout à
l'autre du film, ce qui n'est pas le but recherché... :-)))
(1) Quelques exemples "d'effets" non sexuels ;-) :
le bruit de vaisseau spatial qui rythme une accélération cardiaque dans
l'interrogatoire de Léon dans la première scène de Blade Runner. La mise
en réverbération de sa voix... et surtout l'exploitation des habitudes
du montage commercial traditionnel pour nous surprendre...
cf : http://www.lumiere.org/esthetique/decoupage-blade-runner.html
Le plan de neige TV lors de la mort de Dallas dans ALien 1, plan qui
est à peine justifié par le contexte, mais qui fonctionne quand même
pour provoquer un effet de rupture fort...
L'espèce de pasteque perforée, lors de la mort de Parker dans les
soutes...
Les jeux de rupture de l'axe des 180° lorsque l'Alien surgit du ventre
de sa victime dans le réfectoire...
Les effets de flashs dans la plupart des scènes dramatiques d'Alien, qui
ne sont pas justifiés par le contexte...
Le changement d'axe des 180° dans le combat à l'épée de HighLander 1,
lorsque l'élève domine le Maître...
Les inserts d'une image blanche dans les westerns au moment d'un coup de
poing... etc... etc...
l'histoire du cinéma est pleine de "Trucs" de réalisateurs pour
renforcer les effets et l'impact émotionnel de leur film...
Ce qui m'intéresse dans Alien, à la différence de la plupart des autres
films dans lesquels on peut trouver tout ce qu'on veut en terme de
métaphores sexuelles, c'est que dans le cas d'Alien elles sont
consciemment maitrisées par l'équipe de réalisation, en tous cas pour le
1 et le 4... et pour l'instant, à part ces deux films et quelques plans
chez Hitchcock ou Blade Runner, j'en ai pas vu beaucoup d'autres dans
lesquels les métaphores sexuelles étaient aussi consciemment maîtrisées,
et où elles étaient structurelles de la narration.
Et surtout, ce que je trouve le plus jubilatoire, c'est que pointer du
doigt des détails techniques comme les jeux de montage ou sonore ou de
lumière ça n'intéresse personne, ou presque, mais lorsque tu pointes du
doigt les analogies métaphoriques sexuelles dans Alien ou dans Blade
Runner, (qui sont loin d'être négligeables) tu es sur de déclencher une
polémique chez beaucoup de cinéphiles ou amateurs de SF pourtant
avertis... c'est surtout ça que je trouve intéressant et signifiant: la
réaction de rejet viscérale que provoque ce genre d'analyse... :-))
Je pense que c'est une défense instinctive, pour protéger inconsciemment
notre plaisir à s'immerger dans des films qu'on a aimé... je me rappelle
un de mes petits neveu qui voulait faire du cinéma, et à qui j'avais
expliqué les principes de base du découpage commercial... quelques mois
plus tard il m'avait dit qu'il était très faché que je lui explique
cela, car il ne pouvait plus voir un film sans faire attention au
découpage... :-))
> Ca reste quand même un film d'action plutot mauvais.
Je dirai pas que c'est un film d'action... je dirai plutôt que c'est
une comédie de SF métaphorique.... :-)
> Erf, je suis bon pour un revisionnage :-)
Si t'as le courage, relis mon post sur le sujet avant, dans lequel je
pointe toutes les scènes clefs... je te jure que ça change complétement
la vision du film, en l'enrichissant... enfin, c'est ce que ça m'a
fait...
A la première vision j'avais été un peu déçu... et lorsqu'à la deuxième
vision j'ai découvert la clef métaphorique, le film est carrément devenu
jubilatoire... :-))
> Au fait, c'est vrai qu'ils veulent faire un Alien 5 ? Pitié...
aucune idée... mais je pense que c'est induit par la fin du 4, et je ne
suis pas si critique, c'est une des rares séries de films qui tienne le
coup je trouve.
Yann, noobsédé... :-)
en lisant cet avis sur la saga ALIEN, je me suis retapé le premier DVD, qui
fait partie des quatre (si vous ne les avez pas, il le faudrait voyons). Les
trois autres? un chaque soir... De loin, le premier est... le premier! et il
est rudement bien fichu! ça m'a foutu les chocottes (l'espace d'un instant).
Je me suis dit, cette nuit, à la vision: "Qu'est-ce que je fous sur Terre?".
La musique de Jerry Goldsmith est grinçante et en DVD elle m'a empoigné les
tympans. Je me rends compte que nous nous faisons arnaquer par les
scientifiques (les tous premiers!), les chats qui jouent à cache-cache
(minou minou), les messages SOS camouflés, les femmes, les mises à feu de
l'auto-destruction (H moins 60 secondes), et les bestioles sulfuriques qui
n'aiment pas les repas entre collègues et préfèrent respirer le grand air!
@plux pour la suite
* Alors, comme Parker, je me disais que nous devrions un peu discuter de
notre salaire en tant que rédacteurs sur frcd! On navigue sur ce rafiot
depuis quelques temps déjà et Parker et moi aimerions avoir une petite
augmentation (ouais!)! nous sommes, avant tout, sur un engin commercial et
nous n'avons pas à repêcher les égarés et les perdus qui traînent sur frcd.
Ou alors, il faudrait nous donner une prime! c'est une saloperie cette
compagnie! (ouais!).*
--
Pino Mario Catalano (Bellaire) né le 22 août 1973.
page personnelle http://pmcdiane.multimania.com/
E-mail pmcd...@potaulait.be
collaboration E-zine cinéma http://www.cyberliege.com/
ou directement http://www.cyberliege.com/cinema/index.html
[ Snipons mes frères ]
> ben oui, heureusement que c'est pas évident :-))
> c'est un "truc" scénaristique, comme le jeu avec la règle des 180°, les
> plans subliminaux, les raccords par analogie formelle, les effets
> sonores et autres...(1), c'est quelquechose qui doit rester en dessous
> du seuil de conscience, sinon l'immersion dans la narration est cassée,
> soit l'attention est détournée, soit t'es mort de rire d'un bout à
> l'autre du film, ce qui n'est pas le but recherché... :-)))
>
> (1) Quelques exemples "d'effets" non sexuels ;-) :
[ SNIP de plein de choses intéressantes]
Je suis interessé par ces idées concernant "le jeu avec la règle des
180°, les plans subliminaux, les raccords par analogie formelle, les
effets sonores et autres". Tu connais quelques bouquins et/ou références
qui parlent de (montage, cadrage...) ?
> Ce qui m'intéresse dans Alien, à la différence de la plupart des autres
> films dans lesquels on peut trouver tout ce qu'on veut en terme de
> métaphores sexuelles, c'est que dans le cas d'Alien elles sont
> consciemment maitrisées par l'équipe de réalisation, en tous cas pour le
> 1 et le 4... et pour l'instant, à part ces deux films et quelques plans
> chez Hitchcock ou Blade Runner, j'en ai pas vu beaucoup d'autres dans
> lesquels les métaphores sexuelles étaient aussi consciemment maîtrisées,
> et où elles étaient structurelles de la narration.
Je suis aussi interessé par des références dans ce domaine des
"métaphores sexuelles", si possible des bouquins.
> Et surtout, ce que je trouve le plus jubilatoire, c'est que pointer du
> doigt des détails techniques comme les jeux de montage ou sonore ou de
> lumière ça n'intéresse personne, ou presque, mais lorsque tu pointes du
> doigt les analogies métaphoriques sexuelles dans Alien ou dans Blade
> Runner, (qui sont loin d'être négligeables) tu es sur de déclencher une
> polémique chez beaucoup de cinéphiles ou amateurs de SF pourtant
> avertis... c'est surtout ça que je trouve intéressant et signifiant: la
> réaction de rejet viscérale que provoque ce genre d'analyse... :-))
Idem
-- Kartoch
> Je suis étonné que tu t'étonnes. Je trouve pour ma part très banal. Que tu
> parles des métaphores sexuelles dans Alien, voire de l'organique, du
> trivial (le gluant, la bave, voire sperme), c'est quasi une évidence.
Oui et non... il y a des évidences bien sur et je n'en parle pas, mais
la ou je jubile, c'est que j'ai découvert il y quelques années, qu'il
existait ce second niveau de lecture des métaphores dans Alien, (pas
seulement sexuelles) qui a échappé à nombre de cinéphiles et de fans de
SF avertis, malgré l'âge du film.
Donc ce qui peut paraître des évidences pour tel ou tel corps de métier
habitué aux arcanes d'une technique, ne le sont pas toujours pour tout
le monde. Et pour une fois que je connais quelquechose que je peux
transmettre, j'en profite... c'est un des intérêt d'internet, la
circulation horizontale des connaissances... et en plus ça me permet
d'assouvir mes pulsions egotiques existentielles dans la matrice....
:-)))
> Tout
> comme dans Le Locataire de Polanski, il y a des choses similaires. Et même
> avant.
Oui... absolument... mais à priori ce jeu métaphorique n'est pas aussi
structurel et redondant de la narration dans les films de Polanski, ce
sont des "plus" archétypaux disséminés par ci par la..., au contraire
d'ALien 1 qui est d'ailleurs sans doute le seul exemple d'une adéquation
aussi précise et cohérente entre un travail formel et une évolution
dramaturgique...
>
> Il y a deux plans : le plan métaphore sexuelle à la frontière du lisible et
> l'invisible, cachée et controlée par le metteur en scène. Ne dire que cela,
> n'en rester qu'à cela, est une illusion de profondeur comme si faire
> métaphore sexuelle (aussi bien contrôlée et bien faite qu'elle soit)
> suffisait à donner une profondeur au film ou à une oeuvre.
eh eh eh... ça c'est toi qui le dit... d'abord comme dirait Roland
Wagner l'auteur de SF, "si c'est profond c'est que c'est creux"... :-)
désolé... j'ai pas pu m'empêcher... :-))
Il est clair Yannick que nous n'avons pas les mêmes valeurs... il me
parait donc vain d'essayer d'argumenter le sujet avec toi... c'est
forcément une impasse... ceci dit sans agressivité...
En gros, je pense qu'il y a opposition d'école et de culture... étant
issu d'une culture de plasticien, j'accorde beaucoup plus d'intérêt au
traitement et aux significations formelles d'une oeuvres
cinématographique qu'à son contenu explicite narratif.... littéraire....
surtout au cinéma.
Je dirai même que c'est la pour moi, que se trouve la vrai profondeur du
film... pas dans son contenu narratif explicite qui peut être transcrit
expliqué détaillé littérairement, en particulier sur un NG.
Si un film est fait d'images, ce n'est pas un hasard. Il véhicule de ce
fait un répertoire émotionnel qui n'est pas transmissible ni explicable
par des mots, et échappe donc aux analyses, ou en tous cas, ne peut pas
être hiérarchisé en terme de "profondeur" en utilisant une échelle de
valeur ou un système d'argumentation issu du "littéraire".
c'est pour ce la que tant de gens sur Frcd n'arrivent pas à argumenter
avec toi, et se contente d'expressions comme, "j'ai pris mon pied".
C'est souvent qu'ils sont ressorti de la salle, chargés d'un répertoire
émotionnel "plastique", non verbalisable... intransmissible par des
mots.
Bref... à bas le totalitarisme de l'argumentation littéraire... ;-)))
et Alien est un très bon exemple de film dont le contenu narratif
verbalisable est minimaliste, voir pauvre, mais dont le contenu formel
est exceptionnel et a marqué beaucoup d'entre nous, dont des gens très
bien... si si si... :-))
Décrypter le sytème technique des métaphores formelles utilisées par
Ridley Scott dans son film, permet, non pas de restituer, ou décrire le
répertoire émotionnel sur lequel il a joué, mais d'indiquer au
spectateur quelles zones émotionnelles inconscientes ont été activées...
après c'est à chacun de voir si ça lui parle ou pas...
> publicité est un art et elle utilise cela depuis des années.
Oui... absolument, et beaucoup de plasticiens aussi, en particulier dans
les oeuvres faisant référence à l'alchimie.
> Le second plan serait que ces métaphores dans la manière dont elles sont
> inclues dans la narration, disent précisément quelque chose dans notre
> rapport ambigu à l'autre, à notre identité. Et de cela, tu en parles peu.
Julien en a très bien parlé, sauf d'un point qui me parait important, et
c'est vrai que sur Frcd je n'ai pas posté la suite de mon analyse
d'Alien, ou je traitais du mythe de la femme guerrière dans notre
imaginaire (incarné par Sigourney Weaver), je le retrouve et je
l'envois...
Yann, formaliste, :-))
Kartoch <kartoc...@melting-pot.org> wrote:
> Je suis interessé par ces idées concernant "le jeu avec la règle des
> 180°, les plans subliminaux, les raccords par analogie formelle, les
> effets sonores et autres". Tu connais quelques bouquins et/ou références
> qui parlent de (montage, cadrage...) ?
Je te renvois à mon analyse de la première scène de blade Runner qui est
un modèle pédagogique parfait AMHA. (la scène, pas mon analyse ;-)
http://www.lumiere.org/esthetique/decoupage-blade-runner.html
Sinon, la bible pour moi qui explique très bien les règles du cinéma
commercial classique c'est :
La grammaire du langage filmé, de Daniel Arijon, aux éditions Dujarric.
C'est très technique et très pragmatique, mais c'est ce que j'ai trouvé
de plus explicite et efficace pour aborder l'analyse du découpage d'un
film traditionnel.
Bien sur, ces règles ont été explosées par la nouvelle vague, et sont
très controversées en france chez les théoriciens.
Et si on est créatif, on peut très bien découper une scène sans
respecter cette logique et que ça fonctionne. De nombreux auteurs en on
fait la preuve.
Par contre ce sont des systèmes qui sont rigoureusement respectés par le
cinéma commercial et les séries tv américaines.
Pour le reste, images subliminales, effets sonores, raccords par
analogie formelle, etc... hélas, c'est une connaissance qui me vient de
mes cours de cinéma et de cotoyer le milieu, donc je n'ai pas en tête
d'ouvrages en traitant de façon exhaustive. Mais ça doit se trouver dans
une bonne biblio du cinéma.
> Je suis aussi interessé par des références dans ce domaine des
> "métaphores sexuelles", si possible des bouquins.
J'avais reçu ce message suite à ma première intervention sur le sujet
dans Frcd. (Merci Olivier)
> Mais oui, et pour relier tous les films US contenant du subtext lesbien
> plus ou moins aisément décryptable, il faut relire un papier rédigé il y a
> déja quelques mois par Marie-Hélène Bourcier, et repris dans son bouquin
> "Queer Zones"
Sinon, c'est pareil, c'est une connaissance que je tiens de mes propres
analyses, de mes cours de sémiologie appliquée à la pub, des arts déco
et des métiers d'art, et tout bêtement aussi de mes cours d'histoire de
l'art, donc pas d'ouvrage non plus à te conseiller... sinon d'être
attentifs à l'ensemble des publications et articles qui traitent du
sujet.
Tu sais dans les grandes écoles d'art plastique de mon temps on ne
fonctionnait pas beaucoup comme en fac sur le même système que les
thèses où il faut élaborer des bibliographies énormes... on attend
plutôt de nous de la "pratique" que de la théorie, laquelle théorie nous
était directement transmise par les profs...
Donc désolé de ne pas pouvoir répondre à ta requête plus précisément...
(sinon à t'inscrire dans une grande école de cinéma ou d'art ;-))
Par contre d'une façon plus générale,
J'ai essayé de me taper les grands théoriciens comme Deleuze et
Saussure, mais j'ai trouvé ça relativement insipide, mais si ça peut
t'aider, les bouquins faciles à lire qui m'ont le plus aider à me forger
ma comprehension de l'art ce sont :
Pour comprendre les media, de Marshall Mc Luhan
L'utopie de la communication, par Philippe Breton
et Vie et Mort de l'image de Régis Debray.
Yann, praticien... ;-)
> Bref, chez Polanski, c'est très concret et non
> simplement du formalisme.
Eh eh eh... passque le formalisme c'est pas du concret... tu vois, nous
n'avons pas les mêmes valeurs... enfin presque... :-)
> En fait, c'est profond mais tu ne peux pas l'expliquer. C'est fou, ça.
Tu vois... on ne se comprends pas... :-))
> Et tout d'abord, c'est tout simplement faux car il y a d'innombrables
> livres sur la peinture et qui savent parler de cela. Je te conseille de
> lire Méduse de Jean Clair qui sait mettre les mots sur ce genre de choses
> et montrer en quoi telle ou telle oeuvre dans ce style de registre
> "morbide" et "plastique" apporte quelque chose et pourquoi elle nous
> perturbe profondément. Renvoyer cela à un inexplicable me semble très
> facile, surtout pour dire que ça fait métaphore sexuelle. Et là, c'est
> notre propre rapport à la peur, donc à l'identité et à autrui qui me semble
> le plus important.
Bof... mauvais exemples, qui illustrent justement très bien mon
propos...
Tu sais j'ai passé beaucoup de temps dans les cours d'histoire de l'art
à entendre glauser sur telle ou telle oeuvre... on m'a même appris à
baratiner sur les peintures et effectivement il arrive parfois qu'une
oeuvre d'art plastique génère des travaux d'écriture passionnants...
Ce que je retiens de nombre de ces baratins de critiques d'art, c'est
que ce sont, à quelques exceptions près, et à part ceux qui ne cherchent
pas à transmettre leurs émotions perso, une espèce de besoin de
verbaliser vainement un ressenti émotionnel propre à soi et à la
relation que Machin ou truc entretien avec l'oeuvre plastique...
Précisément si c'est une oeuvre plastique, c'est qu'elle véhicule
souvent un répertoire émotionnel spécifique qui ne peut pas être
transmis par les mots... et tu peux baratiner tant que tu veux, tu ne
fait que transmettre mal une interprétation personnelle de ta relation
avec cette oeuvre...
par contre, que cela puisse générer une prose passionnante chez un
maître de l'écriture, c'est certain, et que certains auteurs puissent
réussir à transmettre à certains via l'écriture une part verbalisable de
leur émotion par rapport à une oeuvre je n'en doute pas... mais j'en
apprends souvent plus sur eux-mêmes que sur la relation que moi, je vais
entretenir avec l'oeuvre.
Et puis je m'insurge contre ce totalitarisme des intellectuels
littéraires, qui sous prétexte qu'ils ont élaboré une construction
verbale cohérente en terme de transmission verbalisable, veulent
t'imposer leur point de vue à force d'arguments, comme si une oeuvre
d'art plastique, ou cinématographique était univoque dans la perception
qu'on peut en avoir... d'ailleurs les auteurs eux-mêmes souvent ne
savent pas ce qu'ils ont mis dans leurs oeuvres... :-))
> >> publicité est un art et elle utilise cela depuis des années.
> >Oui... absolument, et beaucoup de plasticiens aussi, en particulier dans
> >les oeuvres faisant référence à l'alchimie.
>
> Le problème est que la publicité n'est pas un art.
Passeque tu connais la définition de l'art toi... vas-y... moi j'ai la
mienne, et je ne demande qu'à en changer pour une plus pertinente...
mais nous en avons déja parlé... :-)
Sinon, je fais comme toi
> : "C'est pas possible à expliquer."
Ben oui... bien sur, il y a certaines choses qu'on peut transmettre par
les mots, mais d'autres pas... d'ailleurs toute ton explication qui suit
en est la parfaite démonstration...
Qu'est ce que je lis :
Un réflexions sur la peur dans les films d'épouvante par Yannick
Rolandeau très généraliste sur la notion "d'étranger" et d'angoisse par
rapport à la consistance du réel, qui me parait par contre relativement
étrangère et décalée, pour ne pas dire complètement à côté de la plaque
par rapport à la spécificité des émotions suscitée par la vision
d'Alien1, et en tous cas par rapport à ce que j'ai ressenti en voyant le
film.
D'ailleur je remarque que tu as gommé toute la dimension sexuelle de
l'étrangeté du fameux Alien, qui, pourtant, est un élément essentiel. À
la fois dans les films d'horreurs, que dans Alien, ou il prend une
dimension (si j'ose dire) exceptionnelle... :-)))
Beaucoup de mots Yannick... énorméments de mots même, pour me
transmettre somme toute que peu de choses que je ne savais pas sur
certains ressorts émotionnels du cinéma d'épouvante, mais très peu de
chose sur la spécifité d'Alien 1 qui était pourtant un film relativement
hors du commun dans la sphère des films d'horreur et de SF de l'époque.
Excellente démonstration des limites de l'écriture lorsqu'il s'agit de
retransmettre une partie du répertoire émotionnel suscité par un film
précis AMHA :-))
Dommage remarque, j'aurai voulu que tu m'apprennes des choses sur le
film, ou que tu m'en fasse découvrir des facettes que je ne connaissais
pas... ou n'avais pas remarqué, ou une autre façon de l'apprécier...
comme tu as su le faire pour Polanski, même si je ne suis pas convaincu,
mais j'ai compris ton point de vue...
Mais la raté, tu me parles de ta vision de la peur dans les films
d'épouvante. Intéressant, mais pas convaincant Yannick... ni me semble
t'il très pertinent par rapport au contexte... mais peut-être suis-je
un peu obtus... :-)
Moi par contre j'ai mis en exergue certaines petites spécificités du
film, qui lui sont propre, et qui peuvent contribuer à expliquer son
efficacité et son impact sur notre imaginaire. Mais ces spécificités tu
les balaye d'un revers du poignet méprisant, comme des évidences sans
intérêt... ok... match nul ? :-))
Yann, qui malgré tout va lui aussi préparer son baratin subjectif
perso... y a pas de raison que y'ait que toi qui joue...
>>En gros, je pense qu'il y a opposition d'école et de culture... étant
>>issu d'une culture de plasticien, j'accorde beaucoup plus d'intérêt au
>>traitement et aux significations formelles d'une oeuvres
>>cinématographique qu'à son contenu explicite narratif.... littéraire....
>>surtout au cinéma.
>>Je dirai même que c'est la pour moi, que se trouve la vrai profondeur du
>>film... pas dans son contenu narratif explicite qui peut être transcrit
>>expliqué détaillé littérairement, en particulier sur un NG.
>
> En fait, c'est profond mais tu ne peux pas l'expliquer. C'est fou, ça.
Oui, il est sans doute excessif d'opposer l'esthétique, ou la recherche
plastique, à la littérature. Les écrits de Kandinsky ou Klee, pour ne
citer qu'eux, sont là pour prouver que cette recherche peut très bien
s'écrire, les peintures elles-mêmes servant d'illustration plus ou moins
imparfaite (on tend vers un effet, vers une suggestion) des principes
écrits.
Cependant, cette littérature « plasticienne » ne traite pas des mêmes
thèmes (rôle de la couleur, de la forme, de la ligne) que la philosophie
qui repose sur des écrits « classiques » non liés à la représentation
graphique (je pense à la métaphysique « traditionnelle », par opposition
par exemple au suprématisme), thèmes que l'on retrouve sur frcd lorsque
l'on parle du fond des films.
Je crois que c'était pour cela que Yann Minh opposait l'esthétique au
contenu « littéraire ».
Mais ce qui me semble intéressant, c'est quand il affirme l'opposition
de votre « culture », de vos échelles de valeur plutôt. Car il soutient la
valeur esthétique comme autosuffisante, l'art pour l'art en somme, alors
que pour toi (arrête-moi si je me trompe) c'est véritablement le sens qui
fait la valeur de l'oeuvre (la forme ne suffit pas), ce sens qui rejoint
les écrits « classiques » (la forme fait sens d'une certaine manière, bien
sûr, mais j'espère m'être fait comprendre, je parle du sens métaphysique,
par exemple).
Et si cette approche controversée de l'art pour l'art continue de
diviser, c'est que chaque partie a des arguments. Cela a déjà été traité
ici, mais si quelqu'un avait une référence synthétisant le pour et le
contre de ce débat ça m'intéresse beaucoup, merci.
--
Jihem
> Oui, il est sans doute excessif d'opposer l'esthétique, ou la recherche
> plastique, à la littérature. Les écrits de Kandinsky ou Klee, pour ne
> citer qu'eux, sont là pour prouver que cette recherche peut très bien
> s'écrire, les peintures elles-mêmes servant d'illustration plus ou moins
> imparfaite (on tend vers un effet, vers une suggestion) des principes
> écrits.
Merci Jean-Michel, car tu apportes de l'eau à mon moulin... :-))
Kandinsky et Klee s'inscrivent justement dans cette période de
l'histoire de l'art qui fera la gloire du conceptuel, où l'écriture et
la verbalisation jouent un rôle essentiel dans la compréhension et
l'appréciation de l'oeuvre.
Nombre d'oeuvres d'art moderne minimalistes en terme de traitement
plastique, prennent toute leur ampleur, et leurs qualités lorsqu'elles
sont associées à un discours... une verbalisation...
Et d'ailleurs c'est particulièrement jubilatoire et agréable pour
l'esprit, lorsqu'on est un esthète éclairé, ou qu'on a eu la chance
d'avoir des cours d'histoire de l'art d'apprécier une oeuvre lorsqu'on a
eu accès à l'information conceptuelle "verbalisée" qui a présidé à sa
naissance et lui donne toute sa force.
Pour moi le plus bel exemple est l'hommage à Klein de Tinguely au Cyclop
à Milly la Forêt. Au départ on contemple juste une dalle remplie d'eau
qui reflète le ciel, au sommet du Cyclop à 53 m de haut. C'est sympa,
mais bof... peu d'émotion... et on peut même se dire... facile...
Mais lorsqu'on m'a expliqué verbalement devant l'oeuvre, que c'était un
hommage de Tinguely à Klein, qui rêvait d'un art sans support matériel,
et que j'ai regardé le bleu du ciel se refléter dans cette étendue
liquide rectangulaire, il s'est produit une mise en abîme conceptuelle
qui m'a donné à ce moment le vertige. Et surtout, est apparu dans ma
psychée une parcelle de ce repertoire émotionel inexprimable, un
indicible que les esthètes connaissent bien, lorsqu'ils sont confronté à
une oeuvre d'art plastique qui les touche.
Alors tu vas me dire que c'est bien la démonstration qu'on peut
transmettre par des mots une émotion plastique...
Oui, précisément dans le cas des oeuvres conceptuelles justement, car
beaucoup parmis les plus célèbres sont issu d'une élaboration mentale
verbalisable... je dirai même que c'est un principe du conceptuel... et
d'ailleurs Klein qui rêvait d'un art sans support, utilisait celui de la
parole pour transmettre son concept dans sa performance la plus célèbre.
Ce genre de jeux conceptuels ou la verbalisation est essentielle est
d'ailleurs tellement jouisif, que les critiques d'art "littéraires" en
ont fait leurs choux gras, et ont fini par imposé le conceptuel comme
art Majeur... enfin des oeuvres d'art dont on pouvait transcrire par
écrit le contenu émotionnel... :-))) raaaah!
Mais c'est oublier tout le répertoire d'oeuvres plastiques figuratives
ou réalistes, dont les sujets étaient totalement anecdotiques, mais qui
pouvaient susciter chez certains le même type d'émotion indicible, et
d'amour, non verbalisable, et non transmissible...
Deux exemples :
Lors de l'exposition Paris Bruxelle au grand palais sur les
impressionistes et les symbolistes belges, j'ai été complétement
subjugué par deux peintures, qui paraissent totalement anecdotiques si
tu en vois des reproductions.
La mangeuse d'huitres de James Ensor, et le vieux jardinier d'Émile
Claus...
Sujet, néant... une femme qui mange des huitres à une table, un
Jardinier portant un pot de fleur dans l'entrée d'une maison...
Je peux te décrire laborieusement les jeux de couleurs, la composition,
te resituer l'oeuvre dans son contexte socio culturel, te raconter la
vie de leurs auteurs... mais rien, aucun mot, aucune prose ne pourra te
transmettre l'émotion indiscible (justement) que j'ai ressentie face à
ces originaux qu'aucune technologie ne peut encore reproduire... c'est
le pouvoir et la spécifité de certaines oeuvres plastiques...
transmettre un répertoire émotionnel que l'écriture ne peut pas
transmettre, sinon à quoi bon peindre, pourquoi pas se contenter
d'écrire... :-)) et en plus, moi j'étais subjugué, ma copine était
indifférente... pourquoi ? Culture, sensibilité... etc... le nombre de
variables est infini et on ne peut pas encore en faire le re-ingéniering
cognitif... :-)
Et pour le cinéma c'est pareil...
évidement, comme c'est un système de transmission de l'information
relativement riche et complexe, c'est mieux quand une oeuvre
cinématographique est à la fois un enchantement pour les yeux, l'ouïe,
le cerveau gauche et le cerveau droit ... mais rares sont les oeuvres
qui sont tout cela à la fois... et il existe des oeuvres
cinématographiques dont les qualités sont essentiellement plastiques,
parfois outrageusement comme Prospero Book de Greenaway, par exemple,
mais aussi commme 2001, ou Alien 1, ou Blade Runner, ou Final fantasy,
ou Ghost in The Shell, ou Avalon...
On connait ce répertoire cinématographique, et ce n'est pas parce qu'on
ne peut pas argumenter verbalement, ou même qu'une analyse des
structures narratives de l'oeuvres démontre la vacuité du scénario,
sinon même sa dimension éthiquement incorrecte, que ces oeuvres ne sont
pas chargées d'une émotion plastique spécifique, et je dirai même
parfois, plus pertinente et plus puissante émotionellement que n'importe
quel scénario complexe...
c'est pour cela que je m'insurge un peu contre les excès de ce
totalitarisme de l'argumentation de Frcd, qui bien qu'intéressant, et
qui enrichie la qualité des débats, à tendance, pour un art ou l'image,
(et le son) jouent un rôle essentiel, à reproduire ici la dérive que le
conceptuel à provoqué dans la sphère des arts plastiques, c'est à dire
ne donner de crédit qu'aux oeuvres dont l'appréciation est
verbalisable... et littérairement transmissible...
> Cependant, cette littérature « plasticienne » ne traite pas des mêmes
> thèmes (rôle de la couleur, de la forme, de la ligne) que la philosophie
> qui repose sur des écrits « classiques » non liés à la représentation
> graphique (je pense à la métaphysique « traditionnelle », par opposition
> par exemple au suprématisme), thèmes que l'on retrouve sur frcd lorsque
> l'on parle du fond des films.
Oups... la faut me traduire passeque je comprends rien... :-))
> Je crois que c'était pour cela que Yann Minh opposait l'esthétique au
> contenu « littéraire ».
Ben... peut-être... :-)
Yann, esthète malgré lui...
Bon, j'ai évacué cet argument un peu vite, et tu as raison...
C'est sur qu'il y a effectivement dans le locataire des jeux et une
inventivité formelle excellente, et qui semble effectivement
structurelle de la narration, ce qui en fait d'ailleurs une des très
grande qualité... c'est un film que j'aime beaucoup, et j'avais pas vu
cette histoire d'ambiguité sexuelle, faut que je le revois...
Par contre je ne vois pas pourquoi ça te parait plus "concret" que dans
Alien... c'est exactement la même démarche... il me semble...
Yann, polémiqueur...
> Un réflexions sur la peur dans les films d'épouvante par Yannick
> Rolandeau très généraliste sur la notion "d'étranger" et d'angoisse par
> rapport à la consistance du réel,
Oups! houla... je me relis la, et il me semble que j'ai été un peu
véhément...et agressif... milles excuses... j'ai posté trop vite sans me
relire...
Bien sur ton analyse était intéressante et pertinente, d'ailleurs je
l'ai lu attentivement...
Mais je me suis bêtement énervé.
C'est du au fait que parfois ton style peut paraître relativement
dogmatique, et je me suis fait avoir...
promis je recommencerai plus...
Yann contrit.
> Et d'ailleurs c'est particulièrement jubilatoire et agréable pour
> l'esprit, lorsqu'on est un esthète éclairé, ou qu'on a eu la chance
> d'avoir des cours d'histoire de l'art d'apprécier une oeuvre lorsqu'on a
> eu accès à l'information conceptuelle "verbalisée" qui a présidé à sa
> naissance et lui donne toute sa force.
Tout à fait, et n'ayant eu aucune de ces chances je remercie Anna
Moszynska d'avoir écrit « L'Art abstrait » (diffusé au Seuil), que je
recommande vivement.
> Mais c'est oublier tout le répertoire d'oeuvres plastiques figuratives
> ou réalistes, dont les sujets étaient totalement anecdotiques, mais qui
> pouvaient susciter chez certains le même type d'émotion indicible, et
> d'amour, non verbalisable, et non transmissible...
Certes, l'appréciation esthétique est affaire de sensibilité, et une
oeuvre n'a pas besoin d'être théorisée pour toucher cette sensibilité.
Pourtant, les recherches justement de peintres comme Kandinsky semblent
montrer qu'il y a une part d'universalité dans cette sensibilité, dans le
sentiment suscité par l'opposition des couleurs, des formes, ou encore par
le placement des objets.
Mais à ce sujet, je me demandais si cette sensibilité « universelle »
n'était pas affaire de formatage. Je m'explique. Dans l'ouvrage sus-cité,
on nous présente une oeuvre de Balla (Compénétration iridescente n°13)
censée susciter une impression de mouvement. Dans un premier temps, je n'y
étais pas sensible et ne ressentais rien à la vision de cette oeuvre. Mais
plus tard, après avoir assimilé les oppositions jaune-bleu et rouge-vert
instaurées par Kandinsky d'après Goethe, et m'être persuadé à force de
contemplation que ces couples de couleurs produisaient une tension
dynamique, on peut effectivement ressentir une impression de mouvement
devant l'oeuvre de Balla. Mais cela reflète-t-il une sensibilité
universelle ou le rattachement à un référentiel commun mais arbitraire
(autrement dit, pourrait-on se convaincre que les couples sont plutôt
jaune-rouge, bleu-vert), difficile à dire...
> ce n'est pas parce qu'on ne peut pas argumenter verbalement, ou même
> qu'une analyse des structures narratives de l'oeuvres démontre la
> vacuité du scénario, sinon même sa dimension éthiquement incorrecte, que
> ces oeuvres ne sont pas chargées d'une émotion plastique spécifique, et
> je dirai même parfois, plus pertinente et plus puissante émotionellement
> que n'importe quel scénario complexe...
Oui, le cinéma peut apporter des émotions. Mais le problème c'est quand
la réalisation utilise ces émotions pour éblouir le spectateur et lui
faire passer un message qu'il assimile plus ou moins consciemment. Ainsi,
le devoir de vigilance impose de ne pas se focaliser que sur la forme et
de toujours s'attacher à décortiquer le fond. Sinon c'est justement la
porte ouverte à la propagande et à toutes les manipulations.
En revanche, je ne me souviens pas avoir vu les défenseurs du sens
refuser d'apprécier la forme d'une oeuvre lorsque le fond était valable.
Et finalement le fond est rarement neutre, et la valeur du film est donc
indissociable de la valeur du fond.
Par ailleurs, tu défends le droit à fonder la valeur d'un film sur une
esthétique non verbalisable et relevant d'une sensibilité personnelle :
simplement dire « J'ai trouvé ça beau. ». Pourquoi pas, chacun a le droit
d'apprécier l'oeuvre ainsi, mais frcd est avant tout un forum de
discussion, et une sensibilité personnelle et non verbalisable est
difficilement discutable.
>> Cependant, cette littérature « plasticienne » ne traite pas des mêmes
>> thèmes (rôle de la couleur, de la forme, de la ligne) que la
>> philosophie qui repose sur des écrits « classiques » non liés à la
>> représentation graphique (je pense à la métaphysique « traditionnelle
>> », par opposition par exemple au suprématisme), thèmes que l'on
>> retrouve sur frcd lorsque l'on parle du fond des films.
>
> Oups... la faut me traduire passeque je comprends rien... :-))
Je distinguais trois types de « littérature » : celle qui traite de
recherches plastiques sur la forme seulement (Kandinsky), celle qui traite
de recherches philosophiques intimement liées à la représentation
graphique (Ouspenski, théoricien du suprématisme illustré par Malévitch),
et celle qui traite de métaphysique indépendamment d'une quelconque
représentation graphique (Platon).
Ainsi, s'il est abusif d'opposer la recherche plastique et la
littérature, on peut effectivement opposer la littérature plastique d'un
Kandinsky, qui va parler de la sensibilité de l'homme à la couleur, à la
littérature philosophique « classique » d'un Platon, qui va parler de
la nature du réel. On peut les opposer en ce sens qu'ils ne parlent pas
des mêmes sujets, l'une traitant en substance de la forme et l'autre du
fond. Cela explique peut-être le dialogue de sourds qui oppose souvent
ceux qui ne veulent voir que la forme à eux qui défendent le fond, car
même si le fond et la forme sont liés, en extrayant la substantifique
moëlle de chacun on finit par aboutir à deux discours disjoints (l'un
n'étant donc pas « supérieur » à l'autre).
--
Jihem
> Salut mon frère :-> Je te renvois à mon analyse de la première scène de blade Runner qui est
> un modèle pédagogique parfait AMHA. (la scène, pas mon analyse ;-
Très intéressant.
> Sinon, la bible pour moi qui explique très bien les règles du cinéma
> commercial classique c'est :
> La grammaire du langage filmé, de Daniel Arijon, aux éditions Dujarric.
> C'est très technique et très pragmatique, mais c'est ce que j'ai trouvé
> de plus explicite et efficace pour aborder l'analyse du découpage d'un
> film traditionnel.
> Bien sur, ces règles ont été explosées par la nouvelle vague, et sont
> très controversées en france chez les théoriciens.
Je crois que la connaissance de ces règles est nécessaire pour
comprendre les oeuvres qui jouent avec. J'aimerais particulierement
partir de cette base pour analyser l'oeuvre de Kitano.
> Pour le reste, images subliminales, effets sonores, raccords par
> analogie formelle, etc... hélas, c'est une connaissance qui me vient de
> mes cours de cinéma et de cotoyer le milieu, donc je n'ai pas en tête
> d'ouvrages en traitant de façon exhaustive. Mais ça doit se trouver dans
> une bonne biblio du cinéma.
APPEL: si quelqu'un connaît d'autres références.....
>>Je suis aussi interessé par des références dans ce domaine des
>>"métaphores sexuelles", si possible des bouquins.
> J'avais reçu ce message suite à ma première intervention sur le sujet
> dans Frcd. (Merci Olivier
[ SNIP ]
> J'ai essayé de me taper les grands théoriciens comme Deleuze et
> Saussure, mais j'ai trouvé ça relativement insipide, mais si ça peut
> t'aider, les bouquins faciles à lire qui m'ont le plus aider à me forger
> ma comprehension de l'art ce sont :
>
> Pour comprendre les media, de Marshall Mc Luhan
> L'utopie de la communication, par Philippe Breton
> et Vie et Mort de l'image de Régis Debray.
Je note...
Merci
-- Kartoch
J'ai une objection à faire à Rosset : il accepte une joie sans objet de
joie, une joie pure et nue, il en fait même la « force majeure », ce qui
oriente l'acceptation de ce qui est vers une approbation "joyeuse" de ce qui
est. Ce sa façon de distinguer et d'opposer le pessimisme (à la Schopi) de
la "vrai philosophie tragique" qu'il défend. Or il refuse le même statut à
la peur, qui est selon lui toujours liée à un objet redoutable. Si je veux
bien le suivre et penser (contre Platon) qu'il existe une joie (ou un amour)
qui ne soit pas joie (ou amour) de quelque chose, c'est parce qu'il me
semble avoir ressenti cette joie pure et nue. Mais j'ai aussi l'impression
d'avoir ressenti la peur pure et nue, sans objet. Bref, il me semble que
l'angoisse peut se passer d'un objet de l'angoisse, même d'ordre
fanstasmatique. Dans cet extrait, pour moi, Rosset tire la couverture de la
peur à lui, et c'est un peu gros comme procédé. Enfon bon...
--
« Tout les ans on découvre de nouvelles étoiles, c'est pas pour ça qu'il y
en a plus. »
(B. d. c.)
Oui, sinon le peintre écrirait plutôt que de peindre. Le cas limite
étant pour moi les natures mortes, j'en ai déjà parlé mais personne ne m'a
répondu. Quelle peut bien être la portée « littéraire » (dicible, exprimable
en mots) d'un plateau de fruits ?
> [...]
> Et puis je m'insurge contre ce totalitarisme des intellectuels
> littéraires, qui sous prétexte qu'ils ont élaboré une construction
> verbale cohérente en terme de transmission verbalisable, veulent
> t'imposer leur point de vue à force d'arguments, comme si une oeuvre
> d'art plastique, ou cinématographique était univoque dans la perception
> qu'on peut en avoir...
Pour donner une arme à ton contradicteur : que fais-tu des émissions
très intéressantes d'Arte qui dissèquent les tableaux ? (je me souviens plus
du nom, mais c'est très connu.)
> d'ailleurs les auteurs eux-mêmes souvent ne
> savent pas ce qu'ils ont mis dans leurs oeuvres... :-))
J'ai lu que c'est le cas de Cervantes dont le Quichotte dépasse(rait)
très largement les intentions.
--
« Trouduc, surveille ton truc. »
(Oxmo Puccino, rappeur)
Il me semble qu'un exemple montre bien que la sensibilité n'est pas
universelle, où au moins pas dans les cas de l'art le plus déconnecté de la
réalité : En musique, un accord majeur est considéré comme "gai" en Occident
et "triste" en Orient, et inversement. Enfin, c'est ce que j'ai ouï dire.
> [...]
> Par ailleurs, tu défends le droit à fonder la valeur d'un film sur une
> esthétique non verbalisable et relevant d'une sensibilité personnelle :
> simplement dire « J'ai trouvé ça beau. ». Pourquoi pas, chacun a le droit
> d'apprécier l'oeuvre ainsi, mais frcd est avant tout un forum de
> discussion, et une sensibilité personnelle et non verbalisable est
> difficilement discutable.
Elle peut s'échanger selon moi quand un « lieu commun » est institué
entre les discuteurs. Si je connais bien les goûts d'Untel, il peut me
transmettre une partie du non-verbalisable qu'il a ressenti en voyant tel
film par des moyens littéraires tels que l'allusion, le référence ou la
métaphore. Bref, c'est difficile mais pas infaisable.
--
« Tête baissée vers le macadam, ton regard fixé vague à l'âme. »
(Oxmo Puccino, rappeur)
> Etonnant quand le personnage homme se tranforme en femme !
> Regarde la scène où il parle à moitié ivre et où il dit (c'est tiré du
> livre du génial Topor mais le film y ressemble beaucoup) :
À ma décharge, je l'ai vu à sa sortie, donc très peu de souvenir...
> C'est la forme au détriment du fond comme on dit. Ou un fond sans fond dont
> on ne garde que la surface comme de dire que ça fait métaphore sexuelle.
> Bon ouais et alors ?
Alors rien... c'est tout :-) moi j'aime bien les métaphores... :-))
> Comme des milliers d'études strictement cérébrales qui
> ne parlent que "ça fait mise en abîme".
> Je regrette mais c'est cela que
> l'on trouve dans x revues ou livres universitaires et intellectuels à notre
> époque.
> Il n'y a rien que de plus convenu suite aux Cahiers du cinéma et de
> son époque. Et précisément, cela n'a aucune chair et là pour le coup, c'est
> purement cérébral.
Euh... autant pour toi et tes articles... :-))
Mais revenons au sujet d'origine...
Je me contente de pointer du doigt des trucs très techniques et ultra
précis dans ALien1 au niveau du traitement formel de la mise en scène...
Il se trouve que ce que je raconte a intéressé certains... c'est tout...
maintenant que toi ça ne t'intéresse pas ok... pas de problème.
Pour ce qui est du fond (la profondeur ? :-), je dis qu'il y en a un
dans Alien, mais que justement il est surtout véhiculé par le traitement
formel.
> Tu confonds pour ma part analyse et cérébralité, je veux dire uniquement
> cérébrale.
Ah bon ? je fais ça moi ?
> >Précisément si c'est une oeuvre plastique, c'est qu'elle véhicule
> >souvent un répertoire émotionnel spécifique qui ne peut pas être
> >transmis par les mots... et tu peux baratiner tant que tu veux, tu ne
> >fait que transmettre mal une interprétation personnelle de ta relation
> >avec cette oeuvre...
>
> D'ailleurs, c'est encore inexact. Dans le cinéma, il y a bien autre chose
> que des images, mais du son, de la musique, et du texte.
Merci... je ne m'en étais pas rendu compte... :-)
Bon, en tous cas cette remarque montre à quel point tu ne veux pas
comprendre ce que je raconte... c'est un dialogue de sourd... :-)
> Un film sans
> dialogue d'ailleurs, avec que des images, est quasiment impossible, sinon
> rare alors qu'un film est rempli de dialogue, de texte, de verbalisation
> comme tu dis. Alors, on dit le cinéma, c'est de l'image. Je permets quand
> même de rire. Un tableau oui mais il y a un titre (parfois postérieur).
Evidemment...
> C'est marrant, cette dichotomie ici entre émotion et réflexion ou sens.
Non, il n'ya pas de dichotomie, simplement je doit mal m'exprimer, ou je
parle de quelquechose que tu ne connais pas... :-))
> Pour ma part, je ne sépare pas et l'un ne va pas sans l'autre.
Bien sur que non...
> Trop de
> verbiage est chiant et que de l'émotion, c'est de la chiasse affective.
On ne parle pas de la même chose...
> Pour moi, l'un éclaire l'autre et réciproquement. Bref, une sorte de
> fusion. A la limite, la spécificité de l'homme est de penser, de formuler
> verbalement ses émotions et encore à la limite peu importe qu'elles soient
> esthétiques ou non.
Non... tu exprime exactement ce que je critique... cette volonté de
faire de la verbalisation La Spécificité de l'homme...
La spécifité de l'homme n'est pas de "formuler verbalement", la
spécificité de l'homme c'est sa capacité à traiter de l'information
complexe, qu'elle soit visuelle, sonore, orale, littéraire, musicale
etc...
l'oralité, comme l'écriture ne sont pas les seuls moyens de transmettre
de l'information et de la traiter... et ce n'est pas parce que
l'écriture et l'oralité sont les principaux vecteurs de transmission de
l'information dans les société humaines, que l'impact informationnel sur
notre psychée des autres systèmes de traitement de l'information est
négligeable... loin de la... en particulier en cinéma, ou l'image, (et
le son) et leurs compositions jouent un rôle déterminant... mais tu le
sais bien...
Pourquoi te refuses tu à admettre que pour certains films la dimension
formelle peut être plus importante et véhiculer beaucoup plus
d'informations que la structure scénaristique littéraire... (scénario et
dialogues)
> De plus, même une émotion esthétique ou une émotion
> humaine est déjà en grande partie du verbiage intellectuelle car elle est
> pris dans le réseau de la socialité sauf à être un chien.
Non... mais c'est ça notre différence culturelle... tu refuses
d'admettre que la façon dont notre système cognitif traite l'information
n'est pas forcément à prépondérance verbale, ou en tous cas qu'il existe
tout un répertoire informationnel dans notre cerveau qui échappe à la
verbalisation....et la métaphore y joue un rôle très important, c'est
pour cela que pointer du doigt les métaphores dans un film, qu'elles
soit sexuelles ou non me parait interessant. (d'ailleurs j'ai indiqué
d'autres métaphores que les métaphores sexuelles dans Alien1)
Pour être réducteur... apparament, la où tu verbalises, moi je
fonctionne par images... d'ailleurs faut que je m'y remette... :-)
> Et les plus grands émotifs sont les plus grands cérébraux contrairement à
> ce qu'on essaye de faire croire. C'est même très facile à comprendre.
euh... peut-être... mais dans notre cerveau il n'y a pas que des mots...
et je te dis pas comme ils sont émotifs les peintres... :-)
> Or, tu remarqueras que l'homme quand il a une émotion ne peut pas
> s'empêcher de les verbaliser.
Pas seulement ... en particulier vis à vis de l'émotion esthétique, chez
certains, dont je fait partie, l'émotion peut se transformer en besoin
de la transmettre sous une autre forme que la verbalisation : le dessin,
la peinture... pour certains la musique, d'autres la mise en scène...
par l'amour, la tendresse, la gestuelle... :-)
> C'est non seulement humain mais fondamental.
Communiquer est fondamental chez l'humain, mais ça ne passe pas
forcément par l'écriture et la verbalisation...
> Car cela permet non seulement la transmission de l'expérience et sa
> compréhension mais la connaissance même de l'expérience.
Oui mais la verbalisation a ses limittes et c'est pour cela qu'il existe
d'autres vecteurs de transmission...complémentaires... et le cinéma est
un des plus récent avec une forte spécifité immersive, le prochain à
venir est la réalité virtuelle...
> Il y a là un
> rapport au savoir et à la mémoire pour comprendre la substance même des
> actes humains.
La mémoire et le savoir ne passent pas que par les mots...
> Car sans cela, pas de société.
Absolument...
> De plus, que le langage ne
> permette pas de retraduire exactement une "émotion", c'est assez étrange
> car ce serait à l'inverse demander à une émotion de retraduire l'intellect
> !?
J'utilise le mot émotion, faute de mieux pour désigner le répertoire
informationnel présent dans notre esprit qui n'est pas verbalisable...
je pourrais dire concept, meme, plasme, seme, intuition, révélation,
image... etc...
> C'est demander à l'un de faire une chose que l'autre fait et de mélanger
> les spécificités. Et je crois même que c'est tellement imbriqué qu'il est
> impossible de faire la part des choses, objectif vain car chez l'homme la
> pensée et l'émotion ne font qu'un et c'est justement sa spécificité.
Tu mélange allègrement pensée, émotion, verbalisation...
>
> >Et puis je m'insurge contre ce totalitarisme des intellectuels
> >littéraires, qui sous prétexte qu'ils ont élaboré une construction
> >verbale cohérente en terme de transmission verbalisable, veulent
> >t'imposer leur point de vue à force d'arguments, comme si une oeuvre
> >d'art plastique, ou cinématographique était univoque dans la perception
> >qu'on peut en avoir... d'ailleurs les auteurs eux-mêmes souvent ne
> >savent pas ce qu'ils ont mis dans leurs oeuvres... :-))
>
> Le smiley, c'est pour la provocation. D'abord, on se demande bien ce qu'ils
> t'imposent (non derrière toi il n'y a pas de pistolet sur ta tempe)
Non, il y a des "pouvoirs"...
> car là,
> pour aller dans ton sens, tu imposerais le contraire.
Oui... :-)
> Or, ce n'est qu'un
> débat.
Mmmm... une affirmation existentielle plutôt... :-)
> Là, tu dramatises en employant un effet dramatique (totalitarisme et
> à force d'utiliser les mots n'importe comment, ils en perdent leur sens).
Non... tu as très bien compris ce que je voulais dire...
Le mot totalitarisme exprime très bien ce à quoi il fait référence.
C'est très 1984 ça... on redéfinie un mot, ou on lui change sa
signification pour dissimuler ce qu'il désigne dans la réalité.
depuis qu'on ne peut plus utiliser ce mot ailleurs que dans la
définition politique historique d'Hannah Arendt il n'y a plus de
totalitarismes à l'oeuvre dans notre merveilleuse société... :-))
> Et puis totalitarisme intellectuel, tu me fais rire car que fais-tu pour
> aller dans ton sens sinon que verbaliser tes métaphores sexuelles et de les
> répéter de mois en mois et messages en messages ?
Et non... raté ... relis moi, mon ton n'a jamais été dogmatique, mais
ludique... :-))
> Que de mots, que de mots,
> que de maux de tête... pour simplement comprendre qu'il y a des métaphores
> sexuelles dans Alien.
Euh... tu es très réducteur... et méprisant... c'est pas gentil...
Je n'ai pas pointé du doigt "les métaphores", car elles sont évidentes
pour tout le monde, mais certains points très précis dans la mise en
scène de ces métaphores qui n'étaient pas directement perceptibles... et
que beaucoup d'amateurs du film n'avaient pas vu... malgré le temps, et
beaucoup ont été très content de les découvrir...
Je suis désolé d'avoir fait cela, et provoqué ton irritation, mais comme
tu n'avais pas jugé utile de les signaler, trop investi dans des
réflexions plus "profondes" je me suis permis de combler cette lacune...
:-))
> Ben, je différencie une publicité d'une oeuvre d'art oui. Comme je
> différencie mon mouchoir d'une oeuvre d'art. Désolé, je ne suis pas d'avant
> garde.
