Je suis étudiante en lettres modernes et je m'intéresse beaucoup à la
période "décadente" de la fin XIXème. En littérature, (chez Laforgue,
Schwob ou encore Huysmans) il s'agit d'une esthétique marquée par des
colorations morbides, une certaine complaisance à l'égard du macabre,
(esthétisation de la mort par exemple), une ironie grincante...  
Or, je m'interroge maintenant sur ce phénomène "fin de siècle" dans les
autres arts : en peinture avec Gustave Moreau ou W. Wojtkiewicz en Pologne. 
Mais il me manque cruellement les connaissances nécessaires pour ce qui est
de la musique de cette période. 
Est-ce qu'il existe dans l'histoire de la musique une période équivalente
(pas forcément chronologique, mais au moins dans les thèmes mentionnés ci
dessus) ?  
Par ailleurs, j'ai découvert il y a peu de temps la /Danse Macabre/ de C.
Saint Saëns : je ne connais pas du tout ce musicien, mais en écoutant et en
ré-écoutant cette /Danse Macabre/, j'ai vraiment /l'impression/ qu'il y a
une démarche similaire à celle des auteurs que je connais (comme si
certaines notes manifestaient l'ironie, le morbide, et un certain
désenchantement). 
Mais en en parlant à un prof musicologue de ma fac, il n'a pas vraiment été
d'accord avec mes "impressions"... sans vraiment m'en dire plus.
Qu'en pensez-vous pour St Saëns, mais aussi pour d'autres musiciens ?
Merci d'avance,
Elodie
> Par ailleurs, j'ai découvert il y a peu de temps la /Danse Macabre/ de C.
> Saint Saëns : je ne connais pas du tout ce musicien, mais en écoutant et en
> ré-écoutant cette /Danse Macabre/, j'ai vraiment /l'impression/ qu'il y a
> une démarche similaire à celle des auteurs que je connais (comme si
> certaines notes manifestaient l'ironie, le morbide, et un certain
> désenchantement). 
> Mais en en parlant à un prof musicologue de ma fac, il n'a pas vraiment été
> d'accord avec mes "impressions"... sans vraiment m'en dire plus.
> 
> Qu'en pensez-vous pour St Saëns, 
Notre Camille avait plutôt un bon sens de l'humour : il faut prendre sa 
musique au 1er degré ; d'ailleurs le thème de la "Danse macabre" se 
retrouve avec un temps en plus dans "Les Fossiles" du arnavl des Animaux 
du même Saint-Saëns. Ce qui explique peut-être la moue de ton musicologue.
fred
dsl
F.
> Je suis étudiante en lettres modernes et je m'intéresse beaucoup à la
> période "décadente" de la fin XIXème. En littérature, (chez Laforgue,
> Schwob ou encore Huysmans) il s'agit d'une esthétique marquée par des
> colorations morbides, une certaine complaisance à l'égard du macabre,
> (esthétisation de la mort par exemple), une ironie grincante...
Bonsoir
vaste sujet qui suscitera sans doute un tas de réponses, intéressantes je te
le souhaite.
Si ta question concerne la France et la fin XIXème, pour moi la "fin de
siècle" musicale évoque en effet autre chose. C'est l'époque de la "nouvelle
renaissance" qui fait de Paris la capitale mondiale de la musique,
supplantant Vienne. Pendant ces années l'on découvre Debussy et les élèves
de Gabriel Fauré (comme Ravel), dont on oppose l'art au caractère
"positiviste" de la génération précédente (en gros les fondateurs de la
Société Nationale de Musique, en 1871, Saint-Saëns en faisait partie, ce qui
peut expliquer le désaccord de ton professeur musicologue). La "fin de
siècle" évoque le symbolisme (comme dans l'opéra Pelleas et Melisande de
Debussy), l'impressionnisme (terme un peu passe-partout), et aussi une
redécouverte des maîtres du passé à travers la société des instruments
anciens (1889, fondateur Louis Diémer), la chorale des chanteurs de
Saint-Gervais (1890, par le Tourangeau Charles Bordes), la Schola Cantorum
(1894) qui sous l'autorité de Vincent d'Indy devient un conservatoire privé
connu pour sa rigueur.
Pour revenir sur la Danse Macabre de Saint-Saëns, elle a été composée en
1874, ce qui est un peu prématuré pour un syndrome fin de siècle.
Maintenant si l'on regarde dans d'autres pays on verra d'autres
phénomènes... L'art de Mahler, Dvorak, R. Strauss etc. est lui aussi
concerné par la "fin de siècle."
-- 
Alain CF
Dvorak et la musique tchèque : http://www.musicabohemica.org/
Souvenirs des Carpates : http://perso.wanadoo.fr/alain.cf/musiqueroumaine/
> Qu'en pensez-vous pour St Saëns, mais aussi pour d'autres musiciens ?
Les français, les italiens, je ne les sens pas trop sur ce terrain, à 
cette époque en tout cas.
Peut-être partir de Vienne ?