Tu de défiles la... :-)
> D'ailleurs, un texte critique n'est pas là pour te refaire sentir l'émotion
> esthétique comme on l'a vécu au cinéma, puisque précisément, c'est un texte
> critique mais pour la prolonger et te faire comprendre l'oeuvre et la
> transmettre et élucider le pourquoi cette émotion esthétique a une
> _valeur_. Qui n'est pas seulement une valeur cérébrale mais existentielle.
oui
>
> Ce que tu prends pour une émotion esthétique à ce moment-là
> n'est qu'un téléguidage car à qui fera-t-on croire qu'on a mis cette
> musique par hasard sur le héros défilant et non pour se sentir la poitrine
> gonflée de sentiments nationalistes dont l'impact en retour sur le réel
> peut être catastrophique. Ce que soulignait d'ailleurs Jean-Michel Grimaldi
> dans le dernier Ridley Scott. Et heureusement que la verbalisation permet
> de mettre le doigt et d'élucider la manipulation émotionnelle qui peut-être
> une véritable peste.
Oui, merci, comme je le dis dans un post précédent, ma maman m'a déja
expliqué que c'est pas bien dans les westerns les monsieurs qui tirent
sur d'autres avec un pistolet... :-))
> Et une véritable critique ou essai critique, c'est toute son ambition que
> de prolonger, d'éclairer un peu cette émotion esthétique (émotion + sens)
> et de nous éclairer au passage, nous hommes qui sommes dans le labyrithe ou
> le brouillard de l'existence, totalement inexpérimenté au début.
Euh... j'aime bien quand tu deviens lyrique... il commence à apparaître
des émotions non verbalisables à travers ta prose...:-)
> >Un réflexions sur la peur dans les films d'épouvante par Yannick
> >Rolandeau très généraliste sur la notion "d'étranger" et d'angoisse par
>
> Elle n'est pas de moi. Euh lis moins vite quand même.
J'avais bien lu que ce n'était pas de toi, mais puisque tu me poste ce
texte en rapport avec Alien, je considère que c'est dans le sujet du
débat... et que tu as fait tienne cette réflexion...
> Ce n'est que ton ressenti.
oui :-)))
> D'ailleurs pourquoi viens-tu parler d'Alien et
> ne restes-tu pas muet avec ton émotion esthétique ? C'est bien tout le
> contraire que tu fais. Désole pas de smiley.
tiens, j'ai pas l'impression d'avoir décrit mon émotion esthétique par
rapport à Alien...
> D'abord, ce texte ne parlait pas de Alien. Par ailleurs, la relation à
> l'identité, donc à autrui est première. La dimension sexuelle n'y est que
> secondaire. Ici, dans Alien, c'est par le trivial (ce n'est pas seulement
> la sexualité même si) que la relation à l'identité et à autrui se fracture.
> Ce n'est pas un hasard non plus si la trivialité, la nôtre que nous
> possédons tous, est reliée à l'ordure, aux insultes, précisément AU LANGAGE
> quand il s'agit de blesser l'identité de l'autre.
N'empêche... même si ton copier coller est intéressant, il me parait
toujours hors sujet... ou en tous cas il ne me parle pas, par rapport à
Alien.
> Erreur, je ne parlais pas d'Alien. D'ailleurs, ce texte n'était pas de moi
> mais de Rosset.
A ben oui... si tu parles pas d'Alien et d'autre chose sans me prévenir
tu peux comprendre que je sois perplexe... :-))
> Ce n'est que ton ressenti. Excellente démonstration que l'émotion est
> incapable d'en dire plus sur la nature de l'intellect. Désolé, je ne mets
> pas de smiley.
Malentendu...
> Alien ne fait que reprendre un vieux canevas : l'étranger, l'autre qui
> s'introduit dans un groupe et qui tue.
Absolument... c'est une évidence... :-)
> Alien, ce n''est rien que la reprise
> d'un vieux vieux thème, mais thème très intéressant et crucial. L'aborder
> uniquement en disant qu'Alien, ça fait métaphore sexuelle et en rester là,
> c'est tuer le film dans les thèmes cruciaux qu'il aborde.
Ah... c'est quoi les thèmes cruciaux qu'il aborde ? Autre que des
évidence sur la peur de l'autre, l'étranger...
> Comme ce n'est
> pas un hasard si à un moment, un homme qu'on croyait un véritable homme,
> avec une identité n'est qu'un robot, un artefact. etc. Là, je pourrais t'en
> parler des heures car c'est mon thème favori que je bosse depuis plus de
> quinze ans et je suis en train de faire un site dessus (le double, l'autre,
> le miroir, le diable, l'étranger, le mal, l'identité, le réel et justement
> à travers l'art, la peinture, la littérature, le cinéma et tout se tient et
> c'est du pur concret).
Absolument ce qui rejoint le mythe de la créature artificielle dans
l'histoire de l'humanité... mais il est très particulier le robot
d'Alien1...
> Les études d'art plastique, ça tue pour ne pas voir que ce texte n'était
> pas de moi et que donc il ne parlait pas d'Alien.
Voir plus haut...
> Ah ah ah ! En tous cas,
> le texte de Rosset est très très intéressant car il touche à ce qui est
> _crucial_ (et il est étonnant que tu le rates !),
Tu appelles crucial des évidences et des portes ouvertes généralistes...
en plus relativement déconnectées du sujet... d'ailleurs j'ai
l'impression que ce texte irait mieux sur les films de Polanski, que
précisément sur Alien.
> notre identité, sur quoi
> repose toute notre individualité et notre rapport au monde, ce qu'il
> appelle le tremblement du réel.
Encore des évidences...
> C'est tout à fait concret et quand je dis
> concret, c'est physique, charnel, affectif, psychologique et social, en un
> mot existentiel.
oui, mais encore...
>
> Je suis parti du débat sur tes métaphores sexuelles, sur lesquelles tu
> reviens sans cesse mais pour ne pas dire pourquoi elles sont importantes.
> Et je te disais que j'avais l'impression que tu t'arrêtes en chemin.
oui... toutafé...
> Et
> parler de la femme guerrière me semble inintéressant sinon à le relier avec
> Besson qui fait la même chose mais c'est un pure fantasme un peu machiste.
n'importe quoi...
> C'est comme s'amuser avec la symbolique du miroir. Si tu lis le livre de
> Melchior-Bonnet, Histoire du miroir, tu en captes toute la _substance_
> concrète et ce pourquoi des centaines d'artistes l'ont utilisé. Pourquoi ?
> Qu'est-ce que cela induit et dit ? Ce n'est quand même pas un hasard si
> cela a été tant utilisé. Et, on ne garde que les pertinents et pas les
> autres.
euh... hors sujet...
> Croire que verbaliser (que tu assimiles à cérébralité pure)
Non... on ne se comprend pas...
> ce
> serait manquer la substance, c'est à mon avis une erreur, au contraire
> c'est en capter la chair de la chair et Melchior-Bonnet te fait comprendre
> pourquoi. C'est justement redonner une chair à un thème, une substance, une
> pulpe. Et si ensuite, tu traites le sujet, tu n'en seras que plus pertinent
> et averti. Tu ne cesses de t'enrichir et c'est aussi capiteux qu'un verre
> de Pommard sans compter qu'une telle étude te permet de profiter de
> l'expérience et de l'intelligence d'autrui.
J'aime bien quand tu deviens lyrique... c'est beau... :-)
Yann, Autiste.
> Certes, l'appréciation esthétique est affaire de sensibilité, et une
> oeuvre n'a pas besoin d'être théorisée pour toucher cette sensibilité.
> Pourtant, les recherches justement de peintres comme Kandinsky semblent
> montrer qu'il y a une part d'universalité dans cette sensibilité, dans le
> sentiment suscité par l'opposition des couleurs, des formes, ou encore par
> le placement des objets.
Non... Kandinsky me laisse relativement indifférent... et même après
l'avoir un peu "étudié" en cours il me laisse indifférent... donc pas
d'universalité... :-)
> Mais à ce sujet, je me demandais si cette sensibilité « universelle »
> n'était pas affaire de formatage. Je m'explique. Dans l'ouvrage sus-cité,
> on nous présente une oeuvre de Balla (Compénétration iridescente n°13)
> censée susciter une impression de mouvement.
(zap)
Le futurisme était un mouvement qui faisait beaucoup de prose justement,
et l'appréciation des oeuvres futuristes est souvent enrichie par la
lecture des textes... si on parle bien du Balla peintre futuriste.
Je ne connais pas le tableau de Balla dont tu parles, mais il me semble
que les peintures futuristes jouent sur des codes formels de vitesse
relativement communs à tous, car souvent proches de la destructuration
visuelle que provoque un mouvement rapide dans notre vision. Ou des
compositions graphiques simples relativement archétypales, (flèches)
Il y a donc une relative universalité il me semble dans des
représentations qui reproduisent la perception oculaire ou des codes
graphiques relativement communs.
Par exemple la figuration réaliste est relativement universelle, en
première lecture, car les codes graphiques utilisés sont identifiables
par tous... après, vont apparaître des variations d'appréciation de
l'oeuvre qui varient selon le contexte social ou culturel...
D'ailleurs, le fait que tu cites un peintre futuriste tombe en plein
dans le sujet.
Voila un courant artistique qui sous la houlette de Marinetti son mentor
va se retrouver associer au fascisme... et charger ce courant pictural
de ce qu'il peut y avoir de pire.
Pourtant, rien n'empêche d'apprécier la qualité de certaines de ces
oeuvres, même si on sait qu'il y a une apologie dans leurs intentions de
la guerre, du surhomme, d'une suprématie technoscientiste, et que le
mouvement a compté des fascistes parmis ses auteurs...
Ce n'est pas parcequ'on apprécie une toile futuriste qu'on devient un
facho pour autant... non ?... ceci dit, personellement leurs peintures
me laisse indifférent... :-)
Tiens, pour rire...
Manifeste Futuriste
1. Nous voulons chanter l'amour du danger, l'habitude de l'énergie et de
la témérité.
2. Les éléments essentiels de notre poésie seront le courage, l'audace,
et la révolte.
3. La littérature ayant jusqu'ici magnifié l'immobilité pensive,
l'extase et le sommeil, nous voulons exalter le mouvement agressif,
l'insomnie fiévreuse, le pas gymnastique, le saut périlleux, la gifle et
le coup de poing.
4. Nous déclarons que la splendeur du monde s'est enrichie d'une beauté
nouvelle: la beauté de la vitesse.Une automobile de course avec son
coffre orné de gros tuyaux tels des serpents à l'haleine explosive...
une automobile rugissante, qui a l'air de courir sur de la mitraille,
est plus belle que la Victoire de Samothrace.
5. Nous voulons chanter l'homme qui tient le volant dont la tige idéale
traverse la terre, lancée elle-même sur le circuit de son orbite...
C'est en Italie que nous lançons ce manifeste de violence culbutante et
incendiaire, par lequel nous fondons aujourd'hui le Futurisme parce que
nous voulons délivrer l'Italie de sa gangrène d'archéologues, de
cicérones et d'antiquaires...
> Oui, le cinéma peut apporter des émotions. Mais le problème c'est quand
> la réalisation utilise ces émotions pour éblouir le spectateur et lui
> faire passer un message qu'il assimile plus ou moins consciemment.
bien sur...
> Ainsi,
> le devoir de vigilance impose de ne pas se focaliser que sur la forme et
> de toujours s'attacher à décortiquer le fond. Sinon c'est justement la
> porte ouverte à la propagande et à toutes les manipulations.
oui... mais il arrive que certaines oeuvres, même si elles véhiculent un
message explicite criticable, soient chargées d'une dimension...
poétique... (pour ne pas dire émotionnelle) qui transcende son
contenu... c'est ce qui fait la force de grands films, par exemple
Metropolis... et pour moi de Ridley Scott dans certains de ses films...
le message le plus fort n'est pas dans le contenu du film mais dans son
traitement formel... (jeu d'acteur, décors, son, musique).
> En revanche, je ne me souviens pas avoir vu les défenseurs du sens
> refuser d'apprécier la forme d'une oeuvre lorsque le fond était valable.
euh... la je crois que tous les cas de figures doivent exister... :-))
Il y a aussi les films de littéraires dont le contenu est exceptionnel,
mais dont le traitement formel est plus que pauvre... voir
minimaliste... dommage... :-)
> Et finalement le fond est rarement neutre, et la valeur du film est donc
> indissociable de la valeur du fond.
Euh... en cinéma, La Forme c'est le Fond..... :-))
oui, j'exagère... mais c'est bien d'exagérer...
> Par ailleurs, tu défends le droit à fonder la valeur d'un film sur une
> esthétique non verbalisable et relevant d'une sensibilité personnelle :
> simplement dire « J'ai trouvé ça beau. ». Pourquoi pas, chacun a le droit
> d'apprécier l'oeuvre ainsi, mais frcd est avant tout un forum de
> discussion, et une sensibilité personnelle et non verbalisable est
> difficilement discutable.
Oui, mais ça peut être aussi tout bêtement le lieu d'expression de
quelqu'un qui veut juste transmettre son enthousiasme perso... sans
avoir forcément envie de l'argumenter... :-)
Quelqu'un qui sort de Final Fantasy, et qui exprime son enthousiasme par
un simple message qui dit... j'ai adoré final Fantasy, je trouve ça
sympathique, et dans le fond, je pense qu'il occupe moins de bande
passante que les affrontements interminables que suscitent certaines
argumentations... néanmoins intéressantes... :-))
> Je distinguais trois types de « littérature » : celle qui traite de
> recherches plastiques sur la forme seulement (Kandinsky), celle qui traite
> de recherches philosophiques intimement liées à la représentation
> graphique (Ouspenski, théoricien du suprématisme illustré par Malévitch),
> et celle qui traite de métaphysique indépendamment d'une quelconque
> représentation graphique (Platon).
>
> Ainsi, s'il est abusif d'opposer la recherche plastique et la
> littérature,
Merci d'avoir détaillé... :-)
Pas si abusif que ça... c'est un très vieux débat... Léonard de Vinci
s'y essaye déja pendant pas mal de chapitres de son traité de la
peinture. Ou il tente de démontrer (de façon étonnament naïves pour le
grand maître), une éventuelle suprématie de la peinture sur
l'écriture... :-)
> on peut effectivement opposer la littérature plastique d'un
> Kandinsky, qui va parler de la sensibilité de l'homme à la couleur, à la
> littérature philosophique « classique » d'un Platon, qui va parler de
> la nature du réel. On peut les opposer en ce sens qu'ils ne parlent pas
> des mêmes sujets, l'une traitant en substance de la forme et l'autre du
> fond. Cela explique peut-être le dialogue de sourds qui oppose souvent
> ceux qui ne veulent voir que la forme à eux qui défendent le fond, car
> même si le fond et la forme sont liés, en extrayant la substantifique
> moëlle de chacun on finit par aboutir à deux discours disjoints (l'un
> n'étant donc pas « supérieur » à l'autre).
Bon, déja je n'oppose pas forme et fond, car le fond et la forme sont
très étroitement liés dans les arts du visuel...
et je m'insurge contre justement le besoin qu'on certains, de minimiser
l'importance de la forme, en ne voulant voir que la dimension
"littéraire" de l'oeuvre (le contenu explicite verbalisable, scénario,
histoire dialogues), qu'ils associent au fond... alors que dans une
oeuvre audiovisuelle, il arrive que le fond ne soit pas dans la partie
"littéraire" de l'oeuvre qui est souvent minimal... mais dans tout le
reste.
Alien1 est un très bon exemple de ce type d'oeuvre, où l'équipe
scénaristique à accordé beaucoup d'importance à la signification des
éléments formels du film, plus qu'à sa structure narrative qui tient en
quelques lignes...
Yann... futuriste anti-totalitarismes... :-))
> Il y a donc une relative universalité il me semble dans des
> représentations qui reproduisent la perception oculaire ou des codes
> graphiques relativement communs.
Il y a plusieurs aspects dans le futurisme, qui tournent surtout autour
de la représentation du mouvement et de la puissance de la machine : il y
a en effet ces représentations reproduisant la perception oculaire
(notamment celles inspirées par la chromophotographie), mais aussi
l'utilisation dynamique des couleurs sur les bases posées par Goethe en
1810 dans son « Traité des couleurs ».
Mais Goethe s'appuie sur une étude empirique, probablement réalisée
auprès de gens partageant la même culture. Et pour reprendre l'exemple
musical donné par gbog dans un autre post (l'accord majeur ressenti comme
« triste » en Inde), il est fort probable qu'un résultat empirique
concernant la sensibilité soit intimement lié à la culture, et ne soit
donc pas universel.
> D'ailleurs, le fait que tu cites un peintre futuriste tombe en plein
> dans le sujet.
> Voila un courant artistique qui sous la houlette de Marinetti son mentor
> va se retrouver associer au fascisme...
Ah tiens oui. Merci d'attirer mon attention là-dessus, c'était
totalement occulté dans ce que j'ai lu. Mais c'est la fascination pour la
puissance mécanique et la volonté furieuse d'évolution qui poussent
Marinetti à définir la guerre comme « hygiène de l'humanité », et donc
oui, le futurisme portait en lui des germes dangereux.
Mais cela appuie justement le fait qu'il ne faut pas oublier le fond
lors de recherches formelles, qu'il ne faut pas, pour reprendre les termes
employés par d'autres, séparer l'esthétique de l'éthique. D'ailleurs,
Yannick utilise la phrase « Le sommeil de la raison engendre des monstres.
». Eh bien cette phrase est tirée de l'un des Caprichos (série de
gravures) de Goya : « El sueno de la razon produce monstruos ». Elle prend
donc tout son sens dans les arts graphiques (même si pour être tout à fait
honnête il me semble que la gravure représente un écrivain endormi, mais
cela ne change rien au propos).
Par ailleurs la volonté de représenter autre chose qu'une scène immobile
à deux dimensions n'est pas l'apanage du futurisme, et ce n'est pas parce
que Balla s'inscrit dans le courant futuriste que ses toiles sont
fascistes.
Pour reparler de Black Hawk Down, si Ridley avait fait un bon film,
Bruckheimer ou non, c'eût été un bon film. Je vais prendre un autre
exemple, que je connais très mal mais qui me semble approprié : les
premiers écrits de Céline sont des oeuvres tout à fait appréciables, et
l'antisémitisme de l'auteur, du moment où il n'y est pas présent, n'y
change rien.
> Pourtant, rien n'empêche d'apprécier la qualité de certaines de ces
> oeuvres, même si on sait qu'il y a une apologie dans leurs intentions de
> la guerre, du surhomme, d'une suprématie technoscientiste, et que le
> mouvement a compté des fascistes parmis ses auteurs...
Et cette appréciation aveugle du futurisme par le public italien (le
futurisme était un « art de masse ») a justement été utilisée par
Mussolini pour rassembler la foule autour de ses idées. Je ne vois pas ce
qu'il te faut de plus pour montrer l'importance de ne pas oublier le fond.
Cela dit, rien n'empêche en effet d'apprécier la qualité d'oeuvres
futuristes ; il ne s'agit pas de censurer, mais d'alerter sur leur
dangerosité. Et une fois alerté rien n'empêche de considérer que cela rend
l'oeuvre répugnante.
À ce point du débat, alors que notre discussion m'a vraiment
convaincu de la nécessité du fond alors que j'étais a priori enclin à
apprécier un film purement plastique (ce qui m'apparaît maintenant
dangereux), j'aimerais beaucoup comprendre ce qui fait que tu ne suis pas
le même cheminement, alors que les exemples qui m'ont convaincu sont là.
Si tu arrivais à verbaliser cela ça m'intéresserait beaucoup.
> Ce n'est pas parcequ'on apprécie une toile futuriste qu'on devient un
> facho pour autant... non ?
À condition de faire preuve d'esprit critique. L'exemple du peuple
italien est là pour montrer ce qui arrive sinon.
> oui... mais il arrive que certaines oeuvres, même si elles véhiculent un
> message explicite criticable, soient chargées d'une dimension...
> poétique... (pour ne pas dire émotionnelle) qui transcende son
> contenu...
Je comprends ta position. Mais l'appréciation d'un film dont la forme
est intéressante et le fond criticable relève d'une échelle de valeurs.
Encore une fois, critiquer le fond n'est pas censurer, mais alerter. Pour
ce qui est de l'échelle de valeurs, si quelqu'un me dit que c'est
personnel, j'essaierai quand même de lui montrer, à partir des exemples
ci-dessus, qu'il peut être dangereux de placer l'esthétique trop loin au
dessus de l'éthique.
> Il y a aussi les films de littéraires dont le contenu est exceptionnel,
> mais dont le traitement formel est plus que pauvre... voir
> minimaliste... dommage... :-)
Flûte, je ne t'ai pas convaincu qu'opposer la plastique à la
littérature était abusif. En lisant la suite en effet je me souviens
qu'ailleurs tu as parlé d'émotions non verbalisables. À ce sujet, je suis
d'accord que la littérature n'est pas capable de susciter les mêmes
émotions que l'oeuvre qu'elle va décrire, mais pour moi, verbaliser
l'émotion, ce n'est pas la faire ressentir au lecteur, c'est tenter de
décortiquer ses mécanismes, rendre le lecteur attentif à ces rouages, de
sorte que confronté à l'oeuvre il pourra mettre en branle la même
mécanique et ressentir lui aussi l'émotion. Mais la verbalisation ne
conduit pas à se passer de l'oeuvre plastique elle-même.
Par exemple, dans la description des mécanismes de la peur par Rosset,
on n'a pas peur en lisant le texte, mais en repensant aux émotions
ressenties face à une situation non littéraire, on peut constater que
cette théorie n'est pas infondée, et pour ma part je trouve cette
compréhension de soi tout à fait jubilatoire.
Cela dit, pour revenir à ta phrase à laquelle je réponds, on revient à
ce qui a été dit dans le débat sur éthique/esthétique : la forme ne doit
pas se passer du fond, mais le fond sans la forme est insipide.
>> frcd est avant tout un forum de discussion
>
> Quelqu'un qui sort de Final Fantasy, et qui exprime son enthousiasme par
> un simple message qui dit... j'ai adoré final Fantasy, je trouve ça
> sympathique
Oui c'est vrai, mais d'un autre côté je crains, pour être tout à fait
franc, que trouver cela sympathique relève du même sentiment de
supériorité que celui que l'on peut ressentir à regarder des enfants jouer
dans une cour d'école, en se disant « Aaah le temps de l'innocence ! ».
Analyses-tu cette sympathie différemment ?
Par ailleurs, lorsque l'on est convaincu qu'apprécier la forme en
oubliant le fond est dangereux, n'est-il pas de son devoir d'alerter ceux
qui conservent cette approche de sa dangerosité ?
Pour ma part je réponds « si », et je comprends enfin l'insistance de
certains contributeurs de frcd à rejeter violemment une approche purement
plastique. Rien que pour cela, merci pour cette discussion, et vive frcd !
> Bon, déja je n'oppose pas forme et fond, car le fond et la forme sont
> très étroitement liés dans les arts du visuel... et je m'insurge contre
> justement le besoin qu'on certains, de minimiser l'importance de la
> forme, en ne voulant voir que la dimension "littéraire" de l'oeuvre (le
> contenu explicite verbalisable, scénario, histoire dialogues), qu'ils
> associent au fond... alors que dans une oeuvre audiovisuelle, il arrive
> que le fond ne soit pas dans la partie "littéraire" de l'oeuvre qui est
> souvent minimal... mais dans tout le reste.
Je ne suis pas certain d'avoir compris ce qui te gêne, mais j'essaye
quand même : dans une approche finalement assez défensive (rendue
nécessaire par les horreurs auxquelles l'absence de vigilance a pu
conduire l'Homme), on s'attache à critiquer la dimension verbalisable, le
reste du ressenti étant englobé dans la dimension émotionnelle, car on
considère que c'est cette dimension verbalisable qui fait véritablement
sens, et que c'est donc par rapport à elle que la vigilance s'impose.
Et ce qui te gêne là, c'est que tu considères que ce que j'appelais le «
reste du ressenti » fait également sens, et que l'on a tort par conséquent
de considérer la dimension émotionnelle comme un simple écrin. Et là en
effet, en cherchant en quoi la vigilance est nécessaire par rapport à une
émotion privée de verbalisation, j'écarte tout message politique (qui
relève de la verbalisation), et je tombe sur les pulsions qui conduisent
l'homme au Mal, notamment sur le sadisme et le masochisme qui te sont
chers. Mais alors on en revient à la verbalisation. Flûte.
Ainsi, si l'on reconnaît la nécessité de la vigilance dans
l'appréciation, quel que soit le chemin que l'on prend, on en revient à la
verbalisation. Ensuite, effectivement, une fois que cette analyse de la
dimension verbalisable a été effectuée (et a éventuellement révélé une
richesse de fond, ou une neutralité, ou une tentative de manipulation), tu
peux fonder la valeur de l'oeuvre sur sa dimension plastique, et ce même
s'il y a tentative de manipulation, lorsque dans ton échelle de valeurs tu
places l'esthétique au-dessus de l'éthique. Mais encore une fois une telle
échelle est dangereuse, et je comprends que certains ressentent un besoin
constant d'en recommander une autre.
Voilà, après avoir (je pense) compris la position de Yannick j'essaye de
comprendre la tienne ; dis-moi si j'en suis encore loin. Pour ma part, je
préfère ne pas jouer avec le feu et condamner les films qui tentent de
manipuler le spectateur.
--
Jihem
> On Tue, 26 Feb 2002 20:31:14 +0100, yann...@wanadoo.fr (yann.minh) wrote:
>
> >Pour ce qui est du fond (la profondeur ? :-), je dis qu'il y en a un
> >dans Alien, mais que justement il est surtout véhiculé par le traitement
> >formel.
>
> Quoi alors ? Et tu vas me répondre que ce n'est pas verbalisable. Donc, on
> n'en saura rien.
Non, je dis que dans le cas d'Alien le fond c'est la forme pas le texte,
pour le verbalisable et le non verbalisable on ne se comprend pas, ou
nous n'avons pas les mêmes valeurs... c'est clair... :-)
> >Ah bon ? je fais ça moi ?
>
> Ben oui, tu refuses de considérer un texte qui tente de faire comprendre
> une oeuvre et le fait de cérébraliser. Je développe plus loin.
Je dis que ton texte (copier coller) est très généraliste, d'un lyrisme
littéraire qui s'écoute parler, dans le sens que c'est typique du
processus réducteur inévitable de l'écriture, n'est reconnu pertinent
que ce qui peut se transmettre par des mots... d'ou apparition souvent
dans les textes de critiques d'art d'un lyrisme poétique frolant
l'abstraction pour combler une impossibilité certaine à transmettre un
certain répertoire cognitif non verbalisable.
En plus qui n'aborde pas les spécifités d'Alien et du coup passe
complétement à côté de l'essentiel.
Je dis que pour un film comme Alien, tant qu'on reste dans une échelle
de valeur pour analyser ce film, qui ne veut tenir compte que de la
dimension littéraire explicite, (scénario, dialogues, contenu explicite)
et qu'on oublie d'analyser les informations qui passent par les
compositions graphiques et les métaphores visuelles qui sont faite dans
le film on se plante...
Tu ne peux pas faire d'Analyse pertinente d'Alien si tu n'abordes pas,
"en premier", l'importance des métaphores, une des métaphores
essentielle (j'ai attendu pour voir si tu la citais) et magnifique, un
monument du cinéma, est justement la fin du film (qui ne te satisfait
pas car tu es resté à un premier niveau de lecture narratif), et c'est
une métaphore qui n'est pas sexuelle :
Toute la scène de fin qui est étonnament techniquement complexe dans sa
mise en place scénographique, est la métaphore soit d'une naissance,
soit d'une fausse couche, soit d'un avortement. Et c'est cette scène
magistrale de maîtrise des métaphores par l'équipe d'Alien qui donne au
film une grande part de sa dimension archétypale qui va toucher en
profondeur dans notre inconscient.
La spécificité d'Alien, outre les évidences de la peur de l'autre, de
l'altérité etc...qu'on peut appliquer à nombre de films d'horreur,
c'est que l'équipe de réalisation et de conception, pour mieux nous
faire marcher à utiliser une technique aussi utilisée en publicité en
mélangeant plusieurs niveaux informationnels...
Un premier niveau à la fois simple, mais malgré tout relativement
élaboré pour certains moments ou personnages : le scénario et les
dialogues... sur lequel tu reste scotché...
Et un deuxième niveau qui raconte une autre histoire très différente,
une histoire qui va agir à notre insu sur notre psyché pour réveiller
les démons et les peurs inconscientes qui nous habite afin de renforcer
l'impacte dramaturgique du film....
une histoire de viol, de pulsions sexuelles amorales et assassines, de
frustration sexuelle, de sadisme sexuel, de procréation, de quête vaine
de la mère et de la femme. De femme guerrière masculinisée, et dont le
sens est très loin d'être négligeable et simplement machiste)
(je passe les deux autres niveaux traditionnels du film publicitaire qui
sont la dimension sociale, et le référent artistique.)
Résultat, il y a de l'indicible dans Alien au niveau émotionnel, car en
jouant à la fois sur un niveau narratif explicite, et sur un niveau
formel non explicite on active dans notre psychée un répertoire
émotionnel non verbalisable, des peurs et des émotions préconscientes
enfouies dans les profondeurs de notre psychée et non nommées... comme
peut le faire la bonne poésie par exemple...
Et toute la force d'Alien et sa spécificité, c'est que ça a été fait
très consciemment par l'équipe de réalisation.
C'est effectivement une technique publicitaire, qu'on retrouve dans
quelques films de l'époque, et qu'exploite Hitchcock de temps en temps,
mais dans le cas d'Alien, elle prend une dimension exceptionnelle par sa
maîtrise, et du fait qu'il y a eu une une adéquation presque miraculeuse
dans ce film entre les deux niveaux narratifs... l'histoire... et le
niveau formel métaphorique...
Et c'est ça, pour moi, qui va faire qu'Alien va avoir cet impact aussi
fort sur les spectateurs.
Une fois cette clef mise en évidence, il y a une part très jouisive qui
est de regarder plans par plans le film pour y trouver les éléments
constitutifs de la deuxième trame narrative qui y sont cachés et
d'essayer d'en trouver la signification. Et lorsqu'on fait ça, c'est
génial comme Alien est riche de trouvailles inégalées.
Mais inévitablement, à un moment tu es eu... car tu ne peux pas
formaliser littérairement le répertoire émotionnel ressenti à la vision
du film.
Par contre, d'indiquer et de décoder très concrètement tel ou tel point
précis du film que ce soit au niveau du son, come de l'image, permet de
refaire le même le parcours mental, ou d'indiquer dans quel sens il
faut chercher pour retrouver un soupçon du répertoire émotionnel qui a
pu nous habiter pendant le déroulement du film. Quels sont les ressorts
qui ont été activés dans notre inconscient par l'équipe.
C'est effectivement intéressant de faire de grande théories
conceptuelles littéraires et subjectives sur une oeuvre
cinématographiques avec des référents mythologiques, mais il me parait
tout aussi essentiel aussi de faire l'effort de décrypter techniquement
plans par plans les compositions que nous a proposé le réalisateur, car
le VRAI signifiant pour un certain type de films se trouve la.
Tu vois, moi aussi je peux être dogmatique si je veux... :-))
> >Merci... je ne m'en étais pas rendu compte... :-)
> >Bon, en tous cas cette remarque montre à quel point tu ne veux pas
> >comprendre ce que je raconte... c'est un dialogue de sourd... :-)
>
> J'ai bien compris mais je ne vois pas comment tu peux refuser une
> verbalisation d'une oeuvre.
Laisse tomber, c'est une impasse, tu réinterprète ce que je raconte...
>
> >> Pour ma part, je ne sépare pas et l'un ne va pas sans l'autre.
>
> >Bien sur que non...
>
> On peut ou pas ?
La je suis d'accord avec toi, :-))
>
> >> Pour moi, l'un éclaire l'autre et réciproquement. Bref, une sorte de
> >> fusion. A la limite, la spécificité de l'homme est de penser, de formuler
> >> verbalement ses émotions et encore à la limite peu importe qu'elles soient
> >> esthétiques ou non.
>
>
> >La spécifité de l'homme n'est pas de "formuler verbalement", la
> >spécificité de l'homme c'est sa capacité à traiter de l'information
> >complexe, qu'elle soit visuelle, sonore, orale, littéraire, musicale
> >etc...
>
> La pensée quoi. Et comment on la transmet ? Car il y a aussi une histoire
> des formes esthétiques et des thèmes. Car une forme est lié à un thème.
La pensée verbale se transmet par l'écriture et par l'oralité, les
pensées non verbales se transmettent autrement... y'a pas que des
entités verbales dans ta tête Yannick...
> "Principaux vecteurs de transmission de l'information dans les société
> humaines" Tu parles tout simplement de langage.
Non... tu vois, on ne se comprend pas, pourtant j'ai l'impression d'être
clair :-)
Le langage n'est qu'un des vecteurs de transmission de l'information
cognitive entre humains, pas un des moindres, mais pas le seul. La
musique, la danse, la mise en scène, le théâtre qui joint le geste à la
parole, la sensualité, la peinture, la bande dessinée, les jeux vidéo,
la sculpture, le modelage... en plus j'ai l'impression d'énoncer des
évidences... je vois pas pourquoi il faut que j'argumente.
> Cela ne veut pas dire qu'on
> ne fait que verbaliser mais que la spécificité est qu'une émotion ne reste
> jamais muette et que tout de suite ton cerveau cogite et alors s'agite tout
> un tas de phrase, même sans parler. Tout cela est d'ailleurs tellement
> imbriqué..
Oui... absolument...
>
> Faux débat. Il suffit de voir que dans 2001, Kubrick parvient par un plan à
> lier un os et un vaisseau spatial, spécificité de l'image et qu'en revanche
> quand le cinéma veut adapter une oeuvre littéraire d'envergure, il péche et
> a beaucoup de mal. Donc, il y a une spécificité au registre et tu veux que
> l'émotion esthétique, le visuel mais sans verbalisation, sans langage
Bon exemple que 2001 un peu lourdingue pour moi, mais pas beaucoup plus
que dans Alien, mais c'est exactement l'illustration de mon propos,
l'importance des métaphores formelles...
Tu vois, pourquoi me dénis tu l'intérêt de faire ce genre d'analyse,
alors que tu le fais toi-même...?
Et je n'ai jamais prétendu que j'évacuais la verbalisation...
l'importance de l'information verbalisée dans un film... relis moi... je
me tue à répéter que pour certains films ce n'est pas elle qui est
signifiante ou prépondérante dans l'appréciation de l'oeuvre. Et en
particulier Alien... et plus je le redis et plus ça me semble une
évidence...
>
> Il n'empêche que tu es obligé de verbaliser et de dire métaphore sinon on
> ne connait pas le processus même.
ehhh oui... c'est que j'ai fait pour Alien... :-))
> D'autre part, comme je le disais, tu veux
> scinder alors que c'est un tout.
Non... ça c'est toi qui projette et veut réduire mon discours, c'est
plus facile... :-)
> On n'est pas dans l'image ici.
Non mais il me semble que beaucoup on la prétention d'en parler ici ,
alors c'est mieux si à un moment il parlait du rôle non négligeable de
celles ci dans un film... en général j'entends surtout argumenter du
scénario... du contenu narratif explicite... c'est le plus facile... car
pour argumenter sur les images et le montage faut se retaper le film
plan par plans et le disséquer... :-)) Ce que j'ai fait et que tu as
balayer d'un revers méprisant comme sans intérêt... dommage, car en plus
je sais que tu es sensible au même jeux formels que moi... en
particulier chez Polanski...
> >> Et les plus grands émotifs sont les plus grands cérébraux contrairement à
> >> ce qu'on essaye de faire croire. C'est même très facile à comprendre.
>
> >euh... peut-être... mais dans notre cerveau il n'y a pas que des mots...
>
> Tu vas peut-être me dire que d'un côté, il y a les mots et de l'autre les
> émotions, bien scindés en deux parties ?
Ben non... dommage hein... ;-) quoique, il ya effectivement une
localisation des types de traitement informationnels dans notre cerveau
dont les effets ne sont pas négligeables dans la structuration de notre
appréhension du réel, mais le traitement qui est fait de l'ensemble des
informations que perçoivent nos sens est de nature globalisante... et
souvent non verbalisables ni "analysables"... enfin en tous cas on en
pas les moyens techniques pour l'instant...
> >et je te dis pas comme ils sont émotifs les peintres... :-)
>
> Après avoir beaucoup travaillé, penser, verbaliser aussi et en être passé
> par là pour acquérir des connaissances.
Oui, et en dessinant énormément... le dessin et la représentation
graphique sont des systèmes de transmission de l'information parmis les
plus ancien et les plus puissant de l'humanité avec l'oralité.
Mais apprendre à dessiner oblige à fonctionner avec un peu plus de
neurones que ceux dédiés au langage... et justement à éviter de passer
par les déterminismes linguistique, en utilisant des spécificités non
liées au langage ... tous ceux qui dessinnent voient de quoi je
parle....
D'ailleurs tu constateras que beaucoup de plasticiens ont des
difficultés à verbaliser autour de leurs oeuvres, pas étonnant, ce
qu'ils ont à transmettre ne passe pas par les mots.... ce qui les
handicape parfois énormément pour défendre leurs oeuvres face au
"totalitarisme" des littéraires qui peuvent pas s'empêcher de se
rassurer face à une oeuvre plastique en verbalisant...
Les handicapés du cerveau droit sont tellement déterminés par le langage
qu'ils sont souvent incapables d'apprécier une oeuvre plastique sans
avoir une justification verbale... dommage pour eux... ce qui est
dommage c'est qu'ils encombrent les institutions... il y a une
dichotomie hiérarchique en france à ce niveau, qui existe moins dans les
pays anglo-saxons...
>
> Comme tout le monde. Il n'empêche que celle-ci ne reste jamais muette. il y
> a sans arrêt une interaction.
Non... pas toujours... je dirai même que la verbalisation n'est pas
sollicitée dans l'appréciation de beaucoup d'oeuvres ... la musique par
exemple... lorsque tu écoute un morceau de musique la relation est
parfois corporelle, (danse) mais aussi la psychée génère des images, des
scènes, des émotions qui ne sont pas associées à des mots...
>
> Sauf que tu ne pourras pas la transmettre et la transcrire dans la mémoire
> humaine d'une manière sociale, voire universelle.
faux... qu'est ce que tu fais des millions d'images que nous transmet le
passé... raaaaa... faite chier les littéraires... c'est comme ce délire
de considérer que l'histoire commence avec l'écriture... faux, avant
l'écriture il y avait les images...
> La verbalisation a des limites comme l'émotion a ses limites.
Ben... oui... bien sur...
>
> Tu peux avoir une mémoire et un savoir d'une chose, personnelle et intime
> mais si tu veux la transmettre à un autre homme, tu es obligé de te servir
> du langage, de verbaliser.
Non, je transmet à travers mes oeuvres plastiques des informations
spécifiques qui ne sont pas verbalisables....tu peux après essayer d'en
faire une description, une relation verbale, mais ce sera forcément
réducteur...
> C'est même le fondement de l'institution
> scolaire. De l'enseignement. Sans arrêt de la verbalisation pour apprendre.
Ehhhh oui hélas... totalitarisme de l'écriture... résultat, une société
qui parcellise le réel en éléments sémantiques signifiants structurés
commes les mots... et un besoin permanent de réduire les individus et de
les classer en sémes réducteurs simplistes...
> Le problème est que l'émotion est une chose passe partout et que en
> l'utilisant, tu ne dis rien de la richesse de celle-ci. Il suffit de voir
> comment n'importe quelle activité lucrative se sert de ce mot et le
> dénaturant.
OK, t'as raison la je le reconnais, c'est la qualité de ta prose lyrique
sur les films, elle arrive à susciter des émotions souvent pertinentes,
mais je suis un peu flemmard à ce niveau, ça m'amuse plus de
polémiquer... :-))
> Non, c'est un tout chez l'homme, c'est lié sans arrêt, sinon même codé.
C'est souvent lié, mais pas tout le temps, et justement pas lorsqu'on
est confronté à un media qui exploite une dimension spécifique du
traitement de l'information par notre cerveau.
> >Non, il y a des "pouvoirs"...
>
> Exactement. Reste à savoir comme il est utilisé, par la coercition ou non.
> Là, aucune coercition.
Si... subtile mais active...
> >> car là,
> >> pour aller dans ton sens, tu imposerais le contraire.
> >Oui... :-)
>
> Bah alors, pourquoi venir crier ?
Je plaisante... je ne veux surtout rien imposer à qui que ce soit...
:-))
> >> Or, ce n'est qu'un
> >> débat.
>
> >Mmmm... une affirmation existentielle plutôt... :-)
>
> Oui, mais dans ce cas, il faut voir si celle-ci fait prendre conscience de
> l'existence ou la détruit.
Euh... ? pas compris...
> Absolument. Il n'y a pas de totalitarisme, désolé dans ce sens-là mais en
> l'utilisant, tu fais appel à une mémoire collective encore emprunt d'un
> certain sens et tu dramatises.
Bof... je persiste et signe... on est en plein 1984 avec ce mot... et je
trouve dommage que ce soit précisément le fait d'intellectuels
éclairés... ça entache le prosélitisme démocratique de quelquechose qui
ne me parait pas très sain.
Mais ok, trouve moi un autre mot pour désigner les processus de
normalisation de la pensée, ou des comportements qui sont à l'oeuvre
dans notre société... en particulier issus du monde marchand...
> Le ludique aujourd'hui très utilisé peut aussi déguiser un dogmatisme.
> Voire le dogmatisme publicitaire.
Non, Yannick, tu peux dire ce que tu veux, dans mes posts sur Alien je
n'ai jamais été dogmatique, au contraire, j'ai fait très attention de ne
pas l'être, et de laisser la liberté au lecteur à travers l'humour de
faire sienne mes théories ou pas, pour moi c'est une forme de respect de
mes interlocuteurs, par contre maintenant je le suis dogmatique, car
c'est la forme d'argumentation utilisée sur Frcd... c'est un peu
lourdingue mais tant pis... :-))
> >Euh... tu es très réducteur... et méprisant... c'est pas gentil...
>
> Rien de méprisant. C'est simplement que tu es "vexé" et que tu réagis en
> essayant de vexer par le terme méprisant ton interlocuteur. "Pouvoirs"...
Non Yannick, c'est étrange comme tu n'as pas de recul par rapport au
mépris induit de tes formulations... c'est étrange pour un prosélythe de
la verbalisation de ne pas s'en rendre compte... :-)) et me dit pas
que c'est de la maïeutique... :-)
> Bon, bien et qu'est-ce que cela dit ? Véhicule, apporte, le mot que tu
> veux. Car si tu me dis "C'est inexplicable", tu ne transmets rien, ne me
> fait rien connaître sinon de dire qu'il y a métaphore.
voir plus haut...
> Cela me fait
> toujours penser à ce bon mot de Woody Allen dans Stardust mémories quand un
> jeune fan du réalisateur lui demande : "Que symbolisait votre voiture ?" Et
> W. Allen répond : "Elle symbolisait ma voiture." Allen répond bien à ce
> côté symbolisation, activité purement cérébral, pour ne dire que peu de
> choses.
Bof... c'est amusant, mais aussi pertinent que : si c'est creux c'est
que c'est profond... :-)) un effet de manche...
> >Tu de défiles la... :-)
>
> Pas folle la guêpe. J'en ai déjà beaucoup, beaucoup parlé. Tu n'as pas de
> mal à poser une telle question dont tu sais qu'elle demande une très longue
> réponse.
Bon ok...
> Voilà le problème que tu oublies. Tu veux laisser en quelque sorte
> l'émotion esthétique muette.
Non... voir plus haut...
> Or, c'est étrange car quand on voit un film
> par exemple, on la capte bien, on la ressent. Ok mais alors elle reste
> seulement en soi et alors elle n'est pas transmettable et donc ne sert qu'à
> un plaisir purement subjectif et même égoïste. Or, l'homme est un animal
> sociale et l'oeuvre d'art, quelque chose de mondain (au sens premier). On
> ne peut pas rester chacun avec ses émotions esthétiques dans son coin.
Ahhh ben y a des fois y'a pas le choix... le meilleur exemple ce sont
les oeuvres musicales... heureusement au cinéma il y a un scénario pour
pouvoir se mettre quelque chose de verbalisable sous la dent... :-)
> En plus, c'est jouer un faux jeu car la critique ne prétend pas rivaliser
> avec une émotion esthétique comme je le disais plus haut. Elle est là pour
> prolonger et transmettre, éclairer et sans cet éclairage, la beauté d'une
> oeuvre d'art reste lettre morte, muette au monde et aux hommes. Et à
> t'entendre, il ne faudrait rien dire.
Non... malentendu voir plus haut...
>
> >Oui, merci, comme je le dis dans un post précédent, ma maman m'a déja
> >expliqué que c'est pas bien dans les westerns les monsieurs qui tirent
> >sur d'autres avec un pistolet... :-))
>
> Voilà le problème à mon sens de n'avoir recours qu'au terme émotion qui
> peut légitimer cela et dont tout le commerce se sert allègrement. Il faut
> alors, je trouve, préciser, nuancer car on risque d'utiliser un mot qui a
> différents plans.
Me suis déja expliqué...
> Absolument. Le sujet d'Alien est justement la peur. Et la peur n'est que
> "bouh !"
Euh... tu fais de la provo la :-)))
> >tiens, j'ai pas l'impression d'avoir décrit mon émotion esthétique par
> >rapport à Alien...
>
> Tu tiens donc à verbaliser quand même ? Donc, à faire passer des choses ?
> Ben, c'est idem dans une critique, pour transmettre à autrui. Et pourtant,
> là tu t'insurges.
Voir plus haut...
> La peur. Voir aussi autre message avec récapitulation historique. Alien,
> c'est au fond le diable sans le mystique ou Dracula. Et toujours la peur.
J'ai lu... interessant mais à mon gout encore trop généraliste...
> >> Alien ne fait que reprendre un vieux canevas : l'étranger, l'autre qui
> >> s'introduit dans un groupe et qui tue.
> >Absolument... c'est une évidence... :-)
> Ce n'est pas seulement une évidence, c'est la structure principale.
Non! Parfaite démonstration de ce que j'explique... tu accordes trop
d'importance au scénario, tu regardes l'arbre qui cache la forêt...
:-)))
> Tu n'en
> prends qu'un fragment, la métaphore sexuelle qui n'est que secondaire par
> rapport à la peur et à l'idendité.
Pas secondaire... c'est le sujet Principal d'Alien... Et puis la peur
et l'identité ce sont des mots très généralistes... que tu peux
appliquer à la plupart des films d'horreur...
> >Ah... c'est quoi les thèmes cruciaux qu'il aborde ? Autre que des
> >évidence sur la peur de l'autre, l'étranger...
>
> C'est déjà beaucoup car cette peur de l'autre est en rapport avec notre
> identité (et cela est viscérale), d'où le phénomène essentiel qu'est la
> peur et dans la relation dialectique et mimétique avec soi et autrui, à la
> violence qui en découle et à la manière de percevoir notre rapport au réel,
> à autrui et donc au fondement de notre être qui ici prend des allures
> sexuelles mais pas seulement (le monstre sortant du ventre d'un des
> membres). Ce qui est intéressant dans ce film, ce n'est pas seulement la
> métaphore sexuelle mais tout l'organique dont est investi le film, le
> trivial et n'en fait paraître que plus fragile la constitution humaine et
> ses constructions. Vulnérabilité de l'homme d'autant plus que le premier
> alien vampirise ses proies et se reproduit à l'intérieur de l'homme
> lui-même. A cela s'ajoute la perforation, la pénétration, le viol et
> l'érotisme. A cela s'ajoute l'obscurité, l'humidité du vaisseau et
> l'omniprésence d'Alien. La peur est présente partout et partout, dans le
> vaisseau et dans le corps des passagers même. Créant une peur panique.
Eh eh... c'est curieux, mais j'ai l'impression d'avoir déja lu ça mille
fois sur ALien... qu'est ce que tu m'apprends de plus que je ne sais
déja...
je persiste et signe, tu ne m'as toujours pas démontré le manque
d'intérêt de mes postes sur Alien... car je te rappelle que c'est ce que
tu as formulé...
> Le film fonctionne d'autant mieux qu'il est sobre (sans beaucoup de
> musique) et joue avec le hors champ. Malheureusement, le film se conclue
> banalement et héroïquement.
Bien sur, tant que tu reste collé sur le premier niveau de lecture, par
contre dés que tu te met à décortiquer les métaphores, celles de la fin
est magistrale, et particulièrement jubilatoire... cf plus haut.
> >Absolument ce qui rejoint le mythe de la créature artificielle dans
> >l'histoire de l'humanité... mais il est très particulier le robot
> >d'Alien1...
>
> Ce n'est pas seulement un robot qui est important, c'est le fait qu'il ait
> été pris pour un homme, pour le même, pour une non-identité. Relis le texte
> de Rosset sur le tremblement du réel, de ce que l'on croit réel ou pas.
> Donc sur l'identité, de l'illusion de ce qu'on croit stable ou pas.
Oui... ça j'aime bien... mais c'est pas l'essentiel pour moi... car
c'est déja le propos de Coppellia... ce qui m'intéresse dans ce robot
c'est ce qu'il raconte... c'est d'ailleurs comme la mis en exergue
Julien, pour moi une très grande scène du cinéma...
> C'est au fond le même thème : l'étranger (Trelkovski) qui intervient dans
> une communauté (un immeuble) et qui parait monstrueux, qui va changer
> d'apparence. Sauf que lui se suicide. Mais Alien n'est guère autre chose
> transplanté ailleurs.
Si, c'est autre chose... en plus tu le sais bien...
> >> Et
> >> parler de la femme guerrière me semble inintéressant sinon à le relier avec
> >> Besson qui fait la même chose mais c'est un pure fantasme un peu machiste.
>
> >n'importe quoi...
>
> Bizarrement, c'est un des thèmes que tu semblais trouver intéressant. Pour
> ma part, c'est le plus faible.
Pour moi, comme le mythe de la créature artificielle ou du monstre le
mythe de la femme guerrière est un sujet génial et très riche à
explorer... surtout à travers Aliens 1 et puis toute la série... c'est
un thème qui n'est pas du tout négligeable lorsqu'on s'attaque à
analyser Alien... maintenant que dans l'absolu, comme le mythe de la
créature artificielle, ce soit des thèmes récurrents connus, c'est
certain.
> >euh... hors sujet...
>
> non, c'est le sujet. Pourquoi le miroir ? Ce n'est pas relier à
> l'apparence, au double, à l'identité, au mal ? En disant cela, j'en dis peu
> mais je peux développer. Narcisse, tu connais ?
Non hors sujet... le miroir et narcisse, ce sont des tropismes
conceptuels tellement généralistes que tu peux les plaquer sur n'importe
quel film ou dramaturgie en donnant l'impression de dire des choses très
intelligentes... par contre si tu me les raccorde à Alien de façon
spécifique la je suis vraiment intéressé...
Et me fait pas le plan du reflet de nous même incarné par l'Alien... ou
par Ripley ce sont des évidences... qu'on peut projeter sur pratiquement
tous les films d'horreur, sinon tous les films en général... par contre
montre moi comment dans ce film il y a eu un traitement particulier ou
spécifique des auteurs pour nous introduire (si j'ose dire) une
réflexion volontaire et maitrisée sur le mythe de narcisse... :-))
Yann polémiqueur... :-)
> La peur. Voir aussi autre message avec récapitulation historique. Alien,
> c'est au fond le diable sans le mystique ou Dracula. Et toujours la peur.
Alien 1 ne s'inscrit pas dans la lignée de Dracula, mais de
Frankenstein.
Lorsque j'analyse le film à travers les métaphores présentes voici
comment je l'interprète.
Pour moi, Alien 1, plus que la peur de l'organique, ou du phallus ou de
l'autre étranger, est surtout un conte métaphorique moderne, qui met en
scène notre peur viscérale inconsciente de l'emprise de la technologie
sur notre psychée et l'asservissement qui en résulte.
Nous sommes dans l'univers aseptisé d'un vaisseau spatial, gigantesque
cathédrale technologique, dans laquelle sont confinés quelques
minuscules petits humains perdus dans ce décors mécanique d'une échelle
inhumaine.
Ces humains vont rencontrer une autre cathédrale technologique, issue
d'une civilisation extraterrestre, et vont être contaminés par une arme
bactériologique sexuée particulièrement destructrice issue de cette
civilisation inconnue.
Cette arme, cette invention technologique/biologique issue d'une autre
civilisation va passer son temps à pénétrer, déchirer, se mélanger aux
corps humains, violant leur intégrité pour assurer sa perpétuation.
Les humains sont réfifiés, ils ne sont plus que les instruments d'une
machine. Comme ils n'étaient au départ que les instruments d'un système
abstrait : La compagnie, incarnée par deux entités technologiques
archétypales, l'ordinateur de bord : Mother. Dont un des messages les
plus important sera :
Crew expendable. (équipage sacrifiable)
ce qui veut dire en clair que l'humain n'est plus nécessaire...
et un Robot, dont le message sera :
- "J'admire sa pureté. Un survivant qui n'est pas souillé par la
conscience, le remords, ou les illusions de la moralité."
Caractéristiques proprement humaines et désormais obsolètes face à une
technologie dont on sait qu'elle n'a ni conscience ni morale...
Ce sont nos propres créations technologiques, qui au départ devrait nous
aider, qui finissent par nous éliminer lorsque nous ne sommes plus
nécessaire à leur perpétuation.
Frankenstein est la, mais aussi les robots de Karel Kapek dans RUR, ou
ceux d'Ignis de Didier de Chousy.
Mais Ripley, l'héroïne refuse la contamination, elle refuse la symbiose
homme machine qui la réduit à l'état d'instrument, vecteur de
perpétuation d'une technologie amorale. Et phallique. Car l'Alien,
l'arme, ce sommet technologique est incarné par un principe masculin.
Pas de hasard.
L'alien incarne la peur non pas de l'autre, mais bien au contraire de
nous-même... hommes.... de cette pulsion de puissance qui émane du
phallus, et qui nous a conduit vers l'élaboration de métaphores
technologiques destructrices à son image, mais aussi dont l'emprise est
telle qu'elle nous conduit aussi, à réifier l'autre, femme, qui
deviennent les instruments de notre jouissance, comme nous mêmes
devenons les instruments de notre technologie, de nos "Systèmes".
Ce qui nous conduira à cette apothéose de la fin du film ou Ripley
évacuera l'alien de la "Matrice" du vaisseau dans une très belle
métaphore d'avortement ou de fausse couche.
Ripley refuse la symbiose homme machine, elle refuse de porter les
enfants des monstres technologiques. Elle refuse d'être l'instrument des
machines.
Car ce n'est pas une fécondation d'humains dont il est question dans
Alien, ils ne sont que de simple vecteurs, c'est une histoire de
rencontre et d'amour entre deux méta entitées technologiques qui
finissent par se rencontrer et s'aimer dans l'espace.
A la fin il ne reste que deux créatures intègres de toute symbiose
technologique. Une femme androgyne, et un chat, qui incarne une forme de
pureté organique originelle.
eh eh eh... :-))
Bon bien sur mon interprétation n'est pas univoque, y'en a pleins
d'autres, mais c'est celle la que je préfère... :-))
Yann Minh, bioorganisme asservit.
J'aime bien quand tu mets moins de smileys... :)
>
> A la fin il ne reste que deux créatures intègres de toute symbiose
> technologique. Une femme androgyne, et un chat, qui incarne une forme de
> pureté organique originelle.
>
Tu oublies de rajouter:
le chat, felin, donc aussi sauvage et amoral que l'Alien.
--
Stephane Ninin
stefnin...@yahoo.fr
Les cons, ca ose tout... C'est meme a ca qu'on les reconnait.
D'ailleurs, je continue d'aimer en secret Van Gogh, bien que je sache
qu'ainsi je cautionne les mecs qui se coupent un morceau d'oreille...
Ce qui peut changer l'intention de ce propos, c'est d'inverser le sens
de « monstres ». Je ne sais pas comment ce terme est connoté en espagnol,
mais en français il est à double tranchant. Un monstre est ce que l'on
montre, étymologiquement : des êtres exceptionnels que l'on donne au regard
des gens pour les impressionner et, en général, leur faire peur. Le sens que
toi et YR donnent à cette phrase, c'est que la raison doit rester en éveil
pour "éviter" d'engendrer des monstres, perçus comme des choses négatives.
Si l'on pense à Bosh et à toute une frange d'auteurs chez qui la raison
semble n'être pas la principale lumière, en allant jusqu'à Van Gogh et
Artaud, on peut voir que la raison s'est endormie et que c'est ce qui a
permi l'éclosion d'oeuvres dont il est difficile de nier l'importance et la
postérité.
Cependant, je ne voudrais pas défendre la même phrase en "positif", je
ne veux pas faire l'éloge de la folie des artistes. En fait, je pense que la
plus belle des choses à montrer, le plus beau des "monstres", c'est
justement le combat titanesque de la raison et de la déraison exprimé par
l'artiste qui en est souvent d'ailleurs le champ de bataille.
> [...]
> Cela dit, rien n'empêche en effet d'apprécier la qualité d'oeuvres
> futuristes ; il ne s'agit pas de censurer, mais d'alerter sur leur
> dangerosité.
Je ferais une distinction entre la dangerosité de l'oeuvre futuriste à
l'époque et celle de la même oeuvre aujourd'hui. Pour moi, cette dangerosité
est en très grande partie effacée aujourd'hui. Qui peut encore se dire
futuriste (dans le sens idéologique) ?
> Et une fois alerté rien n'empêche de considérer que cela rend
> l'oeuvre répugnante.
Rien n'empêche de penser que Céline est un auteur répugnant, mais il est
difficile de nier son génie. Que faire de ses livres ? Les lire et les faire
lire ? Ne pas les lire et ne pas les faire lire ? Je crois pour ma part que
les lecteurs sont moins stupides qu'on pourrait le penser et qu'il font
nettement le départ entre le Céline génie littéraire et le Céline ordure
politique. Si par hasard on m'amenait un lecteur de Céline qui aurait été
"converti" à ses idées merdiques par ses livres, je pense sincèrement que ce
type était perdu d'avance et qu'il aurait de toute façon épousé ces idées,
avec ou sans l'aide de Céline. Idem pour les "bons films" : je pense qu'une
personne qui torturerait des jeunes vierges après avoir vu Salo l'aurait
fait de toutes façon, avec ou sans Salo. (Mais sur ce point mon opinion
n'est pas fermement établie, je dois l'avouer et ça se voit peut-être.)
> À ce point du débat, alors que notre discussion m'a vraiment
> convaincu de la nécessité du fond alors que j'étais a priori enclin à
> apprécier un film purement plastique (ce qui m'apparaît maintenant
> dangereux), j'aimerais beaucoup comprendre ce qui fait que tu ne suis pas
> le même cheminement, alors que les exemples qui m'ont convaincu sont là.
> Si tu arrivais à verbaliser cela ça m'intéresserait beaucoup.
L'agent -- Stationnement prohibé : je verbalise !...
L'automobiliste en faute -- Non, s'il te plaît meussieur, j'ai pas d'autre
choix que me garer provisoirement à cheval sur le trottoir des simples
piétons...
Plus sérieux : je m'incruste un peu dans la discusse... je ne comprends
pas pleinement ta position... en fait, si tu me dis comment tu résouds le
cas Céline (qui cristallise depuis longtemps le fond du problème abordé), je
serais mieux fixé sur ta solution. Pour ma part, j'en suis réduit à laisser
la délicate question des génies "répugnants" non tranchée. Je ne sais pas
comment la raison peut s'appliquer à ce problème sans, soit effacer de
l'histoire une foule d'auteurs pourtant reconnus, soit admettre que l'art
est déconnecté de la réalité "sociale" (ce qui revient à séparer éthique et
esthétique). En fait, il me semble que la seconde solution est préférable en
attendant une troisième solution plus élégante.
> [...]
> Cela dit, pour revenir à ta phrase à laquelle je réponds, on revient à
> ce qui a été dit dans le débat sur éthique/esthétique : la forme ne doit
> pas se passer du fond, mais le fond sans la forme est insipide.
Je repose ma question : quel est le fond d'une nature morte ?
> Voilà, après avoir (je pense) compris la position de Yannick j'essaye de
> comprendre la tienne ; dis-moi si j'en suis encore loin. Pour ma part, je
> préfère ne pas jouer avec le feu et condamner les films qui tentent de
> manipuler le spectateur.
Dans un sens, quel film ou quelle pièce de théâtre ne tente pas de
manipuler le spectateur ? Je lis en ce moment Aristophane, voilà un type qui
cherche visiblement à manipuler le spectateur : il cherche à le faire rire
grassement et parallèlement il cherche à lui donner des solutions pour
régler les problèmes de la Cité. En très gros, on peut le qualifier de
pacifiste un peu réac' scatophile et presque féministe, selon nos critères
d'aujourd'hui. Je veux dire que ta "condamnation des films qui manipulent le
spectateur" ne repose pas sur une observation objective des rouages de
l'oeuvre mais sur une appréciation d'ordre moral des intentions de l'auteur.
C'est là tout le problème : tu ne peux pas, dans ta position, t'abstraire de
ta propre échelle de valeurs qui n'est pas forcément "meilleure" qu'une
autre.
--
« Les hommes sont sortis de la terre comme les épinards. »
(Empédocle)
> Effectivement, on peut rire aujourd'hui et pourtant, c'est la vitesse qui a
> gagné au détriment de la lenteur. Et cette idéologie futuriste a un impact
> concret et catastrophique dans le monde.
Euh... le mouvement pictural futuriste est un peu anecdotique pour moi,
et parler "d'idéologie futuriste" me parait être un peu excessif, ou en
tous cas très disproportionné par rapport aux causes de ce phénomène
d'accélération....
L'accélération est plus un phénomène structurel qu'idéologique. Cela a
commencé il y a déja longtemps, moi je dirais à partir de la propagation
des techniques d'imprimerie, qui ont permise à la connaissance de
circuler plus vite, et horizontalement, et puis la vitesse s'est
accélérée je dirai presque de façon exponentielle au fur et à mesure du
développement et du perfectionnement des moyens de transport et de
communication...
d'ailleurs après le livre, le cinéma avec d'autres media, à largement
contribué à renforcer ce phénomène "d'accélération" qui fait bander les
chroniqueurs de la cyberculture... :-))
> Kundera dans La lenteur a cette
> réflexion judicieuse :
>
> "P 44 : " Il y a un lien secret entre la lenteur et la mémoire, entre la
> vitesse et l'oubli. Evoquons une situation on ne peut plus banale : un
> homme marche dans la rue. Soudain, il veut se rappeler quelque chose, mais
> le souvenir lui échappe. À ce moment, machinalement, il ralentit son pas.
(zap)
Eh eh... c'est mignon .. Kundera serait'il un peu péripatéticien sur les
bords ? :-))
> Il rajoute avant :
>
> "P 10 : " l'homme penché sur sa motocyclette ne peut se concentrer que sur
> la seconde présente de son vol ; il s'accroche à un fragment de temps coupé
> et du passé et de l'avenir; il est arraché à la continuité du temps ; il
> est en dehors du temps; autrement dit, il est dans un état d'extase ; dans
> cet état, il ne sait rien de son âge, rien de sa femme, rien de ses
> enfants, rien de ses soucis et, partant, il n'a pas peur, car la source de
> la peur est dans l'avenir, et qui est libéré de l'avenir n'a rien à
> craindre.
C'est aussi très beau, merci et c'est une très bonne illustration de
mon propos, la qualité poétique formelle de la prose dissimule des
idées fausses... et en tous cas discutables...
En général au volant d'un véhicule, qui est une métaphore des jambes, on
marche plus vite, et la pensée se met à fonctionner comme lorsqu'on
marche. Le cerveau se met justement à faire abstraction de la "conduite"
pour penser, réfléchir, imaginer... et justement, très souvent, plonger
dans le passé...
Par contre, au dela du contenu explicite de ce que décrit Kundera qui
est carrément faux ou pour le moins très parcellaire ou orienté,
Kundera dans ce texte plus poétiquement métaphorique que scientifique,
génère des émotions spécifiques qui nous parlent, et qui justement
appartiennent à un répertoire non verbalisable... il ne nous parle pas
de la réalité de la pensée du motocycliste, mais de notre perception
intuitive de l'évolution sociale contemporaine, sous entendant, (ce qui
est faux aussi), que cet "effet" d'accélération renforcerait l'oubli des
erreurs passées...
> La vitesse est la forme d'extase dont la révolution technique a fait cadeau
> à l'homme. Contrairement au motocycliste, le coureur à pied est toujours
> présent dans son corps, obligé sans cesse de penser à ses ampoules, à son
> essoufflement; quand il court il sent son poids, son âge, conscient plus
> que jamais de lui-même et du temps de sa vie.
Eh eh ... carrément lyrique sur la fin... par contre je me demande si un
coureur de 100m haie a le temps de penser à tout ça quand il court, il
me semble au contraire que nombreux sont les accidents, les claquages,
parce que justement il y a une perte de conscience des limites de notre
corps...
> Tout change quand l'homme
> délègue la faculté de vitesse à une machine : dès lors, son propre corps se
> trouve hors du jeu et il s'adonne à une vitesse qui est incorporelle,
> immatérielle, vitesse pure, vitesse en elle-même, vitesse extase.
La pareil, c'est valable pour le coureur automobile qui est en train de
faire une performance, et toute son attention est concentrée sur la
course... par contre au volant d'un véhicule qui se déplace à 130 kmh
sur l'autoroute, "ce qui est le quotidien l'homme moderne pressé" la
pensée et la réflexion sont omniprésents
Du temps où j'avais une voiture, je me suis vu prendre l'autoroute
justement pour exploiter ce processus générateur de pensée et de
réflexions que suscite "la vitesse"... :-))
> " Curieuse alliance : la froide impersonnalité de la technique et les
> flammes de l'extase. Je me rappelle cette Américaine qui, il y a trente
> ans, mine sévère et enthousiaste, sorte d'apparatchik de l'érotisme, m'a
> donné une leçon (glacialement théorique) sur la libération sexuelle; le mot
> qui revenait le plus souvent dans son discours était le mot orgasme; j'ai
> compté : quarante-trois fois. Le culte de l'orgasme : l'utilitarisme
> puritain projeté dans la vie sexuelle ; l'efficacité contre l'oisiveté ; la
> réduction du coït à un obstacle qu'il faut dépasser le plus vite possible
> pour arriver à une explosion extatique, seul vrai but de l'amour et de
> l'univers.
Euh... il ne me semble pas très informé la Kundera, AMHA il confond
l'orgasme masculin et l'orgasme féminin ... serait pas en plus un peu
macho sur les bords Kundera... :-))
> Pourquoi le plaisir de la lenteur a-t-il disparu ?
> Ah, où sont-ils, les
> flâneurs d'antan ? Où sont-ils, ces héros fainéants des chansons
> populaires, ces vagabonds qui traînent d'un moulin à l'autre et dorment à
> la belle étoile ?
Oui... c'est un texte sympa... merci... :-)
Pour ajouter une pierre mélancolique sur ce merveilleux passé de nos
ancêtre ou tout n'était que lenteur, calme et volupté,
Voici un très beau texte d'introduction de Barbey d'Aurevilly pour
l'Ensorcelée...
première publication en feuilleton dans «L'assemblée nationale du 7
janvier au 11 Février 1852».
La lande de Lessay est une des plus considérables de cette portion de la
Normandie qu'on appelle la presqu'île du Cotentin.
.../...
Qui ne sait le charme des landes?... Il n'y a peut-être que les paysages
maritimes, la mer et ses grèves, qui aient un caractère aussi expressif
et qui vous émeuvent davantage. Elles sont comme les lambeaux, laissés
sur le sol, d'une poésie primitive et sauvage que la main et la herse de
l'homme ont déchirée. Haillons sacrés qui disparaîtront au premier jour
sour le souffle de l'industrialisme moderne; car notre époque,
grossièrement matérialiste et utilitaire, a pour prétention de faire
disaparaître toute espèce de friche et de broussailles aussi bien du
globe que de l'âme humaine. Asservie aux idées de rapport, la société,
cette vieille ménagère qui n'a plus de jeune que ses besoins et qui
radote de ses lumières, ne comprend pas plus les divines ignorances de
l'esprit, cette poésie de l'âme qu'elle veut échanger contre de
malheureuses connaissances toujours incomplètes, qu'elle n'admet la
poésie des yeux, cachée et visible sous l'apparente inutilité des
choses. Pour peu que cet effroyable mouvement de la pensée moderne
continue, nous n'aurons plus, dans quelques années, un pauvre bout de
lande où l'imagination puisse poser son pied pour rêver, comme le héron
sur une de ses pattes. Alors sous ce règne de l'épais génie des aises
physiques qu'on prend pour de la Civilisation et du Progrès, il n'y
aura ni ruines, ni mendiants, ni terres vagues, ni superstitions comme
celles qui vont faire le sujet de cette histoire, si la sagesse de notre
temps veut bien nous permettre de la raconter.
> C'est frcd, c'est fait pour discuter, pas pour faire du spam d'égo. Non ?
Euh... et c'est toi qui dit ça :-)
> >Pas si abusif que ça... c'est un très vieux débat... Léonard de Vinci
> >s'y essaye déja pendant pas mal de chapitres de son traité de la
> >peinture. Ou il tente de démontrer (de façon étonnament naïves pour le
> >grand maître), une éventuelle suprématie de la peinture sur
> >l'écriture... :-)
>
> Qu'il est obligé de verbaliser, eh eh.
Oui, pour un résultat relativement dérisoire et maladroit par rapport au
reste de son oeuvre...
> Ah zut, le problème n'est pas de nier la forme ou le fond ou que la forme
> parle d'elle-même, sans texte mais de faire comprendre sa beauté, sa valeur
> et de la transmettre à autrui.
d'accord tant qu'on occulte pas l'importance signifiante parfois
prépondérante de l'image et du son dans l'appréciation d'une oeuvre
audio visuelle... :-))
> Pour sourire un peu, une nouvelle de Slavomir Mrozek (tirée de La vie est
> difficile, Albin Michel).
>
> Révolution
(zap)
> Maintenant le lit se trouve ici, comme avant, l'armoire la, et entre les
> deux il y a la table. Quand l'ennui me guette, je me rememore l'époque où
> j'étais révolutionnaire.
Excellent ... merci
Surtout quand on sait comment chez moi sont disposés les armoires, les
tables et le lit... :-)
Yann révolutionnaire, chez qui ça marche... :-))
> Mais Goethe s'appuie sur une étude empirique, probablement réalisée
> auprès de gens partageant la même culture. Et pour reprendre l'exemple
> musical donné par gbog dans un autre post (l'accord majeur ressenti comme
> « triste » en Inde), il est fort probable qu'un résultat empirique
> concernant la sensibilité soit intimement lié à la culture, et ne soit
> donc pas universel.
Pour moi la question de l'universalité de certaines formes d'art a une
réponse relativement simple.
J'ai adopté la pensée cybernétique, en attendant de rencontrer une
proposition plus pertinente. Donc je raisonne en terme d'information et
de traitement de l'information.
Le mot Art pour moi désigne certains systèmes et protocoles de
traitement et de diffusion de l'information dans nos société. Mais pour
moi, l'Art n'existe pas en soi sinon en tant que protocole sémantique
contextuel à notre époque. Ce n'est qu'une convention sémantique moderne
à géométrie variable.
L'Art, tel qu'on le conçoit actuellement est un concept relativement
moderne dans notre histoire, car, si je ne me trompe pas, c'est la
renaissance qui va surtout amorcer une réflexion élaborée sur la notion
d'art, au XVIe siècle avec un texte de Giorgio Vasari publié en 1550
qu'il faudrait que je retrouve.
Je ne crois pas que dans les sociétés précédentes, le résultat du
travaille des plasticiens, des sculpteurs, des peintres, soit considéré
comme de l'art. On considère dans les périodes antérieures à la
renaissance, les oeuvres artistiques comme actuellement on considère la
pub, le design industriel, l'ensemble des arts appliqués et de
l'artisanat: Les artistes sont des artisans, avec plus ou moins de
notoriété, qui mettent leur savoir faire au service d'un travail de
commande. Et dans certaines société, les artistes font partie des
catégories sociales les plus basses, ce qui est en train d'ailleur de
revenir.
Il n'y a donc pas pour moi d'universalité intemporelle de l'art... l'Art
tel qu'on le perçoit aujourd'hui est un concept spécifique à notre
société, concept qui est en perpétuel évolution et redéfinition aux fil
des mouvements et avant-garde.
Par contre, si je pose sur le monde de la création artistique un regard
cybernétique, je suis convaincu qu'il existe une universalité de
certains codes visuels simples, faisant références à des invariants
communs.
La représentation d'une figure debout par exemple, même sommaire, est
perceptible et compréhensible par la plupart des humains... comme
l'empreinte d'une main... ce sont des référents communs. Les symboles
phalliques comme vaginaux sont aussi des éléments récurrents communs,
compréhensibles par tous, (sauf dans notre société qui, malgré leur
omniprésence en particulier dans l'architecture, à tendance à en évacuer
volontairement la perception.
C'est à dire qu'il peut y avoir des processus cognitifs complexes dans
les sociétés humaines, qui "masquent" la perception immédiate de
certains archétypes ou référentiels communs.)
Ensuite, selon la complexité et la sophistication des techniques de
transmission de l'information, il est possible de transmettre des
messages perceptibles par tous les humains au dela des langues et des
cultures.
Tout simplement en "reproduisant" le plus fidélement possible un type de
captation propre à un de nos mode de perception.
Par exemple le réalisme photographique, permet de faire en sorte qu'un
chinois, un français, un américain, un indien identifient une jeune
femme ligotée sur une photo... :-) par contre, la réaction que cette
image va suscité va être éminament variable selon le sexe, la culture,
l'histoire de la personne qui regarde.
Tous les systèmes immersifs qui simulent de façon réaliste le mode de
captation d'un de nos sens ont tendance à tendre vers une certaine
universalité au niveau de leur appréhension. Ainsi le cinéma, qui simule
de façon très précise la perception visuelle et la perception auditive
permet de faire en sorte qu'une très grande quantité d'humains, de
cultures et d'origines diverses, perçoivent sans trop de déformation une
grande part du répertoire informationnel véhiculé par le film. Par
contre, et c'est le sujet de nos débats, l'interprétation de certains
points spécifique vont variés en fonction des individus, parfois issus
d'une même ethnie ou culture.
c'est pour cela qu'il ne peut pas y avoir de lecture ou d'interprétation
univoque d'un film.
Donc, l'universalité de l'art existe jusqu'à certaines limites où
intervient la variabilité des systèmes cognitifs.
Simple... et pour revenir précisément à ce que tu évoquais, il me semble
qu'un grand nombre d'oeuvres d'art moderne ou contemporaines sont AMHA
précisément un contre exemple absolu d'universalité... quoiqu'en disent
les artistes eux-mêmes, ça me parait totalement vain d'y chercher une
universalité de l'appréciation, car au contraire... ce sont pour la
plupart, des ésotérismes très élaborés qui nécessitent pour être
apprécié une culture spécifique très spécialisée. Ce qui fait d'ailleurs
une grande part de leurs qualités.
> Mais cela appuie justement le fait qu'il ne faut pas oublier le fond
> lors de recherches formelles, qu'il ne faut pas, pour reprendre les termes
> employés par d'autres, séparer l'esthétique de l'éthique. D'ailleurs,
> Yannick utilise la phrase « Le sommeil de la raison engendre des monstres.
oui... on peut aussi la retourner... "l'excès de raison engenre des
monstres" ... :-)
> Par ailleurs la volonté de représenter autre chose qu'une scène immobile
> à deux dimensions n'est pas l'apanage du futurisme, et ce n'est pas parce
> que Balla s'inscrit dans le courant futuriste que ses toiles sont
> fascistes.
Ah ah... tu vois, tu y viens à mon raisonnement...
Balla était quand même très impliqué, et justement, les futuristes sont
eux aussi des prosélythes immodérés d'une morale de l'art...
Pour les futuristes l'art doit avoir une dimension politiquement morale,
et servir à nous éduquer... nous pauvres incultes qui ne savons pas où
sont les vrais valeurs morales... d'ailleurs la plupart des
totalitarismes commencent par essayer de "moraliser" l'art...
Moi je me méfie quand on commence à vouloir moraliser l'expression
artistique... :-) et si je réagis, c'est que je trouve ce discours sur
éthique et esthétique très limitte et réducteur...
> Pour reparler de Black Hawk Down, si Ridley avait fait un bon film,
> Bruckheimer ou non, c'eût été un bon film. Je vais prendre un autre
> exemple, que je connais très mal mais qui me semble approprié : les
> premiers écrits de Céline sont des oeuvres tout à fait appréciables, et
> l'antisémitisme de l'auteur, du moment où il n'y est pas présent, n'y
> change rien.
Oui...
> Et cette appréciation aveugle du futurisme par le public italien (le
> futurisme était un « art de masse ») a justement été utilisée par
> Mussolini pour rassembler la foule autour de ses idées. Je ne vois pas ce
> qu'il te faut de plus pour montrer l'importance de ne pas oublier le fond.
Ce n'est pas le futurisme qui a généré le fascisme.
Mussolini n'avait pas besoin du futurisme pour rassembler les foules...
c'est la qu'il est le problème.
La violence est dans la société avant d'être dans ses oeuvres d'art. Ce
n'est pas le film de Ridley Scott qui va provoquer une troisième guerre
mondiale.
> Cela dit, rien n'empêche en effet d'apprécier la qualité d'oeuvres
> futuristes ; il ne s'agit pas de censurer, mais d'alerter sur leur
> dangerosité. Et une fois alerté rien n'empêche de considérer que cela rend
> l'oeuvre répugnante.
Oui, bien sur, je n'ai jamais dit qu'il ne fallait pas informer sur les
oeuvres d'art, faut pas me faire dire ce que je n'ai pas dit. Je dis
simplement qu'il ne faut prendre les spectateurs adultes pour des cons
si facilement manipulables. C'est précisément le début du
totalitarisme... on va guider le peuple...
Et d'autre part précisément l'un des rôles des oeuvres de fiction c'est
de t'immerger très confortablement et sans danger dans un répertoire
émotionnel que tu ne peux pas pour des raisons évidente vivre dans la
réalité.
> À ce point du débat, alors que notre discussion m'a vraiment
> convaincu de la nécessité du fond alors que j'étais a priori enclin à
> apprécier un film purement plastique (ce qui m'apparaît maintenant
> dangereux), j'aimerais beaucoup comprendre ce qui fait que tu ne suis pas
> le même cheminement, alors que les exemples qui m'ont convaincu sont là.
> Si tu arrivais à verbaliser cela ça m'intéresserait beaucoup.
Ecoute, je te remercie sincèrement pour ton intérêt, et ce débat m'a
vraiment plus, mais il me semble quand même avoir été clair... donc je
ne peux conclure qu'une chose, c'est que nous ne sommes pas d'accord.
:-)
> > Ce n'est pas parcequ'on apprécie une toile futuriste qu'on devient un
> > facho pour autant... non ?
>
> À condition de faire preuve d'esprit critique. L'exemple du peuple
> italien est là pour montrer ce qui arrive sinon.
oh ben oui, c'est sur, s'il n'y avait pas eu le futurisme italien il n'y
aurait pas eu de fascisme :-))
> Je comprends ta position. Mais l'appréciation d'un film dont la forme
> est intéressante et le fond criticable relève d'une échelle de valeurs.
> Encore une fois, critiquer le fond n'est pas censurer, mais alerter.
Oui... c'est bien... mais tu sais, j'ai très peur que souvent tu prèche
des convaincus... pour le film de RS qui est à l'origine de ce débat, je
crois que personne ici n'a été dupe... et celui qu'il faut convaincre en
ce moment de calmer le jeu, c'est plutôt Bush et les extrémistes
religieux de tout bord qui sont en train de délirer, et la, la tâche me
parait nettement plus ardue.... :-)) En plus même le jeune qui s'engage
dans les commandos marines n'est pas dupe... il sait très bien dans quoi
il s'engage... :-)
> Pour
> ce qui est de l'échelle de valeurs, si quelqu'un me dit que c'est
> personnel, j'essaierai quand même de lui montrer, à partir des exemples
> ci-dessus, qu'il peut être dangereux de placer l'esthétique trop loin au
> dessus de l'éthique.
Et moi je dis que c'est dangereux de vouloir moraliser la création
artistique... je dirai même que sa fonction et sa nature est justement
d'être amorale... :-))
>
> Flûte, je ne t'ai pas convaincu qu'opposer la plastique à la
> littérature était abusif. En lisant la suite en effet je me souviens
> qu'ailleurs tu as parlé d'émotions non verbalisables. À ce sujet, je suis
> d'accord que la littérature n'est pas capable de susciter les mêmes
> émotions que l'oeuvre qu'elle va décrire, mais pour moi, verbaliser
> l'émotion, ce n'est pas la faire ressentir au lecteur, c'est tenter de
> décortiquer ses mécanismes, rendre le lecteur attentif à ces rouages, de
> sorte que confronté à l'oeuvre il pourra mettre en branle la même
> mécanique et ressentir lui aussi l'émotion. Mais la verbalisation ne
> conduit pas à se passer de l'oeuvre plastique elle-même.
Toutafé...
> Par exemple, dans la description des mécanismes de la peur par Rosset,
> on n'a pas peur en lisant le texte, mais en repensant aux émotions
> ressenties face à une situation non littéraire, on peut constater que
> cette théorie n'est pas infondée, et pour ma part je trouve cette
> compréhension de soi tout à fait jubilatoire.
oui
> Cela dit, pour revenir à ta phrase à laquelle je réponds, on revient à
> ce qui a été dit dans le débat sur éthique/esthétique : la forme ne doit
> pas se passer du fond, mais le fond sans la forme est insipide.
Bof... c'est précisément ce genre de système de valeur que je
critique... et que je trouve, sauf ton respect, carrément suspect et
dangereux... si si si
>
> Oui c'est vrai, mais d'un autre côté je crains, pour être tout à fait
> franc, que trouver cela sympathique relève du même sentiment de
> supériorité que celui que l'on peut ressentir à regarder des enfants jouer
> dans une cour d'école, en se disant « Aaah le temps de l'innocence ! ».
> Analyses-tu cette sympathie différemment ?
Oui...
> Par ailleurs, lorsque l'on est convaincu qu'apprécier la forme en
> oubliant le fond est dangereux, n'est-il pas de son devoir d'alerter ceux
> qui conservent cette approche de sa dangerosité ?
Absolument...
> Pour ma part je réponds « si », et je comprends enfin l'insistance de
> certains contributeurs de frcd à rejeter violemment une approche purement
> plastique.
Libre à eux... mais c'est dommage, ils ratent quelquechose... :-)
> Rien que pour cela, merci pour cette discussion, et vive frcd !
Hum...
> Je ne suis pas certain d'avoir compris ce qui te gêne, mais j'essaye
> quand même : dans une approche finalement assez défensive (rendue
> nécessaire par les horreurs auxquelles l'absence de vigilance a pu
> conduire l'Homme),
Oui... soyons vigilant, contrôlons un peu plus ce qu'il se passe dans le
champ des arts... et par la ce que pensent les gens... des fois que
certains prennent les films pour la réalité... :-))
> on s'attache à critiquer la dimension verbalisable, le
> reste du ressenti étant englobé dans la dimension émotionnelle, car on
> considère que c'est cette dimension verbalisable qui fait véritablement
> sens, et que c'est donc par rapport à elle que la vigilance s'impose.
C'est ça... d'ailleurs, ce qui est rigolo, c'est que je pense que cette
façon de fonctionner vous fait rater la vrai cible...au niveau de la
moralisation.
Ainsi des films chers à Yannick, comme la jeune fille et la mort, et
Salo, dont le discours explicite apparent sont des dénonciations de la
violence, sont en fait des films, qui par leurs images, leur dialogues
et leur mise en scène font preuvent d'un prosélitisme et d'une
complaisance incroyable et très jouisive à l'égard de la violence
sexuelle sado-maso...et flattent particulièrement l'imaginaire des
adeptes de cette sexualité... :-)))
Tu sais, c'est un vieux truc... qui date de Griffith... la scéne du
"méchant" qui ligote la fille sur la tronçonneuse ou au milieu des rails
:
"Non! Vraiment c'est pas bien de ligoter les filles sur des rails devant
la locomotive... euh, tu peux me repasser la scène où il l'attache..."
Mais je devrais pas te dire ça, ça fourbie des armes aux
"Moralisateurs"... :-))
> Et ce qui te gêne là, c'est que tu considères que ce que j'appelais le «
> reste du ressenti » fait également sens, et que l'on a tort par conséquent
> de considérer la dimension émotionnelle comme un simple écrin.
Oui... c'est la pour moi que se situe le vrai message... le cinéma c'est
avant tout un répertoire Emotionnel... pas un discours...
> Et là en
> effet, en cherchant en quoi la vigilance est nécessaire par rapport à une
> émotion privée de verbalisation, j'écarte tout message politique (qui
> relève de la verbalisation), et je tombe sur les pulsions qui conduisent
> l'homme au Mal, notamment sur le sadisme et le masochisme qui te sont
> chers.
Tiens, un discours manichéen... c'est pas bien... :-))
Et toujours ce postulat non démontré sérieusement et sur lequel repose
toute ton argumentation, qu'il y a une exemplarité des oeuvres
d'imagination dans le passage à l'acte...
C'est curieux mais il me semble qu'il y a une certaine occultation
volontaire de ta part comme de Yannick du rôle des oeuvres de fiction...
Le sadisme et le masochisme comme la violence, ce n'est pas le mal, ce
sont des éléments structurels du fonctionnement des humains et de ses
sociétés, et qu'on doit apprendre à gérer en nous forgeant une éthique
personnelle plus efficace qu'une morale imposée.
Et le cinéma comme la plupart des oeuvres de fiction sont des outils
extraordinaires qui permettent par un processus d'immersion cognitive et
sensuelle de confronter l'homme à ses propres démons... et l'obliger à
se forger sa propre éthique... à murir...
Paradoxalement, ce n'est pas en allant voir un film moralisateur benêt
qu'on va se forger une éthique perso, c'est précisément en allant voir
une fiction qui va aller jusqu'au bout d'une immoralité...tiens je pense
au dernier film de Claire Denis par exemple... qui est particulièrement
gratiné en terme de représentation de la violence.
Et puis tout simplement pas oublier le rôle cathartique de beaucoup de
films, en particulier les films d'horreur série B... tient Bad Test par
exemple....ou massacre à la tronçonneuse... :-))
c'est quoi le discours morale la :-)) c'est pas bien mon petit, tu sais,
il ne faut pas massacrer les gens à la tronçonneuse ?
> Ainsi, si l'on reconnaît la nécessité de la vigilance dans
> l'appréciation, quel que soit le chemin que l'on prend, on en revient à la
> verbalisation.
> Ensuite, effectivement, une fois que cette analyse de la
> dimension verbalisable a été effectuée (et a éventuellement révélé une
> richesse de fond, ou une neutralité, ou une tentative de manipulation), tu
> peux fonder la valeur de l'oeuvre sur sa dimension plastique, et ce même
> s'il y a tentative de manipulation, lorsque dans ton échelle de valeurs tu
> places l'esthétique au-dessus de l'éthique. Mais encore une fois une telle
> échelle est dangereuse, et je comprends que certains ressentent un besoin
> constant d'en recommander une autre.
Arrête... je suis impressionné finalement de constater à quel point tu
ne vois pas les dangers d'un tel raisonnement de vouloir mettre de
l'éthique dans l'esthétique...
C'est bientôt moi qui vais faire de la morale sur frcd.... :-)))
> Voilà, après avoir (je pense) compris la position de Yannick j'essaye de
> comprendre la tienne ; dis-moi si j'en suis encore loin.
non, il me semble que tu as saisi mon propos, mais tu ne veux pas le
cautionner ... car des choix moraux te l'interdisent ... je comprends ce
choix, c'est plus simple, mais un peu vain AMHA, car le champ des
oeuvres d'art est vaste, et il n'est pas possible d'élaborer de filtres
cognitifs simples qui soit pertinents pour toutes les oeuvres.
> Pour ma part, je
> préfère ne pas jouer avec le feu et condamner les films qui tentent de
> manipuler le spectateur.
Alors tu dois condamner tous les films et tous les romans... vaste
programme... :-))
Yann, noopervers...
> Si l'on pense à Bosch
Oui :-)))
> et à toute une frange d'auteurs chez qui la raison
> semble n'être pas la principale lumière, en allant jusqu'à Van Gogh et
> Artaud, on peut voir que la raison s'est endormie et que c'est ce qui a
> permi l'éclosion d'oeuvres dont il est difficile de nier l'importance et la
> postérité.
Merci G bog...
>
> Cependant, je ne voudrais pas défendre la même phrase en "positif", je
> ne veux pas faire l'éloge de la folie des artistes. En fait, je pense que la
> plus belle des choses à montrer, le plus beau des "monstres", c'est
> justement le combat titanesque de la raison et de la déraison exprimé par
> l'artiste qui en est souvent d'ailleurs le champ de bataille.
Excellent... j'adhère...
> > [...]
> > Cela dit, rien n'empêche en effet d'apprécier la qualité d'oeuvres
> > futuristes ; il ne s'agit pas de censurer, mais d'alerter sur leur
> > dangerosité.
>
> Je ferais une distinction entre la dangerosité de l'oeuvre futuriste à
> l'époque et celle de la même oeuvre aujourd'hui. Pour moi, cette dangerosité
> est en très grande partie effacée aujourd'hui. Qui peut encore se dire
> futuriste (dans le sens idéologique) ?
Tu soulève un vrai problème... en fait...
Le mythe du surhomme me parait être un mythe de plus en plus
d'actualité...
C'est vrai qu'il y a un malaise en ce moment par rapport à la vitesse et
aux mythes associés... et en ça je suis un peu de mauvaise foi lorsque
je m'insurge contre la volonté de moralisation de Yannick, car je pense
que malgré tout c'est bien de parler et d'énoncer parfois ce qui peut
paraitre suspect... de la à élaborer un nouveau moralisme, y a un pas
que je me refuse totalement à franchir...
Le problème c'est que les artistes, dans leur quête de transgression
naturelle, ont souvent une facheuse tendance à aller la ou ça va faire
mal...
Et beaucoup d'artistes associés au courant artistique dit "cyberpunk"
(poursimplifier), comme beaucoup d'artistes et d'auteurs utilisateurs de
NTIC, dont moi, adhèrent ou sont fascinés par les grandes mutations
technologiques que le siècle nous prépare... Et n'hésitent pas à
affirmer une adhésion/fascination totale par rapport aux transformations
corporelles, aux implants informatique, au clonage, nanotechnologies, et
autres mutations génétiques...etc...( les post-humanistes, les
extropians... entre autre...) Thèmes récurents dans de nombreux films et
dont c'est le vrai "message", que ne voient pas ceux qui ne font
attention qu'au scénario.
(Final Fantasy, Avalon, Ghost in The Shell, Terminator, Alien...etc...)
Mais hélas, il est possible de faire des analogies troublantes comme
l'esquisse Yannick à propos de la vitesse.... entre le manifeste des
futuristes et leur fascination pour les nouvelles technologies de
l'époque, et certains discours artistiques contemporains pro-nouvelle
technologies et mutations technologiques, auquel il m'arrive de
contribuer.
Ce qui pourrait me laisse augurer de façon intuitive et paranoïaque, de
la proximité d'une période aussi trouble que ce qui s'est passé en
allemagne ou en Italie d'avant guerre... d'ailleurs si on continue à
faire des analogies paranoïaque, on peut trouver des similitudes
formelles entre l'aisance technologique des USA et l'aisance
technologique de l'allemagne d'avant guerre.... ainsi qu'avec certains
discours guerriers manichéens de Bush qui sont très loin d'être
rassurants si on regarde l'histoire...
De plus les NTIC dans une interprétation cybernétique, ne sont pas
neutres, le développement technologique chez l'humain a pour fonction
principale d'assurer sa suprématie/sécurité sur les autres organismes
concurrents... dans une logique de prédation...
Les futuristes, comme tous les artistes à leur façon, sont des
visionnaires, et ils ont anticipé/exprimé à leur époque une dérive
totalitaire en train de naitre... le problème, c'est que dans leur
naïveté et leur candeur de "rêveurs provocateurs" ils se sont un peu
planté en adhérent les yeux fermés à une idéologie qui caressait leurs
aspirations de modernité dans le sens du poil...
Et donc je m'en voudrais beaucoup de favoriser par mes discours pro-NTIC
l'arrivée d'un nouveau big-brother...
Heureusement, un des éléments structurel de la mythologie cyberpunk qui
me sauve ethiquement, c'est sa dimension libertaire, et l'utilisation
précisément des NTIC pour lutter contre les totalitarismes
institutionnels... sauf que ça marche dans l'imaginaire, et a pu être
crédible dans les années 80 à 90, mais le mythe des Hackers résistants
libertaires est maintenant plus du folklore qu'un réel contre pouvoir
par rapport à l'emprise de plus en plus forte qu'offrent les NTIC aux
pouvoirs ou aux structures cachées des pouvoirs à fort tropismes
totalitaires... (si Yannick, il y a des totalitarismes à l'oeuvre dans
notre société).
Évidemment ces analogies sont minimes, et les USA comme l'Europe ne sont
pas l'Allemagne ou l'Italie d'avant Guerre... donc je me dis que
finalement, les ordinateurs, les réseaux, les NG, les implants, les
clones, les vaisseaux spatiaux, les nanotechnologies... autant continuer
de les aimer sans avoir l'impression d'être potentiellement un futur
collabo du nouvel ordre mondial... et puis c'est cette défiance
traditionnelle, profondément enracinée dans les mentalités des
intellectuels, par rapport aux éventuelles dérives de la modernité qui
fait qu'on a systèmatiquement 20 ans de retard sur les anglo-saxons à ce
niveau...
> > Et une fois alerté rien n'empêche de considérer que cela rend
> > l'oeuvre répugnante.
>
> Idem pour les "bons films" : je pense qu'une
> personne qui torturerait des jeunes vierges après avoir vu Salo l'aurait
> fait de toutes façon, avec ou sans Salo. (Mais sur ce point mon opinion
> n'est pas fermement établie, je dois l'avouer et ça se voit peut-être.)
Oui... moi la mienne est fermement établie sur ce sujet...
> > [...]
> > Cela dit, pour revenir à ta phrase à laquelle je réponds, on revient à
> > ce qui a été dit dans le débat sur éthique/esthétique : la forme ne doit
> > pas se passer du fond, mais le fond sans la forme est insipide.
>
> Je repose ma question : quel est le fond d'une nature morte ?
une corbeille de fruit... :-)
Yann versatile...
Je snippe étant d'accord avec ta vision du problème...
> Moi je me méfie quand on commence à vouloir moraliser l'expression
> artistique... :-) et si je réagis, c'est que je trouve ce discours sur
> éthique et esthétique très limitte et réducteur...
Le vrai problème se situe effectivement ici.
Se situer au niveau du devoir-être quant à l'art me semble un
non-sens... Et l'éthique est du domaine du devoir-être.
<mode taquinage>
D'ailleurs, mon éthique me semble parfois plus exigeante que la plupart
de ceux qui veulent subordonner, ou pour être moins polémique, relier
l'esthétique et l'éthique. Il n'y a qu'à voir comment certains prennent
à la légère le mec qui vient dire : "je soutiens qu'on peut se faire un
avis et argumenter categoriquement
sur un film meme si on l'a pas vu?"... Je suis désolé, mais il faut une
réponse ferme et définitive à cette question (certains d'ailleurs l'ont
fait) : au niveau éthique, on ne saurait le tolérer... Prévoir ce que
sera un film, et ne pas aller le voir sur cette prévision, discuter des
éventuelles ficelles qu'on pense y trouver, en parler, dire qu'on n'ira
pas le voir pour telle ou telle raison, avec tout ça je suis d'accord,
mais essayer de soutenir une argumentation sensée aboutir sur un
jugement, non, définitivement non. Si certains trouvent mon esthétique
pas très éthique, je trouve l'éthique de certains pas très éthique
justement.
Comment dire qu'on relie l'esthétique à l'éthique, et dans le même
temps, cautionner un pré-jugement qui se fait passer pour de
l'argumentation, ce qui dans la logique même de ceux qui esthétisent
l'éthique ou éthisent l'esthétique, devrait aboutir à pré-juger des
autres, sans les connaître, sur des aspects extérieurs à leur
personnalité ?
De plus l'intérêt d'une telle démarche est quasiment nulle : quel en est
l'intérêt, à part l'auto-satisfaction particulière de celui qui tranche
ainsi ? Et encore ... c'est encore pire quand il décide d'aller le voir
: quel regard peut-il porter sur l'oeuvre, sinon celui qui le conforte
dans ses opinions ? Au moins, si l'on a tranché d'avance, la moindre des
choses n'est de jamais aller le voir, et de ne pas se précipiter sur
frcd pour annoncer que finalement on l'a vu, mais ouf on n'a pas aimé,
comme si ce n'était pas prévisible, et comme si on était soulagé...
<fin mode taquinage>
L'esthétique réduite à l'esthétisation de l'éthique non seulement pose
des problèmes insurmontables quant à la définition de ce qui est
éthique, mais encore finit forcément par la censure. Je précise que la
censure commence par l'auto-censure : avec le risque d'écarter les
sujets limite, c'est à dire pour faire simple les vrais sujets...
Bien sûr la pensée facile, prête à l'emploi, c'est de dire : on rejette
tout ce qui n'est pas éthique pour nous aujourd'hui, et d'ailleurs par
prudence, tout ce qui ne sera pas considéré comme éthique demain... En
voilà un beau principe, style recette de cuisine, qu'on peut appliquer
tout en ayant la conscience tranquille. La difficulté commence dans les
détails... On n'écarte pas la difficulté, on ne fait que la déplacer...
Tout se tient, essayer de réduire la part subjective que comporte la
réception d'une oeuvre, c'est essayer de simplifier le problème, car on
"sait" d'avance qu'il y aura une solution "rationnelle" à la question
éthique. C'est ignorer que la réception , l'intériorisation d'une
oeuvre, est une question individuelle, et sans cesse à reposer. C'est
ignorer que le sens d'une oeuvre évolue avec le temps, que la question
du sens est incessante, se renouvelle... Que l'oeuvre n'est jamais reçue
d'une manière définitive...
Je reposte puisque c'est le sujet quelques réponses de P. Ricoeur à ce
sujet qui me semblent tellement claires :
Question : [...]Cela renvoie à la question de l'éthique évoquée
précédemment dont on peut se demander si elle fait partie d'un monde,
même si elle renvoie au monde?
Réponse : L'éthique a pour fonction d'orienter l'action, tandis que dans
l'esthétique il y a suspension de l'action et donc, du même coup, du
permis et du défendu, de l'obligatoire et du souhaitable. Je crois qu'il
faut maintenir la catégorie de l'imagination, qui est un bon guide.
L'imagination c'est le non-censurable...
Q : Pour l'art?
R : Oui, pour l'art, sous toutes ses formes. Toutes les fois que des
mises en forme deviennent coutumières et se transforment en injonctions,
en "éthisant" en quelque sorte l'esthétique, il y a nécessité d'un
moment de rupture, de provocation, comme le montrent en musique les
exemples de Schonberg, de Varèse ou de Boulez. Cela pour regagner la
libre expansion de l'imaginaire, défini par cette capacité non-censurée.
Q : Quel est le rapport justement entre cette non-censure et la censure
potentielle de l'éthique qui suppose des interdits et des commandements
éthiques ("Tu ne tueras point"), alors qu'en principe il n'y a pas de
commandements esthétiques?
R : Ce qu'il ne faut pas faire, c'est tirer une éthique d'une
esthétique, ce qui est la contre-partie de la libération de l'esthétique
par rapport à l'éthique. De ce point de vue-là je dirais avec les
Médiévaux qu'il faut maintenir la parfaite autonomie de chacun des
grands Transcendantaux: le Juste, le Vrai, le Beau. Et le Beau n'est ni
juste ni vrai. D'accord pour que l'Être soit dit par le beau, oui, mais
justement il n'est pas dit sur le mode véritatif, ni sur le mode
injonctif.
Rousseau, d'accord...
>> « El sueno de la razon produce monstruos ».
>
> Le sens que toi et YR donnent à cette phrase, c'est que la raison doit
> rester en éveil pour "éviter" d'engendrer des monstres, perçus comme des
> choses négatives.
Je vais faire plaisir à Yann : l'image parle d'elle-même.
http://spaightwoodgalleries.com/Media/Old_Masters/Goya/Goya_Cap_D80_Sleep_Reason.jpg
> En fait, je pense que la plus belle des choses à montrer, le plus beau
> des "monstres", c'est justement le combat titanesque de la raison et de
> la déraison exprimé par l'artiste qui en est souvent d'ailleurs le champ
> de bataille.
Oui, et Goya dans sa période des Caprichos est un bel exemple de cette
lutte créatrice entre la raison et la folie. Mais le sommeil de la raison
ne permet pas cette lutte, et Goya ne met pas en garde contre la folie,
mais contre l'absence d'exercice de la raison. Ce qui rejoint l'idée que
l'esthétique ne peut se passer de l'éthique.
>> [...]
Note que dans ce passage que tu snipes, je suggérais qu'une oeuvre de
Céline comme Voyage au bout de la nuit n'est pas condamnable parce que
l'antisémitisme de l'auteur n'y transparaît pas.
> Je ferais une distinction entre la dangerosité de l'oeuvre futuriste
> à l'époque et celle de la même oeuvre aujourd'hui. Pour moi, cette
> dangerosité est en très grande partie effacée aujourd'hui.
C'est possible (je vois mal pourquoi mais c'est possible, et
le fond du problème n'est pas là). C'était un exemple montrant comment
l'oubli de l'éthique dans une démarche esthétique a pu conduire à
l'horreur. L'exemple n'est peut-être plus d'actualité, mais la leçon que
l'on peut en tirer n'en perd pas de sa valeur.
>> Et une fois alerté rien n'empêche de considérer que cela rend l'oeuvre
>> répugnante.
>
> Si par hasard on m'amenait un lecteur de Céline qui aurait été
> "converti" à ses idées merdiques par ses livres, je pense sincèrement
> que ce type était perdu d'avance et qu'il aurait de toute façon épousé
> ces idées, avec ou sans l'aide de Céline.
Si cela ne te gêne pas, je vais plutôt reprendre l'exemple du
futurisme car il a été utilisé à grande échelle : si je te suis, l'Italie
serait devenue fasciste sans le futurisme. Cela relève en effet du bon
sens, mais le futurisme fut une brique de l'édifice fasciste, et la
modestie de son rôle justifie-t-elle de ne pas le condamner ?
Car si une oeuvre conduit au fascisme, c'est qu'elle en porte les
germes. Nous ne parlons donc pas d'oeuvres se réclamant du futurisme mais
ne valorisant pas chez le spectateur cette fascination d'une puissance
mécanique inhumaine, pas plus que nous parlons d'oeuvres de Céline où ne
transparaît pas l'antisémitisme. Non, nous parlons d'oeuvres où
transparaît bel et bien un message dangereux.
Et là tu dis « oui le message est dangereux, mais les gens sont
intelligents ». Donc on peut tout dire, là je suis d'accord, mais surtout
ce n'est pas la peine d'alerter l'opinion sur la dangerosité d'un message,
et là je te trouve utopiste.
> Je ne sais pas comment la raison peut s'appliquer à ce problème sans,
> soit effacer de l'histoire une foule d'auteurs pourtant reconnus
Il ne s'agit pas d'« effacer » une oeuvre, même pas de la censurer ; il
s'agit de mettre en garde le lecteur qui ouvre le livre : « au-delà de
cette ligne, allumez votre sens critique ».
> soit [...] séparer éthique et esthétique. En fait, il me semble que la
> seconde solution est préférable en attendant une troisième solution plus
> élégante.
Comme l'a dit Sherlock Holmes : « lorsqu'il ne reste plus qu'une
solution, aussi incroyable soit-elle, c'est la bonne. ». Mais ici il en
reste d'autres.
Vigilance, mais tolérance. C'est la « troisième solution » que je te
propose.
>> la forme ne doit pas se passer du fond, mais le fond sans la forme est
>> insipide.