Ils sont bons en décadence les viennois. Si ce n'est déjà fait, je 
conseillerais Adorno (le "Mahler", le "Wagner", et "L'esthétique"), 
Bernhardt - il était balaise en décadence - et a commis beaucoup 
d'écrits sur l'Ecole de Vienne (et aussi Martinu).
C'est simple : tu te colles la période films-trash-allemands de Visconti 
(il adorait la décadence) et tu écoutes ce qu'il utilise comme musique : 
  Bruckner (enfin, personnellement je ne le trouve pas trop décadent, 
sauf dans la 9eme), Mahler, Wagner usw.
Il y a aussi "Asterix chez les Hélvètes" et bien entendu "Astérix aux 
jeux olympiques" ("Et si on veut décader ? Oui, décadons ! Et un boeuf 
bourguignon").
Pour se reposer,tout en restant dans l'ambiance "La décadanse" de S. 
Gainsbourg.
costaclt
Bonjour Elodie,
Ainsi tu es passée des musiques fragmentaires à la musique "fin de siècle",
et décadente.
Pour moi la musique française "fin de siècle" est bien représentée par
Fauré, Chausson et autres compositeurs raffinés, cultivant dans leur musique
une grande sensibilité et une certaine tristesse. Mais il ne s'agit pas de
musique décadente, encore que le climat de délectation morose de certaines
oeuvres pourrait sûrement plaire à plus d'un décadent.
Pour Saint-Saëns, je n'associe pas non plus un représentant si établi de
l'art officiel et à qui on fait généralement plutôt le reproche
d'académisme, au terme de "décadent". Même pour la danse macabre. Cependant,
celle-ci porte en exergue un poème de Cazalis qui rentre peut-être dans ta
définition de l'art décadent. Quelques renseignements ici :
http://www.cenacle21.com/dansemacabre.htm
Ainsi que l'a écrit Fredéric Platzer, la Danse Macabre ne me paraît pas un 
très bon exemple de délectation morose. Il y a effectivement de l'ironie, 
mais c'est surtout un clin d'oeil, (et une magnifique démonstration de 
virtuosité orchestrale) tout comme la Marche funèbre pour une marionnette de 
Gounod, grinçante à souhait.
Le problème avec la musique, contrairement à la littérature et à la 
peinture, c'est qu'à moins d'une intention clairement affichée de l'auteur, 
le titre explicite d'une pièce à programme, par exemple, il est difficile de 
connaître objectivement les intentions du compositeur.
On trouve une période très nettement marquée par le goût du macabre, c'est 
bien sûr le romantisme, soit plutôt le milieu du XIXe siècle. Les "Fleurs 
solitaires" des Scènes de la Forêt de Schumann sont délicieusement 
vénéneuses, comme les Colchiques d'Apollinaire, et diffusent leur poison par 
une multitude de petites dissonnances qui écorchent l'oreille. Quant à la 
pièce intitulée "le Lieu maudit", elle est introduite par un poème de Hebbel 
qui ne fait pas vraiment dans la gaîté :
"Les fleurs, si haut croissent-elles
Sont pâles ici comme la mort ;
Une seule d'entre elle, au centre,
Se dresse dans sa parure rouge sombre.
Elle ne l'a point reçue du soleil :
Jamais elle n'en rencontra la chaleur ;
Elle la tient de la terre
Car elle a bu du sang humain."
Le Songe d'une nuit de Sabbat de la Symphonie fantastique de Berlioz, la 
Jeune fille et la Mort ou le Roi des Aulnes de Schubert, la Nuit sur le Mont 
Chauve, ce ne sont pas les références macabres qui manquent, le problème est 
de savoir si elles sont décadentes, et en tout cas elles sont rarement 
ironiquement grinçantes.
Pour rester dans l'époque fin XIXe - début XXe, j'évoquerais plutôt Gustav 
Mahler (l'ironique marche funèbre de la première symphonie - 1888 - par 
exemple), le Pierrot Lunaire de Schonberg (1912) sur des poèmes d'Albert 
Giraud, morbides à souhait :
"Comme un crachat sanguinolent,
De la bouche d'une phtisique,
Il tombe de cette musique
Un charme morbide et dolent.
Un son rouge - du rêve blanc
Avive la pâle tunique,
Comme un crachat sanguinolent
De la bouche d'une phtisique.
Le thème doux et violent
De la valse mélancolique
Me laisse une saveur physique,
Un fade arrière-goût troublant,
Comme un crachat sanguinolent."
Le texte complet sur
http://minilien.com/?iQFbHfFoFN
Je rajouterais volontiers la Valse de Ravel (1919), qui tourne tragiquement 
sur les ruines d'une civilisation et pourquoi pas les mélodies désabusées de 
Reynaldo Hahn (1874 - 1947) ou la musique un peu faisandée de Franz Lehar 
(la Veuve joyeuse - 1907). Mais il faut ici chercher le morbide derrière une 
gaîté un peu trop gaie pour être honnête.