>
> Je repose ma question : quel est le fond d'une nature morte ?
Ce n'est pas à moi qu'il faut poser cette question, car je trouve
justement l'académisme insipide, m'appuyant en cela sur Platon qui
critique l'art lorsqu'il prétend simplement imiter le réel : puisque de
toute façon on n'arrivera pas à l'égaler, ça ne sert à rien.
Ensuite, tu parles peut-être de natures mortes qui font autre chose que
tenter d'imiter le réel. Cela constitue un fond.
>> Voilà, après avoir (je pense) compris la position de Yannick j'essaye
>> de
>> comprendre la tienne ; dis-moi si j'en suis encore loin. Pour ma part,
>> je préfère ne pas jouer avec le feu et condamner les films qui tentent
>> de manipuler le spectateur.
>
> Dans un sens, quel film ou quelle pièce de théâtre ne tente pas de
> manipuler le spectateur ?
Il y a tout de même une différence entre réaliser une association
inconsciente dans l'esprit du spectateur entre l'ingérance armée et un
sentiment de fierté, et tenter de le convaincre par des arguments
confrontés à son esprit critique que l'ingérance armée est une bonne
chose. Convaincre n'est pas forcément manipuler. Et ce n'est pas un hasard
si sur certains thèmes (je pense au nationalisme américain) les
réalisateurs ont systématiquement recours à la manipulation inconsciente.
> Je lis en ce moment Aristophane, voilà un type qui cherche visiblement à
> manipuler le spectateur : il cherche à le faire rire grassement et
> parallèlement il cherche à lui donner des solutions pour régler les
> problèmes de la Cité.
Si ton adhésion à ces solutions repose sur une réflexion et une
assimilation consciente, d'accord. Mais tu es alors capable de dire
pourquoi ce sont de bonnes solutions. S'il s'agissait d'une adhésion à des
idées considérées comme positives car associées au rire, à un sentiment
agréable donc, mais que tu ne pouvais pas justifier ton adhésion à ces
idées, ce serait de la manipulation. Cette définition ne fait pas
intervenir l'échelle de valeurs du spectateur et me semble donc objective.
--
Jihem
> Pour moi la question de l'universalité de certaines formes d'art a une
> réponse relativement simple.
>
> J'ai adopté la pensée cybernétique, en attendant de rencontrer une
> proposition plus pertinente. Donc je raisonne en terme d'information et
> de traitement de l'information.
Pourquoi pas, mais je trouve cela moins clair. Par ailleurs cela me
rappelle une réflexion amusante : prends un film qui suscite une émotion
non verbalisable. Sous forme numérisée il suscite toujours la même
émotion, vrai ? Pourtant, si tu lis les 0 et 1, tu retransmets la totalité
du film sous forme verbalisable. Bien sûr le langage utilisé est un peu
abscons. Et le message transmis, chez quelqu'un de non éduqué (on peut
imaginer quelqu'un apprenant à décoder du mpeg de tête comme on apprend à
lire), n'est pas immédiatement sensible. Mais d'un point de vue théorique
tout ce qui est numérisable est verbalisable.
> C'est à dire qu'il peut y avoir des processus cognitifs complexes dans
> les sociétés humaines, qui "masquent" la perception immédiate de
> certains archétypes ou référentiels communs.)
Tu veux dire que le surmoi subit une influence culturelle ? Ça me
semble difficilement contestable en effet.
> Ensuite, selon la complexité et la sophistication des techniques de
> transmission de l'information, il est possible de transmettre des
> messages perceptibles par tous les humains au dela des langues et des
> cultures.
>
> Tout simplement en "reproduisant" le plus fidélement possible un type de
> captation propre à un de nos mode de perception.
Oui, ce que tu dis est très intéressant. Il ne s'agit pas de reproduire
le plus fidèlement possible le stimulus devant les yeux, devant le sens
critique, mais derrière, directement dans le lieu du ressenti, afin de
contourner l'influence du surmoi (en particulier, mais c'est plus général
bien sûr).
Et je suis d'accord, c'est de la manipulation mais cela ouvre une
nouvelle dimension, superbe, à l'art. Superbe, mais dangereuse : je ne
peux m'empêcher de rappeler que c'est tout de même dangereux car cela
revient à donner à l'artiste un accès libre sur notre pensée, les droits
en écriture pour reprendre un terme informatique.
Et puisque l'on contourne le filtre du sens critique afin justement de
susciter une émotion « pure », l'intelligence du spectateur que tu
présentais comme suffisante ne sert plus à rien.
Finalement, je ferai un parallèle entre ce mécanisme qui permet de
susciter des émotions inédites, mais qui est dangereux pour le
consommateur, je veux dire le spectateur, et la drogue. C'est sûr, en la
refusant on passe à côté de certaines sensations. Mais pour ma part je
préfère ne pas m'y accoutumer. Car ce que je trouve de plus beau dans
l'homme, ce qui me fait vraiment triper, c'est l'exercice de la Raison.
J'aime aussi le goût du chocolat, par exemple, mais quand je prends du
recul c'est le phénomène de la pensée que je trouve le plus magnifique.
Mais c'est personnel, j'en suis conscient.
> "l'excès de raison engenre des monstres" ... :-)
C'est vrai ; mais ce n'est pas parce que l'on vénère la raison que l'on
néglige les émotions non raisonnées, le tout étant de trouver un juste
milieu.
> Pour les futuristes l'art doit avoir une dimension politiquement morale,
> et servir à nous éduquer... nous pauvres incultes qui ne savons pas où
> sont les vrais valeurs morales... d'ailleurs la plupart des
> totalitarismes commencent par essayer de "moraliser" l'art...
>
> Moi je me méfie quand on commence à vouloir moraliser l'expression
> artistique... :-) et si je réagis, c'est que je trouve ce discours sur
> éthique et esthétique très limitte et réducteur...
Il ne s'agit pas justement d'imposer une pensée morale sur ce qui est
bien ou mal mais de faire réfléchir. Ensuite oui, j'ai des convictions sur
ce qui est bien ou mal pour l'homme, et je le dis, mais en tentant de
confronter ces convictions à l'esprit critique de mon interlocuteur. C'est
pour cela que je fais tant d'efforts pour essayer de te comprendre.
Surtout que ça me force à me remettre en question, à mieux comprendre de
quoi je parle, et éventuellement à changer de position.
> Ce n'est pas le futurisme qui a généré le fascisme. Mussolini n'avait
> pas besoin du futurisme pour rassembler les foules... c'est la qu'il est
> le problème.
> La violence est dans la société avant d'être dans ses oeuvres d'art. Ce
> n'est pas le film de Ridley Scott qui va provoquer une troisième guerre
> mondiale.
Bien sûr, comme je l'ai dit dans une réponse à gbog, le futurisme n'est
qu'une brique de l'édifice fasciste. Mais à force de laisser passer des
briques un mur s'élève. Car d'où vient le fascisme ? Est-ce un monolithe
qui s'est posé là comme ça où l'amoncellement patient et discret d'une
multitude de petites briques comme le futurisme (il y en a sans doute de
plus grosses, mais cela ne change pas grand-chose, mille petites briques
qu'on laisse passer faisant plus qu'une seule cent fois plus grosse) ?
> Je dis simplement qu'il ne faut prendre les spectateurs adultes pour des
> cons si facilement manipulables. C'est précisément le début du
> totalitarisme... on va guider le peuple...
Je le répète magré ma volonté de rester synthétique car je pense que
c'est le point le plus important de ce message : ici il s'agit de
soumettre des idées à la réflexion de l'homme (pour qu'il puisse se «
forger sa propre éthique » comme tu dis), pas de les lui faire assimiler
de façon plus ou moins forcée ou inconsciente.
Je snipe pas mal de choses après car ce serait pour répéter ce que j'ai
déjà dit. Mes idées sont là ; si tu penses que j'élude des arguments
intéressants n'hésite pas à les ressortir.
> Ainsi des films chers à Yannick, comme la jeune fille et la mort, et
> Salo, dont le discours explicite apparent sont des dénonciations de la
> violence, sont en fait des films, qui par leurs images, leur dialogues
> et leur mise en scène font preuvent d'un prosélitisme et d'une
> complaisance incroyable et très jouisive à l'égard de la violence
> sexuelle sado-maso...et flattent particulièrement l'imaginaire des
> adeptes de cette sexualité... :-)))
Jusqu'ici nous parlions de films censés ne pas avoir de fond
« littéraire » au sens Yann Minhien ;), là tu parles d'autre chose. C'est
un autre débat ; laisse-moi souffler.
>> en cherchant en quoi la vigilance est nécessaire par rapport à une
>> émotion privée de verbalisation [...] je tombe sur les pulsions qui
>> conduisent l'homme au Mal, notamment sur le sadisme et le masochisme
>> qui te sont chers.
>
> Tiens, un discours manichéen... c'est pas bien... :-))
C'était un exemple ; étant donné le contenu qui précédait, la nature de
cet exemple montre sans doute le rôle de l'inconscient, mais mon appareil
psychique intéresse sans doute assez peu frcd. Cela dit merci de me
l'avoir fait remarquer, à titre personnel ça m'intéresse.
> Et toujours ce postulat non démontré sérieusement et sur lequel repose
> toute ton argumentation, qu'il y a une exemplarité des oeuvres
> d'imagination dans le passage à l'acte...
Puisque c'est le fondement d'un outil assez commun appelé propagande,
j'imagine que des ouvrages en traitent plus en profondeur que les quelques
lignes que j'ai pu écrire dans <a5fvan$io2$1...@sphere.via.ecp.fr>.
Pour ma part, l'importance qu'y accordent ceux qui veulent faire
accepter par l'opinion des idées que je trouve répréhensibles (fascisme,
manichéisme en général) me suffit. Mais si tu veux trouver un tel ouvrage
et en proposer une synthèse ici, n'hésite pas.
> C'est curieux mais il me semble qu'il y a une certaine occultation
> volontaire de ta part [...] du rôle des oeuvres de fiction...
Pff, « occultation volontaire », alors que depuis le début je m'efforce
de faire preuve de toute l'honnêteté intellectuelle possible. Mais de même
qu'une oeuvre classée « futuriste » n'est pas forcément fasciste, de même
une oeuvre à l'intention innocente n'est pas forcément inoffensive.
Mais ce n'est pas parce que je soumets une oeuvre à mon esprit critique
qu'ensuite je ne peux pas, une fois que j'ai vérifié que ma ceinture est
bien attachée, me laisser transporter. Si tu veux un exemple l'un de mes
livres préférés est « Les Fleurs du Mal ».
> Et puis tout simplement pas oublier le rôle cathartique de beaucoup de
> films, en particulier les films d'horreur série B... tient Bad Test par
> exemple....ou massacre à la tronçonneuse... :-)) c'est quoi le discours
> morale la :-)) c'est pas bien mon petit, tu sais, il ne faut pas
> massacrer les gens à la tronçonneuse ?
Tu me force à aller jusqu'au bout de mes idées. Merci. Je n'ai vu
aucun des deux films que tu évoques. J'imagine que ce que d'aucuns
pourraient reprocher à « Massacre à la tronçonneuse » c'est en montrant
une violence extrême de banaliser la violence courante, d'atténuer ainsi
la dimension culturelle de son rejet. Cela peut ne pas paraître un
problème puisque cette dimension culturelle a un fondement, et un être
pensant devrait être capable, à partir de valeurs fondamentales comme le
respect de l'autre, de condamner cette violence après réflexion. Le
problème c'est qu'il y aura toujours une poignée de psychopathes qui n'y
arriveront pas et qui feront un massacre. Ainsi oui, je pense qu'il faut
maintenir certaines conclusions aussi essentielles que « il ne faut pas
massacrer les gens à la tronçonneuse », et l'on retrouve ce côté «
moralisateur » qui t'exaspère. Je te répondrai qu'il faut se limiter à des
conclusions essentielles dont le reniement met indéniablement l'humanité
en danger. Et l'on n'aura qu'à appeler cet ensemble de « conclusions
essentielles » une morale. Le problème est alors jusqu'où étendre cette
morale ? Qu'est-ce qu'une conclusion « essentielle » ? C'est bien parce
que c'est une affaire de consensus et que l'on ne peut cependant pas s'en
passer que l'on en discute encore aujourd'hui.
> Arrête... je suis impressionné finalement de constater à quel point tu
> ne vois pas les dangers d'un tel raisonnement de vouloir mettre de
> l'éthique dans l'esthétique...
Effectivement, il y a un danger à définir une morale, celui d'aller
trop loin et de nier la liberté de chacun ; je pense cependant que cette
morale est nécessaire pour éviter qu'un psychopathe ne commette un
massacre à la fourchette. Et tant que cette morale reste culturelle et ne
fait pas partie de la loi (je pense au rejet de choses plus compliquées
que le meurtre, par exemple la liberté d'expression, la limite étant
affaire de concensus), celui qui aurait pu retrouver par la réflexion que
le meurtre est condamnable saura s'abstraire de la valeur culturelle du
rejet et penser par lui-même.
Ainsi, tant que la morale reste culturelle, le seul qui a à pâtir de
cette morale est celui qui a une pulsion de mort et qui n'est pas capable
par la réflexion de la réprimer.
Ensuite, on peut craindre un glissement qui conduirait à considérer que
ne pas inscrire la morale dans la loi est immoral, d'où la nécessité de la
vigilance dans les deux sens. Mais une fois assimilée cette nécessité de
vigilance, je pense toujours que la morale est nécessaire. Enfin,
attention, il ne s'agit pas de censurer, mais de préserver une culture qui
condamne le meurtre, tout en incitant à la réflexion.
Car le discours théorique qui prend l'homme comme un être pensant
purement conceptuel est une chose, et la réalité d'une humanité dont la
raison est parfois endormie en est une autre dont il faut tenir compte.
> C'est bientôt moi qui vais faire de la morale sur frcd.... :-)))
Hehe...
--
Jihem, qui attendait depuis 18h que sa connexion refonctionne :-/
> >En général au volant d'un véhicule, qui est une métaphore des jambes,
on
> >marche plus vite, et la pensée se met à fonctionner comme lorsqu'on
> >marche. Le cerveau se met justement à faire abstraction de la
"conduite"
>
> Etonnant.
Mais c'est pourtant vrai, dans certaines conditions. Bien sûr, quand tu
conduis en ville, ou dans des situations requérant vraiment ton
attention, ça n'est pas le cas.
> >pour penser, réfléchir, imaginer... et justement, très souvent,
plonger
> >dans le passé...
>
> Tu me diras comment tu fais pour penser, réfléchir, imaginer à 130.
Mais tu n'as pas à te forcer, hein. Ca vient très naturellement. Tu ne
fais pratiquement aucun mouvement pour peu que l'autoroute soit peu
fréquentée, même ton pied qui appuie de manière à garder une vitesse
constante, et dont tu finis par ne plus sentir la pression si ça se
prolonge..
C'est simple Yannick : la vitesse constante est proche de l'immobilisme.
En physique classique ces deux états sont ceux pour lesquels aucune
force ne s'exerce sur l'élément considéré. Si tu roules à peu près à
vitesse constante, dans un paysage proche paraissant immobile (sur une
autoroute droite, il y a déjà la vision de la route qui est à peu près
toujours la même, beaucoup plus qu'hors autoroute en tout cas). Tu as de
plus un fond sonore qui varie très peu. L'extérieur se rapproche de
l'immobilisme et de l'uniformité.
La possibilité de concentration ne dépend pas de la vitesse à laquelle
tu vas, mais de ce qui te distrait et attire ton attention vers la
réalité extérieure. Et plus celle-ci est monotone, moins elle change,
plus il est facile de s'en abstraire. Il m'est arrivé souvent de faire
des heures d'autoroute et d'arriver sans avoir vu passer le temps, et ce
sans passager, sans musique, etc. Tu ne peux pas nier au nom d'un
principe un phénomène qui existe clairement.
D'ailleurs, dans l'exemple de Kundera de l'homme qui marche, il parle de
ralentir le pas... au sens propre il ne s'agit pas de vitesse mais
d'accélération et de décélération, qui sont des variations de vitesse.
Je ne dis pas que la vitesse n'y est pas liée non plus, mais c'est quand
tu accélère ou ralentis que tu subis une force "extérieure" qui te
ramène à la réalité concrète. Si ta vitesse est constante et
l'environnement suffisamment "stable", ça n'est pas le cas.
>Par
> contre, je conçois plus aisément cela dans le calme, la lenteur où
> justement la pensée, l'imaginaire a le temps de se développer, de
> s'étendre, de gambader, de prendre des tours et des détours, ce qui
est
> incompatible avec la conduite.
Absolument pas. C'est rare, ça demande certaines conditions, mais ça
n'est pas incompatible. Il faut voir ce que "vitesse" et
"lenteur"recouvrent vraiment. En voiture, le calme, tu peux l'avoir.
Quelques fois plus que chez toi pour peu que tu vives près d'une rue
agitée, par exemple.
>Comme j'ai conduit de nombreuses années, au
> contraire, la vitesse provoque une faramineuse agressivité et stupide
> comportement.
Mais pas la vitesse en soi, cf plus haut. Quand tu regardes par le
hublot dans un avion de ligne, tu n'as pas ce sentiment, non, et je
pense que même le pilote ne l'a pas. Le paysage change très peu, très
lentement.
>On en veut toujours plus et aller toujours plus vite comme
> une spirale infernale.
C'est une tendance, mais pas une pulsion incontrôlable, hein. Si tu
conduis souvent, tu te fixes assez rapidement tes limites personnelles
de vitesse, par exemple, que tu ne chercheras plus à dépasser, qui
dépendent des limites de vitesse mais aussi de tes capacités de
conducteur...
>Je suis toujours étonné de voir à mon carrefour des
> automobilites griller un feu qui vient de passer au rouge pour être
arrêter
> au feu rouge suivant à dix mètres. Stupido. C'est là où la technique
domine
> l'homme ou que celui-ci se laisse vampiriser par elle.
Bien sûr mais là tu mélanges un peu des choses différentes. Il y a bien
des comportements extrêmes, violents, stupides, induits par
l'automobile, ça ne veut pas dire qu'en principe il est impossible de
"penser" quand tu conduis quelles que soient les conditions.
En gros, le problème n'est pas la vitesse en soi, c'est la vitesse des
changements perçus, et aussi le degré de contrôle que tu exerces dessus.
Tiens, rappelle-toi le vaisseau de 2001. Filmé comme s'il allait très
lentement, alors qu'en fait sa vitesse est très élevée... ut as
l'impression qu'il est presque immobile. Et ses occupants ont
l'impression qu'il est complètement immobile. Lors des scènes de sortie
dans l'espace, arrive-tu à te représenter que l'ensemble de ce que tu
vois est en train de se déplacer à une vitesse faramineuse ?
--
Cédric
> J'aime beaucoup ce texte plus haut. Simple en plus et concret. Car il
> indique bien une condition existentielle dans le rapport que l'homme a de
> lui-même. Ici, le temps du recul, de la reflexion, de la méditation, du
> souvenir qui se fait dans la lenteur.
Oui, je critique pour le plaisir, mais c'est vrai que Kundera écrit
magnifiquement bien... :-))
> Tu me diras comment tu fais pour penser, réfléchir, imaginer à 130.
Ah ben oui... moi c'est ce que ça me fait...d'ailleurs nombre de mes
scénarios je les ai élaborés sur l'autoroute au volant d'un véhicule
roulant à grande vitesse... Donc exit la démonstration de Kundera, et
exit tu vas voir l'opposition course à pied ... automobile...
> Par
> contre, je conçois plus aisément cela dans le calme, la lenteur où
> justement la pensée, l'imaginaire a le temps de se développer, de
> s'étendre, de gambader, de prendre des tours et des détours, ce qui est
> incompatible avec la conduite.
Ehhh non... même s'il n'y a que moi qui suis capable de faire ça :-)))
Remarque, ça me confirme que les bretons asiatique sont sans doute la
race supérieure... :-)))
> Comme j'ai conduit de nombreuses années, au
> contraire, la vitesse provoque une faramineuse agressivité et stupide
> comportement. On en veut toujours plus et aller toujours plus vite comme
> une spirale infernale. Je suis toujours étonné de voir à mon carrefour des
> automobilites griller un feu qui vient de passer au rouge pour être arrêter
> au feu rouge suivant à dix mètres. Stupido. C'est là où la technique domine
> l'homme ou que celui-ci se laisse vampiriser par elle.
Oui... absolument ! Mais pour moi, Kundera, parceque ça sert sa
métaphore sur notre relation à l'histoire et à la société, occulte
volontairement le fait que ces pulsions agressives de compétition qui
accaparent toute notre psychée, sont en fait directement issue de la
course à pied... car courir est aussi lié à la notion de vitesse...
Pourquoi est ce que l'homme cours originellement...
lorsqu'il chasse, qu'il attaque, qu'il fuit, qu'il est en
"compétition"... et donc tout système technologique qui est une
métaphore des jambes et qui donc amplifie la fonction de courrir
amplifie aussi chez l'homme des tropismes de compétition, de chasse et
d'attaque....
résultat les comportements agressifs dramatiques de beaucoup de
conducteurs qui deviennent inconsciemment des prédateurs en chasse
lorsqu'ils prennent les commandes d'un véhicule automobile...
C'est le pouvoir de nos métaphores technologiques sur nos comportements
comme le pouvoir des métaphores visuelles sur notre imaginaire et notre
inconscient...
c'est aussi pour cela que lorsque je conduit, je reproduis aussi des
processus positifs propre à la marche... je me sens très péripatéticien
automobile dans ce cas, car lorsque je marche... je pense... et lorsque
je conduit... je pense aussi... et la marche comme la conduite génèrent
le même type de pensée, ou disons la même catégorie de rêverie
hyperconsciente extrêmement créative... :-))
Kundera pour les besoins de son analogie vitesse=modernité, occulte
volontairement le fait que courir n'induit pas un comportement pacifique
de réflexion, mais d'abord un comportement de compétition...
Sauf dans la course de jogging sans enjeux, similaire à la marche, mais
il en est de même pour la conduite nonchalante...
Tiens, pour le fun, voici d'autres exemples du pouvoir des métaphores
technologiques sur notre psychée....
Le pistolet, qui est, bien sur une métaphore sexuelle, mais aussi et
surtout une métaphore de la main... (je touche plus fort et plus loin)
Le pistolet amplifie dans notre cerveau l'envie justement de toucher
loin, et nombreux sont ceux qui, lorsqu'ils ont une arme dans les mains
ont du mal à s'empêcher de tirer sur n'importe quoi, même si les
conditions de sécurité ne sont pas optimum... d'ou le nombre d'accidents
qui arrivent... et aussi pourquoi le port d'arme impose (théoriquement)
un apprentissage, pour que son utilisateur ne se laisse pas "posséder"
par le pouvoir métaphorique, (pulsion de tuer) de ce type d'objet
particulièrement ravageur... cf... taxi driver.... :-))
La longue vue... en amplifiant la fonction de regarder plus loin,
stimule les pulsions de voyeurismes, et c'est très vite qu'on braque la
longue vue vers les fenêtres des voisins...
La photographie, qui, au niveau grand public est surtout utilisée comme
métaphore, non pas de l'oeil, mais de la mémoire, et qui incite certains
à ne plus fonctionner dans leur relation au réel, aux autres, à tout ce
qui est éphèmère dans notre vie qu'à travers une compulsion forcenée de
"Photographier" pour "archiver"....
Et je te parle pas de la caméra vidéo ou cinéma chez certains gravement
atteints...;-)
L'utilisation de toute technologie métaphorique provoque un effet de
narcose narcissique, qui nous possédera tant que nous n'aurons pas
compris qui nous sommes devenu avec cet implant greffé.
Alors déja, savoir qui nous sommes sans implants technologiques c'est
pas facile, et une vie ne suffit souvent pas, mais alors si en plus on
utilise des excroissances qui amplifient nos fonctions physiques et
mentales... ça devient encore plus laborieux... résultat... 8000 morts
par ans sur les routes... :-))
Et je te parle pas de la dernière greffe technologique que la modernité
nous a offert : l'informatique...
Résultat, certains d'entre nous se mettent à "communiquer" de façon
compulsive et effreinée des heures et des jours durant sur l'internet
dans les NG, et il faudra du temps pour nous libérer de l'asservissement
narcissique que provoque ce monstrueux amplificateur de la voix.... :-))
> Pas seulement mais que la vitesse qui veut toujours aller plus vite, nous
> fait perdre un rapport concret au monde et pour nous soumettre à sa froide
> logique utilitaire. Et cela a évidemment un rapport avec l'oubli en
> général. On le voit dans tous un tas de domaines.
Euh... des exemples concrets seraient les bienvenues la, pour la
perfection de la démonstration... quels domaines... ?
> Tu emploies le mot de lyrique d'une drôle de manière. Il n'y a rien de
> lyrique dans cette prose. Sinon il parle là d'un coureur à pied et non d'un
> sportif de haut niveau qui, pris dans des intérets économiques, de
> notoriété, d'efficacité, de rendement, de performance etc. en vient à
> mépriser son corps comme on le voit dans le sport actuellement. Pas un
> hasard à notre époque si cela est lié avec la prise d'anabolisants.
Ahhhhh pas du tout la même chose, alors "oui" dans le cas du coureur de
jogging qui court à son rythme tranquillement, mais dans ce cas, je peux
te garantir qu'un chauffeur automobile qui musarde tranquillement sur
une route de campagne pense, réfléchie, rêve, se promène dans son futur
ou son passé tout autant... :-)))
Par contre, effectivement, celui qui court à pied pour la compétition,
comme celui qui conduit un véhicule dans le même état mental, il a
effectivement l'esprit particulièrement accaparé par l'emprise de la
vitesse... nous sommes d'accord... mais c'est pareil pour les deux...
> Tu as une drôle manière de conduire. Dans la vitesse, l'homme s'oublie
> lui-même ; Il n'a pas le temps de penser ou alors tu as une autre
> définition du mot penser, méditer, savourer. Il ne vaut mieux pas être
> distrait en voiture quand tu conduis à 130.
Bof... y'a vraiment que moi qui passe son temps et à réfléchir au
volant d'une voiture lorsqu'il se tape de longues routes ? Allez,
rassurez moi... sinon je vais vraiment finir par croire que je suis un
surhomme.... ou que c'est miraculeux que je soit encore vivant...:-)
>
>
> Il n'y a ici aucune comparaison entre l'orgasme féminin et masculin mais au
> contraire une réduction de la sexualité à une fonctionnalité utilitaire et
> qui là touche aussi bien les hommes que les femmes. Par ailleurs, dans ce
> texte, il compare aussi tout cela avec une autre histoire, Point de
> lendemain de Vivan Denon, une histoire d'amour, d'attente, de saveur,
> d'érotisme dégusté dans la lenteur où le corps, l'esprit de l'autre a une
> réelle présence.
Bon, soyons bêtement et trivialement explicite...
Mais bien sur, nous savons tous que les prémices et la sensualité sont
importants, ... ainsi que cette merveilleuse et lente découverte des
corps et de l'érotisme de l'autre... :-))
Mais pour moi, en aucun cas je n'associerai l'orgasme féminin à une
fonctionnalité utilitaire, car à la différence de nous, les mâles, pour
certaines femmes, et en tous cas, beaucoup que j'ai connu, l'orgasme
n'a pas du tout la même signification.
Pour moi Kundera ne fait que projeter sa vision masculine de la
jouissance, qui est effectivement une fin dans le sens littéral, mais
pour beaucoup de femmes, l'orgasme n'est pas une fin mais plutôt le
milieu d'un parcours dans l'exploration de la sensualité et de
l'extase... car d'orgasme pour elles il n'y en aura pas qu'un... et pas
du même type...
Le truc qui est génial pour ceux qui savent manipuler ces entités
étranges, c'est qu'en plus les orgasmes peuvent être à répétition, durer
et s'inscrire dans une même exploration sensuelle et succession
d'apothéoses, et je te parle pas des femmes fontaines.... :-))
Allez les filles, osez me soutenir... oui je sais... la pudeur vous
l'interdit, ce sont des discussions de mâles macho ça... :-))
Et des fois qu'un obsédé mâle pervers nous lise et en profite pour vous
embêter... je comprends... :-)))
> Oui. Il y a une différence entre ne parler que de soi, faire du spam d'go
> (Ce film est super top ou raconter sa vie comme les gens qui montent un
> site pour ne montrer que la tendresse de leur chien) et creuser pour
> montrer l'intérêt d'un film.
Dire qu'on a super aimer un film, et faire des analyses détaillées,
pertinentes ou non, s'inscrit de toute façon dans une relation
existentielle aux autres.... communiquer est une quête existentielle...
> >Oui, pour un résultat relativement dérisoire et maladroit par rapport au
> >reste de son oeuvre...
>
> Lapidaire ton jugement sur ce livre que je trouve excellent et qui en dt
> long sur son art.
Je parle des chapitres où il ne parle pas technique, mais où il
s'embarque dans cette démonstration naïve de la suprématie de la
peinture sur l'écriture... il n'y brille pas particulièrement, et pour
le reste, on peut pas dire, à part la qualité du pensum technique que
c'est un chef d'oeuvre de la littérature, au contraire du reste de ses
créations plus "plastiques"... quoique... suis pas un fan non plus de
Vinci... moi, sorti de Giger et Ridley Scott, tu sais... :-)))
> >d'accord tant qu'on occulte pas l'importance signifiante parfois
> >prépondérante de l'image et du son dans l'appréciation d'une oeuvre
> >audio visuelle... :-))
>
> Je ne l'ai jamais nié.
c'est bien que je pensais, en fait nous sommes d'accord, ce débat n'est
qu'un affrontement polémique pour le seul plaisir d'affirmer notre
existence dans la matrice.... :-))
Yann, qui se sent de plus en plus exister sur frcd... :-)))
> Résultat, certains d'entre nous se mettent à "communiquer" de façon
> compulsive et effreinée des heures et des jours durant sur l'internet
> dans les NG, et il faudra du temps pour nous libérer de l'asservissement
> narcissique que provoque ce monstrueux amplificateur de la voix.... :-))
Rectificatif... amplificateur de la parole... pas de la voix... :-)
(Je suis réellement fasciné par le rythme et l'ampleur de tes réponses à
tes interlocuteurs...)
> Le problème est que tu confonds deux plans : l'esthétique et l'éthique
>d'un
> film, dans l'oeuvre, dans ce qu'elle interroge même et comment elle le
> résorbe et une démarche personnelle et individuelle qui ne veut pas se
> laisser impressionner par des produits.
Il est possible de ne pas se laisser impressionner par des produits,
sans émettre 'd'argumentations catégoriques sur un film qu'on n'a pas
vu'...
> Et qui est proprement éthique pour le coup.
Non, ça c'est le prétexte pour faire
passer une attitude, où en germe et parmi les autres briques (pour
reprendre un
terme employé ici) on peut discerner une dérive fascisante...Ce n'est
pas parce qu'un mot, une attitude ne contient pas *stricto sensu*, en
soi, une réalité, qu'il ne prépare pas à un devenir autre (voir fin du
message)...
> C'est un peu comme s'il fallait voir une publicité pour voir si
> elle est artistique alors qu'on peut se douter qu'elle ne sert qu'à
>vendre. La ruse évidemment est de déguiser une idéologie, une
> propagande derrière une esthétique. Edgar Morin en parle très
>bien dans L'esprit du temps :
>snip
Hors sujet avec le problème éthique. Tu essaies au contraire
d'impressionner par les mots 'idéologie' et 'propagande', alors que le
discours consistant à dire 'je peux pré-juger d'une oeuvre sans l'avoir
vu' prend comme alibi un combat sans doute légitime, mais un alibi
qui ne justifie pas l'attitude qui s'appuie sur des clichés,
des stéréotypes et des archétypes...
Girard, et avant lui Nietzsche, a bien vu le danger : les nouveaux
totalitarismes se draperont dans un langage de victimisation, ils se
poseront en défenseurs des victimes (pense au 11 septembre)... Si tu
crois, comme je crois que tu le crois, que le discours est porteur
d'autres choses que des mots, la vigilance doit être constante, et
penser contre soi -même est le deuxième temps de l'histoire de la
pensée...
C'est la même attitude qui empêche les "gros boeufs" d'aller voir un
film soi
disant intello, ou de lire un livre classique...
> Premièrement, cela ne se fait pas passer pour une argumentation
>concrète sur le film mais sur la structure formatée qu'il véhicule,
>clichant les archétypes en stéréotypes" comme dit Morin et cela
> se repère vite.
Admettons en théorie. La pratique de ce genre de comportement me laisse
penser le contraire.
> Secondement, "pré-juger des autres, sans les connaître, sur des
>aspects extérieurs à leur personnalité ?" De quoi parles-tu ? Des gens
> ou des films ?
Etrange de ta part de soutenir que l'amour de la vitesse et des machines
conduit au fascisme, et dans le même temps dire que pré-juger
catégoriquement d'une oeuvre n'est pas porteuse de tous les démons...
> Troisiemement, il y a préjugement d'un film prévisible tout
>simplement.
Comme peut être prévisible l'attitude d'une personne ? Il a fait ça, il
le refera ?
> Quatrièmement, il n'y a pas d'esthétisation de l'éthique ou éthisation
>de l'esthétique. Toujours cette manie de donner un primat à l'un ou à
>l'autre alors que comme le dit le philosophe Wittgenstein, c'est
>inséparable.
Si c'est inséparable, tu es obligé de prendre en compte les deux... Le
primat s'impose, puisque si l'un ou l'autre te déçoit, tu rejetteras
l'oeuvre... Il y aura de fait le primat de l'éthique ou de l'esthétique
dans ton rejet...
> Outre qu'il y a toujours un risque de se tromper (on ne prend guère de
> risque avec Le Pacte des loups), le seul intérêt devient de répérer
>les procédés qui illusionnent pour les mettre à plat.
Que tu mettes à plat les procédés est une chose, que tu pré-juges d'une
oeuvre que tu n'as pas vu en est une autre.
>
> >L'esthétique réduite à l'esthétisation de l'éthique non seulement
> >pose des problèmes insurmontables quant à la définition de ce
> >qui est éthique, mais encore finit forcément par la censure.
> >Je précise que la censure commence par l'auto-censure :
> >avec le risque d'écarter les sujets limite, c'est à dire pour faire
> > simple les vrais sujets...
>
> Lesquels ?
Les sujets pour lesquels la réponse éthique est impossible, ou n'est du
moins pas encore clarifié...
> Toujours la même confusion des termes et dont on a déjà parlé dans
>l'emploi de la part subjective, c'est-à-dire de la subjectivité. Là, il
>n'y a
>pas de distinction entre subjectivité intéressée et subjectivité
>désintéressée.
> Dis comme cela, tu entretiens la confusion et légitime la subjectivité
> intéressée. Alors il ne faut pas s'étonner.
Tu réponds par une pirouette... Que la subjectivité soit ou non
intéressée, ça ne change rien au fait qu'il y a des situations
d'indécidabilité éthique ...
>
> >C'est ignorer que la réception , l'intériorisation d'une
> >oeuvre, est une question individuelle, et sans cesse à reposer. C'est
> >ignorer que le sens d'une oeuvre évolue avec le temps, que la
> >question du sens est incessante, se renouvelle... Que l'oeuvre
> > n'est jamais reçue d'une manière définitive...
>
> Tu pars d'une affirmation non démontrée et définitive (la
>contradiction performative pointe le bout de son nez) que le sens de
> l'oeuvre évolue avec le temps et que l'oeuvre n'est jamais reçue d'une
> manière définitive. Peut-on même dire que si le sens d'une oeuvre
>évolue, cette évolution soit contradictoire avec celle d'avant ?
>Umberto Eco résumait cela (déjà posté)
> d'une manière limpide : (snip)
Je n'ai jamais rien dit de tel : c'est de la dialectique tout ça. En
quoi l'évolution signifie la contradiction. L'embryon contredit-il le
spermatozoïde ? Le foetus contredit-il l'embryon ? le nouveau né
contredit-il le foetus ? ...
> Et cela ne me semble pas clair du tout. On en avait déjà parlé et
>j'avais écrit : "Là, Paul Ricoeur ne nuance pas assez car dans une
>émission à France 2 ou à
> France Culture il me semble, il y a un certain temps, il s'insurgeait
> contre quelqu'un qui défendait une oeuvre à caractère violent (un film
>ou un roman je ne sais plus) en réaction justement, en rupture, par
> provocation comme il dit, et il ajoutait qu'on ne pouvait pas dire
>tout et n'importe quoi.
Il faudrait alors y réfléchir et voir s'il y a vraiment contradiction...
> snip
>Encore faut-il qu'on soit dans l'imagination. Est-ce de l'imagination
>Le Juif Süss ? Une esthétique qui est dans la propagande ? Un film
>qui prône la violence ? Non, justement ce qui est éthique, c'est
>justement que l'oeuvre interroge concrètement de telles notions
>qui à ce niveau précisement, suspend l'action en retour.
En brandissant cet exemple qui n'en est pas un (Je lis la Bible même si
elle a été le ferment de l'inquisition, je lis le Coran même s'il est
source d'inspiration des terroristes, donc comme dans toute chose
existante, se trouve une potentialité, une possibilité du mal (c'est le
sens du pêché originel)), tu essaies d'étouffer toute tentative sereine
de réflexion... Combattre les idées dangereuses ou potentiellement (et
c'est valable pour toute oeuvre), c'est certainement le devoir éthique
de chacun. Mais ce n'est pas un jugement esthétique.
> Ricoeur parle d'un autre niveau. De quoi parle-t-il en fait ?
>D'oeuvres qui
> interrogent vraiment et là sans prendre trop d'audace en parlant de la
> musique. Ricoeur approuverait Le juif Süss ? Je ne crois pas du tout.
>Il dit bien par ailleurs "éthisant" en quelque sorte l'esthétique". En
>disant, que l'éthique et l'esthétique sont inséparables, cela ne veut
>pas dire que l'un ou l'autre a un primat, mais que l'un et l'autre
> s'éclairent.
Personne de sensé ne peut approuver éthiquement Le Juif Süss...
"Inséparables" est une question de mot.
Tu dis qu'ils ne *doivent* pas être séparés (niveau du devoir-être), je
dis qu'ils le sont de fait (niveau de l'être)...
Ce qui se confirme avec ce que tu dis juste après...
> Idem : "Le problème des termes là est encore périlleux et là Ricoeur
>se situe là à un autre niveau il me semble. Evidemment, je suis
>d'accord avec lui qu'on ne peut pas tirer une Ethique (avec un grand E)
>seule ou isolée de l'esthétique (comme un jugement sans appel ou
>même un film prônant la sagesse ne serait pas forcément un bon film)
>mais en même temps pour moi, l'un va de pair avec l'autre, et l'un
>éclaire l'autre et réciproquement.
> Mais en même temps, un film prônant Tue ton prochain, je ne vois pas
>Paul Ricoeur dire que le film est bon ou intéressant."
Un film sur le droit à l'avortement par exemple ?
Un film montrant un antisémite allemand luttant contre la solution
finale, le mot antisémite n'impliquant pas forcément l'approbation de la
solution finale ?
Ce point de vue d'un philosophe de l'accueil et de la conscience morale
qu'il est difficile de comparer à un rigolo comme Onfray ou un terroriste
comme Rosset vient à point nommé pour me rassurer sur ces points importants
que sont la distinction éthique-esthétique et le rôle de l'éthique dans le
domaine de l'art. Dommage que Strato ne soit pas dans le coinstot car je
serais très intéressé de lire sa réaction à ces quelques phrases (qui
démolissent quand même un peu le bel édifice rolandien, soit dit en mode
taquin). Peut-être que Rialland pourrait lui aussi nous expliquer comment il
se démarque de cette position de Ricoeur, qui devrait être inscrite au
fronton de frcd, selon moi. Quand au reste, comme d'hab', je suis d'ac' avec
"rousseau"...
--
« Trop de rappeurs décrivent une vie grise. »
(Oxmo Puccino, rappeur)
Je crois que tu utilises là un gros mot qui est forcément teinté par
Nietzsche dans un sens que je saisis mal mais qui me semble assez loin de
l'homme-robot imaginé par les cyber-ponques. Je suis moi même assez
sensible à l'alliage de chair et d'électronique, au point que je peux même
regarder un épisode des Gunman (?). Pour ceux qui ne connaîtraient pas,
c'est comme Goldorak en plus complexe : des gamins et des gamines pilotent
des robots tout puissants ce qui leur permet de régler leur comptes avec la
société ou leurs rivaux. Voir ces petites gamines au coeur d'un Goliath de
métal se battre en ouvrant les montagnes avec leur pistolasers, c'est, le
diable sait pourquoi, un spectacle troublant qui accroche mon
attention. Il y a deux choses à en dire, selon moi. D'une part le mariage
"esthétique" de la chair enfantine et de la machine, mariage contre-
nature de l'innocence et de la guerre qui produit peut-être comme un
choc psychologique, un contraste. D'autre part, il ne faut pas oublier que
la machine est censée donner à l'humain qui l'habite une puissance physique
sans mesure. Ainsi, peut-être raccroches-tu ce point à la « volonté de
puissance » liée par l'intermédiaire Nietzsche au « surhomme ». (Je préjuge
un peu de tes idées, mais c'est pour avancer.) Il me semble pourtant que si
on regarde le thème cyberpunk comme une aspiration à une puissance obtenue
par des machines ou des modifications du corps humain, on est très loin de
ce que j'ai pu comprendre de l'idée de Nietzsche, car il entend plutôt une
puissance intérieure et "morale" (morale n'est pas le bon mot). Ainsi, sa
puissance relève plus d'une décision d'accepter la vie humaine et ses
limites, le surhomme devenant celui qui est si content de chaque jour qui
passe, qui est tellement détaché des aspirations vaines des hommes du
commun qu'il vit chaque instant comme s'il devait revenir à l'identique et
à l'infini, d'où l'éternel retour...
Bon, c'est archi résumé à ma sauce d'une interprétation certainement
partielle de Nietzsche qui n'est pas de moi, mais ça me plaît bien. Dans
cette optique, en première analyse, on peut penser que le spectacle des
gamins nippons qui se vêtent de superrobots superpuissants sont des
palliatif aux pleutres qui ont peur de vivre aujourd'hui, dans notre
société, avec leur corps d'humains maigrichons. On peut y voir une revanche
des "faibles" et des "couards" qui niquent les méchants sur une console
vidéo. (A-t-on jamais causé ici du coté consolatoire des consoles de jeu
vidéo ? J'ai été personnellement "consolé" d'une rupture par une console
N64) D'où vient cette manie des gadjets électroniques ? N'est-ce
pas à terme une aliénation de l'homme par la machine comme la
télé aliène les téléspectateurs ? et les portables, et les autres bidules à
boutons ? Pour ma part, je déteste les lève-vitre électriques : on ne peut
pas doser une mince filet comme on voudrait et on est jamais sûr de pouvoir
ouvrir la vitre en cas de chute dans la mer. Mais j'utilise quand-même un
ordi, entre autre pour causer ici.
Anti-thèse, on peut renverser la chose et penser que ce sont justement
ceux qui ont peur de la nouveauté et du changement qui projettent leur
fantasmes pessimistes sur un futur qui leur fait peur. Dans l'idée de
l'approbation de ce qui est, il y a aussi celle d'accepter ce qui part et ce
qui vient, c'est à dire le changement. Nul ne peut enrayer cette poussée
technologique qui peut effrayer et que nous vivons déjà en discutaillant sur
l'usenet. Il vaut peut-être mieux souhaiter l'avenir tel qu'il vient et
surmonter ces craintes. Sur le clonage, je pense qu'on y viendra tôt ou
tard, selon un "procédé" qu'on ne peut pas prévoir. Ce qui peut faire peur,
c'est l'idée ridicule que les "clones" seraient des sous-hommes. J'ai
entendu des émissions très intéressantes sur la neurobiologie et les types
avaient l'air formels : un "clone" sera différent du "modèle" et il aura
toutes les caractéristiques de l'individu (mémoire propre, intelligence
particulière, configuration du cerveau différente de tout les autres hommes,
etc.). Je ne nie pas que l'existence des clones posera quelques problèmes,
je pense juste qu'il ne faut pas les exagérer et que c'est les fictions
alarmistes (comme Matrix ou Le Soleil Vert dans d'autres domaines) qui nous
font penser que les clones risquent de devenir des esclaves ou des pièces de
rechange. Si le fait que des clones existent ou non venait de moi, je ne
sais pas ce que je ferais, mais ce n'est pas le cas et je pense qu'avoir
peur d'eux est inutile. Bon, je m'avance un peu et le clonage est un
sujet-oursin. Une avancée technologique que j'attends et que je souhaite,
c'est la pastille collée sur la tempe qui évite de se taper de taper du
texte sur un clavier. Il paraît que ça existe déjà pour les tétraplégiques
et qu'ils peuvent, en se contrant et après apprentissage, monter ou
descendre un curseur juste par une "contraction mentale" qui modifie les
émissions des ondes mesurées par la pastille. Franchement, ce serait plutôt
chouette. À moins d'être vraiment pessimiste et très influencé par les films
sf-catastrophe genre Matrisque, on voit mal que ces pastilles soient
"obligatoires" et incrustée de force dans notre moi par un hypothétique
pouvoir totalitaire pour nous "soumettre" à sa loi. Franchement, on peut
spéculer sur de telles dérives et c'est certainement utile de les délimiter
pour savoir jusqu'où aller, mais c'est être vraiment très pessimistes, à mon
sens, que de voir dans l'avenir proche une telle dérive. gdlf me dira
peut-être que je peux être "optimiste" justement parce que des gens font
attention, qu'il y a une conscience des dangers, ce qui conduit à créer la
CNIL et autres prémisses de régulations nécessaires. Il aura raison : c'est
en effet grâce à la vigilance qu'on peut être optimiste...
Euh, je ne suis pas très clair mais bon... disons comme Ponge que ce
n'est pas si idiot de n'être ni le premier ni le dernier à adopter les
innovations technologiques. Les preum's qui ont acheté des portables ont
payé cher des talkies-walkies inefficaces, les dern's sont des sauvages
naturistes qui font les malins et qui passent leur temps à te piquer le
tien.
> [...]
> Les futuristes, comme tous les artistes à leur façon, sont des
> visionnaires, et ils ont anticipé/exprimé à leur époque une dérive
> totalitaire en train de naitre... le problème, c'est que dans leur
> naïveté et leur candeur de "rêveurs provocateurs" ils se sont un peu
> planté en adhérent les yeux fermés à une idéologie qui caressait leurs
> aspirations de modernité dans le sens du poil...
... ou même plus simplement qui leur permettait de gagner leur croûte...
> Et donc je m'en voudrais beaucoup de favoriser par mes discours pro-NTIC
> l'arrivée d'un nouveau big-brother...
T'inquiètes...
--
« Le cheval a pas de frein qui se voit. »
(B. d. c.)
'fectivement, c'est un beau cauchemar.
> > En fait, je pense que la plus belle des choses à montrer, le plus beau
> > des "monstres", c'est justement le combat titanesque de la raison et de
> > la déraison exprimé par l'artiste qui en est souvent d'ailleurs le champ
> > de bataille.
>
> Oui, et Goya dans sa période des Caprichos est un bel exemple de cette
> lutte créatrice entre la raison et la folie. Mais le sommeil de la raison
> ne permet pas cette lutte, et Goya ne met pas en garde contre la folie,
> mais contre l'absence d'exercice de la raison. Ce qui rejoint l'idée que
> l'esthétique ne peut se passer de l'éthique.
Sur ce point, j'ai du mal à comprendre. Soit on distingue éthique et
esthétique de la même façon qu'on distingue le beau et le bon, alors
l'éthique devient très proche de la morale et je pense que l'éthique est
secondaire dans le domaine de l'art, puisque c'est le domaine du beau et non
du bon. C'est une première approche un peu simpliste mais qui a le mérite de
la clarté, (presque) tout le monde voyant la distinction du beau et du bon.
Deuxième approche on considère qu'éthique
et morale sont opposées, parce qu'on attribue la morale
au domaine interpersonnel, social ; alors que l'éthique est du
strict domaine personnel. Si l'on défini l'éthique ainsi, comme une attitude
personnelle, une décision qui n'engage que celui qui la prend, je ne vois
pas comment on peut l'appliquer à l'art, qui est d'essence interpersonnelle.
Je ne sais pas si je m'explique correctement. Si tu veux, je me demande
comment critiquer "éthiquement" un film si l'éthique est un choix dans la
sphère intime. En effet, soit je critique tel film en disant qu'il ne me
convient pas éthiquement, qu'il s'oppose à ma décision éthique, et cette
critique est justifiée mais elle est tellement subjective qu'on se demande
quel intérêt il y a à la partager. Soit je critique tel film en disant qu'il
va à l'encontre de mon éthique perso et qu'EN PLUS il peut avoir un impact
négatif sur les autres, et on retombe ainsi dans le domaine "social", c'est
à dire dans la morale, domaine social qualifié non sans raisons de
diabolique par Simone Weil. Bref, pour moi, une "critique éthique et
objective" présente une contradiction dans les termes. Peut-être que tu
pourras m'éclairer.
> >> [...]
>
> Note que dans ce passage que tu snipes, je suggérais qu'une oeuvre de
> Céline comme Voyage au bout de la nuit n'est pas condamnable parce que
> l'antisémitisme de l'auteur n'y transparaît pas.
Si si, l'antisémitisme de Céline transparaît (un tout petit peu
seulement, je le reconnais) dans le Voyage. En fait, on en a déjà parlé ici
et je ne suis pas d'accord avec cette réduction de Céline au Voyage, sans
aller jusqu'à imposer la lecture de ses pamphlets au lycéens. Dans les
livres postérieurs de Céline (Nord, Rigodon, etc.), son génie littéraire est
encore plus marqué que dans le Voyage, son style est plus du Céline. Mais il
ne faut pas se crisper sur l'antisémitisme de Céline, l'important me semble
qu'il est au fond un anti-humaniste et je me demande si c'est ça que tu
voudrais "condamner".
> > Je ferais une distinction entre la dangerosité de l'oeuvre futuriste
> > à l'époque et celle de la même oeuvre aujourd'hui. Pour moi, cette
> > dangerosité est en très grande partie effacée aujourd'hui.
>
> C'est possible (je vois mal pourquoi mais c'est possible, et
> le fond du problème n'est pas là). C'était un exemple montrant comment
> l'oubli de l'éthique dans une démarche esthétique a pu conduire à
> l'horreur. L'exemple n'est peut-être plus d'actualité, mais la leçon que
> l'on peut en tirer n'en perd pas de sa valeur.
Pour moi la lecon du futurisme est justement que l'art ne devrait pas se
mêler de politique. Pourtant j'aime beaucoup Aristophane qui se mêle
justement de politique. On en cause plus bas.
> > Si par hasard on m'amenait un lecteur de Céline qui aurait été
> > "converti" à ses idées merdiques par ses livres, je pense sincèrement
> > que ce type était perdu d'avance et qu'il aurait de toute façon épousé
> > ces idées, avec ou sans l'aide de Céline.
>
> Si cela ne te gêne pas, je vais plutôt reprendre l'exemple du
> futurisme car il a été utilisé à grande échelle : si je te suis, l'Italie
> serait devenue fasciste sans le futurisme. Cela relève en effet du bon
> sens, mais le futurisme fut une brique de l'édifice fasciste, et la
> modestie de son rôle justifie-t-elle de ne pas le condamner ?
En partie, mais ce n'est pas la modestie de son rôle mais sa nature.
Prenons un autre exemple, disons un film de propagande communiste, je pense
à Karmen (Carmen ?) le filmeur des révolutions communistes qui a suivi
Lénine, Staline, Kroutchev, Brejnev, etc. Je n'en suis pas sûr mais
supposons que ce type qui a créé des fictions-reportages de propagande
soviétique soit aussi un grand cinéaste et qu'il ait inventé beaucoup de
façons de filmer, de cadrages, avec une sensibilité très juste des éléments
du cinéma. Doit-on le condamner d'avoir servi le pouvoir en place ? et à des
fins de propagande pure ? Doit-on rejeter cet homme pour avoir probablement
cru à son idéologie et d'avoir tout aussi probablement "fermé les yeux" sur
ce qui lui déplaisait ? Doit-on lui reprocher de n'avoir pas quitté son pays
et d'avoir contribué directement à la manipulation du peuple russe pour
servir un totalitarisme ?... Je ne sais pas... je ne crois pas... Pour ta
part, en refusant de séparer éthique et esthétique, j'ai l'impression que tu
dis qu'on retrouve dans la qualité de son regard sur la réalité filmée des
"dispositions" qui sont les mêmes que celles qui l'ont poussé à mettre son
art au service du pouvoir totalitaire, c'est à dire des traits que tu juges
éthiquement négatifs et qui transparaissent dans l'esthétique du film. Tu me
dis si je me trompe.
> Car si une oeuvre conduit au fascisme, c'est qu'elle en porte les
> germes. Nous ne parlons donc pas d'oeuvres se réclamant du futurisme mais
> ne valorisant pas chez le spectateur cette fascination d'une puissance
> mécanique inhumaine, pas plus que nous parlons d'oeuvres de Céline où ne
> transparaît pas l'antisémitisme.
Dans les oeuvres de Céline, un anti-humanisme radical et haineux
transparaît à chaque ligne, selon moi. Pourtant je considère comme environ
tout le monde que Proust et lui sont les deux génies antagoniques du XXe s.
en littérature française.
> Non, nous parlons d'oeuvres où
> transparaît bel et bien un message dangereux.
Question : que penses-tu de l'appel pacifiste de Pierre Loti avant la
seconde guerre mondiale ? Est-ce que c'était dangereux ou au contraire ?
> Et là tu dis « oui le message est dangereux, mais les gens sont
> intelligents ». Donc on peut tout dire, là je suis d'accord, mais surtout
> ce n'est pas la peine d'alerter l'opinion sur la dangerosité d'un message,
> et là je te trouve utopiste.
Tu parles en général mais je crois qu'il faut alerter quand le message
est de nature politique, c'est à dire quand il est un "objet" de la
politique (au sens large). Quand le message est de nature artistique, je ne
pense pas qu'il soit nécessaire d'alerter. L'exemple de Karmen est
intéressant car c'est un message qui a deux faces, c'est des films de
propagande et des "objets d'art". (J'en suis pas sûr, c'est une hypothèse de
travail, mais il m'a semblé que ce type savait tenir une caméra.) Quand
l'objet politique n'a plus d'impact parce que les temps ont changé, il n'est
plus nécessaire de prévenir contre ces films.
Autre exemple, les vieux Pagnol. Pour moi, il est absurde de plonber ces
films en disant que c'est traditionnaliste, passéiste ou quoi. Je l'ai vu
ici, je crois. On peut plonber Pagnol en disant que ses cadres seraient
pourris ou que ses histoires n'auraient pas de trame, on peut pas le plomber
pour la raison que c'est politiquement dépassé. Ces films sont d'ailleurs
pour moi plus du coté tragique que du coté romantique. Rien de moins
gnangnan que ces histoires terrifiantes d'honneur familial en étau, de
répudiations définitives et de malheurs assumés, même si le couvercle est un
peu soulevé à la fin pour laisser respirer le spectateur.
Bref, jeter Pagnol au orties pour des raisons éthiques me semble idiot,
de même que glorifier des films esthétiquement médiocres pour la seule
raison qu'ils défendent une vision juste, humaniste, morale, éthique, ce que
tu veux, de la réalité.
> > Je ne sais pas comment la raison peut s'appliquer à ce problème sans,
> > soit effacer de l'histoire une foule d'auteurs pourtant reconnus
>
> Il ne s'agit pas d'« effacer » une oeuvre, même pas de la censurer ; il
> s'agit de mettre en garde le lecteur qui ouvre le livre : « au-delà de
> cette ligne, allumez votre sens critique ».
Oui, mais c'est aussi un peu incompatible, en un sens, avec l'idée je
pense primordiale qu'un film doit nous "prendre" dans un fleuve. Il faut
d'un certaine façon "jouer le jeu", et je suis assez ouvert de ce coté. J'ai
vu le TIGRE DU BENGALE de Fritz Lang hier soir, je ne sais si tu connais. Ça
ressemble un peu à un péplum en Inde avec une pincée d'Idiana Jones. Non, je
rigole : c'est un film excellent, mais il faut se prendre au jeu. Dans un
Hitchcock, si une mouche pète à coté de moi, le suspense est rompu et je
deviens fou. Il y a comme un effet de téléportation dans les bons films (et
les mauvais) qui me semble au premier plan. Comment demander au spectateur
d' « allumer son sens critique », lui qui est momentanément prisonnier du
bon vouloir de l'auteur ?
Pour moi, ça marche plutôt dans l'autre sens : si je vois dans un film
un truc que je trouve éthiquement débile et nuisible (genre un gamin qui
fait des bisous à un flingue ou simplement une tête à claque tel Thierry
Lhermite) ça fait exactement comme quand une mouche pète : je suis troublé
dans mon film et l'hypnose est rompue brutalement. Pour cette raison, je
suis contre l'immoralisme flagrant ou les énormes ficelles géo-politiques.
Si tu veux, si je vois l'exaltation d'un geste raciste dans un film, c'est
surtout parce que mon indignation va me troubler dans la réception que je
vais pas aimer ce film, pas tellement parce que je pense que les gens sont
moins malins que moi et risuqent de devenir racistes juste parce qu'ils
auront vu un film.
> > soit [...] séparer éthique et esthétique. En fait, il me semble que la
> > seconde solution est préférable en attendant une troisième solution plus
> > élégante.
>
> Comme l'a dit Sherlock Holmes : « lorsqu'il ne reste plus qu'une
> solution, aussi incroyable soit-elle, c'est la bonne. ». Mais ici il en
> reste d'autres.
>
> Vigilance, mais tolérance. C'est la « troisième solution » que je te
> propose.
C'est pas un troisième solution, c'est un compromis temporaire.
> >> la forme ne doit pas se passer du fond, mais le fond sans la forme est
> >> insipide.
> >
> > Je repose ma question : quel est le fond d'une nature morte ?
>
> Ce n'est pas à moi qu'il faut poser cette question, car je trouve
> justement l'académisme insipide, m'appuyant en cela sur Platon qui
> critique l'art lorsqu'il prétend simplement imiter le réel : puisque de
> toute façon on n'arrivera pas à l'égaler, ça ne sert à rien.
>
> Ensuite, tu parles peut-être de natures mortes qui font autre chose que
> tenter d'imiter le réel. Cela constitue un fond.
Je parle de belles natures mortes, qui sont indéniablement des oeuvres
d'art et qui sont pourtant le degré zéro de l'éthique, c'est à dire qu'elles
ne sont que des représentations (très belles, sublimes) de paniers de
fruits. De même, que penses-tu de la musique ? Crois-tu que la musique est
un "langage" apte à tenir un discours "éthique", qui pourrait reflêter les
sentiments humains et tenir un discours à leur propos ? Personnellement, je
crois que c'est une imposture. La musique est radicalement déconnectée du
"réel", le plus loin qui se puisse être des considérations éthiques ou
morales.
Si tu es dans une optique où une nature morte et un morceau de musique
ne te touchent que si tu peux y voir une sorte de "discours éthique sur
l'humain", je crois qu'on est alors très différents tout les deux (ce qui
n'empêche pas de discuter, au contraire).
> >> Voilà, après avoir (je pense) compris la position de Yannick j'essaye
> >> de
> >> comprendre la tienne ; dis-moi si j'en suis encore loin. Pour ma part,
> >> je préfère ne pas jouer avec le feu et condamner les films qui tentent
> >> de manipuler le spectateur.
> >
> > Dans un sens, quel film ou quelle pièce de théâtre ne tente pas de
> > manipuler le spectateur ?
>
> Il y a tout de même une différence entre réaliser une association
> inconsciente dans l'esprit du spectateur entre l'ingérance armée et un
> sentiment de fierté, et tenter de le convaincre par des arguments
> confrontés à son esprit critique que l'ingérance armée est une bonne
> chose. Convaincre n'est pas forcément manipuler. Et ce n'est pas un hasard
> si sur certains thèmes (je pense au nationalisme américain) les
> réalisateurs ont systématiquement recours à la manipulation inconsciente.
>
> > Je lis en ce moment Aristophane, voilà un type qui cherche visiblement à
> > manipuler le spectateur : il cherche à le faire rire grassement et
> > parallèlement il cherche à lui donner des solutions pour régler les
> > problèmes de la Cité.
>
> Si ton adhésion à ces solutions repose sur une réflexion et une
> assimilation consciente, d'accord.
C'est là que nous sommes différents : pour juger ou causer d'Aristophane
pris en tant qu'« artiste », mon adhésion ou non aux solutions qu'il propose
pour la Cité est indifférente. D'ailleurs, les circonstances qui imposent
telles solutions ont changé et mon opinion sur le féminisme ou le
communisme importe peu. Dans la version que je lis, le traducteur
commente ses solutions et son préjugé anti-communiste
le fait déraper : il fait dire à Aristophane ce que lui pense, et il est en
pleine projection de ses fantasmes, il me semble ; et on peut donc
s'interroger sur l'honnêteté de ce traducteur dans son choix des mots,
ce qui est une accusation grave (mais ici, c'est un cas d'école, je ne
cherche pas noise à ce type). De même, un sexiste verra dans les
pièces de cet auteur un sexisme qui le flattera alors qu'une féministe y
verra les prémisses du féminisme. Projections des deux cotés. Ce qu'on peut
dire objectivement, c'est qu'Aristophane parle beaucoup des femmes et qu'il
pense à elles à la fois quand il veut rire un bon coup d'elles et aussi
quand il cherche une solution pour la paix.
> Mais tu es alors capable de dire
> pourquoi ce sont de bonnes solutions.
Donc, tu vois, ma réponse est non.
> S'il s'agissait d'une adhésion à des
> idées considérées comme positives car associées au rire, à un sentiment
> agréable donc, mais que tu ne pouvais pas justifier ton adhésion à ces
> idées, ce serait de la manipulation.
C'est de la manipulation. Pour faire dire à son héros que les voisins
ennemis n'ont pas tout les torts, Aritophane est obligé de procéder à toute
une manipulation très adroite des spectateurs passant par divers procédés
dont le rire, l'adhésion par le misérabilisme, la minimisation du discours,
l'intercalage de bouffoneries pour diluer, etc. (toutes ces précautions car
ça revient à dire en 1914 que les boches n'ont pas tous les torts, faut
sérieusement enrober la chose si on veut rester en vie.)
> Cette définition ne fait pas
> intervenir l'échelle de valeurs du spectateur et me semble donc objective.
Malheureusement si. Exemple, toujours avec mon pote Aristophane (dont je
ne saurais que conseiller la lecture, c'est infiniment moins chiant que
Platon, par ex.) : il est considéré comme réac', et a juste titre car il se
réfère très souvent à la sagesse des anciens et combat l'« athéisme » des
sophistes et des penseurs à la mode à l'époque, il raille violemment toutes
les nouvelles idées concernant la gestion de la Cité, etc (alors qu'en plus
il se permet lui-même de proposer de telles nouvelles idées). C'est donc un
réac' paradoxal mais ce seul coté réac' devrait me faire dire qu'il est
éthiquement condamnable, selon toi. Seulement, je ne saurais jamais quelle
position éthique était objectivement (?) juste à son époque, je ne peux donc
pas juger. De toute façon, je m'en fous : j'aime Aritophane pour son humour
scato et son sens de l'intrigue, pour ses qualités et ses défauts, et nul ne
peut ignorer son influence décisive sur d'autres très grands auteurs de
théâtre (Molière, Chat-qu'expire)
En espérant avoir réussi un peu à être clair sans être trop long.
--
« ... le dernier calva et après je reste... »
(B. d. c.)
Les grandes oeuvres de Pagnol ont pour moi un lien direct avec la
tragédie grecque...
Pagnol, lecteur et traducteur de Shakespeare, est aussi l'auteur d'un
'Judas' qui essaie de réhabiliter la figure de Judas, une réhabilitation
qui me tient beaucoup à coeur.
> C'est là que nous sommes différents : pour juger ou causer
>d'Aristophane pris en tant qu'« artiste », mon adhésion ou non
> aux solutions qu'il propose pour la Cité est indifférente.
>D'ailleurs, les circonstances qui imposent telles solutions ont
> changé et mon opinion sur le féminisme ou le
> communisme importe peu. Dans la version que je lis, le traducteur
> commente ses solutions et son préjugé anti-communiste
> le fait déraper : il fait dire à Aristophane ce que lui pense, et il
>est en pleine projection de ses fantasmes, il me semble ; et
>on peut donc s'interroger sur l'honnêteté de ce traducteur dans
>son choix des mots, ce qui est une accusation grave (mais ici,
>c'est un cas d'école, je ne cherche pas noise à ce type). De
>même, un sexiste verra dans les pièces de cet auteur un
>sexisme qui le flattera alors qu'une féministe y
> verra les prémisses du féminisme. Projections des deux cotés.
> Ce qu'on peut dire objectivement, c'est qu'Aristophane parle
>beaucoup des femmes et qu'il pense à elles à la fois quand il
>veut rire un bon coup d'elles et aussi
> quand il cherche une solution pour la paix.
Je me souviens du choc que fut pour moi la lecture de son théâtre
complet (avril-mai 97). Je comprends ton enthousiasme... Le passage sur
Socrate est assez jubilatoire, quand on sort de la lecture des oeuvres
de Platon (les nuées je crois si je me souviens bien, qui n'est pas sa
meilleure pièce)..
Je ne me souviens pourtant pas d'une traduction partiale.
Merci de confirmer mon intuition, grand merci.
> Pagnol, lecteur et traducteur de Shakespeare, est aussi l'auteur d'un
> 'Judas' qui essaie de réhabiliter la figure de Judas, une réhabilitation
> qui me tient beaucoup à coeur.
Si tu as le temps de dévelloper un chouillou, je suis preneur.
> > [Aristophane]
>
> Je me souviens du choc que fut pour moi la lecture de son théâtre
> complet (avril-mai 97). Je comprends ton enthousiasme...
Le mot est faible. Je chus littéralement sur le cul <SPOIL> à la lecture
de scènes où le héros chiait pendant un quart d'heure devant le public, ou
bien quand un jeune fille dénudée convie les belligérants à faire la paix en
les prenant par la quéquette... et surtout, surtout, je suis très marqué par
la finale obligée : « Et ils s'en allèrent en chantant et en dansant. » <FIN
du SPOIL>
Ceussent qui polarisent le monde entre les antagonistes Apollon et
Dionysos, pour rejeter ce dernier dans la sphère du Malin carné (du mal
incarné), sont selon moi dans la situation de ceux qui voudraient couper les
humains en deux et rejeter la part "du diable", à savoir la fête et
l'exultation dionysiaque, la perte de la conscience dans le vin et la
musique. Pour ceux-ci, je pense que s'ils étaient vraiment conséquents avec
eux-mêmes, ils s'interdiraient la musique et toute forme de joie tragique...
Ne dit-on pas de Socrate qu'il refusait d'assister aux trygidies ?
(Parallèlement à Aristo', je lis Platon, c'est autrement casse-bonbons et ce
Socrate est vraiment un rabat-joie doublé d'un penseur onctueux et perfide,
qui ne cesse de répéter qu'il ne sait rien et qu'il admire ses
contradicteurs, tout en les prenant de force dans les machoires de ses
raisonnements ce qui revient à leur montrer qu'ils sont vraiment cons. Pour
tout dire, je ne comprends pas encore très bien pourquoi il serait moins
sophiste que les Sophistes, mais ça viendra peut-être.)
> Le passage sur
> Socrate est assez jubilatoire, quand on sort de la lecture des oeuvres
> de Platon (les nuées je crois si je me souviens bien, qui n'est pas sa
> meilleure pièce)...
Oui, les Nuées, qui présentent Socrate comme le pire des sophistes qui,
par ses idées nuageuses, corromp la jeunesse... La meilleure pièce, pour moi
et pour l'instant, c'est Lysistrata.
> Je ne me souviens pourtant pas d'une traduction partiale.
Tu as lu la version de la Pléiade ? (Te répondant, je suppose que oui)
Je ne dis pas que la traduction est partiale, je dis que, vu que le
traducteur commente dans ses notices les pièces et qu'il me semble y montrer
un léger parti pris "anti-communiste" dans sa notice de L'Assemblée des
Femmes (qui expose effectivement un "communisme" un chouilla caricatural),
on peut se demander si ses idées éthiques ont influé sur sa traduction. À
vrai dire, je ne pense pas qu'il a complètement déformé la pièce car c'est
un type sérieux, mais il peut avoir été influencé à son insu. Pour causer
précisément, le traducteur pense qu'Aristophane ironise sur la solution
collectiviste proposée par Praxagora (il a certainement raison car
Aristophane est un roi de l'ironie), mais il ajoute que l'auteur ne "croit"
pas en cette solution ce qui serait montré par la fin en queue de poisson de
la pièce. Il me semble que la fin en queue de poisson peut aussi provenir
d'une perte de manuscrits, ou bien d'un refus délibéré d'Aristophane de
défendre jusqu'au bout cette solution aux problème de la Cité (aka la mise
en commun de tout les biens, et même des jolies femmes, dont tout le monde
peut user à son tour à la condition d'avoir d'abord satisfait sexuellement
une femme laide, ce qui ne va pas sans graves problèmes pratiques, ainsi
qu'il le montre par la scène hilarante des mégères moches qui écartèlent
quasiment un beau jeune homme liquéfié de désir pour une jolie). Bref, je
n'ai pas senti autant que le traducteur une présentation foncièrement
négative de cette solution.
De toutes façon, que mon hypothèse soit juste ou fausse, je voulais
montrer par l'exemple combien il est nécessaire de s'abstraire (ou plutot de
"faire la part") de toutes considérations éthiques quand on est confronté à
un texte qui, tout "moderne" qu'il soit, est distant de nous et de nos
problèmes d'une petite poignée de millénaires.
--
« Tu glisses sur une merde, tu te casses la jambe, tout est dangereux. »
(B. d. c.)
> Soit on distingue éthique et esthétique de la même façon qu'on distingue
> le beau et le bon, alors l'éthique devient très proche de la morale et
> je pense que l'éthique est secondaire dans le domaine de l'art, puisque
> c'est le domaine du beau et non du bon. C'est une première approche un
> peu simpliste mais qui a le mérite de la clarté, (presque) tout le monde
> voyant la distinction du beau et du bon.
Tu fais implicitement référence à Kant, et j'ai l'impression que tu
opères une confusion sur le sens de « bon », qui désigne ce qui répond à
un besoin, tandis que le « beau » désigne ce qui procure une satisfaction
désintéressée (et idéalement universelle car répondant à une éthique), l'«
agréable » que tu oublies étant une sensation personnelle.
Justement pour Kant l'éthique est ce qui définit l'Idéal du beau,
tandis que l'éthique et le bon n'ont rien à voir.
Mais soit, oublions Kant et employons les définitions gboguiennes que
l'on devine. Finalement ton « bon » c'est l'éthique, et le beau (là tu as
raison) l'esthétique. Ton « je pense que l'éthique est secondaire dans le
domaine de l'art, puisque c'est le domaine du beau et non du bon » est
donc équivalent à « je pense que l'éthique est secondaire dans le domaine
de l'art, puisque c'est le domaine de l'esthétique et pas de l'éthique ».
Pas très convaincant...
Mais si tu ne démontres donc rien tu fais part d'une conviction
personnelle, je le note, et je te demande si vraiment ta critique d'une
oeuvre antisémite propre à influencer l'opinion doit se limiter au côté
esthétique. Pour ma part je trouverais cette attitude irresponsable et
dangereuse.
> Deuxième approche on considère qu'éthique
> et morale sont opposées, parce qu'on attribue la morale au domaine
> interpersonnel, social ; alors que l'éthique est du strict domaine
> personnel.
Quand je dis que j'ai des idées sur ce qui est éthique, ce sont des
idées que je considère comme universelles, par exemple ne pas tuer. La
conviction personnelle n'empêche pas l'universalité.
> Mais il ne faut pas se crisper sur l'antisémitisme de Céline,
> l'important me semble qu'il est au fond un anti-humaniste et je me
> demande si c'est ça que tu voudrais "condamner".
Quand on critique une oeuvre il ne s'agit pas de condamner l'auteur.
Soit l'oeuvre porte un message condamnable et on la condamne (c'est-à-dire
que l'on met l'opinion en garde), soit non et on ne la condamne pas. C'est
aussi simple que cela. Sur Céline en particulier, comme je l'ai dit je le
connais très mal, donc je ne m'étendrai pas.
> Pour moi la lecon du futurisme est justement que l'art ne devrait
> pas se mêler de politique. Pourtant j'aime beaucoup Aristophane qui se
> mêle justement de politique.
Donc tu te contredis. Et puis lorsque justement c'est l'artiste qui
insère dans son oeuvre un message politique, l'oeuvre ne relève plus
seulement du beau, de l'esthétique, et la critique ne peut pas ignorer la
question éthique.
> Prenons un autre exemple, disons un film de propagande communiste, je
> pense à Karmen [...]. Je n'en suis pas sûr mais supposons que ce type
> qui a créé des fictions-reportages de propagande soviétique soit aussi
> un grand cinéaste et qu'il ait inventé beaucoup de façons de filmer, de
> cadrages, avec une sensibilité très juste des éléments du cinéma.
> Doit-on le condamner d'avoir servi le pouvoir en place ? et à des fins
> de propagande pure ?
Eh bien un tribunal le condamnera peut-être, oui. Le spectateur quant
à lui n'a pas à condamner l'artiste. Il se mettra en garde et mettra en
garde sur l'oeuvre. Quant aux « façons de filmer », tout cela n'empêchera
nullement de les apprécier pour ce qu'elles sont. Nous parlons de mettre
en garde le spectateur, pas de censurer une oeuvre, encore moins condamner
l'artiste.
Et si ce que tu cherches à dire c'est que si la propagande permet
l'éclosion de nouvelles formes d'expression alors c'est une bonne chose,
je trouve cela irresponsable : la fin ne justifie pas les moyens.
> j'ai l'impression que tu dis qu'on retrouve dans la qualité de son
> regard sur la réalité filmée des "dispositions" qui sont les mêmes que
> celles qui l'ont poussé à mettre son art au service du pouvoir
> totalitaire, c'est à dire des traits que tu juges éthiquement négatifs
> et qui transparaissent dans l'esthétique du film. Tu me dis si je me
> trompe.
Eh bien je te le dis. Depuis le début je m'efforce de dire que l'oeuvre
doit être considérée pour ce qu'elle contient. C'est pour cela que je
citais des toiles futuristes inoffensives.
> Question : que penses-tu de l'appel pacifiste de Pierre Loti avant
> la seconde guerre mondiale ? Est-ce que c'était dangereux ou au
> contraire ?
Ce n'est pas parce qu'un artiste s'exprime qu'il fait de l'art. Donc on
dévie. Ensuite je pourrais peut-être trouver une réponse à ta question en
deux minutes, mais ça me semble désinvolte. Cela dit j'y réfléchirai.
> Tu parles en général mais je crois qu'il faut alerter quand le
> message est de nature politique, c'est à dire quand il est un "objet" de
> la politique (au sens large). Quand le message est de nature artistique,
> je ne pense pas qu'il soit nécessaire d'alerter.
D'accord, mais pour savoir que le message est de nature artistique et
non politique, le seul moyen est de confronter l'oeuvre à un jugement
éthique. Ensuite, on n'alerte l'opinion que si le message est dangereux.
Mais même lorsque l'intention est purement esthétique, pour s'en assurer
on ne peut se passer de l'éthique. Les deux sont donc indissociables.
>> Il ne s'agit pas d'« effacer » une oeuvre, même pas de la censurer ;
>> il s'agit de mettre en garde le lecteur qui ouvre le livre : « au-delà
>> de cette ligne, allumez votre sens critique ».
>
> Oui, mais c'est aussi un peu incompatible, en un sens, avec l'idée
> je pense primordiale qu'un film doit nous "prendre" dans un fleuve.
Dans le post auquel tu réponds, je dis qu'une fois que la ceinture est
bien attachée, on peut se laisser transporter. Au besoin avec une deuxième
vision dans le cas d'un film.
Il est même possible qu'une analyse a posteriori suffise, en essayant de
justifier le message que tu as perçu, et dans ce cas tu peux te laisser
impressionner sans attacher ta ceinture. Mais après tu passes en chambre
de décontamination.
> si je vois l'exaltation d'un geste raciste dans un film, c'est surtout
> parce que mon indignation va me troubler dans la réception que je vais
> pas aimer ce film, pas tellement parce que je pense que les gens sont
> moins malins que moi et risuqent de devenir racistes juste parce qu'ils
> auront vu un film.
Être gêné est la première étape d'une attitude responsable. Mais il y
en a d'autres.
> Je parle de belles natures mortes, qui sont indéniablement des
> oeuvres d'art et qui sont pourtant le degré zéro de l'éthique
Clairement tu ne parles pas du beau mais de l'agréable. Mais encore une
fois, s'il n'y a pas de message dangereux, je ne crois pas que quiconque
éprouvera une frustration à ne pas pouvoir agiter d'épouvantail. C'est
aussi valable pour la musique. Et une valeur éthique n'est pas nécessaire,
mais s'assurer de l'innocence de l'oeuvre requiert une conscience éthique.
Attention à la phrase précédente, c'est justement quelquechose qui n'était
pas passé visiblement.
Pour la suite, je ne ferais que me répéter si je répondais point par
point ; restons synthétique.
--
Jihem
Au contraire... la politique est une chose beaucoup trop sérieuse pour
être confier aux politiciens...
Jean-Michel Grimaldi <ji...@via.ecp.fr> wrote:
> Et si ce que tu cherches à dire c'est que si la propagande permet
> l'éclosion de nouvelles formes d'expression alors c'est une bonne chose,
> je trouve cela irresponsable : la fin ne justifie pas les moyens.
Tiens, une des traductions littérale possible de manga, c'est "art
irresponsable". C'est un mot qui a été popularisé à l'origine par le
peintre Hokusaï au 19me siècle.
> Ce n'est pas parce qu'un artiste s'exprime qu'il fait de l'art.
Non, effectivement, par contre s'il affirme que ce qu'il fait c'est de
l'art, c'est que c'est de l'art... en tous cas dans la définition de
l'art contemporaine...
> D'accord, mais pour savoir que le message est de nature artistique et
> non politique, le seul moyen est de confronter l'oeuvre à un jugement
> éthique. Ensuite, on n'alerte l'opinion que si le message est dangereux.
Alerter l'opinion... vaste ambition, Simplement exprimer son opinion me
parait déja plus facile à réaliser... :-))
> Il est même possible qu'une analyse a posteriori suffise, en essayant de
> justifier le message que tu as perçu, et dans ce cas tu peux te laisser
> impressionner sans attacher ta ceinture. Mais après tu passes en chambre
> de décontamination.
Non, la chambre de décontamination ne sert à rien, une fois qu'on s'est
laissé aller à regarder ou contempler une oeuvre corruptrice malfaisante
le mal est fait irrémédiablement... les mauvaises pensées ont pénétré
dans les profondeurs du néocortex et seule une ablation rapide peut
peut-être sauver la victime de la contamination.
> > Je parle de belles natures mortes, qui sont indéniablement des
> > oeuvres d'art et qui sont pourtant le degré zéro de l'éthique
je trouve personnellement que cette volonté affirmée de certains
peintres de ne pas mettre leur talent au service d'une cause noble à
défendre et de perdre leur temps à faire des natures morte alors qu'il y
a tant d'injustices dans le monde à dénoncer est un choix ethiquement
très discutable...
> Clairement tu ne parles pas du beau mais de l'agréable. Mais encore une
> fois, s'il n'y a pas de message dangereux, je ne crois pas que quiconque
> éprouvera une frustration à ne pas pouvoir agiter d'épouvantail. C'est
> aussi valable pour la musique. Et une valeur éthique n'est pas nécessaire,
> mais s'assurer de l'innocence de l'oeuvre requiert une conscience éthique.
Il n'y a pas d'artistes innocents...
désolé j'ai pas pu m'empêcher...
Yann très coupable... :-)
Voilà un lien qui résume l'affaire :
http://www.eglise-reformee-mulhouse.org/el/eli2.htm
(non, non, je ne suis pas calviniste :) mais quand on trouve quelque
chose de bien fait, on le dit...)
>
> Tu as lu la version de la Pléiade ? (Te répondant, je suppose que
oui)
Non je ne crois pas...
C'était une édition en deux tomes dont je reconnaitrais le nom du
traducteur si on me le citait :) (nom composé il me semble), mais dont
je suis complètement incapable de me souvenir...
Tiens, je l'ai revu ce lien (qui n'était pas celui sur lequel je l'avais
déniché à l'origine) pour l'occasion... J'ajouterai que la relecture du
passage de Matthieu à la lumière de ces hypothèses est pour le moins
troublant...
C'est important d'un autre point de vue en fait, car alors le
christianisme vu comme inversion du mécanisme du bouc-émissaire ce ne
serait vrai qu'en partie, puisque ce serait oublier l'Iscariote...
"yann.minh" wrote:
> > Septembre 1979 en france ?
>
> ça devait être ça, tout ce dont je me souviens c'est que je revenais de
> vacance pour continuer mes études d'art plastique, et il y avait toutes
> ces affiches qui recouvraient les stations de métro, et quand on posait
> la question aux copains sur ce que c'était que ce film, personne n'était
> au courant...
Marrant, à la même époque moi aussi je sortais du ventre d'un être
humain :)
> black -out total dans les media, même la presse
> spécialisée n'étaient pas informée semble-t-il (à vérifier). Je ne
> crois même pas qu'il y ait eu des Bandes annonces de diffusées les mois
> précédents... en tous cas, comme j'étais en vacance, je les ai pas vu...
Bizarre ça. Pour ménager l'effet de surprise ? C'est surprenant quand on
voit la qualité de la bande annonce.
> > > Si, si tu as en tête les métaphores sexuelles mise en place
> > > volontairement par Sigourney Weaver... le film devient franchement
> > > drôle... et renoue magistralement AMHA avec le premier... :-))
Je viens de le revoir, il est quand même loin du premier. Il joue quand
même énormément d'effets raccoleurs, de zooms, de gore gratuit, de
musique pompeuse, etc...
> > Comment sais-tu que c'est S W qui a délibérément mis cela en place ?
>
> c'est Jeunet qui le dit dans une ITW donnée à Karen Guillorel du fanzine
> Chasseur de Rêves. Faudrait que je leur demande si je peux le poster...
>
> > Je veux bien croire que les métaphores sexuelles sont présentes dans le
> > film (j'ai lu tes posts à ce sujet), mais je ne trouve pas du tout cela
> > évident (je veux dire, ce n'est pas du tout ce qu'on voit en premier).
>
> ben oui, heureusement que c'est pas évident :-))
[...]
> > Erf, je suis bon pour un revisionnage :-)
>
> Si t'as le courage, relis mon post sur le sujet avant, dans lequel je
> pointe toutes les scènes clefs... je te jure que ça change complétement
> la vision du film, en l'enrichissant... enfin, c'est ce que ça m'a
> fait...
J'ai relu avant de visionner. (pour ceux qui ne vois pas de quoi on
parle:
<URL>
http://groups.google.com/groups?q=group:fr.rec.cinema.discussion+insubject:alien+insubject:4+author:yann.minh&hl=fr&selm=1ej3aqq.7emck11c8ozeoN%25yminh%40yannminh.com&rnum=1
</URL>
En fait les métaphores sont encore moins présentes que ce que je pensais
(elles sont bien là je te l'accorde, c'est presque évident une fois
qu'on sait), même moins présentes que dans le 1 je trouve. Toutes les
scènes que tu notes dans ton post explicatif ne sont en fait que des
détails (c'est plus que très court par rapport au reste) perdus au
milieu du reste. Ca n'en fait pas un bon film...
Tiens, il y a des scènes que je n'arrive pas à replacer dans ce
contexte. Par exemple la scène ou Ripley tue ses doubles clonés. Replacé
dans le contexte du film d'action, c'est larmoyant à souhait, très
pompeux dans le traitement (les cuves qui explosent une à une).
Métaphoriquement ca donne quoi ? Les doubles de Ripley sont en fait ses
soeurs, et elle les voit comme des rivales (c'est d'ailleurs Call qui
lui donne le fusil pour les tuer) ? Je trouve ça bancal, ou en tout cas
assez ignoble. Et comment expliquer la remarque finale de Johnser: "Un
truc de gonzesses" ?
Par contre j'ai découvert un truc et je ne crois pas que tu en parles
dans ton post explicatif (ca va d'ailleurs plutot à l'encontre). Il y a
véritablement dans Alien 4 une scène de coït entre un alien et Ripley !
Quand Ripley se fait kidnapper par un alien et est emportée par la bête
jusqu'à la reine mère, on a une trentaine de secondes je pense où on
voit l'alien transportant Ripley dans ses bras. Ca peut apparaitre comme
un scène de transition entre le moment où Ripley tombe et celui où elle
arrive près de la reine. Mais dans la façon de filmer, de répéter la
scène en enchainant les images avec un fondu noir, avec le fond derrière
mouvant comme dans un mouvement de va-et-vient, c'est très évocateur.
L'alien tient Ripley dans ses bras, l'haleine fumante, ils se frottent
le visage l'un contre l'autre, la caméra s'attarde sur leurs caresses.
Et ça se termine sur Ripley laissant retomber sa tête sur les épaules de
l'alien. (Le genre de scène qu'on aurait pu regarder hier soir :-) C'est
peut-être même de cette fornication que naitra l'alien final (d'ailleurs
dans ton post tu dis que les aliens sont eux-mêmes les rivaux de Ripley
dans sa relation lesbienne, comment alors expliquer cette scène entre
Ripley et un alien ??)
Enfin, je comprend que Ripley en veuille à l'alien final car il s'en est
pris à Call, la protégée de Ripley. Mais comment expliquer le
comportement de cet alien avant: Pourquoi tue-t-il sa mère porteuse ?
Pourquoi tue-t-il le scientifique ? Pourquoi poursuit-il Ripley jusque
dans le vaisseau ?
La fin est pour moi des plus incohérente...
> A la première vision j'avais été un peu déçu... et lorsqu'à la deuxième
> vision j'ai découvert la clef métaphorique, le film est carrément devenu
> jubilatoire... :-))
Mouais, toujours la même déception quant à moi :/
> > Au fait, c'est vrai qu'ils veulent faire un Alien 5 ? Pitié...
>
> aucune idée... mais je pense que c'est induit par la fin du 4, et je ne
> suis pas si critique, c'est une des rares séries de films qui tienne le
> coup je trouve.
C'est vrai :) Mais vue la tournure que ça prend :))
Julien,
--
http://juliengourdon.free.fr
"C'est véritablement utile puisque c'est joli."
Le Petit Prince
"yann.minh" wrote:
J'ai relu avant de visionner. (pour ceux qui ne voient pas de quoi on
)
> J'ai relu avant de visionner. (pour ceux qui ne vois pas de quoi on
> parle:
> <URL>
> http://groups.google.com/groups?q=group:fr.rec.cinema.discussion
+insubject:alien+insubject:4+author:yann.minh&hl=fr&selm=1ej3aqq.
7emck11c8ozeoN%25yminh%40yannminh.com&rnum=1
> </URL>
Super, je constate qu'effectivement j'avais posté la totale, et que donc
certains qui critiquent mes posts ne les avaient pas lu... suivez mon
regard... :-))
> En fait les métaphores sont encore moins présentes que ce que je pensais
> (elles sont bien là je te l'accorde, c'est presque évident une fois
> qu'on sait), même moins présentes que dans le 1 je trouve.
Oui
> Toutes les
> scènes que tu notes dans ton post explicatif ne sont en fait que des
> détails (c'est plus que très court par rapport au reste) perdus au
> milieu du reste. Ca n'en fait pas un bon film...
Pas si négligeable que ça en terme de quantité... et moi ça m'a changé
ma perception du film... mais je conçois que ça marche pas à tous les
coups... ;-)
> Tiens, il y a des scènes que je n'arrive pas à replacer dans ce
> contexte. Par exemple la scène ou Ripley tue ses doubles clonés. Replacé
> dans le contexte du film d'action, c'est larmoyant à souhait, très
> pompeux dans le traitement (les cuves qui explosent une à une).
> Métaphoriquement ca donne quoi ? Les doubles de Ripley sont en fait ses
> soeurs, et elle les voit comme des rivales (c'est d'ailleurs Call qui
> lui donne le fusil pour les tuer) ?
Non... surement pas des rivales... comment peux tu y voir ça... et si
je ne me trompe pas il n'y en a qu'une encore vivante...
et pour moi c'est une scène magnifique... qui renvoie la à une angoisse
très forte par rapport à l'autre "soi-même"... qui est qui dans
l'histoire?
> Je trouve ça bancal, ou en tout cas
> assez ignoble.
Bof... mauvaise interprétation AMHA.
> Et comment expliquer la remarque finale de Johnser: "Un
> truc de gonzesses" ?
Excès de sensiblerie justement de la part de Ripley... :-) Elle se
laisse atteindre par des émotions que le surmale ne comprend pas... :-))
> Par contre j'ai découvert un truc et je ne crois pas que tu en parles
> dans ton post explicatif (ca va d'ailleurs plutot à l'encontre). Il y a
> véritablement dans Alien 4 une scène de coït entre un alien et Ripley !
J'en parle pas parce que c'est un peu trop évident pour moi et que je
pense que tout le monde l'a vu,
> Mais dans la façon de filmer, de répéter la
> scène en enchainant les images avec un fondu noir, avec le fond derrière
> mouvant comme dans un mouvement de va-et-vient, c'est très évocateur.
> L'alien tient Ripley dans ses bras, l'haleine fumante, ils se frottent
> le visage l'un contre l'autre, la caméra s'attarde sur leurs caresses.
> Et ça se termine sur Ripley laissant retomber sa tête sur les épaules de
> l'alien. (Le genre de scène qu'on aurait pu regarder hier soir :-) C'est
> peut-être même de cette fornication que naitra l'alien final
Sur le plateau Signourney Weaver va tourner deux fois la scène, dont une
tellement trop explicite dans son jeu d'acteur qu'elle sera supprimée au
montage...
> (d'ailleurs
> dans ton post tu dis que les aliens sont eux-mêmes les rivaux de Ripley
> dans sa relation lesbienne, comment alors expliquer cette scène entre
> Ripley et un alien ??)
Euh... j'ai dit ça moi ? t'es sur... bon je me relis dès que je trouve
un instant et j'essai de voir, mais j'ai pas l'impression que les Aliens
soient les rivaux de Ripley... au contraire... ils sont potes dans un
relation nettement sado-maso... :-)) Dans ce film ce sont les hommes
les monstres...
> Enfin, je comprend que Ripley en veuille à l'alien final car il s'en est
> pris à Call, la protégée de Ripley. Mais comment expliquer le
> comportement de cet alien avant:
> Pourquoi tue-t-il sa mère porteuse ?
ça c'est un peu évident non... ? Je veux dire que le scénario semble
indiquer qu'entre deux mères il choisit l'humanité... mais sa mère par
"affection" ne voudra pas de lui et avortera... :-))
> Pourquoi tue-t-il le scientifique ? Pourquoi poursuit-il Ripley jusque
> dans le vaisseau ?
Il veut rester prés de sa maman le petit chéri... c'est un peu une
évidence non ?
> La fin est pour moi des plus incohérente...
Pas tant que ça... mais je suis d'accord pour dire qu'il n'est pas à la
hauteur du 1 au niveau de la perfection scénario/métaphores....
> Mouais, toujours la même déception quant à moi :/
Bon, tant pis... :-)
> > Tiens, il y a des scènes que je n'arrive pas à replacer dans ce
> > contexte. Par exemple la scène ou Ripley tue ses doubles clonés. Replacé
> > dans le contexte du film d'action, c'est larmoyant à souhait, très
> > pompeux dans le traitement (les cuves qui explosent une à une).
> > Métaphoriquement ca donne quoi ? Les doubles de Ripley sont en fait ses
> > soeurs, et elle les voit comme des rivales (c'est d'ailleurs Call qui
> > lui donne le fusil pour les tuer) ?
>
> Non... surement pas des rivales... comment peux tu y voir ça... et si
> je ne me trompe pas il n'y en a qu'une encore vivante...
Oui.
> et pour moi c'est une scène magnifique... qui renvoie la à une angoisse
> très forte par rapport à l'autre "soi-même"... qui est qui dans
> l'histoire?
Scène magnifique ?? Complaisante tu veux dire ! La musique qui appuie
sur tout, sur les corps horriblement mutilés, sur le visage déformé de
Ripley, sur sa crispation quand elle tire au lance flamme (pourquoi
tirer au lance flamme en plus ? Celle qui est encore vivante n'en
souffre qu'encore plus...), sur les cuves qui explosent pour nous en
mettre plein la vue. L'angoisse par rapport à l'autre "soi-même" ok,
mais ca arrive comme un cheveu sur la soupe dans l'histoire (ils courent
vers le vaisseau et tout d'un coup Ripley s'arrête - et deux minutes
plus tard on a oublié l'épisode), et c'est plutot pour en rajouter dans
l'émotion facile.
> > Je trouve ça bancal, ou en tout cas
> > assez ignoble.
>
> Bof... mauvaise interprétation AMHA.
Oui sûrement :) Je cherche tjrs à ratacher ça à ton analyse
métaphoriquement sexuelle :)
> > Et comment expliquer la remarque finale de Johnser: "Un
> > truc de gonzesses" ?
>
> Excès de sensiblerie justement de la part de Ripley... :-) Elle se
> laisse atteindre par des émotions que le surmale ne comprend pas... :-))
Ok.
> > Par contre j'ai découvert un truc et je ne crois pas que tu en parles
> > dans ton post explicatif (ca va d'ailleurs plutot à l'encontre). Il y a
> > véritablement dans Alien 4 une scène de coït entre un alien et Ripley !
>
> J'en parle pas parce que c'est un peu trop évident pour moi et que je
> pense que tout le monde l'a vu,
Erf, je l'ai loupé les deux premières fois :) C'est tellement évident,
mais pourtant ça rentre bien dans la symbolique sexuelle que tu voulais
montrer non ?
> > Mais dans la façon de filmer, de répéter la
> > scène en enchainant les images avec un fondu noir, avec le fond derrière
> > mouvant comme dans un mouvement de va-et-vient, c'est très évocateur.
> > L'alien tient Ripley dans ses bras, l'haleine fumante, ils se frottent
> > le visage l'un contre l'autre, la caméra s'attarde sur leurs caresses.
> > Et ça se termine sur Ripley laissant retomber sa tête sur les épaules de
> > l'alien. (Le genre de scène qu'on aurait pu regarder hier soir :-) C'est
> > peut-être même de cette fornication que naitra l'alien final
>
> Sur le plateau Signourney Weaver va tourner deux fois la scène, dont une
> tellement trop explicite dans son jeu d'acteur qu'elle sera supprimée au
> montage...
Hehe, j'aimerais bien voir la version supprimée au montage :)
> > (d'ailleurs
> > dans ton post tu dis que les aliens sont eux-mêmes les rivaux de Ripley
> > dans sa relation lesbienne, comment alors expliquer cette scène entre
> > Ripley et un alien ??)
>
> Euh... j'ai dit ça moi ? t'es sur... bon je me relis dès que je trouve
> un instant et j'essai de voir, mais j'ai pas l'impression que les Aliens
> soient les rivaux de Ripley... au contraire... ils sont potes dans un
> relation nettement sado-maso... :-)) Dans ce film ce sont les hommes
> les monstres...
Je me suis plus ou moins mélangé. L'alien/bébé de Ripley sera
effectivement son rival à la fin quand il voudra violer/mettre sa main
dans la plaie de Call.
En fait je pense que tu mets les aliens dans le même sac que les
sur-males du films, Ripley éliminant les uns comme les autres comme
inutiles dans son trip avec Call. C'est pourquoi je ne vois pas le sens
de cette relation entre Ripley et l'alien si tout du long on nous montre
une relation lesbienne entre Ripley et Call ?
> > Pourquoi tue-t-il sa mère porteuse ?
>
> ça c'est un peu évident non... ? Je veux dire que le scénario semble
> indiquer qu'entre deux mères il choisit l'humanité... mais sa mère par
> "affection" ne voudra pas de lui et avortera... :-))
Oui enfin choisir et tuer, c'est pas trop pareil, non ? :) Pourquoi ne
laisse-t-il pas vivre sa mère porteuse si tu préfères ?
> > Pourquoi tue-t-il le scientifique ? Pourquoi poursuit-il Ripley jusque
> > dans le vaisseau ?
>
> Il veut rester prés de sa maman le petit chéri... c'est un peu une
> évidence non ?
Oui. Mais bon :) Ca répond pas à la question sur le scientifique :)
> > La fin est pour moi des plus incohérente...
>
> Pas tant que ça... mais je suis d'accord pour dire qu'il n'est pas à la
> hauteur du 1 au niveau de la perfection scénario/métaphores....
Ha, haha ! :p
> Mais personne ne le nie, enfin que la forme est importante ! Et ce n'est
> pas _que_ la forme car il y a aussi pas mal de texte sur quoi s'appuyer et
> qui structure comme la forme, le film. Un film n'est pas QUE de l'image.
> toi, tu zappes tout le scénario pour ne t'interesser qu'à l'image,
Meuuuh non, facile... tu réduit mon discours à ça passeque ça sert ton
propos...
> moi les
> deux m'intéressent ainsi que leur interaction. Là, tu fais une grossière
> erreur obnubilé par ta répugnance du verbal.
Meuhhh non... la encore t'es reducteur de mon discours...
Et puis d'abord, je vais te dire... je ne suis pas contre le verbal et
encore moins l'écriture... :-)) vu que l'écriture de mon roman m'a
montré l'efficacité immersive de ce médium, et avec quelle aisance et
facilité il était utilisable pour pouvoir transmettre les cosmogonies
qui nous habitent... :-)
Par contre je suis contre le totalitarisme intellectuel des handicapés
du cerveau droit... mais je me répète, et la je crois que je suis allé
au bout de ma démonstration...
Aussi désormais je vais m'efforcer de communiquer autrement que par la
verbalisation :-)
......... .... .... .......... ..... , ...... ...... ... ........
.....!
. ........ ....... .....?
......... ... ............... .. .. ...... ..... . . ....... .
............. ... ..... ........... ....., .......... :-)))
......! :-( ...... ...... ...... ........... .. .......... .... :-)
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.... ......... ..... ;-)
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........... :-)
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......! :-( ...... ...... ...... ........... .. .......... .... :-)
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.... ......... ..... ;-)
> Scène magnifique ?? Complaisante tu veux dire ! La musique qui appuie
> sur tout, sur les corps horriblement mutilés, sur le visage déformé de
> Ripley, sur sa crispation quand elle tire au lance flamme (pourquoi
> tirer au lance flamme en plus ? Celle qui est encore vivante n'en
> souffre qu'encore plus...), sur les cuves qui explosent pour nous en
> mettre plein la vue. L'angoisse par rapport à l'autre "soi-même" ok,
> mais ca arrive comme un cheveu sur la soupe dans l'histoire (ils courent
> vers le vaisseau et tout d'un coup Ripley s'arrête - et deux minutes
> plus tard on a oublié l'épisode), et c'est plutot pour en rajouter dans
> l'émotion facile.
Bon, je pense qu'effectivement le problème est que je suis trop bon
public... car dans le 1 aussi y a des lourdeurs d'effets de ce genre
comme "va chercher le chat"
je crois qu'en fait, aucun film ne me satisfait vraiment, (la perfection
n'est pas de ce monde) et à partir d'un certain niveau de qualité, j'ai
tellement pris l'habitude de passer au dessus des éléments formels,
scénaristiques ou dramaturgiques qui me dérangent, que je les occultes
pour ne retenir que ce qui me plait... moi j'ai surtout retenu de cette
scène la rencontre de Ripley avec son alter ego monstrueux et handicapé,
et toute la mise en abîme que cela induit sur nous même, ce que nous
sommes et ce que nous aurions pu être...
En quelques secondes de cette scène, j'ai ressenti toute l'horreur qu'a
pu ressentir la Ripley monstrueuse, rivée sur son lit, objet
d'expérimentation maintenue dans une agonie interminable, et qui se
trouve confrontée à son alter ego plus ou moins abouti...
Et c'est cette émotion qui m'a le plus marqué, même si j'ai été dérangé
comme toi par le Lance Flammes spectaculaire et pas très pertinent...
:-)
Mais pour moi, ça ce sont des détails...
Idem pour à l'Aube du Sixième jour, dont je ne retiens que ce jeu des
clones avec leur mort, que j'ai trouvé très jubilatoire :-)
A propos de la scène d'immersion sexuelle entre ripley et l'alien...
> Erf, je l'ai loupé les deux premières fois :) C'est tellement évident,
> mais pourtant ça rentre bien dans la symbolique sexuelle que tu voulais
> montrer non ?
Plus ou moins... et tu as raison, une partie de cette scène contredis
mon propos...
l'immersion dans la conglomérat organique gigerien est métaphorique
d'une relation sexuelle avec la Reine... par contre sa tendresse envers
l'alien qui la porte est plus hétérosexuelle du fait de la forte charge
phallique des alien, et fou la merde dans mon interprétation... :-)
> Hehe, j'aimerais bien voir la version supprimée au montage :)
Moi aussi :-)
> En fait je pense que tu mets les aliens dans le même sac que les
> sur-males du films,
Euh... je ne les mettrais pas dans le même sac... ils jouent un rôle
différent... et Ripley me parait plus proche d'eux que des savants et
des militaires... mais tu as raison qu'il y a quelquechose d'un peu
confus à ce niveau, et qui m'a moins intéressé...
> Ripley éliminant les uns comme les autres comme
> inutiles dans son trip avec Call. C'est pourquoi je ne vois pas le sens
> de cette relation entre Ripley et l'alien si tout du long on nous montre
> une relation lesbienne entre Ripley et Call ?
Oui, c'est ce qui fait que le 1 reste inégalé...,
>
> > > Pourquoi tue-t-il sa mère porteuse ?
> >
> > ça c'est un peu évident non... ? Je veux dire que le scénario semble
> > indiquer qu'entre deux mères il choisit l'humanité... mais sa mère par
> > "affection" ne voudra pas de lui et avortera... :-))
>
> Oui enfin choisir et tuer, c'est pas trop pareil, non ? :) Pourquoi ne
> laisse-t-il pas vivre sa mère porteuse si tu préfères ?
Choisir c'est mourir... :-)
Parce qu'il n'a pas de limites morales... ce qui le gêne il le néantise
purement et simplement... et il perçoit sa mère comme une étrangeté, et
si ça se trouve, une monstruosité... et ainsi victimise la Reine, on se
retrouve à avoir de la compassion pour elle... un comble... moi j'aime
bien ce jeu émotionnel pervers... et ce retournement du rôle des Aliens
dans la Résurrection...
> > Il veut rester prés de sa maman le petit chéri... c'est un peu une
> > évidence non ?
>
> Oui. Mais bon :) Ca répond pas à la question sur le scientifique :)
Passeque c'est un monstre, qui aime beaucoup la cervelle d'humain...
:-))
> > > La fin est pour moi des plus incohérente...
> >
> > Pas tant que ça... mais je suis d'accord pour dire qu'il n'est pas à la
> > hauteur du 1 au niveau de la perfection scénario/métaphores....
>
> Ha, haha ! :p
On est d'accord, mais des 3 suites c'est celui que je préfère...
Yann bon public...
> Ton exemple ne démontre pas grand chose et je pourrais dire le contraire
> simplement par une simple affirmation. Exit ton argument.
Eh eh eh... non non non, j'ai argumenté, Kundera est complètement pris
en flagrant délit d'imagologie, et toi de mauvaise foi totale...
Revise un peu ton histoire et jette un oeil à péripatéticien...
La pensée dans la marche est précisément liée au mouvement du corps,
donc à une certaine vitesse aussi... c'est normal... l'apprentissage du
monde est lié au mouvement... y a pas que les yeux les oreils et le
fauteuil de cinéma qui permettent de penser Yannick... :-))))
> Mort de rire.
content de t'avoir fait rire... (jaune ? :-)))
>
> Plus sérieusement, oserais-je dire, le fait que l'homme court ou ait
> inventé une voiture ne change à rien à l'affaire. Dans un cas comme dans
> l'autre, il s'agit d'une histoire de vitesse.
Ah !!!!
> Il parle de vitesse. Il parlait bien de différence entre un homme qui
> ralentit le pas et un homme qui accélère.