-----
Paul & Mick Victor
décadent
A mon avis c'est plutôt du côté du symbolisme qu'il faut aller chercher
(plus que Debussy il me semble), comme tu l'indiques.
Pour préciser mon projet, je pense faire mon mémoire de master sur les
manifestations de la mort dans la littérature décadente avec comme idée
majeure l'esthétisation de la mort : le recours à l'esthétique comme moyen
de retrait et d'élévation au dessus du monde, avec l'influence des théories
de Schopenhauer dans les années 1880. 
Alors je recherche si il y aurait de quoi creuser du côté de la musique à
cette époque et si oui, quels sont les aspects majeurs qui fondent cette
musique ? Ce que je recherche en fait, c'est comment pourraient se
manifester ironie, morbidité... dans le langage musical. 
C'est ainsi que la Danse Macabre de St.S. me paraissait (déjà par son titre)
coller à cette idée. Mais apparement non! 
J'avais aussi quelque envie d'aller chercher du côté de Wagner avec le
Crépuscule des Dieux (le thème du renoncement) et la récupération de
Nietzsche (celui-ci a des thèses peut-être comparables à celles de
Schopenhauer). 
Mais pareil, j'attends votre aval!
> Ainsi tu es passée des musiques fragmentaires à la musique "fin de
> siècle", et décadente.
Et oui, Pascal et La Rochefoucauld ont fait leur temps !
> Pour moi la musique française "fin de siècle" est bien représentée par
> Fauré, Chausson et autres compositeurs raffinés, cultivant dans leur
> musique une grande sensibilité et une certaine tristesse.
Je vais essayer de trouver tout ça et d'écouter... Merci.
 
> Cependant, la danse macabre porte en exergue un poème de Cazalis qui
rentre peut-être dans ta définition de l'art décadent.
Intéressant. En effet, ça tire du côté décadent il me semble... avec les
squelettes. Mais peut-être pas encore assez complaisant ! 
Pour ce qui est de "ma" définition de l'art décadent, voici collé ci dessous
un extrait des "striges," une nouvelle de M. Schwob qui me semble
correspondre à ce que je recherche (à propos de la mort - et que j'explique
plus en détail dans une réponse à un autre intervenant). Bonne lecture,
---------------
---------------
" (...) La morte était couchée sur le lit ; elle avait la figure verte et
une multitude de petites rides autour de la bouche et aux tempes. Nous lui
avions attaché un linge autour des joues pour empêcher ses mâchoires de
s'ouvrir. Les papillons de nuit secouaient en cercle, près de la torche,
leurs ailes jaunes ; les mouches se promenaient lentement sur le haut du
lit, et chaque bouffée de vent faisait entrer des feuilles sèches, qui
tournoyaient. Moi, je veillais au pied, et je pensais à toutes les
histoires, aux mannequins de paille qu'on trouve le matin à la place des
cadavres, et aux trous ronds que les sorcières viennent faire dans les
figures pour sucer le sang. 
Voilà que s'éleva parmi les huées du vent un son strident, aigre et tendre ;
on eût dit qu'une petite fille chantait pour supplier. Le mode flottait
dans l'air et entrait plus fort avec les souffles qui éparpillaient les
cheveux de la morte ; cependant j'étais comme frappé de stupeur et je ne
bougeais pas. 
Le lune se mit à briller avec une lumière plus pâle ; les ombres des meubles
et des amphores se confondirent avec la noirceur du sol. Mes yeux, qui
erraient, tombèrent sur la campagne et je vis le ciel et la terre
s'illuminer d'une lueur douce, où les buissons lointains s'évanouissaient,
où les peupliers ne marquaient plus que de longues lignes grises. Il me
sembla que le vent s'apaisait et que les feuilles ne remuaient plus : je
vis glisser des ombres derrière la haie du jardin. Puis mes paupières me
parurent de plomb et se fermèrent ; je sentis des frôlements très légers. 
Soudain, le chant du coq me fit tressauter, et un souffle glacé du vent
matinal froissa les cimes des peupliers. J'étais appuyé au mur ; par la
fenêtre je voyais le ciel d'un gris plus clair et une traînée blanche et
rose du côté de l'Orient. Je me frottai les yeux, - et lorsque je regardai
ma maîtresse, - que les dieux m'assistent ! - je vis que son corps était
couvert de meurtrissures noires, de tâches d'un bleu sombre, grandes comme
un as, - oui, comme un as, - et parsemées sur toute la peau. Alors je criai
et je courus vers le lit ; la figure était un masque de cire sous lequel on
vit la chair hideusement rongée ; plus de nez, plus de lèvres, ni de joues,
plus d'yeux : les oiseaux de nuit les avaient enfilés à leur bec acéré,
comme des prunes. Et chaque tache bleue était un trou en entonnoir, où
luisait au fond une plaque de sang caillé ; et il n'y avait plus ni coeur,
ni poumons, ni aucun viscère ; car la poitrine et le ventre étaient farcis
avec des bouchons de paille. 