ça c'est une image mentale théâtrale qui ne repose sur rien de réel, de
l'imagologie, moi quand la marche génère des idée forte je ne ralentie
pas le pas....
> Je t'en avais indiqué un il me semble, l'information. Voir message à
> Cédric.
Oui, mais tu ne lis pas ce qu'on écris... ce n'est pas cette
interrogation sur le rôle de la vitesse de circulation de l'information
dans notre société qui est débattu la, c'est l'utilisation d'une
métaphore manipulatrice qui repose sur des bases fausses dans la
réalité...
> Ce qu'il dit n'est pas que l'orgasme féminin est bien ou pas, ou que
> l'orgasme masculin est moins bien ou pas, mais de faire une espèce de
> propagande de l'orgasme en quelque sorte, d'être obnubilé par cela et d'en
> faire une espèce d'obstacle.
eh eh eh... il me semble surtout qu'il y a de sérieux problèmes vis à
vis de la sexualité...
>
>
> Appel hypocrite, séducteur et de prédation detected.
Rien d'hypocrite, et tu sais Yannick elles sont assez grande pour savoir
se défendre contre le méchant Yann dragueur obsédé ... :-))
> Tu as changé d'avis à la bouffe, car entre un message spam d'ego et un
> message argumenté...
Eh eh ... tu ne retiens que ce qui t'arrange... :-) ma position est
moins radicale...
> Tu n'aimes pas Vinci ?
j'aime bien ses gravures...
Yann imagologue...
Moi je veux bien intervenir mais j'exige que l'on me *résume* le lien qui
vous amène ici en partant d'Alien et passant par la conduite, la vitesse et
Kundera. Hors forum si vous voulez.
> Allez les filles, osez me soutenir... oui je sais... la pudeur vous
> l'interdit, ce sont des discussions de mâles macho ça... :-))
> Et des fois qu'un obsédé mâle pervers nous lise et en profite pour vous
> embêter... je comprends... :-)))
Bein s'il n'y avait que ça... C'est surtout que c'est assez audacieux de
faire un appel à témoins féminins voulant bien relater leur conception de
l'orgasme afin d'acculer Kundera, non ? Évidemment en plein milieu d'une
conversation que l'on n'ira clairement pas reprendre depuis le début pour le
plaisir de parler cul à un moment.
> Mais bien sur, nous savons tous que les prémices et la sensualité sont
> importants, ... ainsi que cette merveilleuse et lente découverte des
> corps et de l'érotisme de l'autre... :-))
Certes.
> Mais pour moi, en aucun cas je n'associerai l'orgasme féminin à une
> fonctionnalité utilitaire, car à la différence de nous, les mâles, pour
> certaines femmes, et en tous cas, beaucoup que j'ai connu, l'orgasme
> n'a pas du tout la même signification.
> Pour moi Kundera ne fait que projeter sa vision masculine de la
> jouissance, qui est effectivement une fin dans le sens littéral, mais
> pour beaucoup de femmes, l'orgasme n'est pas une fin mais plutôt le
> milieu d'un parcours dans l'exploration de la sensualité et de
> l'extase... car d'orgasme pour elles il n'y en aura pas qu'un... et pas
> du même type...
D'accord mais cela ne concerne pas toutes les femmes à l'évidence et, sans
vouloir jouer les désillusionnées, il me semble que tout le monde ne cherche
pas à maîtriser sa sexualité et que les questions se posent même
relativement tard la plupart des gens... quand ce n'est pas jamais vraiment.
Ensuite, la maîtrise et le jeu sur l'orgasme en particulier est de loin le
plus difficile, étant donné le nombre de non dits ou tabous en matière de
simulation par exemple (pourquoi simule-t-on l'orgasme ? est-ce bien/mal ?
qu'est-ce que cela induit sur les comportements du couple ?).
Enfin, le jeu que tu décris est très beau et je me demande pourquoi tu le
restreint aux femmes. Pour moi, j'ai connu des hommes qui ne concevaient pas
leur orgasme ou celui de leur partenaire comme une fin en soi, non plus.
> Le truc qui est génial pour ceux qui savent manipuler ces entités
> étranges, c'est qu'en plus les orgasmes peuvent être à répétition, durer
> et s'inscrire dans une même exploration sensuelle et succession
> d'apothéoses, et je te parle pas des femmes fontaines.... :-))
C'est là que je me repose la question du rapport avec Kundera... Attention,
donnez-moi aimablement le titre de l'ouvrage auquel vous pensez. L'auteur
n'est pas une autorité une et indivisible. Et dire que Platon dit que... ne
veut pas dire grand chose tant il y a de Platon différents selon l'oeuvre.
Notre pensée non plus n'est pas une et indivisible. Et plus tard, quand on
fera référence aux talentueux posts de Messieurs Rolandeau et Minh, il
faudra également restituer la conversation exacte pour resituer l'état
d'esprit et l'heure par exemple, afin de comprendre ce qui sonne comme une
contradiction avec leurs posts de deux ans avant.
Bé.
> Bon, je pense qu'effectivement le problème est que je suis trop bon
> public... car dans le 1 aussi y a des lourdeurs d'effets de ce genre
> comme "va chercher le chat"
Ha le chat dans le premier alien ! J'en ai pas énormément parlé dans mon
post initial, et pourtant !
C'est bizarre que tu parles du chat comme d'une lourdeur au film. Est-ce
que la félinité ne représente pas justement quelque chose de hautement
féminin ? Et s'inscrit alors parfaitement dans la métaphore du film ? Le
chat serait le double de Ripley (il est le seul autre être vivant à
justement être vivant du début à la fin), ou plutot sa propre féminité.
On pourrait même aller jusqu'à dire que l'alien passe tout le film à
essayer de violer Ripley, et bien sûr échoue lamentablement. Le chat est
bien vivant à la fin du film, l'alien n'a pas défloré Ripley :-)
Plus prosaïquement, le film joue assez peu du 'coup du chat'. Une fois
au début, quand Ripley, Parker et Brett cherche le bébé alien. Mais
ensuite, point de tout ça, puisque les personnages passent leur temps
justement à chercher le chat. Et c'est très intéressant de voir comment
il est utilisé dans les scènes violente où l'alien se fait un membre de
l'équipage. Tout l'art de l'élipse est là. On ne nous montre pas l'alien
qui bouffe, juste le chat qui plisse les yeux. C'est bien plus évocateur
:)
On retrouve d'ailleurs le chat dans Amélie Poulain (désolé de
l'association d'idée :-), qui aime écouter les histoires au coin du feu.
Le chat dans Alien est un peu pareil, c'est le témoin du cauchemar qu'on
nous montre.
> je crois qu'en fait, aucun film ne me satisfait vraiment, (la perfection
> n'est pas de ce monde) et à partir d'un certain niveau de qualité, j'ai
> tellement pris l'habitude de passer au dessus des éléments formels,
> scénaristiques ou dramaturgiques qui me dérangent, que je les occultes
> pour ne retenir que ce qui me plait... moi j'ai surtout retenu de cette
> scène la rencontre de Ripley avec son alter ego monstrueux et handicapé,
> et toute la mise en abîme que cela induit sur nous même, ce que nous
> sommes et ce que nous aurions pu être...
Le fond de la scène serait ça, bien sûr. Mais comme c'est traité sur le
mode 'je t'en mets plein la vue'... :(
Pour en revenir au film parfait, heureusement qu'il n'existe pas, sinon
tout le monde aimerait le même film, on serait bien embêté :)
[SNIP la suite, je suis d'accord]
> Choisir c'est mourir... :-)
> Parce qu'il n'a pas de limites morales... ce qui le gêne il le néantise
> purement et simplement... et il perçoit sa mère comme une étrangeté, et
> si ça se trouve, une monstruosité... et ainsi victimise la Reine, on se
> retrouve à avoir de la compassion pour elle... un comble... moi j'aime
> bien ce jeu émotionnel pervers... et ce retournement du rôle des Aliens
> dans la Résurrection...
Oui c'est un peu ça alien, cette bête, cet autre, totalement amoral, qui
tue juste pour le plaisir. C'est ça qui fait peur : ca n'a pas de sens,
puisqu'il va jusqu'à tuer sa propre mère. D'ailleurs on peut encore
creuser (ha c'qu'elle est bonne cette série :-). L'alien a pour habitude
de tuer son hôte porteur lors de sa naissance (voir la sublime scène de
alien1). Peut-être l'alien final de la résurection tue-t-il sa mère
porteuse par 'habitude', par instinct ?
[...]
Ouaip, j'ai lu et c'est très intéressant.
> [...]
> > Tu as lu la version de la Pléiade [D'Aristophane] ?
> > (Te répondant, je suppose que oui)
>
> Non je ne crois pas...
>
> C'était une édition en deux tomes dont je reconnaitrais le nom du
> traducteur si on me le citait :) (nom composé il me semble), mais dont
> je suis complètement incapable de me souvenir...
C'est une traduction de Pascal Thiercy, probablement pas celui que tu as
lu.
--
« Même réincarné dix fois, je penserais pareil. »
(B. d. c.)
> On Sun, 3 Mar 2002 18:57:47 +0100, yann...@wanadoo.fr (yann.minh) wrote:
> >Eh eh eh... non non non, j'ai argumenté, Kundera est complètement pris
> >en flagrant délit d'imagologie, et toi de mauvaise foi totale...
> >Revise un peu ton histoire et jette un oeil à péripatéticien...
>
> C'est bôôôôôôôôô, Yann, quand tu t'écoutes parler...
merci... :-)
> "L'apprentissage du monde est lié au mouvement...". Il faut que tu
> m'expliques cela
Non.. car c'est un savoir secret issu de l'enseignement acroamatique
d'Aristote et que je ne transmet qu'aux filles dans ma crypte... et
uniquement par voie verbale non exotérique :-))) , et puis tu vas me
retorquer que j'essaye de te faire marcher... :-)))
eh eh ... bon, désolé, j'ai pas pu m'empêcher... :-)))
c'est tout bête, et tellement évident que je suis étonné de devoir
l'argumenter...
Comment le bébé se construit-il sa perception du monde ? pas seulement
en babillant, en écoutant, en regardant, en pissant et en chiant sur
place, mais aussi et le plus tôt possible en bougeant, en rampant, en
escaladant, en se cognant en touchant...
La connaissance des différences de nature des objets que nos sens
perçoivent passe par le mouvement... c'est pour cela qu'il y a une telle
adéquation entre penser et marcher... entre autre... bien sur...
Le sens du tactile est un bon exemple de l'importance du mouvement,
c'est en bougeant les doigts sur l'étoffe qu'on en perçoit la texture,
c'est la succession de tous les points d'impacts de la matière sur la
peau qui donne la sensation de lisse ou rugueux.
Lorsque l'oeil cesse de bouger, l'image disparait, l'oeil ne perçoit que
s'il est en mouvement... c'est une particularité de la vision que
n'importe qui peut expérimenter à la cité des sciences...
Et les péripatéticiens considéraient que pour atteindre la vérité il
fallait marcher... être en mouvement, donc il marchaient en rond...
comme les péripatéticiennes... :-)
Le problème que pointe Kundera indirectement, c'est que l'homme de cette
modernité utilise des greffes technologiques qui multiplient certaines
fonctions physiques, dont certaines liées au mouvement et à la vitesse.
Mais ces greffes technologiques sont tellement performantes qu'elles
sont dangereuses... ceci dit bouger à toujours été dangereux... :-))
L'expérimentation de la vitesse est devenu un passage obligé pour notre
néocortex dans sa quête de la connaissance de ce que nous sommes et de
ce qu'est le monde qui n'a que très peu de chose à voir avec la gestion
de la mémoire.
Physiologiquement au niveau de la fonction de mémorisation, par contre,
il y a effectivement une notion d'immobilité qui est prépondérante, dans
le sens que c'est le sommeil qui permet de fixer l'information.
Et donc, il faut effectivement s'arrêter, non pas pour se rappeller,
mais pour mémoriser... et pas simplement s'arrêter sur un banc,
carrément mettre notre néocortex en veilleuse et dormir!!! :-)))
Le problème de respecter une exactitude physiologique dans le contexte
métaphorique qu'utilise Kundera, ça marche moins bien, car dire qu'il
faut dormir pour se rappeller peut poser des problèmes d'interprétations
qui vont aller à l'encontre des idées qu'il veut défendre.
Ne dis t'on pas justement que le sommeil de la raison engendre des
monstres ? :-)))
Physiologiquement, je dirai au contraire que le sommeil de la raison
engendre de la mémoire... :-)))
> >ça c'est une image mentale théâtrale qui ne repose sur rien de réel, de
> >l'imagologie, moi quand la marche génère des idée forte je ne ralentie
> >pas le pas....
>
> Puis-je te conseiller de relire ce qu'il disait ?
AMHA il parle sans doute de quelqu'un qui a oublié où il a garé sa
voiture, ou alors où il allait... :-)) ... c'est sur qu'à ce niveau on
s'arrête de marcher... mais pour le reste, plonger dans la mémoire ne
ralentie pas le pas... je persiste et signe...
> >Oui, mais tu ne lis pas ce qu'on écris... ce n'est pas cette
> >interrogation sur le rôle de la vitesse de circulation de l'information
> >dans notre société qui est débattu la, c'est l'utilisation d'une
> >métaphore manipulatrice qui repose sur des bases fausses dans la
> >réalité...
>
> Tu t'es trompé. Il faut que tu remplaces fausses par vraies.
eh eh eh... à court d'arguments...? Pourtant on a été deux à témoigner
que ça marchait pas comme ça pour nous... et j'ai posé pas mal de
questions autour de moi à ce sujet, et nous sommes nombreux à
fonctionner comme cela au volant d'une automobile...
> >eh eh eh... il me semble surtout qu'il y a de sérieux problèmes vis à
> >vis de la sexualité...
>
> Là, je me demande si tu as compris ce dont je parlais.
Il me semble, et il me semble aussi que c'était pas de ça dont il était
question la encore mais de la pertinence de la métaphore sexuelle pour
illustrer son propos...
Tu vois... on se comprend pas... :-)
Ceci dit, les métaphores de kundera sur l'influence de la vitesse à
notre époque étaient intéressantes à lire, et c'était très sympa de les
avoir poster, elles m'ont intéressé car elles s'inscrivent dans un
paquets de réflexions des philosophes réactionnaires contemporains (sans
être péjoratifs) qui utilisent la notion de vitesse pour dénoncer
certaines dérives de la modernité...
Le seul problème, c'est que si on commence à analyser les métaphores de
Kundera, elles ne tiennent pas la rampe ... dommage... mais elles ont de
réelles qualités poétiques... ce sont de beaux "mensonges
hyperboliques"... (expression que j'aime beaucoup, et utilisée pour
désigner les excellentes oeuvres photographiques monumentales d'Andreas
Gurky exposées en ce moment à Beaubourg, et c'est une expression qu'on
peut appliquer à nombre d'oeuvres d'art et en particulier aux oeuvres
cinématographiques)
> >Rien d'hypocrite, et tu sais Yannick elles sont assez grande pour savoir
> >se défendre contre le méchant Yann dragueur obsédé ... :-))
>
> Je ne parle pas de ton comportement d'homme en rut mais de ta flatterie.
Et alors... :-) elles ont besoin de toi pour qu'on leur décode mes
éventuelles "flatteries"... et en plus la il n'y en avait pas... un
simple appel à témoins très provocateur... et qui aura plus tendance à
énerver qu'à flatter... :-)
> >Eh eh ... tu ne retiens que ce qui t'arrange... :-) ma position est
> >moins radicale...
>
> Disons que puisque tu veux utiliser le mot radical pour faire peur à ton
> lectorat,
Si je veux lui faire peur j'utiliserai des arguments autrement plus
terrifiants... j'ai une certaine maîtrise à ce niveau... :-))
> disons que ta position est radicale dans l'autre sens.
Bof... j'utiliserai pas le mot radical, la, mais plutôt mitigé... et
excuse moi, mais votre attitude par rapport à cela m'a quand même donné
l'impression d'une certaine radicalité... mais si tu me dis que non...
ok... j'ai mal perçu... :-)
Yann, menteur hyperbolique encore un peu pugnace, mais qui va
effectivement cesser d'argumenter bêtement faute de temps...
Je n'ai pas exclu le choix et le droit au choix... Et je comprends que
le choix se fasse sur des prévisions somme toute la plupart du temps
assez faciles... Ce n'est pas ça qui me gène.
Je snippe étant *bizarrement* d'accord avec une grande partie de ton
analyse :
> Je pourrais te le renvoyer d'ailleurs et on tournera en rond. Car la
> question dans ce débat est en fait : les films qui sortent sont-ils
>faits en majorité pour que les gens pensent contre eux-mêmes
>ou l'inverse ? Si tu
> réponds à cette question, tu as répondu à mon attitude.
J'ai été un peu ambigü. Le "penser contre soi-même" n'était pas une
"pique" générale du style : il faut de temps en temps se remettre en
question. Dans le cours de ma "pensée", elle s'intégrait à la situation
qui consistait à réclamer un droit ("pré jugement d'un film,
argumentation catégorique sans l'avoir vu") au nom d'une fin (lutter
contre l'envahissement du prêt à consommer)... Le "penser contre
soi-même" faisait allusion au fait que même lorsqu'on a raison (et je
pense que ta fin est légitime), il faut une lucidité supplémentaire pour
y voir clair sur nos propres actions. Ca suivait le cours de ma phrase
sur la parure victimaire dont la mise en parallèle est évidemment très
exagéré dans le cas qui nous préoccupe, mais c'est pour faire sentir
l'idée...
Loin de moi l'idée de vouloir stigmatiser une attitude qui est
compréhensible... Disons qu'il est dangereux de la généraliser, ou d'en
faire une théorie, parce qu'elle me semble être le contraire d'un
comportement sain et qu'il faut être irréprochable, surtout quand on a
raison. C'est ringard, c'est exigeant, c'est difficile à suivre et pour
moi le premier, ça peut même sembler de l'hypocrisie, mais ça me semble
la seule voie possible. C'est un principe, quoi, une exigence, avec
tout ce que le mot comporte de négatif, éthique.
En plus le message dont je parlais, si je me souviens bien faisait quand
même allusion à une "argumentation catégorique" assez éloignée d'une
simple mise à plat des procédés...
Il y a autre chose : ton désir de lutter contre une forme
d'envahissement ne doit pas se faire au détriment d'une autre forme de
lutte (aussi légitime) qui est celle de l'uniformisation des pensées, et
défendre un relativisme pragmatique en est également l'un des moyens. A
la rigueur, je comprends ton attitude, je poursuis la même finalité,
mais je ne suis pas d'accord avec le moyen. Je redoute que pour répondre
à une standardisation qui nous fait peur avec raison, on impose une
standardisation inversée, qui sera tout aussi négative .
> Il y a un moment où un phénomène comme celui-ci, le formatage d'une
>oeuvre, la standardisation industrielle des clichés, qui par le recours
à
[...]
>manipulation.
Oui.
> Je dirais que ce n'est pas la même attitude quand on prend le fond.
>Sur quoi repose les deux fondements : l'un refuse les produits et
>l'autre (les "gros boeufs", marrant déjà de les qualifier les gros
> boeufs !) des oeuvres
Je précise : à vrai dire je croyais à ce moment citer le qualificatif de
la faq mais je me suis trompé d'animal :) ... Je viens de vérifier : la
faq parle de blaireaux en opposition aux intellos...
> qui interrogent véritablement les choses. Ce qui devient délirant,
>c'est que la confusion est telle qu'on ne parvient déjà plus à les
>distinguer et qu'on est déjà prêt à avaliser cette confusion.
> Et le faire, ce sera laisser les "gros boeufs" comme tu dis aller
>de plus en plus vers les
> produits standardisés et non vers un livre classique.
Non parce qu'ils pourront alors te dire : je peux critiquer ton livre
classique (c'est chiant, ça prend la tête) sans l'avoir lu, comme toi tu
critiques mes films sans les avoir vu...
> Taxi 1 ? Taxi 2 ? Taxi 3 ? (Je n'ai pas vu le dernier, pas encore
>sorti mais c'est très mauvais).
>
> Ce qui est vrai en théorie est vrai en pratique sinon la théorie est
> fausse. Maintenant, il faut être prudent dans ces choix et j'ai
>toujours entouré cette attitude d'une prudence. Ce que je ferais
>pour Le Pacte des
C'est ta prudence qui fait et fera parfois défaut chez d'autres (c'est
pourquoi je parlais de pratique, j'aurais dû peut-être dire
l'application plus ou moins stricte de la théorie)...
> loups, je ne le ferais pas pour un autre film, ce n'est pas la
> revendication d'une attitude générale mais très ciblée. Et que
>j'assume par ailleurs comme telle. Pour moi, c'est une question
>d'urgence, vraiment.
Ok.
>
> >Etrange de ta part de soutenir que l'amour de la vitesse et des
> >machines conduit au fascisme, et dans le même temps dire que
> >pré-juger catégoriquement d'une oeuvre n'est pas porteuse de
> > tous les démons...
>
> Quels films choisis et ciblés ? Il ne faut pas oublier le fond dans
> ces choix.
Pourtant pour moi l'éloge de la lenteur (avec lequel je suis d'accord
sans forcément en faire une illustration comme le fait l'auteur que tu
as cité : une fois par semaine j'ai une longue route à faire seul dans
mon véhicule sur l'autoroute sans radio, et je confirme l'expérience de
Cédric et de Yann. C'est très étrange. Je ne sais pas si c'est
dangereux. Difficile cependant d'y échapper. C'est une sensation très
étrange. Je n'ai pas l'impression que ma vigilance soit réduite, mais je
ne peux pas l'affirmer non plus. Evidemment ça ne vaut pas pour les
petits trajets en ville), la "haine de la précipitation" (qu'il faudrait
doubler d'une louange au silence) me semble contredire le pré-jugement.
J'y vois une relation.
Nous-mêmes en discutant, nous allons très vite : nous raccourcissons
souvent une pensée (d'où certains malentendus). Nous avons une envie
légitime d'expliquer et de comprendre le monde. Nos conclusions sont
rapides, basées sur nos expériences (individuelles), nos lectures
(toujours insuffisantes) et nos choix (forcément hasardeux). Accélérer
est notre tendance naturelle, et l'espèce humaine a certainement survécu
grâce à cette caractéristique. Décider rapidement, fuir, combattre, tout
ça fut et demeure nécessaire. Quand en même temps, on sent s'écouler la
vie et qu'on peut supposer que nous sommes nous mêmes dans un univers en
expansion et en plein accélération, on comprend que tout nous pousse à
aller vite. Et pourtant. Ralentir, prendre le rythme adéquat, suspendre
l'action et son jugement, réfléchir deviennent d'autant plus précieux.
C'est pourquoi j'ai un faible pour le rythme de la lecture, qui pour moi
contredit celui de la vie. J'ai un peu de mal avec le cinéma parce que
j'ai l'impression d'être embarqué dans un fleuve, dans un flux
irréversible, dont je ne maîtrise pas l'écoulement. Je me console avec
mon magnétoscope (oui je sais je suis encore à la préhistoire) :)...
> On parle d'un film, pas d'une personne. Il y a là une dérive de ta
>part entre un film qui est quelque chose de fini, voir de formater et
>qui ne changera pas et une personne qui peut toujours changer.
Ce sont des personnes qui font les films. Dans les cas que tu cites, on
juge toujours en référence à une oeuvre (un produit) antérieure..
> Non car on parle bien dans un cas d'une oeuvre, de ce qu'elle contient
>en elle-même comme interrogation. Et non d'une attitude personnelle
> qui rejette le fait qu'il n'y a aucune interrogation dans un produit.
Là j'avoue que j'ai un problème de comprenette, il doit me manquer un
bout :)...
Bon en relisant, je crois que je ne parlais plus du même sujet, tandis
que toi tu parles toujours du film qu'on n'a pas vu. Pas grave. Le reste
du message me semble également en décalage. Sinon ok pour ta phrase en
l'état.
>Justement
> dans ces produits, il n'y a guère d'éthique et de compréhension d'un
> phénomène mais des thèmes que l'on dégrade, que l'on passe à la
>moulinette de l'appauvrissement (il suffit de voir comment les
téléfilms
>font cela) et où l'on est prêt à rendre consommable n'importe quelle
>valeur (violence, sexe etc.)
Oui.
> Quelle oeuvre ? Elargissons. Ce soir, ne regarde pas une émission sur
>TF1 comme Star Academy ou sur France 3 comme C'est mon choix car
>tant que tu l'as pas vu, tu ne peux pas dire.
Je ne remettais pas en cause le fait de choisir.
> Mais dans ce cas, un film qui interroge un phénomène particulier et
>qui laissera au spectateur toutes les cordes pour se faire une opinion,
> c'est-à-dire que le film ne tranchera pas d'un côté comme de l'autre,
> c'est-à-dire restera sceptique, a une composante éthique même,
>responsable dans son discours envers un phénomène.
Oui.
> ? ! Pourquoi partir dans le foetus ?
Pour te montrer que quand je parle d'évolution de l'oeuvre dans sa
réception, il n'y a pas forcément contradiction, mais bien évolution.
Mais je sais pourquoi tu nies. Si je parlais d'évolution dans la
réception de l'oeuvre, ça ne veut pas dire qu'on y voit ce qu'on veut ou
que l'oeuvre change. Ca veut juste dire que notre compréhension peut
être différente. Un peu comme quand Girard redécouvre Stendhal,
Flaubert, Proust ou Dostoievsky. On ne peut plus les lire de la même
façon qu'auparavant.
(snip)
> A te lire, tu relativises la réception subjective sans faire la
>distinction entre la subjectivité intéressée et désintéressée donc
>que veut dire réduire la part subjective ? Dans ton système proche
>de Kant, cela annule tous les oeuvres intéressées et cela revient
>à légitimer n'importe quelle
> "oeuvre" bassement commerciale sous prétexte que la réception est une
> question individuelle et que donc le sens évolue en fonction du temps
>et que donc aussi cette oeuvre n'est jamais recue d'une manière
>définitive. Comment peut-on faire cette distinction intéressée et
> désinteressée sans avoir recours à la raison.
Je te réponds au risque de te choquer (c'est du 100% concentré et
j'avoue adorer te choquer :) et tu vas comprendre en même temps pourquoi
je ne peux accepter le pré-jugement d'une oeuvre :
Le simple fait de recourir à un état d'esprit, même fait de culture,
d'intelligence ou d'éthique, nuit déjà au jugement de goût, parce qu'il
y introduit une part intéressée, une part de plaisir, intellectuelle
certes mais qui n'en est pas moins un perturbateur du pur jugement de
goût. Que la culture, que l'intelligence ou l'éthique, interviennent
dans un deuxième temps, pour verbaliser, expliquer, et argumenter, c'est
souhaitable et nécessaire, mais le pur jugement de goût a déjà eu lieu à
ce stade, et le reste n'est que littérature.
> Je me demande justement comment un jugement esthétique peut laisser de
>côté un jugement éthique, comme si au fond en ayant un jugement
>esthétique, on mettait de côté ce qu'il l'a soulevé. Une oeuvre envoie
>des messages visuels, sonores mais aussi des messages moraux, voire
> même politiques et il devient difficile de jeter l'éthique par dessus
bord.
>De même, ce côté visuel ou sonore génère aussi des pensées chez le
> spectateur et qui sont liées aussi à des catégories émotionnelles qui
>elles-mêmes sont toujours liées à des choses fondamentales comme la
>haine, la vengeance, l'amour etc.
> et qui en retour ont toujours un impact dans le réel.
Nous voilà dans l'art engagé. Plus loin tu parles de propagande pour un
film qui prônerait le droit à l'avortement.
Je crois que nous sommes d'accord pour dire que l'art trop intéressé à
une cause fait rarement de bons films. Je crois que l'art a quelque
chose à voir avec la maîtrise, la lucidité et le détachement. Si
l'artiste ne domine pas son oeuvre et son sujet, et ça n'empêche pas la
passion (maîtrisée), il ne fait rien de bon.
Je crois que l'art peut ou non avoir à trancher dans des questions
éthiques, et peut ou non les illustrer (messages moraux,
politiques,...).. Mais ce n'est pas ça qui pèsera dans le jugement
esthétique de l'oeuvre. Je peux trouver belle une oeuvre d'art dont je
ne partage pas les conclusions morales.
> >Personne de sensé ne peut approuver éthiquement Le Juif Süss...
>
> Ah alors comment croire que de tels "oeuvres" esthétiques (tout
>d'abord là, on est dans une "oeuvre" interessée) ne comportent pas
>en elle-même des émotions, des sentiments plutôt nauséabonds
>justement par l'esthétique ? On
> dit quoi alors ? Ce film est bien fait (admettons qu'il le soit) ?
>
> - Oui mais il est antisémite.
>
> - Aucune importance, l'éthique n'est pas lié à l'esthétique."
>
> Merci de développer proprement la barbarie.
Parce que ce n'est pas de l'art. C'est de la démonstration, de la
propagande...
Mais je ne me défile pas : s'il était bien fait, il ne serait pas
anormal de le dire. Tout en condamnant son message. Mais je ne vais pas
voir de l'art pour y trouver ce que je dois penser. Tout ce qui est
pensée prête à consommer n'a rien à voir avec l'art. L'art m'aide à
penser en élargissant le champ de mes concepts, mais l'art n'est pas de
la pensée pré-mâchée...
Bon là je marche sur des oeufs, mais tu m'y pousses et j'ai peur qu'on
noie le vrai débat, et qu'on parte sur des trucs pas très ragoutants :
L'Histoire est trop proche encore. Prenons un autre exemple tout aussi
'nauséabond', mais qui peut sembler à certains moins grave
(objectivement du point de vue théorique c'est presque kif kif
bourricot) à cause peut être des situations historiques : la conférence
de Valladolid où il s'agissait de déterminer si les indiens avaient une
âme...
Qu'est-ce qui empêche quelqu'un aujourd'hui de reprendre l'argumentaire
? Pourquoi ce danger nous semble si hautement improblable ? Je serais
tenté d'y voir avec Hegel une certaine évolution de l'Esprit en général.
J'espère ne choquer personne, mais pour l'instant je maintiens quand
même qu'être antisémite jusqu'en 1930 ne recouvre pas la même chose
qu'être antisémite après 1945. Dois-je préciser que les deux sont tout
aussi condamnables, injustifiables et nauséabonds ?
> Je vais jouer au con maintenant.
[...]
Tu joues bien au con. Un rôle de composition ? :)
> On Mon, 4 Mar 2002 08:44:37 +0100, yann...@wanadoo.fr (yann.minh) wrote:
> Ce qui est étrange dans tout ce que tu dis, c'est que tu as occulté le
> cerveau et l'interprétattion qu'il en fait, c'est-à-dire encore
> l'interaction constante de l'individu vis-à-vis de son milieu. Et tu réduis
> finalement un individu à un instrument purement fonctionnel et
> utilitariste. Sans aucune âme.
Excellent ... mais t'as complètement raison, j'avais complètement oublié
l'importance du néocortex dans tous ça... :-)
ben écoute, la je crois qu'on est collé au mur de l'impasse de
Trollville...
C'est dommage, je te laisse réfléchir, et peut-être qu'avec un peu
d'expérience et de maturité tu comprendras un jour. C'est vrai que la
complexité de notre monde moderne n'est pas toujours facile à
appréhender pour les jeunes générations, et faut leur laisser du temps.
Mais n'hésite pas si à un moment ou un autre tu as besoins de conseils,
je serai ravi de t'aider dans ta quête :-))
Yann, qui a fait ce qu'il a pu.
>> > Tu as lu la version de la Pléiade [D'Aristophane] ?
>> > (Te répondant, je suppose que oui)
>>
>> Non je ne crois pas...
>>
>> C'était une édition en deux tomes dont je reconnaitrais le nom du
>> traducteur si on me le citait :) (nom composé il me semble), mais dont
>> je suis complètement incapable de me souvenir...
>
> C'est une traduction de Pascal Thiercy, probablement pas celui que tu as
>lu.
Victor-Henry Debidour, sans doute.
Et _ensuite_ lire celle de Budé est encore plus tordant.
Euh... je débarque comme un cheveu dans le potage mais pour lire
Aristophane, c'est Debidour à n'en pas douter ! (Folio)
Bé.
> "yann.minh" wrote:
>
> > Bon, je pense qu'effectivement le problème est que je suis trop bon
> > public... car dans le 1 aussi y a des lourdeurs d'effets de ce genre
> > comme "va chercher le chat"
>
> Ha le chat dans le premier alien ! J'en ai pas énormément parlé dans mon
> post initial, et pourtant !
> C'est bizarre que tu parles du chat comme d'une lourdeur au film. Est-ce
> que la félinité ne représente pas justement quelque chose de hautement
> féminin ? Et s'inscrit alors parfaitement dans la métaphore du film ? Le
> chat serait le double de Ripley (il est le seul autre être vivant à
> justement être vivant du début à la fin), ou plutot sa propre féminité.
> On pourrait même aller jusqu'à dire que l'alien passe tout le film à
> essayer de violer Ripley, et bien sûr échoue lamentablement. Le chat est
> bien vivant à la fin du film, l'alien n'a pas défloré Ripley :-)
Oui, il y a des similitudes entre le chat et Ripley.
C'est une interprétation possible... surtout que le chat est aussi
associé au sexe féminin, mais, (sans chercher à te contredire), qui ne
me parait pas la plus importante... surtout que précisément l'Alien n'en
joue pas... le chat l'indifère... :-))
Tu as raison d'insisté sur le chat, car effectivement il joue un rôle
essentiel dans le film, beaucoup moins anecdotique qu'il ny parait...
mais ce n'est pas le chat qui me dérangeait dans cette scène, c'est son
côté cousu de fil blanc... le moment dans tout film d'horreur, ou sous
un prétexte quelconque les héros se séparent...
Je pense que le chat c'est avant tout une trouvaille scénaristique qui
joue plusieurs rôles.
1) il sert l'effet de réel, dans le sens qu'il parait logique que des
cosmonautes partis pour une longue mission emportent avec eux un animal
domestique qui humanisera l'atmosphère à l'intérieur du vaisseau. Et est
un peu inatendu dans cette atmosphère de haute technologie (même
pourrie) Il renforce la dimension humaine un peu dérisoire de
l'équipage. En plus il joue aussi le rôle de mascotte comme dans les
grands voiliers de la marine au long-cours.
2) il est l'alter ego positif de l'Alien, à mettre AMHA en parallèle
avec le discours de Ash. Voila une autre entité non humaine, dénuée de
morale, très autonome, mais qui par contre est un compagnon des humains
et qui vit en symbiose avec eux.
3) il est intéressant de constater que l'Alien ne lui fait rien. A
priori le chat l'indifère... parceque le chat n'est pas un concurrent de
l'Alien, comme il n'est pas un concurrent des humains dans la hiérarchie
de la vie. Le chat incarne une forme d'altérité positive tolérée par les
humains. Il induit une hiérarchie dans les espèces, montrant par sa
présence dans le film, que l'Alien est plus proche des humains que de
lui sur l'échelle du vivant. Car à l'opposé de l'Alien, le chat rassure.
On sait comment il fonctionne, on connait ses limites et en plus il est
relativement innofensif... (ce qui ne serait pas le cas d'un chien).
Face aux humains ou l'Alien, il est presque sans défenses, il ne peut
être que victime, d'où sans doute le raccord par analogie entre le chat
et Parker, lors du premier massacre commis par l'Alien adulte.
4) il peut aussi catalyser une empathie très forte dans l'imaginaire du
spectateur. Dans le sens que l'animal domestique, victime innocente,
qu'il faut protéger, génère souvent plus d'empathie à son égard de la
part du spectateur qu'à l'égard des protagonistes humains d'une fiction.
5) Malgré sa fragilité, le chat met en évidence aussi une certaine
incompétence des humains à assurer leur propre survie dans un retour
vers des conditions de lutte archaïques pour la survie. Dans le sens que
comme pour la petite fille dans le 2. Le chat semble être capable
d'échapper à l'Alien pour peu qu'on le laisse tranquille. Il n'aurait
pas perdu, comme les humains civilisés, une capacité archaïque à
survivre dans la jungle...
D'ailleurs le seul moment où il serait potentiellement en danger, (le
chat) c'est lorsque Ripley l'enferme dans sa boite et que l'Alien le
trouve.
6) il exprime aussi et très fortement, et la je crois que c'est son rôle
principal, l'empathie qui rend les humains dépendants de leurs
projections affectives, et donc faillibles. (ce qui est le discours de
Dick dans "Les androïdes rêvent tils de moutons électriques".
L'équipage du Nostromo risque sa peau pour le trouver deux fois. Alors
qu'à priori on pourrait penser qu'ils ont autre chose à faire que de
chercher le chat. C'est cette qualité morale, ou cette projection
empathique vers les êtres faibles, qui rend les humains sympathiques,
mais fragiles face à des entités robotisés ou des Aliens dénués de tout
sens moral. En cela le chat, par les sentiments d'affection qu'il
suscite de la part des humains renforcent l'altérité de l'Alien et du
robot et montre que notre morale c'est aussi notre faiblesse.
> Tout l'art de l'élipse est là. On ne nous montre pas l'alien
> qui bouffe, juste le chat qui plisse les yeux. C'est bien plus évocateur
> :)
Oui...
> On retrouve d'ailleurs le chat dans Amélie Poulain (désolé de
> l'association d'idée :-), qui aime écouter les histoires au coin du feu.
> Le chat dans Alien est un peu pareil, c'est le témoin du cauchemar qu'on
> nous montre.
Oui... bien vu le coup du témoin... ça renforce encore l'effet de
réel...
ALIEN 4
> > Choisir c'est mourir... :-)
> > Parce qu'il n'a pas de limites morales... ce qui le gêne il le néantise
> > purement et simplement... et il perçoit sa mère comme une étrangeté, et
> > si ça se trouve, une monstruosité... et ainsi victimise la Reine, on se
> > retrouve à avoir de la compassion pour elle... un comble... moi j'aime
> > bien ce jeu émotionnel pervers... et ce retournement du rôle des Aliens
> > dans la Résurrection...
>
> Oui c'est un peu ça alien, cette bête, cet autre, totalement amoral, qui
> tue juste pour le plaisir.
Non... dans ce cas pas par plaisir... par colère simplement...comme un
môme quelquechose lui déplait et il tape... imagine que nos mômes
naissent avec des capacités physiques d'adultes, je peux te dire qu'on
serait très prudent lorsqu'ils se mettent en colère... :-))
D'ailleurs on sent qu'il est peut-être éducable ce petit monstre pour
peu qu'on le veuille bien... car il écoute Ripley....
c'est pour cela que c'est d'autant plus douloureux le choix de l'évacuer
que fait Ripley... :-))
> C'est ça qui fait peur : ca n'a pas de sens,
> puisqu'il va jusqu'à tuer sa propre mère.
Quand j'y repense une chose qui m'interpelle dans le film, c'est le fait
que Ripley soit une métisse d'Alien... et surtout que la reine
l'appelle... parcequ'elle souffre, et elle cherche de l'aide chez
Ripley, une entité qui fait le pont entre les humains et les Aliens...
tout d'un coup on a un basculement émotionnel vers la Reine, qui de
monstre devient victime... un peu comme dans le 1 lorsque Ripley
l'éjecte... car c'est l'alien qui est devenu une victime... il n'a pas
tué le chat, et s'est confortablement installé avec Ripley dans la
navette pour le long voyage. D'ailleurs on aimerait bien être à sa place
aux côté de Ripley, pourquoi tant de haine à l'égard de la pauvre petite
bestiole qui ne demande qu'à jouer au chat aussi... :-)))
> D'ailleurs on peut encore
> creuser (ha c'qu'elle est bonne cette série :-). L'alien a pour habitude
> de tuer son hôte porteur lors de sa naissance (voir la sublime scène de
> alien1). Peut-être l'alien final de la résurection tue-t-il sa mère
> porteuse par 'habitude', par instinct ?
Suis pas sur qu'il aient scénarisé cette scène de cette façon pour une
raison logique... je pense que si le petit tue sa mère c'est pour
précisément provoquer cette projection empathique perverse de la part du
spectateur vers la reine... c'est un jeu sur la monstruosité... et la
non monstruosité... quels sont les degrés dans la monstruosité...
D'ailleurs, le contenu d'Alien 4 est avant tout une relativisation de la
notion de monstruosité et d'altérité sur lequel vient se greffer un
deuxième discours caché sur l'homosexualité.
Et tu as raison, c'est sans doute une des meilleurs série de film,
malgré les lacunes des un et des autres...
Yann AlienAddict.
> >Il m'est arrivé souvent de faire
> >des heures d'autoroute et d'arriver sans avoir vu passer le temps, et
ce
> >sans passager, sans musique, etc. Tu ne peux pas nier au nom d'un
> >principe un phénomène qui existe clairement.
>
> A mon avis, tu idéalises. Car sur l'autoroute, tu es toujours parasité
par
> une voiture qui te double (ne parlons pas en cas de pluie), garder les
> mains sur le volant pour ne pas aller dans le décor et qui parasite ta
> pensée. bien sûr, tu peux penser à un truc ou deux mais le problème
n'est
> pas là.
Je ne vais pas répondre à tout ton message puisque je suis en gros
d'accord, tu le sais bien. Je ne vais pas faire l'éloge de la vitesse en
tant que telle !
Simplement, dans certaines conditions, certes un peu rares (mais pas
tant que ça pour peu que tu aies régulièrement à faire un trajet dans
certaines périodes "creuses" au niveau fréquentation des autoroutes), la
conduite devient très automatique. Tu te mets en veille en quelque
sorte, et dès qu'il y a un évènement extérieur qui tranche, tu reviens
subitement, mais il peut ne pas en avoir pendant assez longtemps. Garder
les mains sur le volant, garder le pied sur l'accélérateur à un certain
niveau, et même doubler des voitures pourvu que cela soit sans
difficultés (voitures rares, route droite et claire), tout cela peut se
faire de manière pratiquement automatique.
Plus généralement, fait un boulot très répétitif, et pourvu que tu
prennes le rythme et qu'il ne soit pas trop asservissant (je ne fais pas
l'éloge du travail de l'ouvrier des Temps Modernes, qui est évidemment
au-delà de cette limite), tu vas finir par t'en abstraire sans même le
vouloir par moments. Le corps peut, dans une certaine mesure,
fonctionner sans que cela nécessite ton attention. Quand, justement, il
n'a plus besoin d'information. La vitesse n'en est pas vraiment s'il
elle se traduit par un immobilisme relatif ou n'est que vitesse de
répétition...
Je ne dis que cela. Tu demandais comment c'est possible de réfléchir à
130 à l'heure ? C'est possible, c'est tout. J'ai fait une bonne partie
de ma critique d'Amélie Poulain sur la route, par exemple. Je n'idéalise
pas, ce genre de choses m'a moi-même surpris. Tu t'en aperçois
notamment, je te l'ai dit, à la fin d'un voyage où, perdu dans tes
pensées, tu as pris une heure pour 5 minutes. Ou bien pendant le voyage
même, quand tu sors subitement de ta "réflexion" et t'aperçois que tu
roules beaucoup plus/moins vite que ce que tu pensais... parce que tu ne
faisais plus attention. Evidemment, quand le corps fonctionne en
automatique ou presque, les erreurs ne se remarquent pas aussi vite...
Maintenant, que cela ne soit pas l'effet général de la vitesse, des
comportements induits par la conduite, on est bien d'accord. Bon, je
réponds à quelques trucs, ce que j'ai snippé est ce que j'approuve.
> Mais c'est la rue qui est agitée par des cercueils roulants, des
voitures.
> Ton exemple est tellement spécifique qu'il ne retrace pas une réalité
> concrète fréquente. Et comme tu dis, c'est rare.
Ben oui. Mais possible. en fait je ne fais que relativiser ta
formulation. Tu parles de la vitesse et de ses effets, et tu en tires
une formulation générale ; cette formulation est bonne si on considère
qu'il s'agit d'un portrait, mais fausse dans quelques cas spécifiques,
et en particulier ne permet pas de juger automatiquement chaque
situation.
>Mais ton exemple est
> étrange car chez toi, tu peux t'asseoir dans ton fauteuil et laisse
dériver
> ta pensée, fermer les yeux. En voiture, en ville, tu as toujours un
piéton
> qui peut traverser à n'importe quel moment, un chat que sais-je... et
il
> vaut mieux être vigilant. C'est-à-dire que ta pensée est sans arrêt
> parasitée. Ce n'est pas très propice quand même à la reflexion sans
compter
> que l'automobile, l'objet t'instumentalise par les capacités qu'elle a
> d'aller plus vite.
Mais évidemment, je ne dis pas que l'automobile est un outil de
réflexion non plus... simplement qu'elle ne l'interdit pas en soi, que
c'est l'automobile plus un certain contexte, majoritaire mais pas
inévitable.
[comparaison avec l'avion]
> Evidemment mais il ne faut pas tout mettre sur le même plan où tu es
lié à
> la vitesse par l'objet entre tes mains dans un environnement et non
dans un
> avion ou tu n'as aucune vigilance à avoir.
Oui mais justement je parlais de conditions où tu n'as plus guère besoin
de vigilance...
> Evidemment mais l'automobile requiet une vigilance, aussi bien à 30
> kilomètres/heures qu'à 120. Ne serait-ce que pour ne pas aller dans le
> décor et tu es toujours parasité par diverses choses.
Vigilance très réduite dans certains cas. Tu parles de principes
valables en général, donc pertinents, et moi de cas particuliers, donc
ne caractérisant bien sûr pas la vitesse en soi. Reste qu'ils existent,
et que j'en suis conscient pour les avoir vécus de nombreuses fois. Il
m'est même arrivé d'attendre le trajet avec une sorte d'impatience
(relative), car tu sais que la voyage représente une durée
incompressible pendant laquelle rien ne te dérangera : pas de téléphone,
pas d'autre personne... parfait, pourvu que les conditions suivent
(évidemment, dans le même ordre d'idées on peut attendre un voyage en
train ou avion).
> On ne parle pas dans le premier plan d'un objet que tu ne maîtrises
pas.
> Comme dans un TGV mais où tu dois le contrôler sans arrêt car c'est ce
> rapport du sujet à l'objet qui te vampirise par la vitesse.
"Contrôler sans arrêt", c'est biaisé, le contrôle ne demande pas tant de
concentration. j'ai l'impression que tu ne penses qu'aux conditions de
conduite urbaines...
>Dans un second
> plan, social, historique, il y a le phénomène de la vitesse comme par
> hasard, au niveau de traitement de l'information qui en répande de
plus en
> plus et de plus en plus vite. La saturation arrive vite et dépasse les
> capacités humaines de traitement.
Ca, d'accord.
--
Cédric
Tiens, c'est pas le film où Fabrice Luchini se traîne comme un boulet la
critique d'un film qu'il n'a pas vu ??? Si c'est le cas, quelle
coïncidence !
Je snippe tout le reste sur lequel on est d'accord ou du moins qu'on a
déjà discuté.
> Je ne comprends pas bien où tu veux en venir, peut-être car là
>aujourd'hui, je n'ai pas l'esprit très clair par manque de sommeil.
Je l'ai senti à ton manque de punch et ton trop grand accord avec mes
propos :).
Sinon mon paragraphe n'est effectivement pas très clair pour la simple
et bonne raison que ce n'est pas très bien formalisé chez moi non plus.
:)
Laissons tomber...
Oui c'est bien VHD... :)
>
> Tiens, c'est pas le film où Fabrice Luchini se traîne comme un boulet la
> critique d'un film qu'il n'a pas vu ??? Si c'est le cas, quelle
> coïncidence !
>
Oui, celui la meme. Et ou il ne joue pas Lucchini, d'ailleurs.
>
>> Je ne comprends pas bien où tu veux en venir, peut-être car là
>> aujourd'hui, je n'ai pas l'esprit très clair par manque de sommeil.
>
> Je l'ai senti à ton manque de punch et ton trop grand accord avec mes
> propos :).
>
> Sinon mon paragraphe n'est effectivement pas très clair pour la simple
> et bonne raison que ce n'est pas très bien formalisé chez moi non plus.
>:)
> Laissons tomber...
>
Ce n'est plus du dialogue de sourds ...
mais ca a quelque chose d'interessant. :)
--
Stephane Ninin
stefnin...@yahoo.fr
Les cons, ca ose tout... C'est meme a ca qu'on les reconnait.
Tu enleves toute la poesie de la discussion,
avec ce genre d'arguments scientiste. :)
> >> 3) l'Alien ne lui fait rien. A priori le chat l'indifère... parce que
> >> le chat n'est pas un concurrent de l'Alien, comme il n'est pas un
> >> concurrent des humains dans la hiérarchie de la vie...
> > Il y a surtout que son poitrail n'est pas assez grand pour héberger la
> > gestation du bidule. Pragmatique, je suis.
> >
>
> Tu enleves toute la poesie de la discussion,
> avec ce genre d'arguments scientiste. :)
Surtout que ca ne pose à priori aucun problème à un alien.
[SPOILER sur le 3]
Dans le 3 on a affaire à un alien de chien (la scène de la naissance est
d'ailleurs très intéressante, puisque, bien qu'aucun humain ne meurt à
ce moment, Ripley assiste au même moment à une sépulture)
Donc, pourquoi pas un alien de chat ? (spolier sur le 5 cette fois-ci
:-)
> [SPOILER sur le 3]
>
>
> Dans le 3 on a affaire à un alien de chien (la scène de la naissance est
> d'ailleurs très intéressante, puisque, bien qu'aucun humain ne meurt à
> ce moment, Ripley assiste au même moment à une sépulture)
> Donc, pourquoi pas un alien de chat ? (spolier sur le 5 cette fois-ci
>:-)
>
>
Mais vous l'avez donc vu combien de fois pour vous en souvenir ainsi ??? :)
> > Dans le 3 on a affaire à un alien de chien (la scène de la naissance est
> > d'ailleurs très intéressante, puisque, bien qu'aucun humain ne meurt à
> > ce moment, Ripley assiste au même moment à une sépulture)
> > Donc, pourquoi pas un alien de chat ? (spolier sur le 5 cette fois-ci
> Mais vous l'avez donc vu combien de fois pour vous en souvenir ainsi ??? :)
Pour éviter de faire peur au lecteur, je m'abstiendrai de répondre à
cette question... :)
>Excellent ... mais t'as complètement raison, j'avais complètement oublié
>l'importance du néocortex dans tous ça... :-)
>
>ben écoute, la je crois qu'on est collé au mur de l'impasse de
>Trollville...
>
>C'est dommage, je te laisse réfléchir, et peut-être qu'avec un peu
>d'expérience et de maturité tu comprendras un jour. C'est vrai que la
>complexité de notre monde moderne n'est pas toujours facile à
>appréhender pour les jeunes générations, et faut leur laisser du temps.
>
>Mais n'hésite pas si à un moment ou un autre tu as besoins de conseils,
>je serai ravi de t'aider dans ta quête :-))
>
>Yann, qui a fait ce qu'il a pu.
Méfiez-vous de ce garçon, il commence à répandre sa parole doctrinale
même dans les contrées lointaines du nord des Alpes (on y parle avec
un accent lent), à travers des holo-visions (ou hyper-vision ? Je ne
me rappelles plus de quelle mouvance fait-il parti...), appelés pour
l'instant télévisions. Un futur futurologue, que je vous dis !
;-)
--
Psykotik.
Spammator : to email me, just replace "nospam" by "ch"
>> > Il y a surtout que son poitrail [au chat] n'est pas assez grand pour
>> > héberger la gestation du bidule.
> ca ne pose à priori aucun problème à un alien.
> [SPOILER sur le 3]
> Dans le 3 on a affaire à un alien de chien [...] Donc, pourquoi pas un
> alien de chat ?
Parce que le chat doit faire 5 kilos et le dogue 60. Cela dit, pour
prouver qu'il est possible à un alien de rentrer dans un chat, je ferais
plutôt le parallèle avec le cafard géant de MIB.
--
Jihem
Je vais essayer de trouver ça.
"Bérangère Condomines" :
>
> Euh... je débarque comme un cheveu dans le potage
Y a pas d'mal, on là pour ça.