Les striges chanteuses avaient tout emporté pendant mon sommeil. L'homme ne
peut pas résister au pouvoir des sorcières. Nous sommes le jouet de la
destinée». (...) "
> Élodie GADEN :
> 
>> Ce que je recherche en fait, c'est comment
>> pourraient se manifester ironie, morbidité... dans le langage musical.
> c'est pas ça qui manque... mais peux-tu préciser le champ de ta recherche
> : musique française seulement ? ou aussi des autres pays ?
Musique française en priorité. Allemande en second. Mais je prends le reste
aussi si ça peut m'éclairer...
>
> A mon avis c'est plutôt du côté du symbolisme qu'il faut aller chercher
> (plus que Debussy il me semble), comme tu l'indiques.
>
> Pour préciser mon projet, je pense faire mon mémoire de master sur les
> manifestations de la mort dans la littérature décadente avec comme idée
> majeure l'esthétisation de la mort : le recours à l'esthétique comme moyen
> de retrait et d'élévation au dessus du monde, avec l'influence des
théories
> de Schopenhauer dans les années 1880.
>
> Alors je recherche si il y aurait de quoi creuser du côté de la musique à
> cette époque et si oui, quels sont les aspects majeurs qui fondent cette
> musique ? Ce que je recherche en fait, c'est comment pourraient se
> manifester ironie, morbidité... dans le langage musical.
>
Comme l'a dit PMV, difficilement par la musique pure, même si l'on sait que
le mineur est souvent senti comme plus triste que le majeur, et si on peut
vaguement reconnaître un rythme de marche funèbre.
Pour Debussy, "Pelléas et Mélisande" offre une merveilleuse esthétisation de
la mort, mais c'est surtout le poème de Maeterlinck qui nous le dit
clairement, quoique Debussy l'illustre fort bien.
Même fascination de la mort dans "la Ville morte" de Korngold, d'après le
livre également symboliste de Rodenbach. Mais là, la musique se fait
violente.
>
> Pour ce qui est de "ma" définition de l'art décadent, voici collé ci
dessous
> un extrait des "striges," une nouvelle de M. Schwob qui me semble
> correspondre à ce que je recherche (à propos de la mort - et que
j'explique
> plus en détail dans une réponse à un autre intervenant). Bonne lecture,
>
>
> ---------------
> ---------------
>
> " (...) La morte était couchée sur le lit ; elle avait la figure verte et
> une multitude de petites rides autour de la bouche et aux tempes. [...]
Voilià qui s'approche assez de la scène de la Ville morte, que je cite
aileurs, dans laquelle le héros danse avec la morte.
http://www.rodoni.ch/korngold/breque.html
> Pour ce qui est de "ma" définition de l'art décadent, voici collé ci
> dessous un extrait des "striges," une nouvelle de M. Schwob qui me
> semble correspondre à ce que je recherche (à propos de la mort - et
> que j'explique plus en détail dans une réponse à un autre
> intervenant). Bonne lecture,
Une question et un tuyau.
La question (à la cantonnade) : une "strige" est une sorte de démon à ce que
je comprends, j'ai déjà rencontré ce terme sans savoir exactement ce qu'il
recouvre. Or en roumain, un "strigoï" est une créature infernale, en fait un
revenant qui pousse des hurlements (d'après le verbe "a striga", hurler), ce
qui l'oppose au moroï, autre créature tout aussi infernale mais qui, au
moins, hante sans hurler, bref une sorte de Nosferatu de salon (plus
pratique en HLM). D'où ma question : y aurait-il un rapport entre "strige"
et "strigoï" ?
Le tuyau : jette un oeil sur les contes de fées (cruels et sanglants) de
Karel Jaromir Erben
http://bohemica.free.fr/auteurs/erben/presentation_erben.htm
dont certains ont servi d'arguments à quatre poèmes symphoniques de Dvorak,
effectivement composés en fin de siècle (1896 - 1897). J'ai commenté le
premier d'entre eux, intitulé l'Ondin, sur mon site, il te suffit de
rechercher "ondin" dans la page suivante (il y a deux articles) :
http://perso.wanadoo.fr/alain.cf/jeudvointro.htm
Les trois autres contes s'intitulent la Sorcière de Midi (on dit aussi
parfois... "la Stryge" !), le Rouet d'Or et le Pigeon des Bois.
-- 
Alain
> Voilià qui s'approche assez de la scène de la Ville morte, que je cite
> aileurs, dans laquelle le héros danse avec la morte.
n'est-ce pas aussi l'argument (inversé) de la Valse Triste de Sibelius ?
Pour la récupération de Nietzsche, tu peux aller voir du côté de "Ainsi 
parlait Zarathoustra" de  Richard Strauss... Et puis faire un détour par 
Mort et Transfiguration. Pour décader, ça décade...