> mais pour lire
> Aristophane, c'est Debidour à n'en pas douter ! (Folio)
Moi j'en voudrais une où « pankatapugon genos » soit traduit par
« bandes d'enculées », cf. http://www.unine.ch/antic/gtalysistrata.html
où l'on peut télécharger le texte de la pièce Lystrata (d'Aristophane) mais
c'est un peu trop édulcoré, pour pouvoir être joué sur scène aujourd'hui.
--
« On a tous un destin et on a tous un intestin, c'est les deux trucs les
plus longs qu'on a tous... »
"Jean-Michel Grimaldi" <ji...@via.ecp.fr> a écrit dans le message :
a5plj0$uvv$1...@sphere.via.ecp.fr...
> gbog a écrit :
> [Il est tard, je risque d'être un peu lapidaire, ne m'en tiens pas
> rigueur, merci.]
Pas de problème. Je réponds un peu tard.
> > Soit on distingue éthique et esthétique de la même façon qu'on distingue
> > le beau et le bon, alors l'éthique devient très proche de la morale et
> > je pense que l'éthique est secondaire dans le domaine de l'art, puisque
> > c'est le domaine du beau et non du bon. C'est une première approche un
> > peu simpliste mais qui a le mérite de la clarté, (presque) tout le monde
> > voyant la distinction du beau et du bon.
>
> Tu fais implicitement référence à Kant, et j'ai l'impression que tu
> opères une confusion sur le sens de « bon », qui désigne ce qui répond à
> un besoin, tandis que le « beau » désigne ce qui procure une satisfaction
> désintéressée (et idéalement universelle car répondant à une éthique), l'«
> agréable » que tu oublies étant une sensation personnelle.
Je ne faisais pas spécialement référence à Kant : j'étais, comme
précisé, dans une première approche séparant éthique et esthétique
de la même façon que pour le commun ce qui est dit "beau" se
différencie de ce qui est dit "bon".
> Justement pour Kant l'éthique est ce qui définit l'Idéal du beau,
> tandis que l'éthique et le bon n'ont rien à voir.
>
> Mais soit, oublions Kant et employons les définitions gboguiennes que
> l'on devine. Finalement ton « bon » c'est l'éthique, et le beau (là tu as
> raison) l'esthétique. Ton « je pense que l'éthique est secondaire dans le
> domaine de l'art, puisque c'est le domaine du beau et non du bon » est
> donc équivalent à « je pense que l'éthique est secondaire dans le domaine
> de l'art, puisque c'est le domaine de l'esthétique et pas de l'éthique ».
> Pas très convaincant...
Je ne sais pas ce qu'il te faut... L'interviou de Ricoeur citée par
"rousseau" me semblait pourtant aller dans mon sens : le domaine de l'art
suppose une suspension momentanée de l'action, donc des considérations
éthiques.
> Mais si tu ne démontres donc rien tu fais part d'une conviction
> personnelle,
Ah, en effet, je ne pense pas qu'il soit possible de démontrer quoi que
ce soit dans ces domaines et je fais effectivement part de mes convictions
personnelles. Permet-moi de parler en mon nom propre, à la première
personne. (comme mes super copains Descartes ou Montaigne...)
> je le note, et je te demande si vraiment ta critique d'une
> oeuvre antisémite propre à influencer l'opinion doit se limiter au côté
> esthétique. Pour ma part je trouverais cette attitude irresponsable et
> dangereuse.
Dans le cas hypothétique d'une oeuvre relevant de l'art qui me plairait
esthétiquement et serait antisémite, d'abord j'éviterais d'en parler trop,
ensuite je donnerais succintement ma position éthique (anti-antisémite,
donc) pour qu'on ne se méprenne sur mes intentions, je dirais ensuite ce que
je pense du coté esthétique de cette oeuvre. Ainsi de Céline (tu dois quand
même connaître suffisament pour comprendre ce que je veux dire) : Je
commence par préciser que je ne partage pas du tout ses opinions politiques,
ensuite je peux dire que c'est un styliste d'exception, un génie littéraire.
Il me semble que c'est la deuxième partie de ce discours qui relève d'une
vraie "critique d'art", alors que le préambule informant que je ne partage
pas les opinions est là seulement pour qu'on ne pense pas que je parle
de Céline dans le but de promouvoir ses opinions politiques.
> > Deuxième approche on considère qu'éthique
> > et morale sont opposées, parce qu'on attribue la morale au domaine
> > interpersonnel, social ; alors que l'éthique est du strict domaine
> > personnel.
>
> Quand je dis que j'ai des idées sur ce qui est éthique, ce sont des
> idées que je considère comme universelles, par exemple ne pas tuer. La
> conviction personnelle n'empêche pas l'universalité.
Oui mais "ne pas tuer" ne peut être une loi universelle sauf à refuser
le tyranicide. Que ferais-tu si tu avais eu Hitler au bout de ton fusil ?
Une universalisation des valeurs éthiques
ou morales tend très vite à refuser certains actes
que je juge nécessaires, comme celui de prendre le maquis et
de se mettre hors-la-loi dans certains cas justifiés. De Gaulle a été un
hors-la-loi, par exemple. Son devoir absolu de militaire était d'obéir à sa
hiérarchie, il a failli gravement à son devoir, il "méritait" la mort pour
rebellion (l'armée ne rigole pas avec ce genre de chose), il "méritait" le
blâme éthique pour avoir parjuré (il avait en quelque sorte fait voeu de
soumission à l'autorité militaire en devenant militaire), etc. Pourtant, il
me semble aller de soi qu'il a bien fait de prendre le maquis, même si cette
action devait emporter de nombreuses personnes vers la mort. Le "tu ne
tueras point" me semble une loi très utile et juste, évidemment, mais je
pense qu'il est difficile d'un faire un commandement absolu primant sur tout
les autres.
Sur ce sujet, j'ai lu le Criton de Platon où un dénommé Criton vient
pour convaincre son ami Socrate de fuir et de ne pas se suicider comme le
lui ordonne
l'autorité de la Cité. Je ne pense pas cerner entièrement la philosophie de
Socrate ni de Platon mais j'ai l'impression que Socrate blâmerais peut-être
De Gaulle d'avoir failli au devoir d'obéissance. Socrate démonte les
arguments de Criton et oppose le sien : rien n'importe plus que le Juste, je
ne peux pas m'opposer à la Justice de ce pays sans être moi-même dans
l'injustice et le parjure. Socrate est conséquent avec lui-même et suit les
préceptes qu'il s'est donné : il boira la ciguë.
Or, pour moi, le suicide d'un philosophe est forcément un aveu d'échec,
quelque part. (Je rentre en zone noire, je déteste l'idée de parler de
suicide.) Socrate pouvait très bien s'en sortir en payant les gardes et en
changeant de Cité, il était libre de ses mouvements. Il a décidé de se
donner la mort. Quelle philosophie peut conduire a un tel acte ? La
philosophie n'est-elle pas forcément une sorte d'amour de la vie ? Le sage
taoïste Lie-tseu fini ses jours dans un ferme en nourissant lui-même ses
cochons comme s'ils étaient des humains et en péchant à la ligne. Le
renoncement ne peut pas, selon moi, être un renoncement de la vie physique.
Le renoncement est ou devrait être une aspiration au bonheur ici et
maintenant, mais le bonheur suppose la vie physique. Qu'une philosophie si
importante pour l'Occident que celle de Socrate mette la Justice au-dessus
de la vie me semble très inquiétant.
Enfin bon, je voulais juste dire que pour moi il n'y avait pas
d'universaux qui méritent le sacrifice ultime... « Mourir pour des idées,
l'idée est excellente... » (Tonton Georges)... donc, en un sens, il n'y pas
d'idées éthiques vraiment universelles.
> > Mais il ne faut pas se crisper sur l'antisémitisme de Céline,
> > l'important me semble qu'il est au fond un anti-humaniste et je me
> > demande si c'est ça que tu voudrais "condamner".
>
> Quand on critique une oeuvre il ne s'agit pas de condamner l'auteur.
> Soit l'oeuvre porte un message condamnable et on la condamne (c'est-à-dire
> que l'on met l'opinion en garde), soit non et on ne la condamne pas. C'est
> aussi simple que cela. Sur Céline en particulier, comme je l'ai dit je le
> connais très mal, donc je ne m'étendrai pas.
>
> > Pour moi la lecon du futurisme est justement que l'art ne devrait
> > pas se mêler de politique. Pourtant j'aime beaucoup Aristophane qui se
> > mêle justement de politique.
>
> Donc tu te contredis.
Oui, un peu, comme je l'avais signalé. C'est que vois-tu je n'ai pas
encore trouvé de système de pensée satisfaisant qui me garantisse contre les
contradictions. Je pense que de tels systèmes existent. Je pense aussi
qu'ils ont tous montré leur "dangerosité" (comme tu dirais). Sans doute que
la décision de refuser de tels systèmes est peut-être elle aussi
"dangereuse", qu'elle présente le risque de perdre toute forme de boussole.
Mais en fait, il me semble que la "dangerosité", le risque, est une
composante essentielle de la vie et je ne vois pas comment on pourrait vivre
ou créer de l'art sans une forme de prise de risque, et il me semble que
dans ton optique cette prise de risque doit être évitée.
> Et puis lorsque justement c'est l'artiste qui
> insère dans son oeuvre un message politique, l'oeuvre ne relève plus
> seulement du beau, de l'esthétique, et la critique ne peut pas ignorer la
> question éthique.
Quand le message éthique est actuel, que c'est une arme politique, je
suis assez d'accord. La limite est difficile à définir. Disons que je pense
qu'on peut dire du Justicier dans la Ville que c'est un film intéressant la
justice et l'éthique et le condamner, mais le cas d'Amélie montre bien que
certains veulent critiquer éthiquement un film qui ne s'y prête pas
tellement.
> > Prenons un autre exemple, disons un film de propagande communiste, je
> > pense à Karmen [...]. Je n'en suis pas sûr mais supposons que ce type
> > qui a créé des fictions-reportages de propagande soviétique soit aussi
> > un grand cinéaste et qu'il ait inventé beaucoup de façons de filmer, de
> > cadrages, avec une sensibilité très juste des éléments du cinéma.
> > Doit-on le condamner d'avoir servi le pouvoir en place ? et à des fins
> > de propagande pure ?
>
> Eh bien un tribunal le condamnera peut-être, oui. Le spectateur quant
> à lui n'a pas à condamner l'artiste. Il se mettra en garde et mettra en
> garde sur l'oeuvre. Quant aux « façons de filmer », tout cela n'empêchera
> nullement de les apprécier pour ce qu'elles sont. Nous parlons de mettre
> en garde le spectateur, pas de censurer une oeuvre, encore moins condamner
> l'artiste.
>
> Et si ce que tu cherches à dire c'est que si la propagande permet
> l'éclosion de nouvelles formes d'expression alors c'est une bonne chose,
> je trouve cela irresponsable : la fin ne justifie pas les moyens.
Non je ne dis pas que la propagande est une bonne chose, je dis que
c'est une chose, que ça existe, et que sans doute des artistes ont utilisé
cette chose qui me semble politiquement réprouvable et artistiquement
indifférente. J'aime bien les affiches soviétiques, je trouve qu'elles ont
une beauté particulière, pour moi ça peut être de l'art, et pourtant je ne
suis pas d'accord avec l'objet politique qu'est la propagande. De même, je
trouve très belles des oeuvres de grand peintres qui sont, au fond, des
propagandes pour le christianisme, quand ce ne sont tout simplement pas des
"pubs" pour les commanditaires. Suppose un bouffeur de curés qui n'aime rien
plus que les églises romanes et les vitraux, est-il pour toi dans une
situation impossible ?... Je m'interroge...
Peut-être bien, mais je crois que c'est une image de la position
de chacun d'entre nous : malgré nos idéaux éthiques et notre
volonté d'un monde meilleur, il nous faut aimer chaque jour la réalité qui
nous entoure, elle qui est souvent en désaccord complet d'avec ces idéaux.
Comment faire ? S'échapper, ne pas regarder la télé, refuser de vivre ici et
maintenant (ou carrément se noyer dans les discussions d'usenet...) ?
J'estime ceux qui prennent cette voie contemplative mais je crois qu'elle
est d'une façon moins "éthique" que celle qui conduit à vivre la
contradiction, ce qui revient à suspendre momentanément la fonction éthique
pour supporter de regarder un jité en entier. Or, il me semble que l'art est
le lieu privilégié de cette suspension.
> > j'ai l'impression que tu dis qu'on retrouve dans la qualité de son
> > regard sur la réalité filmée des "dispositions" qui sont les mêmes que
> > celles qui l'ont poussé à mettre son art au service du pouvoir
> > totalitaire, c'est à dire des traits que tu juges éthiquement négatifs
> > et qui transparaissent dans l'esthétique du film. Tu me dis si je me
> > trompe.
>
> Eh bien je te le dis. Depuis le début je m'efforce de dire que l'oeuvre
> doit être considérée pour ce qu'elle contient.
Je ne comprends pas. Bien entendu qu'une oeuvre est jugée sur ce qu'elle
contient...
> C'est pour cela que je
> citais des toiles futuristes inoffensives.
Je n'ai pas suivi cette partie de la conversation avec Yann Minh.
> > Question : que penses-tu de l'appel pacifiste de Pierre Loti avant
> > la seconde guerre mondiale ? Est-ce que c'était dangereux ou au
> > contraire ?
>
> Ce n'est pas parce qu'un artiste s'exprime qu'il fait de l'art. Donc on
> dévie. Ensuite je pourrais peut-être trouver une réponse à ta question en
> deux minutes, mais ça me semble désinvolte. Cela dit j'y réfléchirai.
Ça m'intéresse de savoir ce que tu en penses.
> > Tu parles en général mais je crois qu'il faut alerter quand le
> > message est de nature politique, c'est à dire quand il est un "objet" de
> > la politique (au sens large). Quand le message est de nature artistique,
> > je ne pense pas qu'il soit nécessaire d'alerter.
>
> D'accord, mais pour savoir que le message est de nature artistique et
> non politique, le seul moyen est de confronter l'oeuvre à un jugement
> éthique.
J'y reviens un peu plus bas.
> Ensuite, on n'alerte l'opinion que si le message est dangereux.
> Mais même lorsque l'intention est purement esthétique, pour s'en assurer
> on ne peut se passer de l'éthique. Les deux sont donc indissociables.
Tu peux le dire sous toutes les formes, je ressents malgré tout en moi
une très nette différence entre le mode "jugement éthique d'un film" et le
mode "jugement artistique". C'est deux états très différents dans mon
psychisme, si tu veux.
> >> Il ne s'agit pas d'« effacer » une oeuvre, même pas de la censurer ;
> >> il s'agit de mettre en garde le lecteur qui ouvre le livre : « au-delà
> >> de cette ligne, allumez votre sens critique ».
> >
> > Oui, mais c'est aussi un peu incompatible, en un sens, avec l'idée
> > je pense primordiale qu'un film doit nous "prendre" dans un fleuve.
>
> Dans le post auquel tu réponds, je dis qu'une fois que la ceinture est
> bien attachée, on peut se laisser transporter. Au besoin avec une deuxième
> vision dans le cas d'un film.
Oh on a vraiment pas la même façon d'aimer les films, alors ! Pour moi,
un bon film, c'est sans ceinture que je me le tape, et surtout pas à la
deuxième vision ! Si je regarde un Hitchcock en mode "jugement éthique", je
vais perdre tout le suspense du film... Tu es en train de faire l'apologie
du spoileur !...
> Il est même possible qu'une analyse a posteriori suffise, en essayant de
> justifier le message que tu as perçu, et dans ce cas tu peux te laisser
> impressionner sans attacher ta ceinture.
Ah ! Ouf !
> Mais après tu passes en chambre
> de décontamination.
>
> > si je vois l'exaltation d'un geste raciste dans un film, c'est surtout
> > parce que mon indignation va me troubler dans la réception que je vais
> > pas aimer ce film, pas tellement parce que je pense que les gens sont
> > moins malins que moi et risuqent de devenir racistes juste parce qu'ils
> > auront vu un film.
>
> Être gêné est la première étape d'une attitude responsable. Mais il y
> en a d'autres.
Possible.
> > Je parle de belles natures mortes, qui sont indéniablement des
> > oeuvres d'art et qui sont pourtant le degré zéro de l'éthique
>
> Clairement tu ne parles pas du beau mais de l'agréable.
Pardon pardon, mais je ne pense pas. Certaines de ces natures mortes
sont assez sombres et sobres, il me semble que l'agrément qu'elles apportent
n'est pas immédiat. Il y a cependant un petit truc qui accroche et qui pour
moi est plus que de l'agrément (mais je ne sais pas bien ce que tu y mets),
ce truc est de l'ordre du beau.
> Mais encore une
> fois, s'il n'y a pas de message dangereux, je ne crois pas que quiconque
> éprouvera une frustration à ne pas pouvoir agiter d'épouvantail.
Extraite de son contexte et inversée, je trouve que cette phrase
explique assez bien l'anti-amélisme politique et brutal.
> C'est aussi valable pour la musique.
Chouette.
> Et une valeur éthique n'est pas nécessaire,
> mais s'assurer de l'innocence de l'oeuvre requiert une conscience éthique.
Je ne sais pas bien à quel degré tu te places. Pour moi, aucune analyse
éthique n'est nécessaire pour m'assurer de l'innocence d'une nature-morte ou
d'un morceau de musique. Tu me diras qu'il faut bien avoir une certaine
disposition éthique pour déjà se poser la question. Certes, mais je n'en
suis pas à nier l'existence de cette disposition... (Même si je trouve un
peu louche ce genre de mots qui échappent aux définitions, mais c'est un
autre débat.) Je dis juste qu'elle a un domaine d'application (celui de
l'action) et que l'art n'en fait pas directement partie. Tu me diras aussi
que les films sont potentiellement des oeuvres d'art mais qu'ils sont
potentiellement aussi des objets de communication pouvant intéresser
l'action, donc l'éthique. Je suis bien d'accord. Mais c'est justement la
face "art" qui me botte le plus, dans les films que j'aime.
D'autre part, il me semble que l'éthique
peut changer et que c'est inutile de chercher des noises
aux auteurs anciens pour la raison qu'ils parlent des noirs comme des
animaux, ou bien pour le fait qu'ils avaient des esclaves. Le boulot
d'artiste n'est pas d'édifier les masses sur le mode véritatif ou injonctif
(Ricoeur) mais de leur transmettre une "émotion". (C'est certainement un peu
plus compliqué, je sais, mais il faut bien être synthétique)
> Attention à la phrase précédente, c'est justement quelquechose qui n'était
> pas passé visiblement.
>
> Pour la suite, je ne ferais que me répéter si je répondais point par
> point ; restons synthétique.
Je fais de mon mieux. En fait, il me semble que l'argumentation la plus
solide est celle de Ricoeur et je pense que tu conviendras que c'est un
penseur préoccupé d'éthique et de morale. Pour être on ne peut plus
synthétique, je dis tout bêtement avec Ricoeur et les Médiévaux que « le
Beau n'est ni juste ni vrai » et je voudrais savoir si tu partage ce point
de vue.
(Au fait, le titre de ce message veut dire que la séparation de
l'Éthique et de l'Esthétique relève de la même nécessité que la séparation
de l'Église et de l'État, selon moi.)
--
« La télé, tu peux poser des fleurs, le cinéma, tu peux rien poser dessus. »
(B. d. c.)
C'est troller que de parler d'âme ?
C'est troller que de dire que c'est troller de parler d'âme ?
--
« Le cinéma français, ça fait rêver à peu près comme la Sécurité sociale. »
(B. d. c.)
> L'interviou de Ricoeur citée par "rousseau" me semblait pourtant aller
> dans mon sens : le domaine de l'art suppose une suspension momentanée de
> l'action, donc des considérations éthiques.
De toute façon, je pense qu'au moment où tu es ému, que tu le veuilles
ou non, tu n'écoutes pas ton néocortex ; je suis donc d'accord sur cette «
suspension _momentanée_ de conscience ». Le tout étant de pouvoir rallumer
ton néocortex lorsque le soufflé retombe, et analyser ce qui s'est passé.
C'est pour cela que je pense que tu as tort de parler de la « fusion de
l'éthique et de l'esthétique ». Je dirais plutôt que les deux sont liés
par un cordon qui ne doit pas être rompu.
> Dans le cas hypothétique d'une oeuvre relevant de l'art qui me
> plairait esthétiquement et serait antisémite, d'abord j'éviterais d'en
> parler trop, ensuite je donnerais succintement ma position éthique
> (anti-antisémite, donc) pour qu'on ne se méprenne sur mes intentions, je
> dirais ensuite ce que je pense du coté esthétique de cette oeuvre.
Mais comment as-tu détecté la nature antisémite de l'oeuvre ? Justement
en y voyant autre chose que l'esthétique : il y a peut-être eu «
suspension momentanée de l'action », mais tu as rallumé ton néocortex et
tu t'es dit « attention ». Ce qui serait dangereux, c'est que tu sois
lobotomisé à tel point que ton néocortex reste HS une fois la bulle
dégonflée. Je ne dis rien de plus quand je dis qu'il ne faut pas rompre le
cordon entre éthique et esthétique. D'ailleurs si tu lis ma critique de
Black Hawk Down (<3C766C55...@via.ecp.fr>), j'y écrivais que « ceux
qui recherchent juste du spectacle et dont le poil n'est pas hérissé par
le nationalisme-manichéisme US passeront tout de même un bon moment ». Je
ne cherche pas à montrer la suprématie de l'éthique sur l'esthétique ou
vice-versa, mais simplement à montrer que le cordon ne doit pas être
rompu. Et visiblement nous sommes d'accord.
> "ne pas tuer" ne peut être une loi universelle sauf à refuser le
> tyranicide. Que ferais-tu si tu avais eu Hitler au bout de ton fusil ?
Ta question me laisse penser que tu aurais tiré. Parce que c'était un
tyran ou parce qu'il menaçait l'Humanité ? Pour ma part, bien au chaud sur
ma petite chaise, je pense que tu aurais eu tort. Et l'on retrouve le
thème d'Apocalypse Now : doit-on répondre à la barbarie par la barbarie ?
Mais nous dévions.
> Une universalisation des valeurs éthiques ou morales tend très vite à
> refuser certains actes que je juge nécessaires
D'où te vient cette légitimité à juger que quelqu'un doit mourir ? Tu
fais partie de ceux qui sont contre la peine de mort sauf pour les
violeurs de fillettes ? Et entre Hitler et ta grand-mère, à quel homme
arrêteras-tu de tirer ? Mais là on dévie vraiment ; je ne suis pas sûr que
frcd soit le meilleur endroit pour parler de cela.
> De Gaulle a été un hors-la-loi, par exemple. Son devoir absolu de
> militaire était d'obéir à sa hiérarchie, il a failli gravement à son
> devoir, il "méritait" la mort pour rebellion
Comme je le disais dans un autre post, il semble naturel de rejeter le
meurtre, et scandaleux de rejeter la liberté d'expression. C'est pour cela
que la vigilance est nécessaire autant que la morale. Où se situe la
désobéissance à une hiérarchie humaine entre les deux ? ...
> Qu'une philosophie si importante pour l'Occident que celle de Socrate
> mette la Justice au-dessus de la vie me semble très inquiétant.
N'est-ce pourtant pas ce que tu ferais en tirant sur Hitler ? Le
problème quand on commence à faire des exceptions, c'est que la limite du
champ d'application de ces exceptions est totalement subjective. Alors si
ça ne concerne que toi, d'accord, mais sinon, pourquoi imposer _ta_
subjectivité ? Quant au choix de Socrate de mourir pour finalement
défendre ses idées, c'est encore un autre débat.
>> Donc tu te contredis.
> Sans doute que la décision de refuser de tels systèmes est peut-être
> elle aussi "dangereuse", qu'elle présente le risque de perdre toute
> forme de boussole. Mais en fait, il me semble que la "dangerosité", le
> risque, est une composante essentielle de la vie et je ne vois pas
> comment on pourrait vivre ou créer de l'art sans une forme de prise de
> risque, et il me semble que dans ton optique cette prise de risque doit
> être évitée.
Prendre des risques ne me dérange pas ; c'est en faire prendre aux
autres qui ne me va pas. Et si l'on décide de passer « Massacre à la
tronçonneuse » dans toutes les classes de CP de France et qu'un enfant en
profite pour tuer son père, ça me choque (même si aucun papa ne se fait
charcuter d'ailleurs). Et tiens un parallèle que je trouve bien approprié
avec ce que tu prônes : c'est comme si tu choisis de rouler à 250 sur une
route fréquentée.
> J'aime bien les affiches soviétiques, je trouve qu'elles ont une beauté
> particulière, pour moi ça peut être de l'art, et pourtant je ne suis pas
> d'accord avec l'objet politique qu'est la propagande.
Là on est d'accord (à condition toujours d'être conscient de ce qu'il y
a derrière). Cf. ce que je disais sur Black Hawk Down. Au passage note
qu'encore une fois tu portes un jugement éthique sur ces affiches.
>>> Question : que penses-tu de l'appel pacifiste de Pierre Loti avant la
>>> seconde guerre mondiale ? Est-ce que c'était dangereux ou au contraire
>>> ?
> Ça m'intéresse de savoir ce que tu en penses.
Cette sollicitude de ta part ne peut que toucher mon ego ; puisque tu
insistes, je pense en effet que c'était dangereux. Quant à savoir s'il a
eu raison cependant, c'est une autre question. Je ne pense pas que des
considérations aussi personnelles (toujours cette fixation subjective
d'une limite entre un rejet et une acceptation « naturels ») intéressent
le groupe de discussion.
> je ressents malgré tout en moi une très nette différence entre le mode
> "jugement éthique d'un film" et le mode "jugement artistique". C'est
> deux états très différents dans mon psychisme, si tu veux.
D'accord. Cf. ce que je disais tout au début de ce post : il ne s'agit
pas de « fusionner » les deux, mais de conserver un lien entre eux, de
façon à être vacciné contre une éventuelle esbrouffe esthétique : on
t'inoculera peut-être le bacille, mais tu sauras générer les anticorps
idoines.
> D'autre part, il me semble que l'éthique peut changer et que c'est
> inutile de chercher des noises aux auteurs anciens pour la raison qu'ils
> parlent des noirs comme des animaux, ou bien pour le fait qu'ils avaient
> des esclaves.
Hehe. Attention tu marches dans un troll. Car je suis d'accord avec
toi, mais tu montres en fait la supériorité d'une éthique fondée sur des
valeurs qui ne sont pas posées comme des axiomes mais qui découlent d'une
vision du monde moins sujette aux glissements. Je pense à une vision
religieuse.
> je dis tout bêtement avec Ricoeur et les Médiévaux que « le Beau n'est
> ni juste ni vrai » et je voudrais savoir si tu partage ce point de vue.
Oui. Mais le beau, s'il n'est pas éthique, ne doit pas pour autant en
être séparé. Mais je ne fais que répéter ce dont nous avons déjà parlé.
> (Au fait, le titre de ce message veut dire que la séparation de
> l'Éthique et de l'Esthétique relève de la même nécessité que la
> séparation de l'Église et de l'État, selon moi.)
Soit. Mais il ne s'agit pas de rajouter un contenu éthique dans
l'esthétique ; simplement de l'identifier lorsqu'il y est présent. C'est
comme si un professeur de l'enseignement laïc faisait du prosélytisme et
que tu me reprochais de critiquer cette attitude car dans le même discours
je parle de religion et d'éducation laïque.
--
Jihem
> Sur ce sujet, j'ai lu le Criton de Platon où un dénommé Criton vient
>pour convaincre son ami Socrate de fuir et de ne pas se suicider comme le
>lui ordonne l'autorité de la Cité. Je ne pense pas cerner entièrement la
>philosophie de Socrate ni de Platon mais j'ai l'impression que Socrate
>blâmerais peut-être De Gaulle d'avoir failli au devoir d'obéissance.
D'avoir engendré le gaullisme immobilier, certainement.
>Socrate démonte les
>arguments de Criton et oppose le sien : rien n'importe plus que le Juste, je
>ne peux pas m'opposer à la Justice de ce pays sans être moi-même dans
>l'injustice et le parjure. Socrate est conséquent avec lui-même et suit les
>préceptes qu'il s'est donné : il boira la ciguë.
Une cité n'est pas un pays.
Le Juste n'est pas la Justice.
> Or, pour moi, le suicide d'un philosophe est forcément un aveu d'échec,
>quelque part.
La seule vérité de ce monde, c'est la mort.
>(Je rentre en zone noire, je déteste l'idée de parler de
>suicide.)
Personne ne t'y obligeait.
>Socrate pouvait très bien s'en sortir en payant les gardes et en
>changeant de Cité, il était libre de ses mouvements. Il a décidé de se
>donner la mort. Quelle philosophie peut conduire a un tel acte ?
L'amour d'Athènes. N'est pas Alcibiade qui veut. Et tu oublies le
contexte historique.
> La
>philosophie n'est-elle pas forcément une sorte d'amour de la vie ? Le sage
>taoïste Lie-tseu fini ses jours dans un ferme en nourissant lui-même ses
>cochons comme s'ils étaient des humains et en péchant à la ligne. Le
>renoncement ne peut pas, selon moi, être un renoncement de la vie physique.
Vive la trahison. Tu fais l'apologie de De Gaulle mais oublies
Brossolette.
>Le renoncement est ou devrait être une aspiration au bonheur ici et
>maintenant, mais le bonheur suppose la vie physique. Qu'une philosophie si
>importante pour l'Occident que celle de Socrate mette la Justice au-dessus
>de la vie me semble très inquiétant.
Le Juste n'est pas la Justice.
Le bonheur est dans le pré.
Le renoncement dans l'escalier.
Vivre. Comme un chien andalou. Mais viiiiiiivre.
(...)
> (Au fait, le titre de ce message veut dire que la séparation de
>l'Éthique et de l'Esthétique relève de la même nécessité que la séparation
>de l'Église et de l'État, selon moi.)
Sacraliser la vie, comme tu l'as fait plus haut, relève de la
religion.
Je sais, je sais, je casse tout le commerce, mais j'ai pas pu
m'empêcher. Pragmatique, je suis.
Yoda sur Seine.
Mais qu'il est compliqué. Y'a simplement que le gars est mutitâches.
L'alien est une projection mentale du chat qui en a marre qu'on ne
s'occupe pas de lui et qui se venge par le biais d'un ectoplasme qui
s'échappe de son cerveau. En plus ils lui filent une patée dégueulasse.
Yannick Rolandeau wrote:
[SNIP, vous semblez d'accord, question de point de vue]
> C'est un
> peu comme si tu me disais, pour forcer la métaphore, qu'en ayant un
> pistolet, tu n'es pas obligé de tirer avec. Je vais te répondre bien sûr
> mais le plus sûr moyen de ne pas tirer, c'est de ne pas avoir de pistolet.
Ca me rappelle vaguement une histoire de X-No-Archive ca... :))
Bien le bonsoir,
> L'alien est une projection mentale du chat qui en a marre qu'on ne
> s'occupe pas de lui et qui se venge par le biais d'un ectoplasme qui
> s'échappe de son cerveau. En plus ils lui filent une patée dégueulasse.
Woooow!!! Excellent Michèle... !!!!
j'avais pas vu ça... mais tu as complètement raison!!! super !!!! :-))))
Sauf que je ne pense pas que l'Alien soit un ectoplasme généré par le
chat... non, on sait que les extraterrestres dans le vaisseau desquels
l'équipage trouve les oeufs de l'Alien étaient en guerre contre quelque
chose... et la tout s'explique... ils étaient en guerre contre les
chats, et les Aliens sont l'arme bactériologique conçu par les chats
pour s'emparer de la galaxie. C'est pour cela que dans le film le chat
et l'Alien s'entendent si bien... et cela éclaire sous un jour
prodigieux la fameuse scène ou l'Alien observe le chat enfermé dans la
boîte à la fin. Il se penche vers lui en signe de soumission, Il salut
son maître... wow...excellent!!!
La complicité chat/Alien est induite par plusieurs scènes et métaphores
incroyablement maîtrisée par l'équipe de réalisation. En fait le chat et
l'Alien communiquent télépathiquement. C'est le chat qui indique à
l'Alien quelles doivent être les victimes. Et amène l'équipage à se
séparer au début. D'ailleurs ça m'a toujours paru bizarre cette histoire
du chat enfermé dans un espèce de sas au début... qui a fermé le sas
derrière le chat ? Soit Ash, soit l'Alien pour tendre un piège à
l'équipage.
D'autres plans sont explicites, lorsque le chat griffe Ripley dans le
poste de pilotage, car il ne veut pas partir sans l'Alien, et détourne
Ripley pour l'empêcher de sauver Lambert et Parker. Et d'ailleurs qu'est
ce qu'il fait le chat dans les fauteuils du poste de pilotage, coeur
névralgique du vaisseau d'où il peut tout suivre grace au monitoring.
Et c'est le chat qui perturbe depuis le début le système de sonar en se
déplaçant en parallèle dans les conduits d'aération avec l'Alien.
Plus subliminal, lorsque Ash projette Ripley sur la couchette, il fait
remuer des éléments décoratifs suspendus qui rappellent étrangement les
jeux qu'on offre aux chats du genre bobine accrochée à un fil...
Ash transpire du sang blanc comme... "le Lait", boisson préférée des
chats, et tout le sang de Ash est blanc... pas de hasard... d'ailleurs
je me demande s'il ne boit pas du lait à un moment Ash.
Et que voit Ash lorsqu'il regarde dans le microscope... un foetus de
chat...
L'alien a une queue... comme les chats.
Le fait que celui qui est infecté le premier par les aliens vomisse tout
son repas, fait référence aux chats qui dégurgitent leur herbe à chat.
D'ailleurs c'est étonnant ce mimétisme à la fin, entre le chat enfermé
dans son caisson et l'Alien qui fait de même et s'allonge dans une
alcôve et devient tout d'un coup peu belliqueux. C'est normal, il ne
reçoit plus d'ordres du chat qui dort dans sa boîte, car pour le chat la
mission est accomplie. L'équipage dangereux est éliminé, et il retourne
sur terre avec l'Alien, et son domestique humain... Ripley.
On remarquera d'ailleurs que dans le 3, L'alien s'attaque aux chiens,
ennemis héréditaires des chats.
Grace au chat, Ridley Scott éveille chez nous des peurs ancestrales, des
engrammes inscrits dans notre psychée depuis des millénaires.
L'angoisse de l'altérité liée au chat est un mythe bien connu depuis les
egyptiens qui vouaient un culte aux vrais maîtres du monde.
C'est d'ailleurs le secret de la table d'émeraude. "Sur terre comme au
ciel". En effet, grace au statuaire et à la mythologie egyptienne on
comprend que les chats sont descendu sur terre en pyramides volantes
pour domestiquer les humains à peu près à cette époque.
On trouve souvent des chats momifiés dans les tombeaux égyptiens, ce
sont eux les vrais Maîtres de l'egypte, et les pharaons qui les
accompagnent dans la tombe n'étaient que leurs serviteurs.
Ces petits félins en apparence inofensifs omniprésent dans notre
quotidien, sont la version réduite de l'invasion à venir.
D'ou l'expression antique, la nuit tous les chats sont gris, qui fait
directement référence aux petits gris de l'ufologie.
Kubrick était au courant, sans être directement explicite, la présence
du tigre aux yeux rouges au début de 2001 montre qu'il connaissait le
complot félin, mais il l'exprime métaphoriquement grace au tigre. Et
c'est pour cela qu'il n'y a pas de chats dans le vaisseau qui va vers
Jupiter... trop dangereux... d'ailleurs l'absence de chats dans toutes
les scènes de la fin de 2001 n'est pas fortuite. Les monolithes
préviennent l'humanité du danger. Il faut se débarasser des chats. C'est
d'ailleurs toute la symbolique de l'os au début du film, juste après la
scène du félin. os=Chien=ennemi des chats... l'association os=vaisseau
spatial est la pour indiquer qu'il est temps d'empêcher les humains de
conquérir l'espace où les chats règnent en maitres... d'ailleurs HAL a
l'oeil rouge comme celui du felin au début.
Dans le numéro 5 d'Alien (dont j'ai lu le scénario grace à mon réseau de
relations), lorsqu'ils atterissent sur terre, il n'y a plus que des
chats roux qui contrôlent le monde et des Aliens qui les servent, c'est
pour cela que dans le 4 l'équipage redoute tellement le retour à la
terre. Et Call a du lait à la place de sang, comme Ash... d'ailleur il y
a quelquechose de félin dans la façon dont Ripley se déplace...
Et dans le 2, il y a de nouveau une association Chat/Alien dans le
cauchemar de Ripley, si je me souviens bien.
Merci Michèle... et encore bravo pour cette trouvaille... si si si...
sincèrement elle me plait beaucoup... :-))
Yann content qui va de ce pas éliminer tous les chats qu'il
rencontrera....
> Tu es en train de me dire en gros, d'une autre manière, que l'on peut
> discuter philosophie même en voiture avec un ami.
Ou même penser tout seul.
>Je suis d'accord mais là
> on parle d'un phénomène, la vitesse et que celle-ci est enivrante et
> instrumentalise. [...] Je veux dire par là que ce sont
> pas des cas rares qui changent grand chose au phénomène et à sa
concrétude.
Bien sûr. Idem pour la suite, que je snippe donc.
> >"Contrôler sans arrêt", c'est biaisé, le contrôle ne demande pas tant
de
> >concentration. j'ai l'impression que tu ne penses qu'aux conditions
de
> >conduite urbaines...
>
> Pas seulement. Pourquoi prendre l'autoroute d'ailleurs ? Je ne te
parle pas
> du fait qu'on y a moins d'accident mais c'est pour aller vite qu'on
l'a
> prend. On veut rentrer au plus vite au lieu de prendre une petite
nationale
> et de prendre son temps pour rentrer.
Heu, pas forcément non plus. Pas exemple, sur le trajet que je faisais,
prendre l'autoroute rallongeait beaucoup la distance et faisait passer
par une ville, ce qui fait qu'au final je ne gagnais pratiquement pas de
temps. Sans compter que je payais, en plus. Mais la conduite sur route
normale me stressant facilement, je l'évite plutôt en cas de trajet un
peu long. Je ne suis pas un fana de la vitesse, du tout.
Enfin bref. Tu vois, je veux juste éviter les généralisations. Une
tendance peut être critiquable sans qu'on établisse un lien logique
exclusif entre son existence et certaines conéquences. Et quant à cette
tendance générale, on est évidemment d'accord.
--
Cédric
Une pomme verte n'est pas un pomme rouge, ce sont des pommes.
> Le Juste n'est pas la Justice.
Le sucré n'est pas le sucre, mais le sucre est sucré.
> > Or, pour moi, le suicide d'un philosophe est forcément un aveu
> >d'échec, quelque part.
>
> La seule vérité de ce monde, c'est la mort.
Et la viiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiie ? Elle est pas vraie, la
viiiiiiiiiiiiiiiiiiiiie ?
> >(Je rentre en zone noire, je déteste l'idée de parler de
> >suicide.)
>
> Personne ne t'y obligeait.
Si, moi.
> >Socrate pouvait très bien s'en sortir en payant les gardes et en
> >changeant de Cité, il était libre de ses mouvements. Il a décidé de se
> >donner la mort. Quelle philosophie peut conduire a un tel acte ?
>
> L'amour d'Athènes. N'est pas Alcibiade qui veut. Et tu oublies le
> contexte historique.
Sans doute mais tu pourrais m'expliquer un peu tes allusions.
> > La philosophie n'est-elle pas forcément
> > une sorte d'amour de la vie ? Le sage
> >taoïste Lie-tseu fini ses jours dans un ferme en nourissant lui-même ses
> >cochons comme s'ils étaient des humains et en péchant à la ligne. Le
> >renoncement ne peut pas, selon moi, être un renoncement de la vie
> >physique.
>
> Vive la trahison. Tu fais l'apologie de De Gaulle mais oublies
> Brossolette.
Tu raccourcis un peu ce que je voulais dire. Pas « Apologie de Mr. de
Gaulle » mais « reconnaissance d'un acte de rebellion nécessaire : l'appel
du 18 juin. ». C'aurait été Duschmoll ou Dugenou, c'aurait été kif-kif... Et
je ne dis pas « vive la trahison », je dis « le suicide philosophique me
semble injustifiable, perfocontradictoire ». Le suicide d'un type qui sait
qu'il va être torturé et qu'il risque de donner une information provoquant
la mort de populations entières me semble tout à fait justifié, par la
légitime défense (en quelque sorte...)
> >Le renoncement est ou devrait être une aspiration au bonheur ici et
> >maintenant, mais le bonheur suppose la vie physique. Qu'une philosophie
> >si importante pour l'Occident que celle de
> >Socrate mette [le Juste] au-dessus
> >de la vie me semble très inquiétant.
>
> Le Juste n'est pas la Justice.
Ok, j'ai changé dans ma phrase.
> Le bonheur est dans le pré.
> Le renoncement dans l'escalier.
> Vivre. Comme un chien andalou. Mais viiiiiiivre.
Exactement.
> (...)
>
> > (Au fait, le titre de ce message veut dire que la séparation de
> >l'Éthique et de l'Esthétique relève de la même nécessité que la
> >séparation de l'Église et de l'État, selon moi.)
>
> Sacraliser la vie, comme tu l'as fait plus haut, relève de la
> religion.
Ah bon ? Alors il faut désacraliser la vie ? Peut-être bien...
--
« On ne peut pas être à la fois tout et quelque chose. »
(Jankélévitch)
> Woooow!!! Excellent Michèle... !!!!
> j'avais pas vu ça... mais tu as complètement raison!!! super !!!! :-))))
[...]
Muhahahaha, ca devient drôllissime quand Yann se lâche :)
> L'alien a une queue... comme les chats.
Sans commentaire :)
[...]
--
Julien Gourdon
Si tu veux, je connais le CCC (Comité Contre les Chats) trčs actif.
Mais faut faire gaffe au "MOU", commité de défense des chats.
>> La seule vérité de ce monde, c'est la mort.
>
> Et la viiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiie ? Elle est pas vraie, la
>viiiiiiiiiiiiiiiiiiiiie ?
"Voyage au bout de la nuit" (p 256 dans l'édition Folio)
>> L'amour d'Athènes. N'est pas Alcibiade qui veut. Et tu oublies le
>> contexte historique.
>
> Sans doute mais tu pourrais m'expliquer un peu tes allusions.
Lis Platon (même si tu le trouves chiant).
Lis Aristote.
Lis Xénophon.
Lis Thucydide.
Relis Aristophane.
Lis Démosthène.
Et tant que tu y es :
Lis Sophocle.
Lis Homére.
Lis Eschyle.
Tu as de la chance, les sources directes sont finalement peu
nombreuses.
> Tu raccourcis un peu ce que je voulais dire. Pas « Apologie de Mr. de
>Gaulle » mais « reconnaissance d'un acte de rebellion nécessaire : l'appel
>du 18 juin. ». C'aurait été Duschmoll ou Dugenou, c'aurait été kif-kif... Et
>je ne dis pas « vive la trahison », je dis « le suicide philosophique me
>semble injustifiable, perfocontradictoire ». Le suicide d'un type qui sait
>qu'il va être torturé et qu'il risque de donner une information provoquant
>la mort de populations entières me semble tout à fait justifié, par la
>légitime défense (en quelque sorte...)
Si ç'est fonctions des circonstances, plus de théorie qui tienne.
Je n'ai pas lu Heidegger (lecture assez rapide de "Qu'est ce que la
philosophie" et "l'Origine de l'oeuvre d'art" fournie par Nicolas
Rialland) parce qu'il me manque pas mal de notions ...
Aussi ce qui suit doit être manié avec prudence :
Je suis surpris que tu évoques Heidegger... Pour plusieurs raisons :
d'abord des raisons éthiques : j'ai toujours crû comprendre que pour
Heidegger l'homme est "le berger de l'être", que pour l'instant
j'extrapole peut-être à tort ainsi : l'homme est au service de l'être et
non le
contraire : l'Aletheia plutôt que le Dasein. J'ai toujours pensé (mais
je peux me tromper) qu'il rejettait
l'humanisme à cause de son anthropocentrisme sous jacent (et là bien sûr
j'ai tous mes clignotants "alerte" allumés)...
Concernant Heidegger, j'ai lu quelque part que contrairement à Céline,
le génial philosophe cotoie dans les mêmes textes le fervent nazi...
Quelqu'un (je pense à Nicolas) peut-il infirmer ?
La seconde raison est que ma lecture survolée de l'Origine m'avait
conforté dans
l'idée que pour Heidegger (même si évidemment il déplace le problème :
il recherche l'origine de l'Art qui n'est ni à trouver dans l'artiste,
ni dans l'objet posé devant nous... La meilleure façon de trouver des
solutions en philosophie semble être de changer de question..."L'origine
de l'oeuvre d'art est l'art"...), l'Art ne désigne jamais une réalité
déjà là, mais fait plutôt apparaître un nouveau monde, qui se suffit à
lui-même et qui se porte tout seul... Quelque part, Heidegger dit que
l'Art "est la mise en oeuvre de la vérité", l'art "est un advenir de la
vérité"... Certes. Pour intégrer ta "façon de voir" dans le système
heideggerien, il te faudrait alors soutenir (contre Heidegger il me
semble mais je crois qu'il s'en fout) que la vérité est éthique,
que le Vrai est Bon et par la même occasion qu'il est en plus Beau...
Position qui me semble assez périlleuse...
Rosset et Girard ont effectivement ceci en commun de n'être pas gênés de
tirer fort la couverture à eux quand bon leur semble. Cela dit, on peut
partir de la distinction médiévale des trois ordres (Vrai, Beau, Juste) sans
pour autant se sentir obligés de lire tout Ricoeur, en effet. Seulement, le
fait que cet auteur soit considéré comme très moral, très conscient de
l'éthique, très prudent, ça met pour moi en cause la prétendue "dangerosité"
de la séparation éthique/esthétique. (Non qu'il ait forcément raison, mais
il faut lui reconnaître qu'il a dû longuement peser sa position sur
l'esthétique... bref, c'est pas un vilain anarchiste qui veut foutre le feu
à la société...)
> Avant tout questionnement sur la convertibilité des transcendentaux, il
> faut à mon avis se demander ce qu'ils désignent. Historiquement, Ricoeur
> les date du Moyen Âge. Soit. Première question : comment viennent-ils à
> exister en tant que tels dans la tradition philosophique ? C'est un point
> capital. Je ne peux pas y répondre ici. Seconde question tout aussi
> importante et qui croise la première : que désignent-t-ils dans le monde
> des phénomènes ?
Dans le bête monde des mots qui forment ma langue, le vrai désigne ce
qui est réel, le juste ce qui devrait être, et le beau ce qui est beau.
Je ne cherche pas à définir des catégorie bien formatées et séparées,
je cherche seulement à donner une courte approche des sens courants de ces
mots.
> Laissons de côté le Juste un moment, pour ne conserver que le Vrai et le
> Beau. [...]
Ok, mais c'est un peu mettre de coté le fond du débat
éthique/esthétique, puisque tu ne m'éclaire pas sur cette question
importante : « le beau est-il forcément juste ? et réciproquement ? ». J'ai
bien lu ton message et je me perds un peu dans ton raisonnement duquel
affleurent çà et là des résurgences de la dialectique de l'être et de
l'étant de Heidi (la fillette blondasse qui redécouvre la nature...), si
j'en crois mon odorat. (J'ai rien contre en-soi ni pour-soi, j'ai juste un
peu de mal à suivre...)
Je comprends mieux le texte ci-dessous qui me semble se raccorder
d'assez près à cette problématique. Comme, de plus, ce texte permet une
approche compréhensible (pour moi) d'une possibilité d'unification à la
chinoise du vrai, du beau et du juste, je pense qu'il devrait te permettre
de m'expliquer mieux ce que tu veux dire.
D'abord il faut bien préciser quelque chose d'important sur les Chinois.
La Chine représente un peu l'antagonique de l'Occident, c'est une façon de
lieu ou tout est inversé par rapport à nous, comme ces gens qui marchent sur
la tête en Australie. Les exemples et les clichés à ce propos sont en
général assez justes. Ainsi, quand on discute, il faut préciser si l'on se
place en tant qu'homo occidentalis ou en tant qu'homo universalis, l'homo
universalis étant comme la somme des homos occidentalis et orientalis. Pour
comprendre le schéma, il suffit de prendre l'image de l'homme et de la
femme. Considérés ensemble, il forment le groupe des humains et y sont
égaux. Considérés selon leur sexe, les humains sont séparés en deux parties
qui s'opposent, comme le pair et l'impair, en formant une sorte de dipôle.
Entre les pôles évoluent les individus... Parler en tant qu'homo
occidentalis est très facile et très difficile. Très facile parce que c'est
ce qu'on est et restera, très difficile parce que c'est à la fois intenable
à cause de la partialité et trop proche de nous pour qu'on le saisisse. Se
placer en tant qu'homo universalis est à la fois très impossible et très
facile. Très impossible parce qu'on ne saura jamais s'il n'y a pas d'autres
« hommes » (animaux conscients) dont on ne tient pas compte (dans le passé,
dans les galaxies lointaines, dans les fourmilliaires...), très facile parce
que c'est ce qu'on est et restera. (je pompe un peu Lao-tseu, là, m'en pas
tenir ricoeur, svp)
Voici donc une petite plongée en Chine classique vue sous l'angle de
l'art.
~~~~~~~~
Les divers courants de la pensée chinoise dérivent tous d'une commune
source cosmologique. Cette cosmologie (résumée schématiquement dans le plus
ancien, le plus précieux, mais aussi le plus obscur des traités canoniques,
le Livre des mutations [le fameux Yi-King]) considère que l'infinité des
phénomènes est en état de flux perpétuel ; cette création permanente résulte
elle-même du mariage de deux forces antithétiques et complémentaires. Ces
deux forces -- ou ces deux pôles -- constituent une diversification de
l'Avoir. L'Avoir est lui-même un produit du Non-Avoir (WU) que, par un
contresens courant, on s'obstine à traduire « le Néant », alors que la
notion se rapproche plutôt de ce que la philosophie occidentale appelle
l'Etre. Les penseurs chinois ont jugé avec sagesse que l'Etre ne se peut
app-
réhender que de façon négative : en effet, l'Absolu que l'on pourrait
définir et nommer, qui aurait des qualifications et des propriétés, qui
donnerait prise à une description, ne saurait être l'Absolu véritable, mais
relève seulement du domaine de l'Avoir, avec son kaléidoscope éphémère et
mouvant des phénomènes. Le processus qu'on vient d'esquisser ne forme pas un
enchaînement mécanique, une séquence causale; c'est un cercle organique à
l'intérieur duquel les diverses phases existent simultanément. Si les textes
plus anciens semblent impliquer une antériorité du Non-Avoir sur l'Avoir,
les commentaires ultérieurs décrivent leurs relations comme un échange, une
dialectique d'opposés-complémentaires, s'engendrant l'un l'autre. L'Etre est
le substrat fécond, le champ où germe l'Avoir, ou, si vous voulez, le vide
est l'espace nourricier des phénomènes. On ne peut donc appréhender l'Etre
qu'en creux, en cernant son absence -- un peu comme un sceau gravé
/intaglio/ livre son message en blanc, ne révélant son dessin que grâce à l'
absence de matière. Cette notion selon laquelle l'Absolu ne saurait être
suggéré que par le vide est d'une importance particulière pour l'esthétique
chinoise, comme nous verrons plus loin.
La pratique des arts constitue une mise en oeuvre concrète de cette
vocation d'universalité, de cette suprême mission d'harmonie, que la sagesse
chinoise assigne à l'honnête homme : il s'agit pour celui-ci de dégager et
retrouver l'unité des choses, de mettre le monde en ordre, de s'accorder au
dynamisme de la création.
Les arts comprennent essentiellement la poésie, la peinture et la
calligraphie ; pour être complet il faudrait également mentionner la musique
(qui, pour les lettrés chinois, se ramène à la seule cithare qin) -- mais à
celle-ci, mon incompétence m'empêchera malheureusement de faire plus
amplement référence.
L'honnête homme cultive les arts afin d'accomplir son humanité. Pour
cette raison, les arts, à la différence des artisanats (sculpture, gravure,
architecture, musique des instruments vulgaires etc.), ne sauraient
constituer une activité professionnelle ou spécialisée. On est naturellement
compétent en matière de poésie, de peinture et de calligraphie dans la
mesure où l'on est honnête homme, et l'on ne saurait atteindre cette
compétence à moins d'être honnête homme. Par définition même, ces activités
ne peuvent donc être pratiquées que par des non-professionnels : dans le
métier de vivre, ne sommes-nous pas tous des amateurs ?