-----
Paul & Mick Victor
surhomme
Il y a certainement un lien, puisque le roumain est une langue sinon latine, 
au moins neo-latine, et que l'étymologie de "strige" est le latin "striga", 
d'après Littré, "oiseau de nuit qui passait pour déchirer les enfants, 
sorcière".
-----
Paul & Mick Victor
bête faramine
ps: t'es àla Sorbonne ?
> Tu vas sans doute nous donner un approfondissement. Car là, je sèche
> pour trouver un sens. 
Que je ne trouve pas Bruckner spécialement décadent ?
C'est une simple question de ressenti. Bien entendu, je vois le côté 
"comment se sortir de Wagner tout en le prolongeant" chez Bruckner et 
son relatif échec d'ailleurs (ce qui en ferait une musique décadente), 
la complexitité des structures -mais ce n'est pas Mahler. En gros, la 
tension vers le religieux me fait douter de la volonté décadente.La 
9eme, je la trouve plus franchement dysphorique.
costaclt
Ca y est ! Socratachon rentre en action...
Amicalement,
Henri - maieuticien
>C'est une simple question de ressenti. Bien entendu, je vois le côté 
>"comment se sortir de Wagner tout en le prolongeant" chez Bruckner et 
>son relatif échec d'ailleurs (ce qui en ferait une musique décadente), 
>la complexitité des structures -mais ce n'est pas Mahler. 
Bruckner ne 'vient' pas de Wagner mais de Haydn, Mozart et Beethoven.
Bruckner écrit des symphonies, de la musique "absolue" ayant pour
modèle la symphonie classique viennoise. 
Wagner est un littéraire et un intellectuel écrivant pour le théâtre.
Le langage de Bruckner est régulièrement périodique, cyclique; celui
de Wagner pas du tout.
L'orchestration de Bruckner procède par un étagement 'cartésien' des
timbres, Wagner pratique volontiers les mélanges.
Tout les oppose stylistiquement, pourquoi les rapprocher?
Il n'y a pas plus de parenté entre Bruckner et Wagner qu'entre
Bruckner et Liszt.
>En gros, la tension vers le religieux me fait douter de la volonté décadente.
La dimension "religieuse", je ne la perçois pas particulièrement en
écoutant cette musique. Ca ne m'a jamais frappé comme étant une
évidence incontournable. 
C'est une chose, je crois, qu'on est tenté de dire et de penser à
cause de la connaissance biographique qu'on a du compositeur (souvent
exagérément caricaturale, d'ailleurs...)
Parsifal est décadent selon toi?
>La 9eme, je la trouve plus franchement dysphorique.
Elle est sans doute moins "affirmative" que les symphonies
précédentes. Cependant, la brèche est déjà ouverte dans la 8ème avec
son premier mouvement qui se termine dans la désolation d'une nuance
pianissimo et non plus dans un fff.
La 9ème constitue, à mon sens, un tournant stylistique important. 
Le langage de Bruckner se transforme (à 70 ans!) et va de l'avant, il
s'engage, tout seul à l'époque, dans une voie expérimentale annonçant,
avec deux décennies d'avance, la dislocation de la tonalité. 
Un échec??
 
Tout comme dans la 5ème symphonie, Bruckner y est plus authentiquement
lui-même, plus exigent, et ne cherche pas à "séduire" comme avec la
7ème par exemple.
Il manque à la 9ème un Finale dont on sait, par les esquisses, qu'il
devait se conclure par une coda triomphante et unificatrice à l'image
des 5ème et 8ème symphonies.
Il ne faut pas non plus oublier que les trois premiers mouvements de
cette 9ème de Bruckner ont été écrits entre 1887 et 1894; autrement
dit environ plus de 20 ans avant la 10ème symphonie de Mahler ou les
premières productions atonales de Schönberg.
Pour moi, la 9ème de Bruckner sonnera toujours plus "moderne" que les
dernières symphonies de Mahler qui elles, effectivement, regardent en
arrière vers... Wagner (comment ne pas faire de lien entre le Prélude
de Tristan et l'Adagio de la 9ème de Mahler?)
En ce sens, Mahler symbolise parfaitement cette "décadence" par la
description quasi autobiographique de la décrépitude de l'individu -
sa 6ème symphonie => 80 minutes d'agitations multiples pour nous dire
que la vie est une vaste blague, et tombe la guillotine!! La 7ème et
son Finale schizophrénique (le do majeur le plus "tragique" de toute
la musique!) ou encore la 9ème s'éteignant dans une solitude
désertique.
La musique de Mahler correspond parfaitement à l'ambiance et aux
courants culturels de la Vienne du début de siècle: Gustav Klimt,
Sigmund Freud, l'expressionnisme, etc.
Sébastien
>
>> Voilià qui s'approche assez de la scène de la Ville morte, que je cite
>> aileurs, dans laquelle le héros danse avec la morte.
>
> n'est-ce pas aussi l'argument (inversé) de la Valse Triste de Sibelius ?
>
Je t'avouerais que je ne suis pas trop familier de l'oeuvre de Sibelius que, 
jusqu'à une date assez récente, je trouvais assez barbant en général (pardon 
Pirjo !), m'étonnant toujours du culte que lui portent nos voisins 
d'outre-Manche.
Naturellement, la Valse triste n'entre pas dans la catégorie des pièces 
barbantes mais dans les pièces favorites, entendues depuis l'enfance. Je 
n'ai appris qu'assez tardivement qu'il ne s'agissait pas d'une jolie pièce 
isolée, mais qu'elle était extraite de la musique de scène de Kuolema (la 
Mort ? si j'ai bien compris) et je lis sur Google que la jeune fille danse 
en rêve avec, sous les traits de son mari, la Mort elle-même. La valse 
triste est le n°1 de l'opus 44 dont le n°2 est la Danse des crânes ; ça va 
plaire à Élodie !
Et est-ce que *l'autre* Valse triste, celle de Nedbal, pour le ballet Der 
faule Hans, a un rapport autre qu'homonyme avec le sujet de la première ? 
La vraie décadence, c' est de se flinguer, le reste c' est de la branlette
pour esthètes.
>La  9eme, je la trouve plus franchement dysphorique.
Y a un rapport avec Dresdes ? (14/15 feb 1945).
jp - dysphorique, hi hi, y nous aura tout fait, le marseillais.
>
> costaclt
>
>>La  9eme, je la trouve plus franchement dysphorique.
>
> Y a un rapport avec Dresdes ? (14/15 feb 1945).
>
Le rapport avec Dresde, c'est plutôt les admirables Métamorphoses de 
Strauss, non ? 
> jp - dysphorique, hi hi, y nous aura tout fait, le marseillais.
Marseillais, marseillais...
Faut pas généraliser, hein !
Amicalement,
Henri - Aixois(accessoirementabruti)
> ps: t'es àla Sorbonne ?
Non, pas du tout, pourquoi?
> Musique française en priorité. Allemande en second. Mais je prends le
> reste aussi si ça peut m'éclairer...
Aujourd'hui pendant la pause café, je me suis pris au jeu de faire un rapide
survol des musiques à programme (opéras, poèmes symphoniques..) de la fin
XIXème - début XXème. Résultat ci-dessous. Bien entendu, toute exactitude
musicologique serait un vrai coup de pot.
Comme on l'a déjà dit, ces années s'ouvrent aux mouvements mystiques,
symbolistes, orientalistes (rappelons l'importance cruciale des expositions
universelles, comme celle de Paris en 1900). Pêle-mêle : opéra Pelléas et
Mélisande, de Debussy, les poèmes symphoniques de Richard Strauss déjà
cités, un peu plus tard Schéhérazade (1903) de Maurice Ravel, sur des textes
de Tristan Klingsor, les trois symphonies du "mystique" Scriabine
(1901-1904), J. Suk (symphonie "funèbre" Asraël, 1904-1905)...
Sous le terme "vérisme" l'on regroupe souvent par complaisance et facilité
(ce que je m'empresse d'ailleurs de faire dans les lignes qui suivent) des
oeuvres disparates. Pour faire court, ce mouvement cherche à rendre compte
de la "réalité" de l'existence des gens de la rue (on dirait aujourd'hui :
des gens du forum). Les oeuvres ci-dessous parlent de "faits divers"
(crimes, vengeances) suscités par la jalousie, de sujets intimes et
"sociaux" comme l'avortement, autant de sujets impensables encore quelques
années auparavant et volontairement opposés à l'esthétique romantisante.
Citons l'immense succès de Mascagni, l'opéra Cavalliera Rusticana (histoire
de crime passionnel dans un village de Sicile), souvent rattaché à Pagliaci
de Leoncavallo (un bouffon trucide son épouse sur scène). Dans "La Nuit
Transfigurée" de Schönberg (1899), une jeune femme annonce à son amant que
l'enfant qu'elle porte n'est pas de lui. L'opéra Jenufa (1894-1903) de L.
Janacek est un drame de l'alcoolisme et de la jalousie, qui provoque un
infanticide. Certains se chamaillent encore de nos jours pour savoir si
"Louise" de Charpentier et "la Bohème" (avec un accent grave, Bohème, merci)
de Puccini sont "véristes".
Avec le siècle, la génération des compositeurs romantique touche à sa fin.
L'art musical est en pleine mutation. Les dernières grandes oeuvres des
romantiques s'attachent volontiers aux modes mineurs, aux thèmes funèbres.
La situation est renforcée par la disparition de grands artistes : dans les
années 1890 meurent Gounod, Hans von Bülow (chef d'orchestre lié à Liszt et
à Wagner, dont les funérailles inspirent le 1er mouvement de la symphonie
"Résurrection" de Mahler), Tchaïkovski, Brahms, Bruckner... On entend des
musiques funèbres chez Tchaïkovski (symphonie Pathétique, 1893), Dvorak
(concerto pour violoncelle, 1896), Mahler (symphonies 1, 2, 5... et les
Kindertotenlieder, chants des enfants morts, 1904), Albéric Magnard (Chant
funèbre, 1895), etc.