~~~~~~~~
Extrait de Simon Leys, La Forêt en feu, pp. 13 et suiv.
> [...]
> Les Grecs ont un mot pour la vérité : « aletheia ». Littéralement, il
> signifie « hors-retrait » (a-letheia), ou dans la traduction allemande
> qu'en donne Heidegger « Unverborgenheit ». Ce mot, « hors-retrait » est
> équivalent dans les textes grecs à « l'étant ». On emploie parfois l'un
> pour l'autre. Ce qui est vrai, donc, c'est l'étant en tant qu'il est dans
> le hors-retrait, qu'il se montre. L'aletheia est la dimension fondamentale
> au sein de laquelle vivent et pensent les Grecs. [Pour s'en convaincre, il
> suffit de lire Platon, République, livre VII ; un sommet de la philosophie
> qui exclut pour qui sait le lire que Platon soit un benêt, soit dit en
> passant. Des esprits qui pénètrent au coeur du problème fondamental de la
> philosophie de manière si perçante, on les compte sur les doigts d'une
> main dans l'histoire.]
P'tée... j'ai relu ce fameux mythe de la caverne... franchement, je
trouve ça chiantissime, hyper laborieux. Je dois pas être normal. D'abord,
ce mythe se résume très bien en deux lignes par la fable des trois aveugles
qui découvrent un éléphant en lui palpant respectivement la trompe, un pied,
la queue : l'un y "voit" une sorte de serpent, le second une colonne, les
troisième une sorte de balai. Pourquoi en faire tant de pages ? Pourquoi
détailler à ce point et demander l'adhésion totale du répondant à chaque pas
péniblement posé un milimètre devant l'autre ? Je ne dis pas que Platon est
un benêt, ni que sa fable n'a pas de portée philosophique, mais je trouve
que Platon s'adresse à des benêts à qui il faut prendre la main et avancer
petit à petit, en assurant chaque nouvelle déduction. C'est très fatiguant à
lire, pour moi. Platon se prend vraiment pour celui qui aurait vu la lumière
et qui cause aux prisonniers de la caverne. Sans doute avait il quelques
lumières et ses contemporains avaient-ils besoin d'un tel guide d'aveugles,
mais je ne vois pas comment on peut prendre du plaisir (!) à lire ceci
aujourd'hui. Les textes des sages chinois datent de la même époque et ils ne
prennent pas les lecteurs pour de pareils idiots qui 1) ont besoin d'avancer
point par point selon de petits sauts de puces exaspérants prenant la forme
de déductions logiques, 2) acquièscent "sincèrement" à chaque nouveau pas et
disent "oui, grand maître, comme tu as raison" alors que tout ne tient que
sur une métaphore qui se veut l'image fidèle de la réalité. (Je n'exclus pas
qu'un jour je revienne sur ce rejet de Platon, de même qu'il est possible
qu'un jour j'arrive à écouter Wagner, merci de le noter.)
Le texte de Leys que j'ai cité plus haut me laisse à penser que pour les
Chinois (et pour moi) l'hypothétique soleil-hors-la-caverne de Platon ne
peut se regarder en face, même si l'on est libéré des chaînes. Pourquoi ?
Parce qu'il est l'« Étre » et qu'il ne se défini qu'en creux, en négatif.
C'est le fameux moyeu qui est du vide et qui permet à la roue de tourner.
C'est le vide du vase qui permet d'en faire usage. C'est le vide et le
non-dit des peintures ou des textes qui fait vraiment le sens d'iceux.
> [...]
> La beauté a donc à voir avec la manifesteté de l'étant en son être, avec
> son hors-retrait. C'est ce que Heidegger résume par la formule « La beauté
> est un mode d'apparaître de la vérité en tant que hors-retrait »
> (« Schonheit ist ein Weise, wie Warheit als unverborgenheit west »).
Oui mais Heidi ne nous dit pas ici de *quel* mode il s'agit, or c'est ça
la question. Pour moi, le mode spécifique de la beauté est de l'ordre de la
célébration. Ricoeur associe le Vrai au mode véritatif, le Juste au mode
injonctif, je serais tenté d'ajouter que le Beau se relie au mode laudatif.
(Si "rousseau" qui citait Ricoeur peut me dire ce qu'il en pense, je suis
preneur.)
Si le Beau est le mode laudatif, on peut l'opposer frontalement au mode
injonctif puisque l'un se réjouit de ce qui est alors que l'autre le déplore
et veut le changer. Là est le noeud de l'opposition esthétique/éthique selon
moi. L'art dit « Ô que cela est beau ! », la morale dit « cela n'est pas
bon ». On pourrait fusionner le beau et le bon, on obtiendrait alors une
morale qui dit « cela est laid » quand l'art dit « cela est beau », la
confrontation n'en est que plus forte. On pourra me dire que je glisse de
l'éthique à la morale, et que l'éthique est justement le positif dont la
morale n'est que le négatif. Si j'admettais qu'il y ait une face positive de
la morale et qu'on la nomme "éthique", je serais alors obligé d'admettre que
l'éthique et l'esthétique se recouvrent, or les deux mots ne se recouvrent
pas du tout chez moi, donc c'est faux. (Démonstration par l'absurde :
l'axiome "physiologique" est que je ressents très différemment les deux
dispositions éthiques et esthétiques en moi, c'est subjectif, mais je crois
que c'est quand même partagé par suffisamment d'autres personnes pour que ce
ne soit pas une exception.)
Bon, pour aller quand même dans ton sens, je dirais que ces modes
(véritatif, injonctif, laudatif) sont des
diversifications de l'élan premier qui est simplement la prise de conscience
de la réalité. Cependant, refuser de séparer ces modes revient à refuser à
la pensée sa fonction analytique, ce que font d'ailleurs peut-être les
Chinois, en un sens, dans leur vision du monde brutalement résumée par
l'anecdote suivante piquée à Leys : Un peintre réalise une cascade dans la
chambre du Prince, mais celui-ci lui demande au bout de quelques jours de
l'effacer : il est dérangé dans son sommeil par le bruit de cette cascade.
(donc la peinture agit sur le réel, elle est dans le domaine de
l'action.)
--
« Dans le métier de philosophe, il est essentiel de ne pas comprendre. »
(Paul Valéry)
J'ai une expérience de Platon complètement différente. Je dirais même
que c'est l'un des philosophes les plus agréables à lire.
Je doute également que ta fable recouvre entièrement le mythe
de la caverne...
Peut être un problème de traduction. Je l'ai découvert il y a quelques
années à travers les oeuvres complètes en 8 tomes traduits par Léon
Robin...
Impossible. Si je trouve un truc chiant, je ne le lis pas vraiment
puisque je n'accroche pas, je ne suis pas intéressé.
> Lis Aristote.
> Lis Xénophon.
> Lis Thucydide.
> Relis Aristophane.
> Lis Démosthène.
>
> Et tant que tu y es :
> Lis Sophocle.
> Lis Homére.
> Lis Eschyle.
>
> Tu as de la chance, les sources directes sont finalement peu
> nombreuses.
J'ai surtout de la chance que tu m'aides à ce point à comprendre ce qui
te gêne dans ce que je dis.
> > Tu raccourcis un peu ce que je voulais dire. Pas « Apologie de Mr. de
> >Gaulle » mais « reconnaissance d'un acte de rebellion nécessaire :
> >l'appel du 18 juin. ». C'aurait été Duschmoll ou Dugenou,
> >c'aurait été kif-kif... Et
> >je ne dis pas « vive la trahison », je dis « le suicide philosophique me
> >semble injustifiable, perfocontradictoire ». Le suicide d'un type qui
> >sait qu'il va être torturé et qu'il risque
> >de donner une information provoquant
> >la mort de populations entières me semble tout à fait justifié, par la
> >légitime défense (en quelque sorte...)
>
> Si ç'est fonctions des circonstances, plus de théorie qui tienne.
Eh oui. Or, c'est fonction des circonstances. Donc les théories ne
tiennent pas. On est d'accord.
--
« Le philosophe babille le bec en l'air. »
(Platon)
>Absolument et tu as raison. Et rien n'empêche de rectifier si on se trompe,
>(il faut être honnête et c'est la chose peut-être la plus difficile) si on
>l'a écrit publiquement surtout. Car on fait tous cela intérieurement.
rzzzz
>Et il m'est arrivé d'avoir préjuger (sans l'écrire ici) négativement (là,
>j'ai pris des précautions) le film de Bonitzer Rien sur Robert à sa sortie.
>Et je me suis fait pincé en le voyant à la tv. Excellent film. "C'est pour
>ma gueule" comme on dit. Retour de sa propre vanité et bêtise dans la
>gueule ou le baiser du serpent. Ca m'apprendra car du coup, je ne l'ai pas
>enregistré et je suis puni.
Et on s'en torche
>C'est comme tu dis un pré-jugement. Pour ma part, en face de phénomène, je
>vérifie, non seulement pour vérifier mais aussi pour voir comment ça
>marche.
oui en général on vérifie pour vérifier.
Pour le reste c incompréhensible. rzzzz
>Ouais, tu as raison, c'est pour ça que j'y vais avec prudence mais en face
>de la standardisation et des millions d'entrées, il faut mettre l'accent
>sur le côté produit et formaté. Souvent, la discussion dévie aussi sur des
>procédés dans la fiction. Mais c'est rarement une phrase lapidaire et plus
>rien après. C'est aussi pour susciter un débat autour de ce côté produit et
>formatage. Et pour faire comprendre le danger de ce côté produit et
>formaté, il faut rentrer dans de longues explications...
ben t'as bien fait de pas le faire parce que le produit et formaté répété 3 fois
c : rzzzzzz
>Oui, mais c'est bien le problème car la personne ne voit plus l'intérêt de
>se prendre la tête et préfère s'en prendre plein la tête, jouons sur les
>mots, c'est toujours rigolo. Elle reconnaît d'office que ce classique fait
>réfléchir.
oui ben la tu nous la prends la tête avec tes trucs incompréhensibles et langue
de bois.
Ton truc on peut l'utiliser sur n'importe quel sujet.
Et puis ton humour c vraiment pitoyable.
Achète le livre de jeux de mots de Jean-Edouard et Loana, on se marra plus.
>Je parlais de prudence et donc d'y réfléchir à deux fois avant de l'écrire.
>Car le penser, ça on le fait souvent. Donc, après, c'est de la
>responsabilité de chacun.
Ben manifestement ce que tu écris tu n'y réfléchis pas tellement, parce que c
vraiment mortellement ennuyant.
rzzzz
> Il y a bien sûr des personnes qui vont toujours contrarier le phénomène
>mais je crois que cela ne retire pas l'impact existentiel dû au fait que
>l'homme adore par facilité et pour s'oublier, accélérer.
Ouais ben descends de ta tomo et arrête de planer vers le phénomène cosmique.
>Je dirais que accélérer est notre bêtise plutôt. Parfois, c'est l'horreur
>pure et simple, ce manque de recul.
Oui ben prends le recul si tu as conscience que tu ne le fais pas.
>Oui, je comprends bien et c'est aussi en général contre le flot
>sensationnel qu'on déverse que je tente de résister bien que j'adore le
>cinéma.
Ben tu ferais mieux de parler de cinéma que de blablater comme ici pour dire des
trucs qui endorment tout le monde
>>Oui.
>C'est de cette éthique-là, à ce niveau éthique là que je parle.
Trop fort la réponse alors qu'il te répondait oui.
>Absolument. Mais c'est là où il apporte quelque chose de réellement
>original dans l'essai. Mais lui-même dit ne rien découvrir, c'était déjà
>dans les romans. Et on lit sans doute toujours mal ou plutôt, on ne sait
>pas ou mal sortir le concret d'une oeuvre. Quand on lit L'éternel mari de
>Dostoievski, c'est flagrant, tellement flagrant que c'est là qu'on se dit
>qu'on est vraiment un imbécile de ne pas l'avoir vu avant et là, où les
>autres nous apportent réellement.
rrrzzz
>C''est où on n'est pas d'accord. Car le jugement de goût à ce niveau ne dit
>plus rien, sauf à dire qu'il y aura toujours une part intéressée etc
>quelque part et là aussi, on ne parle pas du même niveau. On ne peut pas
>dépouiller l"homme de tout intérêt dans un jugement de goût. Pour moi, on
>ne peut pas préjuger d'une oeuvre mais d'un produit.
Ben moi je préjuge que si un jour tu écris un bouquin, il sera mortellement
ennuyeux.
Mais le bouquin est-il une oeuvre ou un produit ?
>Des exemples ? Car tout de même, dans sa formalisation comme je le disais
>plus haut, elle l'induit. Il me semble difficile de ressentir quelque chose
>en face d'une scène sans prendre en compte la manière dont elle est faite
>et ce qu'elle induit. Je peux dire que tel film puant est bien fait (en
>général, tout va dépendre de ce bien fait, ce sera souvent de l'efficacité)
>mais dans ce cas, on ne prend qu'une partie du film alors que ce qu'il
>induit est aussi dans le film.
^__^
Achète un dictionnaire de synonyme, tu répètes trop souvent les mêmes mots dans
un même paragraphe.
>Ben ouais, tu dis que ce n'est pas de l'art. Mais que réponds-tu à
>quelqu'un qui a un jugement de goût en disant que ce film est génial ? Que
>son jugement de goût n'en est pas un ?
Ben pourquoi pas.
>Absolument mais quand je préjuge un produit, c'est bien cela que je dis en
>gros, c'est un produit et que justement, il prémâche.
Tu es totalement incohérent comme gars.
Tu critiques au-dessus le fait que quelqu'un puisse dire qu'un jugement de goût
n'en est pas un, et pourtant tu expliques ici que tu n'hésites pas à préjuger.
Grosso modo t là à nous expliquer que t'as rien vu rien entendu que tu ne
connais pas encore, mais que tu portes déjà un jugement.
Niveau intelligence ca frise le dramatique.
>Je ne comprends pas bien où tu veux en venir, peut-être car là aujourd'hui,
>je n'ai pas l'esprit très clair par manque de sommeil.
Il veut son point Godwin.
Donne-lui et arrête de discuter parce que tout ce que tu pourras répondre à ce
qu'il a écrit sera chiant vu que toute sa prose est à mourrir d'ennui.
>>Tu joues bien au con. Un rôle de composition ? :)
>Non, c'est naturel.
Ben au moins là tu es honnête tu avoues.
>Mais n'empêche, voilà ça pose problème. Et là, il n'y a pas de jugement de goût,
là ?
Super la conclusion.
--
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> J'ai surtout de la chance que tu m'aides à ce point à comprendre ce qui
>te gêne dans ce que je dis.
A toi d'ouvrir les portes.
Tu déboules en parlant de cité, de justice, de juste. Si tu veux
savoir ce que ça signifait pour un Grec de l'époque, difficile de
faire l'impasse, par exemple, sur la Répulique de Platon. Je ne vais
pas ici t'en résumer les livres I à VIII.
Tu parles de Socrates. Je te renvois aux témoignages de ses
contemporains pour te faire une idée peu plus juste du personnage
(Platon l'idéalise, Aristophane le caricature, Xénophon doit
probablement être le plus proche de la réalité - en simplifiant à
outrances). Si le sujet t'intéresse, à toi de te documenter et de te
forger ta propre opinion.
Bé... c'est exactement ce que j'essaie de faire, non ?... Tu me réponds
de lire une vingtaine d'auteurs anciens, j'en ai pour plusieurs années...
D'ailleurs je suivais partiellement ton conseil avant que tu ne me le donnes
: j'ai tenté de lire Platon, non ? Bon, ça m'accroche pas tellement.
J'essaie en ce moment d'aborder la chose par un biais présocratique : je me
tape les fragments d'Héraclite, c'est bien plus proche de ce que j'arrive à
concevoir dans mon petit cerveau d'autodidacte... C'est d'ailleurs
bizarrement un peu chinois, voire taoïste... (Pour ce que j'en peux
comprendre, avec évidemment l'aide massive du traducteur/commentateur de
l'édition que j'ai sous les yeux : Marcel Conche)
Encart en charte : J'ai vu « I Vitelloni » de Fellini hier soir.
Décidément, je n'accroche pas à cet auteur... Ce film parle de tout et de
rien, selon moi, et surtout de rien. M'enfin je ne jette pas la pierre à
ceux qui aiment, je voudrais juste savoir pourquoi au juste. En revanche,
j'ai re-revu Sonate d'Automne de Bergman, au ciné cette fois, avec un débat
en sus, et c'est vraiment fortiche. Super film, très brutal. J'ai déjà posé
une question ici et sur framc et person n'a su me répondre : la fille et la
mère jouent successivement un même morceau de Chopin. La mère est censée
jouer bien mieux que la fille et j'ai pourtant l'impression indéracinable
que pour Bergman, l'interprétation de la mère est inférieure ou du moins
égale à celle de la fille. (Je m'avance, c'est une intuition, une hypothèse,
je ne suis pas chopinologue...) Enfin, je vu pour la première fois l'Orange
Mécanique de Kubrick. Eh oui, j'avais pas vu ce film culte. Je suis plutôt
assez heureusement surpris car je m'attendais au pire : il est présenté
comme de l'esthétique baroque... Et effet, c'est un peu ça, c'est baroque. Y
a pas mal de bonnes scènes et j'ai accroché jusqu'à la fin. Ce qui m'ennuie,
c'est que je n'arrive à tirer aucune interprétation générale sur la violence
selon Kubrick. Faudrait que je lise les critiques à ce sujet...
> Tu déboules en parlant de cité, de justice, de juste. Si tu veux
> savoir ce que ça signifait pour un Grec de l'époque, difficile de
> faire l'impasse, par exemple, sur la Répulique de Platon. Je ne vais
> pas ici t'en résumer les livres I à VIII.
Certes, mais je ne tiens pas vraiment à savoir ce que c'est le juste ou
la justice pour les grecs, je voudrais surtout savoir ce que c'est pour
nous, pour moi, pour toi. (cf. questions à la fin)
> Tu parles de Socrates. Je te renvois aux témoignages de ses
> contemporains pour te faire une idée peu plus juste du personnage
> (Platon l'idéalise, Aristophane le caricature, Xénophon doit
> probablement être le plus proche de la réalité - en simplifiant à
> outrances). Si le sujet t'intéresse, à toi de te documenter et de te
> forger ta propre opinion.
C'est ce que je fais, à mon rythme, mais, me renvoyer directement aux
auteurs antiques alors que je pose des questions, c'est une manière d'éviter
le débat. Là, en te forçant un peu, j'arrive à avoir une indication plus
précise (Xénophon). C'est déjà bien.
Cependant, comme je disais, mon objectif n'est pas de faire de
l'archéologie des idées pour elle-même, il est seulement de préciser ce
qu'on peut entendre aujourd'hui par "juste" ou "justice" ou "valeur
universelle", etc. Donc, je pose des questions. (J'y réponds perso entre
crochets.)
-- Est-il juste d'ordonner « tu ne tueras pas » ? [oui]
-- Aurait-il été juste qu'un tyrannicide mit fin au pouvoir totalitaire
d'Hitler ? [oui]
-- Y a-t-il des exceptions à la règle du « tu ne tueras pas » ? [oui]
Donc, question finale et ouverte : comment poser la règle du « tu ne
tueras pas » en valeur absolue et universelle ? [n.s.p.] est-ce possible ?
[n.s.p.] est-ce nécessaire ? [n.s.p.]
Ça me paraît assez simple et, sans relire tout les Classiques, je pense
qu'il doit y avoir quelques réponses à proposer. Je vois déjà bien celle que
ferait un type genre Ferry : l'universel et l'absolu sont des horizons, des
machins dont on s'approche sans jamais l'atteindre. Mais cette réponse est
encore un moyen d'éviter de répondre, selon moi. Si je dis tout ça, c'est
que je pense que tu as peut-être une idée à ce sujet.
--
« Ô Platon tant admiré ! Vous n'avez conté que des fables. »
(Voltaire)
> Intéressant car quand tu dis au moment où tu es ému, "que tu le veuilles
> ou non, tu n'écoutes pas ton néocortex ", je suis sceptique. Qu'est-ce
> qu'être ému ? Etant donné que derrière cette émotion, il y a toute une
> éducation, une morale etc. car pour être ému, il faut avoir décodé
> l'émotion au préalable, non ?
Je reformulerai en « tu n'écoutes pas ta raison ».
Prenons un exemple : http://www.dtig.de/whatswrong/
Au moment ou la chose arrive devant nos sens, notre réaction est une
peur irraisonnée, instinctive, animale. Ce court-circuit d'une perception
évoluée et éduquée (relâchée par un mécanisme intéressant de diversion) a
quelque chose d'agréable, le plaisir de la régression sans doute, lié à la
pulsion de mort. Mais peu importe. Ce qu'il y a, c'est cette émotion
associée à une suspension de la raison.
Et je pense que le beau, tout au moins dans l'immédiateté de sa
découverte, relève du même mécanisme grisant d'accès à la conscience sans
passer par le filtre de la raison.
Ensuite oui, l'émotion peut sans doute durer et le plaisir d'associer
l'émotion et la raison existe aussi.
Mais je pensais surtout à un film qui en met plein la vue au spectateur
pour l'éblouir. Ce plaisir de l'éblouissement impose de ne plus rien voir
dans l'instant, mais je pense que l'on n'est pas forcé de le renier pour
le décoder. Lien sans fusion, donc.
--
Jihem
Désespérément cynique.
stop ! (le code reste coi) :
"Je suis le Ténébreux, -- le Veuf, -- l'Inconsolé," (G. de N.)
"Que les fins de journées d'automne sont pénétrantes ! Ah ! pénétrantes
jusqu'à la douleur ! car il est de certaines sensations délicieuses dont le
vague n'exclut pas l'intensité ; et il n'est pas de pointe plus acérée que
celle de l'Infini.
Grand délice que celui de noyer son regard dans l'immensité du ciel et de la
mer ! Solitude, silence, incomparable chasteté de l'azur ! une petite voile
frissonnante à l'horizon, et qui par sa petitesse et son isolement imite mon
irrémédiable existence, mélodie monotone de la houle, toutes ces choses
pensent par moi, ou je pense par elles (car dans la grandeur de la rêverie,
le *moi* se perd vite!) ; elles pensent, dis-je, mais musicalement et
pittoresquement, sans arguties, sans syllogismes, sans déductions.
Toutefois, ces pensées, qu'elles sortent de moi ou s'élancent des choses,
deviennent bientôt trop intenses. L'énergie dans la volupté crée un malaise
et une souffrance positive. Mes nerfs trop tendus ne donnent plus que des
vibrations criardes et douloureuses.
Et maintenant la profondeur du ciel me consterne ; sa limpidité m'exaspère.
L'insensibilité de la mer, l'immuabilité du spectacle, me révoltent... Ah !
faut-il éternellement souffrir, ou fuir éternellement le beau ? Nature
enchanteresse sans pitié, rivale toujours victorieuse, laisse-moi ! Cesse de
tenter mes désirs et mon orgueil ! L'étude du beau est un duel où l'artiste
crie de frayeur avant d'être vaincu." (C. B. Le Confiteor de l'artiste)
"[...] Et je me couche, fier d'avoir vécu et souffert dans d'autres que
moi-même.
Peut-être me direz-vous : "Es-tu sûr que cette légende soit la vraie ?"
Qu'importe ce que peut être la réalité placée hors de moi, si elle m'a aidé
à vivre, à sentir que je suis et ce que je suis." (C.B. Les Fenêtres)
Bé, à une heure romantique.
Je me trompe ou tu as fait un pas dans ma direction ?... Tu reconnais la
séparation du juste, du beau et du vrai ; tu admets que les canaux de
l'esthétiques et de l'éthique sont exclusifs l'un de l'autre, à un moment
donné de la réception ; et tu ne laisses qu'un simple cordon ombilical entre
les deux gladiateurs dans l'arène. Mais je pense que je vais aussi un peu
dans ton sens, à certains moments. Je rappelle que nous discutons des
rapports entre l'éthique et l'esthétique, marronnier non-résolu de céans,
même s'il me semble que la ligne de partage se précise, permettant de
discuter avec plus de clarté, c'est-à-dire de s'entendre.
"Jean-Michel Grimaldi" <ji...@via.ecp.fr> a écrit dans le message news:
a638eh$cvg$1...@sphere.via.ecp.fr...
>
> C'est pour cela que je pense que tu as tort de parler de la « fusion de
> l'éthique et de l'esthétique ».
J'ai cru lire par ici que l'éthique et l'esthétique étaient
indiscernables. Pour moi, dans notre système occidental, la séparation est
nette, elle va de soi, elle est utile et nécessaire pour rendre compte à
notre façon du monde. Mais figure-toi que j'ai trouvé dans Simon Leys un
éclairage sur la Chine qui va dans le sens de la fusion. Si tu peux te
reporter au message que j'ai envoyé à Rialland titré « Au fronton »,
il y a une citation de Simon Leys qui me semble toucher à ce problème.
Je mets juste la phrase d'intro de son bouquin, que j'aime bien :
« Les fragments de vérité que nous pourchassons sont comme des papillons :
en cherchant à les fixer, nous les tuons. "Sitôt que l'on a fini de dire
quelque chose, ce n'est déjà plus vrai" a observé Thomas Merton. »
> Je dirais plutôt que les deux sont liés
> par un cordon qui ne doit pas être rompu.
Je suis d'accord. Ce cordon est tout naturel chez l'honnête homme. Seuls
des fous ou des romantiques feraient passer une joie esthétique immense
devant le seul fait de rendre le service qu'un ami réclame. (Je litotise.)
Personne ne resterait assis devant un Keaton, même un inédit, quand
quelqu'un appelle aux secours au dehors. (Je sais que c'est faux, je suis
sur le mode injonctif.) Ce n'est donc même pas un cordon ombilical --
d'ailleurs impossible à conceptualiser puisqu'il relie deux domaines
différents --, c'est plutôt un appel impérieux de la réalité, comme si le
film s'éteignait tout seul au premier bruit extérieur (c'est le cas pour moi
: un pet de ma souris sauvage peut casser un bon film, j'exagère à peine).
Cependant, deux points sur lesquels nous ne sommes peut-être pas
d'accord : Un) je pense que toute considération d'ordre éthique est comme la
projection d'une volonté extérieure, de l'ordre du « devoir-être », sur le
film lui-même, qui est de l'ordre de l'« être brut ». C'est donc déjà une
critique qui n'est plus vraiment une critique d'art pure. Or le mystérieux
mystère de l'art que me semble être l'objet de la quête critique est au
noyau, non à la périphérie. Bien sûr, on ne dévoile jamais qu'incomplètement
et indirectement ce « mystérieux mystère » de l'art. On est bien obligés de
l'aborder par la périphérie, mais son abord éthique ne saurait être pour moi
qu'un des chemins possibles qui conduisent à l'oeuvre.
Deux) Je pense qu'il ne faut pas sous-estimer les gens. Je fantasme très
certainement mais j'ai l'impression que certains défendent ici un
rattachement direct à l'éthique parce qu'ils ont lègers problème avec les
films violents qui sont si courants. Les premiers « amateurs » de ciné que
j'ai rencontré aimaient particulièrement Reservoir Dogs ou Orange Mécanique,
ceux-là suivaient des auteurs de films à l'époque où j'allais au ciné pour
passer l'après-midi quand je n'avais plus de livre à lire. Il y a un effet
d'attraction terrible de la violence à l'écran, c'est pas nouveau mais ça
fait escalade. Dans Reservoir Dogs, je n'ai vu qu'un type en survêtement qui
flingue des mecs en costard qui en flinguent d'autres. Pas passionnant mais
ça assouvi l'attraction dont je parle. Orange Mécanique est plus complexe
car il ébauche des pistes de réflexions sur la violence à l'écran.
Cependant, je n'ai pas trouvé de vraie résolution du problème dans le
labyrinthe baroque de Kubrick (le constat que la violence à l'écran n'est
pas une solution à la violence réelle, qui n'est pas nouveau, ne me suffit
pas et, pire, il n'est pas appliqué par Kubrick). Pour moi, la résolution de
ce problème est très simple et très connue : il faut suggérer plus que
montrer. Je suis littéralement terrorisé par une ombre hitchcockienne alors
que la baston sanglante me fait bailler ou tourner la tête. Plus on banalise
le sang, plus les films qui ont leur force dans le non-dit, le non-vu, sont
les vrais films « sanglants » (dans le sens figuré : on a vraiment peur, on
y croit). J'ai dit qu'il ne faut pas sous-estimer les gens : je veux dire
que ces « gens », qui sont le spectateur moyen des films à succès et que tu
veux protéger ou prévenir éthiquement, ces gens ne sont pas ceux à qui le
problème de la violence se pose avec le plus d'acuité. Pourquoi ? Parce
qu'ils ne vont pas très souvent au ciné et préfèrent la douce Amélie à Kill
Every Body Now XXIII...
> [...]
> > "ne pas tuer" ne peut être une loi universelle sauf à refuser le
> > tyranicide. Que ferais-tu si tu avais eu Hitler au bout de ton fusil ?
>
> Ta question me laisse penser que tu aurais tiré.
J'espère bien que j'aurais eu ce courage. Si quelqu'un l'avait eu au bon
moment, n'aurait-on pas évité une abomination ? Ne doit-on pas tout faire
pour éviter cette abomination ?
> Parce que c'était un
> tyran ou parce qu'il menaçait l'Humanité ?
Je ne sais pas bien ce que c'est que l'Humanité. Je voulais dire : si je
savais ce qu'il allait faire avec une certitude suffisante, je l'aurais tué
si j'avais pu. Tu peux me dire que c'est très subjectif, la « certitude
suffisante ». Eh bien oui. C'est là tout le problème...
> Pour ma part, bien au chaud sur
> ma petite chaise, je pense que tu aurais eu tort. Et l'on retrouve le
> thème d'Apocalypse Now : doit-on répondre à la barbarie par la barbarie ?
Le meurtre d'une personne est de la barbarie ? Et en cas de légitime
défense ? Ne peut-on pas penser qu'il y aurait concentration sur une
personne (le meurtrier tyranicide) de la légitime défense de tout ceux qui
ont subi « ça ». Un Juif qui verrait son peuple pris dans une effroyable
machine d'extermination n'aurait pas le droit moral et éthique, je veux dire
le devoir moral et éthique, d'arrêter cette machine, quitte à tuer un homme?
> Mais nous dévions.
Oui, mais je trouve que ta position bien au chaud assez difficile à
tenir. Kant, Jésus et d'autres auraient peut-être arrêté le bras d'un
éventuel assassin d'Hitler et je crois qu'il est impossible de leur donner
raison sans tomber dans l'absurde d'une position éthique qui provoque les
pires horreurs, que l'éthique est justement censée éviter. Ta position est
presque nihiliste, puisque tu penses qu'il est impossible de mettre la mort
maintenant d'un homme en balance avec la mort probable de millions par la
suite. Ça me semble intenable. (Je précise que je ne suis pas Juif ni juif,
donc je ne réagis pas en tant que directement concerné, je réagis juste en
me demandant ce que j'aurais fait dans cette hypothèse, je me demande
jusqu'où peut aller la rigueur philosophique et le « tu ne tueras pas ».)
> > Une universalisation des valeurs éthiques ou morales tend très vite à
> > refuser certains actes que je juge nécessaires
>
> D'où te vient cette légitimité à juger que quelqu'un doit mourir ?
Je ne sais pas. Peut-être une sorte de grondement impérieux à
l'intérieur de moi que tu peux appeler pulsion éthique et que je
raprocherais plutôt d'une poussée d'adrénaline (ou une conversion brutale
derrière les pilliers de Notre-Dâame.) Sans vouloir frimer, ça m'est arrivé
de séparer des cons qui se battaient pour une place de parking ou une
éraflure sur une bagnole... aucun motif éthique ne m'a dit sur le moment
d'aller tirer un des mecs en arrière pendant qu'un autre faisait la même
chose avec l'autre, ce n'est pas de l'héroïsme, c'est comme un réflexe,
comme une réaction du corps. L'adrénaline est certes responsable de très
nombreux meurtres débiles, mais je pense qu'elle est aussi responsable de
nombreux sauvetages. Sans adrénaline et sans une forme d'"inconscience
momentanée" ou de réflexe, qui se jetterait à l'eau pour secourir un enfant
tombé dans une rivière ?
Il y a bien évidemment un « tu dois » impérieux qui lance la machine, je
ne le nie pas. J'essaie de comprendre cet appel intérieur et je crois qu'il
n'est facilement modélisable que dans un sens, le sens de la culture,
l'imprégniation culturelle, mais ça n'explique pas tout. Ce que j'appelle
au-dessus l'« adrénaline » est une métaphore comme ton « neocortex », c'est
pour moi la partie de cet appel qui n'est pas culturelle (« tu dois parce
que ton père devait »), mais individuelle (« TU dois tout court »). Il se
peut que j'oublie alors une partie raisonnée de cet appel "éthique". « Tu
dois parce que la raison indique ceci ou cela. » Mais cette considération me
fait toujours penser au fait remarquable que ce sont souvent ceux qui
rangent le mieux leur bureau qui ont le cerveau le moins ordonné, que ce
sont souvent ceux qui sont le plus polis qui ont le moins la notion de
l'amitié, que ce sont souvent ceux qui déclarent le plus leur amour à la
belle qui en ont l'idée la plus vague et fausse. Bref, la raison n'est pour
moi qu'une béquille à l'éthique, provisoire et nécessaire pour les seuls
boiteux. (Ce point de vue est un peu forcé dans mon sens... pour être sûr
d'être bien compris... je n'ignore pas que les grandes réalisation morales
doivent aussi à la raison.)
> Tu fais partie de ceux qui sont contre la peine de
> mort sauf pour les violeurs de fillettes ?
Non, je suis contre la peine de mort tout court. Mais je suis pour la
notion de légitime défense... (Je sais que cette notion pose de très
nombreux problèmes et qu'elle peut être utilisée dans toutes sortes de
justifications du pire, mais je ne vois pas comment m'en passer)
> Et entre Hitler et ta grand-mère, à quel homme
> arrêteras-tu de tirer ?
À Hitler (et éventuellement Pol-Pot).
> Mais là on dévie vraiment ; je ne suis pas sûr que
> frcd soit le meilleur endroit pour parler de cela.
>
> > De Gaulle a été un hors-la-loi, par exemple. Son devoir absolu de
> > militaire était d'obéir à sa hiérarchie, il a failli gravement à son
> > devoir, il "méritait" la mort pour rebellion
>
> Comme je le disais dans un autre post, il semble naturel de rejeter le
> meurtre, et scandaleux de rejeter la liberté d'expression. C'est pour cela
> que la vigilance est nécessaire autant que la morale. Où se situe la
> désobéissance à une hiérarchie humaine entre les deux ? ...
Je ne comprends pas bien la question, sincèrement.
La mienne, c'est : approuves-tu l'Appel du 18 juin ? (Sachant que cet
appel était une rebellion passible de mort selon la justice compétente et
qu'il allait de plus entrainer de très nombreuses personnes dans le malheur,
la torture ou la mort.) Question subsidiaire que tu ferais peut-être :
que penses-tu qu'il y ait comme motif premier à cet appel à la résistance
armée ? On peut penser qu'il était animé des décisions éthiques les plus
justes et qu'il voulait sauver l'Humanité de la barbarie, éviter la mort de
x puissance x personnes choisies selon leur religion ou leurs ascendants.
Je crois que c'est une vision romantique : De Gaulle était un militaire
français, il sauvait la France, il faisait assez bien son métier.
> > Qu'une philosophie si importante pour l'Occident que celle de Socrate
> > mette la Justice au-dessus de la vie me semble très inquiétant.
>
> N'est-ce pourtant pas ce que tu ferais en tirant sur Hitler ? Le
> problème quand on commence à faire des exceptions, c'est que la limite du
> champ d'application de ces exceptions est totalement subjective.
Je suis tout à fait d'accord : on s'en sort pas, de la subjectivité dans
ces domaines.
> Alors si ça ne concerne que toi, d'accord,
> mais sinon, pourquoi imposer _ta_ subjectivité ?
On arrive aux limites où j'ai du mal à répondre. En fait, sur un point
concret et faisable aujourd'hui, je peux donner une idée de cette limite,
qui n'est pas théorisée mais seulement jugée "en âme et conscience". Si
j'étais superman et que je pouvais changer le monde, je n'irais certainement
pas dire aux chinois ce qu'ils doivent faire pour vivre mieux, je n'irais
pas essayer de déloger les castes de la société indienne, je ne me
prononcerais pas sur la direction que doivent suivre les gens des villages
d'Afrique Noire, je tenterais cependant d'éliminer la coutume de l'excision.
C'est pour moi un des trucs les plus graves car il touche des personnes
choisies selon un critère (les femmes) et qu'il les mutile volontairement de
la plus accessible des sources de joies. Tu vois, ce serait la limite de mon
interventionnisme.
> Quant au choix de Socrate de mourir pour finalement
> défendre ses idées, c'est encore un autre débat.
C'est vrai. Enfin pas tout à fait.
> >> Donc tu te contredis.
> > Sans doute que la décision de refuser de tels systèmes est peut-être
> > elle aussi "dangereuse", qu'elle présente le risque de perdre toute
> > forme de boussole. Mais en fait, il me semble que la "dangerosité", le
> > risque, est une composante essentielle de la vie et je ne vois pas
> > comment on pourrait vivre ou créer de l'art sans une forme de prise de
> > risque, et il me semble que dans ton optique cette prise de risque doit
> > être évitée.
>
> Prendre des risques ne me dérange pas ; c'est en faire prendre aux
> autres qui ne me va pas. Et si l'on décide de passer « Massacre à la
> tronçonneuse » dans toutes les classes de CP de France et qu'un enfant en
> profite pour tuer son père, ça me choque (même si aucun papa ne se fait
> charcuter d'ailleurs). Et tiens un parallèle que je trouve bien approprié
> avec ce que tu prônes : c'est comme si tu choisis de rouler à 250 sur une
> route fréquentée.
Quel risque fais-je prendre aux autres en regardant un film que tu
penses dangereux ?
> > J'aime bien les affiches soviétiques, je trouve qu'elles ont une beauté
> > particulière, pour moi ça peut être de l'art, et pourtant je ne suis pas
> > d'accord avec l'objet politique qu'est la propagande.
>
> Là on est d'accord (à condition toujours d'être conscient de ce qu'il y
> a derrière).
Raah... Là aussi on est d'accord (sauf que sur le moment même de
l'émotion artistique on n'est plus "conscient de ce qu'il y a derrière"
d'éthique)
> Cf. ce que je disais sur Black Hawk Down. Au passage note
> qu'encore une fois tu portes un jugement éthique sur ces affiches.
C'est toi qui m'y forces !
> >>> Question : que penses-tu de l'appel pacifiste de Pierre Loti avant la
> >>> seconde guerre mondiale ? Est-ce que c'était dangereux ou au contraire
> >>> ?
> > Ça m'intéresse de savoir ce que tu en penses.
>
> Cette sollicitude de ta part ne peut que toucher mon ego ; puisque tu
> insistes, je pense en effet que c'était dangereux. Quant à savoir s'il a
> eu raison cependant, c'est une autre question.
Tu esquives un peu. S'il peut être conduit à faire une chose dangereuse
tout en ayant raison de le faire, tu admets une faille de relativisme ou de
subjectivisme dans ta position, non ? C'est à dire que tu admets des
exceptions à la règle ? (Ici, la règle est le pacifisme et l'exception est
qu'on ne peut "pacifiser" un pays sans "pacifiser" le pays voisin et
aggressif. Loti avait donc un peu tort, il me semble, d'appeller au
pacifisme en France alors que l'Allemagne s'armait. C'était dangereux pour
la vie des gens.)
> Je ne pense pas que des
> considérations aussi personnelles (toujours cette fixation subjective
> d'une limite entre un rejet et une acceptation « naturels ») intéressent
> le groupe de discussion.
Pour moi, c'est peut-être là où on avance un peu dans le débat
éthique/esthétique.
> [...]
> > D'autre part, il me semble que l'éthique peut changer et que c'est
> > inutile de chercher des noises aux auteurs anciens pour la raison qu'ils
> > parlent des noirs comme des animaux, ou bien pour le fait qu'ils avaient
> > des esclaves.
>
> Hehe. Attention tu marches dans un troll.
... pas fait exprès... connais pas ce trôle...
> Car je suis d'accord avec
> toi, mais tu montres en fait la supériorité d'une éthique fondée sur des
> valeurs qui ne sont pas posées comme des axiomes mais qui découlent d'une
> vision du monde moins sujette aux glissements. Je pense à une vision
> religieuse.
???
> [...]
> > (Au fait, le titre de ce message veut dire que la séparation de
> > l'Éthique et de l'Esthétique relève de la même nécessité que la
> > séparation de l'Église et de l'État, selon moi.)
>
> Soit. Mais il ne s'agit pas de rajouter un contenu éthique dans
> l'esthétique ; simplement de l'identifier lorsqu'il y est présent. C'est
> comme si un professeur de l'enseignement laïc faisait du prosélytisme et
> que tu me reprochais de critiquer cette attitude car dans le même discours
> je parle de religion et d'éducation laïque.
La laïcité étant inscrite dans nos institutions, ce n'est pas du
prosélytisme que d'en parler, sinon ce serait du prosélytisme de divulger
les lois, non ?
--
« L'erreur est positive car la vérité n'est qu'une erreur rectifiée. »
(Bachelard)
> Je me trompe ou tu as fait un pas dans ma direction ?
Je crois surtout que grâce à une formulation adaptée on a dégagé des
points communs entre nos opinions. Ça fait des bases pour discuter. Ce
qu'il faudrait à ce point-là c'est faire une synthèse de ces bases et des
divergences. Mais j'ai la flemme, alors je vais répondre plus ou moins
point par point.
> Tu reconnais la séparation du juste, du beau et du vrai
Tu extrapoles violemment. J'ai dit qu'une partie du beau pouvait
accéder à la conscience sans passer par le filtre de la raison.
> tu admets que les canaux de l'esthétiques et de l'éthique sont exclusifs
> l'un de l'autre,
Qu'ils peuvent être séparés, nuance ; c'est justement pour cela que
depuis le début j'affirme la nécessité de l'éthique quand l'esthétique
éblouit.
<Intermède>
> « Les fragments de vérité que nous pourchassons sont comme des papillons
> : en cherchant à les fixer, nous les tuons. "Sitôt que l'on a fini de
> dire quelque chose, ce n'est déjà plus vrai" a observé Thomas Merton. »
Et donc « Tuer c'est mal. » n'est peut-être plus vrai. Cela illustre le
« glissement » possible d'une morale dogmatique, mais j'y reviens à la fin
de ce post.
</Intermède>
>> Je dirais plutôt que les deux sont liés par un cordon qui ne doit pas
>> être rompu.
>
> Je suis d'accord. Ce cordon est tout naturel chez l'honnête homme.
Ah nous sommes d'accord sur le fond. Mais je suis moins optimiste que
toi quant à l'universalité de l'« honnête homme », notamment parce que les
impératifs de ce dernier sont d'ordre culturel, donc formatables s'il
n'est pas vigilant. Et la vigilance, l'esprit critique, ce n'est pas «
naturel » car les formateurs accrédités (publicitaires, gouvernements) n'y
ont pas intérêt. Je te rappelle que nous parlons de situations où un
message arrive inconsciemment derrière un éblouissement esthétique. Ainsi
décoder ce message ce n'est pas se détourner de l'oeuvre, au contraire,
c'est la comprendre.
> Cependant, deux points sur lesquels nous ne sommes peut-être pas
> d'accord : Un) je pense que toute considération d'ordre éthique est
> comme la projection d'une volonté extérieure, de l'ordre du «
> devoir-être », sur le film lui-même, qui est de l'ordre de l'« être brut
> ».
Pas d'accord, il s'agit avant tout de décoder : d'indiquer que la
considération éthique est nécessaire, pas ce qu'elle doit être, chacun est
libre d'appliquer sa propre grille. Ensuite, éventuellement, de rejeter à
cause du message, mais avant tout comprendre, ne pas se laisser manipuler
au-delà de l'instant (et pour certains l'instant c'est déjà trop).
> Deux) Je pense qu'il ne faut pas sous-estimer les gens. Je fantasme
> très certainement mais j'ai l'impression que certains défendent ici un
> rattachement direct à l'éthique parce qu'ils ont lègers problème avec
> les films violents
Ça peut te sembler « évident » avec la violence. Je pense que ça ne
l'est pas, ça a déjà été développé en long et en large ; un exemple plus
marquant serait la justification d'une ingérence militaire pour des
considérations économiques. On en a également déjà parlé.
>> Que ferais-tu si tu avais eu Hitler au bout de ton fusil ?
>> Ta question me laisse penser que tu aurais tiré.
> J'espère bien que j'aurais eu ce courage. Si quelqu'un l'avait eu au
> bon moment, n'aurait-on pas évité une abomination ? Ne doit-on pas tout
> faire pour éviter cette abomination ?
Tout ? Comme une abomination plus grande ? Tu vois bien que l'on ne peut
pas « tout » faire. Alors où commence-t-on ? Entre parenthèses, je ne suis
pas certain qu'on aurait évité l'abomination en assassinant Hitler. C'est
facile a posteriori de faire tout endosser à un monstre unique, mais c'est
un peu gros.
>> Et l'on retrouve le thème d'Apocalypse Now : doit-on répondre à la
>> barbarie par la barbarie ?
>
> Le meurtre d'une personne est de la barbarie ?
Si l'on prend barbarie au sens de « manque de civilisation », alors
oui, dans une civilisation qui condamne le meurtre, le commettre est un
acte barbare.
> Et en cas de légitime défense ?
Quand il y a un homicide en état de légitime défense, le but devait
être de neutraliser, pas de tuer. Le meurtre est donc, quand il advient,
une conséquence accidentelle de la défense, aucunement son objet. C'est
une différence énorme.
> Ta position est presque nihiliste, puisque tu penses qu'il est
> impossible de mettre la mort maintenant d'un homme en balance avec la
> mort probable de millions par la suite. Ça me semble intenable.
Ce n'est pas nihiliste, c'est simplement déontologique, et c'est loin
d'être aussi simple que tu ne sembles le croire.
« Un jeu qui permet de bien comprendre la différence
déontologie/conséquentialisme : tu prends un train avec un toubib en un
point A, qui doit foncer direct à un point B pour sauver 10 personnes.
S'il s'arrête, c'est fichu. S'il arrive il est sûr de les sauver.
Maintenant tu mets un gus attaché sur la voie... Le conséquentialisme te
dit de l'écraser... La déontologie te dit de t'arrêter et de laisser les
autres crever... » (c) 2002 Snoop
>> Et entre Hitler et ta grand-mère, à quel homme arrêteras-tu de tirer ?
> À Hitler (et éventuellement Pol-Pot).
Si tu crois vraiment qu'en mettant tous les hommes les uns à la suite
des autres il y a un fossé entre Hitler (et éventuellement Pol-Pot) et les
autres, tu es bien naïf. Quand bien même il y aurait un fossé au niveau de
leur dangerosité venant de la place qu'ils occupent, en les tuant tu
laisses la place vacante...
> Quel risque fais-je prendre aux autres en regardant un film que tu
> penses dangereux ?
En niant la nécessité du recours à l'éthique, tu laisses les autres se
laisser manipuler, lobotomiser, formater. Encore une fois il ne s'agit pas
de rejeter un film que _je_ trouve dangereux, mais de convaincre les gens
d'utiliser _leur_ esprit critique, peut-être avec des conclusions
différentes.
>> Au passage note qu'encore une fois tu portes un jugement éthique sur
>> ces affiches.
> C'est toi qui m'y forces !
En toute honnêteté tu affirmes que le côté propagandiste des affiches
soviétiques t'était totalement étranger avant cette discussion ? Le cas
échéant cela montre que tu étais effectivement trop optimiste en parlant
d'un cordon « naturel ».
>>>>> Question : que penses-tu de l'appel pacifiste de Pierre Loti avant
>>>>> la seconde guerre mondiale ? Est-ce que c'était dangereux ou au
>>>>> contraire ?
Je n'ai pas trouvé le contenu de cet appel, tu ne l'aurais pas sous la
main ? Si c'est un appel à la paix des deux côtés, je ne vois pas ce que
cela a de dangereux. Ensuite, pour ceux qui font la guerre afin de se
défendre, il s'agit de se protéger, pas d'exterminer l'autre, et le
pacifisme dans ce cas-là est donc déplacé selon mes principes. Au niveau
opérationnel même, des études ont montré que très peu de soldats tirent
(ils vont se battre sans volonté de tuer), et ceux qui le font sont
souvent traumatisés. On peut penser qu'ils ont eu une suspension
momentanée de conscience, qu'il s'agisse de la conscience de leur acte ou
de celle de l'altérité en face d'eux. Il ne s'agit donc pas tant d' «
exceptions à la règle », comme tu dis, que d'un oubli de la règle.
>> Car je suis d'accord avec toi, mais tu montres en fait la supériorité
>> d'une éthique fondée sur des valeurs qui ne sont pas posées comme des
>> axiomes mais qui découlent d'une vision du monde moins sujette aux
>> glissements. Je pense à une vision religieuse.
>
> ???
Je copie-colle un laïus posté sur un forum interne :
« En effet, en dehors de la religion, il existe une morale (c'est-à-dire
un ensemble de principes de base dont la transgression est rejetée)
légale, mais surtout, et la première en découle certainement, une morale
culturelle.
Ainsi, c'est pour des raisons culturelles que n'importe qui rejettera la
vue d'un homme qui se fait découper à la tronçonneuse (ensuite certains
transgresseront ce rejet « naturel », mais justement parce qu'il y a
rejet), raisons culturelles qui viennent d'une prise de conscience du
danger d'une telle action pour l'humanité. Donc parmi toutes les actions
possibles, certaines sont naturellement rejetées, comme un meurtre atroce,
et d'autres naturellement acceptées, par exemple la liberté d'expression.
Mais parmi toutes les actions possibles, où s'arrêtent celles qui sont
dangereuses pour l'humanité et ne doivent pas être transgressées ? On voit
bien que la fixation de cette limite, pourtant nécessaire (sans un rejet
culturel du meurtre, des hommes écouteraient les pulsions de mort qui sont
en chacun de nous sans être capable de les modérer par l'exercice de la
raison), est subjective, et surtout qu'elle peut être sujette à un «
glissement culturel », c'est-à-dire à un déplacement progressif de cette
limite, d'une action à l'autre dont la différence de « gravité » est
infinitésimale, glissement qui avec l'accumulation peut devenir énorme.
C'est ce glissement progressif que dénoncent des oeuvres comme 1984.
Nous voyons donc le danger à poser les valeurs constitutives de la
morale comme des axiomes. En revanche, lorsque ces valeurs découlent de
l'existence d'un dieu qui nous a tous faits égaux et libres, le glissement
de ces valeurs revêt un caractère binaire (existence ou non) qui le rend
impossible. »
>> > (Au fait, le titre de ce message veut dire que la séparation de
>> > l'Éthique et de l'Esthétique relève de la même nécessité que la
>> > séparation de l'Église et de l'État, selon moi.)
>>
>> Soit. Mais il ne s'agit pas de rajouter un contenu éthique dans
>> l'esthétique ; simplement de l'identifier lorsqu'il y est présent.
>> C'est comme si un professeur de l'enseignement laïc faisait du
>> prosélytisme et que tu me reprochais de critiquer cette attitude car
>> dans le même discours je parle de religion et d'éducation laïque.
>
> La laïcité étant inscrite dans nos institutions, ce n'est pas du
> prosélytisme que d'en parler, sinon ce serait du prosélytisme de
> divulger les lois, non ?
Je parle d'un professeur de l'enseignement laïc qui ferait du
prosélytisme pour une religion. Critiquer cela mêlerait dans le même
discours la religion et l'éducation laïque, sans rechercher de fusion,
sans renier leur séparation. Eh bien de même, lorsqu'un artiste place dans
une oeuvre, au milieu d'éléments esthétiques, un message dont le décodage
relève de l'éthique, critiquer cela mêle dans le même discours l'éthique
et l'esthétique, sans rechercher de fusion, sans chercher à résoudre une
séparation « naturelle ». Il s'agit juste de décoder.
--
Jihem