Puisqu'on parlait de Saint-Saëns, rappelons que sa Symphonie avec orgue
(1886) utilise, comme la Danse Macabre, le thème du Dies Irae, tiré de la
Messe de Morts.
Le "conte de fées pour adulte" connaît un certain succès : oeuvres
féeriques, elles cachent sous un abord a priori facile souvent des
symboliques plus graves. Les légendes inspirent Engelbert Humperdinck pour
Hänsel et Gretel, Dvorak pour ses poèmes symphoniques d'après Erben et
l'opéra Rusalka (1901), oeuvres sombres où la mort est omniprésente, des
opéras de Rimsky-Korsakov (comme le Sadko, ou le Tsar saltan en 1899, dont
on connaît le Vol du Bourdon), Cendrillon de Massenet, les fascinants
Gurre-Lieder de Schönberg (peut-être, à mon avis, l'un des plus flagrants
exemples d'une musique "fin de siècle", avec la Nuit Transfigurée. Histoire
mythique et douloureuse, soutenue par un orchestre d'une puissance
phénoménale). Citons également les musiques de Sibelius (Kuolema, "la mort",
1903, avec la valse triste), Dukas (l'Apprenti Sorcier, 1897).
Voilà. On pourrait en dire beaucoup plus, je laisse le soin aux aimables
contributeurs du forum (et même aux autres). Mais les oeuvres gaies ne sont
pas absentes de l'époque (comme l'a dit PMV) puisque "Véronique",
opéra-comique de l'excellent André Messager, est joué en 1898.
-- 
Alain
> Il y a certainement un lien, puisque le roumain est une langue sinon
> latine, au moins neo-latine,
très juste pour la néo-latinité (réintroduction de mots d'origine latine au
XIXème siècle). Justement, je ne sais pas si les strigoï sont concernés,
j'ai dans l'idée que ce mot doit être assez ancien, comme les légendes où il
apparaît. Donc, latin, néo-latin ou autre (slave ? dace ? ...), j'en sais
rien.
> et que l'étymologie de "strige" est le
> latin "striga", d'après Littré, "oiseau de nuit qui passait pour
> déchirer les enfants, sorcière".
Intéressant. Merci.
> Et est-ce que *l'autre* Valse triste, celle de Nedbal, pour le ballet
> Der faule Hans, a un rapport autre qu'homonyme avec le sujet de la
> première ?
Non, je ne pense pas, mais je ne me suis pas penché sur le sujet. Je connais
assez mal la musique d'Oskar Nedbal, plus connu pour son activité d'artiste
(excellent altiste et chef d'orchestre) que pour ses partitions. Et je
m'aperçois que j'avais en tête la Valse Triste d'un troisième compositeur
mais que j'ai soudainement oublié son nom. ça me reviendra peut-être.
> Justement, c'est ça qui est incompréhensible. Pourquoi, selon toi ?
Entre le flop de la 8eme, la pleurésie et le fait de n'avoir pu baiser 
une nana dans sa vie, je le vois bien décadent le Bruckner de la 9eme. 
Il n'y croyait plus au barbu (je parle de Dieu, l'autre il avait fait 
une croix dessus depuis longtemps !).
Et en plus, il ne l'achève pas ce salaud !
costaclt
> Je rajouterais volontiers la Valse de Ravel (1919), qui tourne
> tragiquement sur les ruines d'une civilisation (...)
Pour ma part j'ajoute la 6ème symphonie de Nielsen (1925), véritable foutage
de gueule contre la musique viennoise : dans le second mouvement, Humoreske,
et avec la valse contrariée (le mot est faible !) du finale.
>> Justement, c'est ça qui est incompréhensible. Pourquoi, selon toi ?
>
>Entre le flop de la 8eme, 
Quel "flop"?
>la pleurésie et le fait de n'avoir pu baiser une nana dans sa vie, 
>je le vois bien décadent le Bruckner de la 9eme. 
Tu parles de l'homme ou de sa musique là?
>Il n'y croyait plus au barbu (je parle de Dieu, l'autre il avait fait 
>une croix dessus depuis longtemps !).
Quand je parlais de carricatures...
>Et en plus, il ne l'achève pas ce salaud !
Le Finale était en vérité quasiment terminé...
Je cite:
"Bruckner avait avancé plus encore dans la composition qu'il ne
'semble' aujourd'hui. La totalité de l'exposition et plusieurs autres
pages étaient à l'origine complètement orchestrées à l'encre et
souvent annotées "fertig" (terminé) par Bruckner."
"Le matériel du finale n'a malheureusement pas été transmis d'un seul
tenant, les personnes chargées de la succession de Bruckner ayant fait
preuve de négligence de même que les différents propriétaires (avant
tout Franz Schalk et Ferdinand Löwe ou leurs héritiers) qui firent don
ou vendirent certaines pages. Aujourd'hui le manuscript du finale est
dispersé dans le monde entier, aux mains de personnes qui peut-être
bien même, n'en savent rien."
Sébastien
>> Je rajouterais volontiers la Valse de Ravel (1919), qui tourne
>> tragiquement sur les ruines d'une civilisation (...)
>
>Pour ma part j'ajoute la 6ème symphonie de Nielsen (1925), véritable foutage
>de gueule contre la musique viennoise : dans le second mouvement, Humoreske,
Cette habile carricature est aussi une question: "où va la musique?"
>et avec la valse contrariée (le mot est faible !) du finale.
La dernière variation (IX), aux dires du compositeur, serait une sorte
de description de la mort frappant à la grille. 
L'orchestration, volontairement "grotesque", s'y prête à merveille:
- grosse caisse: les coups
- xylophone: la mort (le bruit des os)
- tuba: (borborigmes) le vide total.
"Mais je veux défier la mort et ainsi jaillit la fanfare"... 
Nielsen parlait de la coda du finale, fanfaronnade plutôt qu'un geste
"héroïque".
Le titre de cette symphonie surnommée "Sinfonia semplice" (car
traitant de "problèmes et de questions musicales") est plus qu'ambigu
et surtout tompeur car l'oeuvre alterne entre dérision burlesque et
tragique intense.
Sébastien
> Bruckner ne 'vient' pas de Wagner mais de Haydn, Mozart et Beethoven.
Ben, je t'assure que je ne l'entends pas du tout comme ça. Du Wagner, 
surtout du Wagner. A-priori, je ne dois pas être le seul : ce que j'ai 
pu lire sur Bruckner va presque toujours dans ce sens. Tiens, au pif 
google : 
http://www.musicalis.fr/v1/Cours/GDC_DET_Dictionnaire.asp?file=auteurs/bruckner.htm
Entre parenthèses, il existe quelque chose de bien à lire sur Bruckner ? 
   Enfin, dans le genre dense ? J'ai un peu cherché, il y a un petit 
bouquin chez Actes Sud, deux bouquins parus pendant la guerre et rien 
d'autre semble-t-il. En allemand, j'ai trop de mal. En anglais, ça coûte 
encore le prix d'un rein.
> Bruckner écrit des symphonies, de la musique "absolue" ayant pour
> modèle la symphonie classique viennoise. 
> Wagner est un littéraire et un intellectuel écrivant pour le théâtre.
Wagner est le phare :)
> Le langage de Bruckner est régulièrement périodique, cyclique; celui
> de Wagner pas du tout.
Comment ça pas cyclique chez Wagner ?
> L'orchestration de Bruckner procède par un étagement 'cartésien' des
> timbres, Wagner pratique volontiers les mélanges.
> Tout les oppose stylistiquement, pourquoi les rapprocher?
> Il n'y a pas plus de parenté entre Bruckner et Wagner qu'entre
> Bruckner et Liszt.
Moi, je l'entends comme ça. La 4eme, c'est pas du Wagner ?
> La dimension "religieuse", je ne la perçois pas particulièrement en
> écoutant cette musique. Ca ne m'a jamais frappé comme étant une
> évidence incontournable.
C'est depuis le Te Deum que je me suis fait une fixette sur ça.
> C'est une chose, je crois, qu'on est tenté de dire et de penser à
> cause de la connaissance biographique qu'on a du compositeur (souvent
> exagérément caricaturale, d'ailleurs...)
C'est fort possible. Allez : hautement probable !
> Parsifal est décadent selon toi?
Musicalement : juste à la limite des limites.
Disons qu'avec Tristan, tout est joué ou presque. Parsifal, c'est juste 
les prolongations. Ensuite, ça ne peut qu'être décadent, sauf à changer 
de système : l'Ecole de Vienne donc.
Sur le livret : à fond !
> Elle est sans doute moins "affirmative" que les symphonies
> précédentes. Cependant, la brèche est déjà ouverte dans la 8ème avec
> son premier mouvement qui se termine dans la désolation d'une nuance
> pianissimo et non plus dans un fff.
> La 9ème constitue, à mon sens, un tournant stylistique important. 
> Le langage de Bruckner se transforme (à 70 ans!) et va de l'avant, il
> s'engage, tout seul à l'époque, dans une voie expérimentale annonçant,
> avec deux décennies d'avance, la dislocation de la tonalité. 
> Un échec??
Tout sauf un échec. En plus, c'est ma symphonie favorite. J'aime bien la 
6eme aussi. Quand j'ai découvert la 9eme, je dois reconnaître avoir été 
cueilli. Je ne m'attendais pas du tout à cette prise de risque final. 
Mais j'ai toujours vécu ça comme un retour vers Wagner pour le dépasser 
d'une autre manière que ce qu'il avait fait jusque là.
> En ce sens, Mahler symbolise parfaitement cette "décadence" par la
> description quasi autobiographique de la décrépitude de l'individu -
> sa 6ème symphonie => 80 minutes d'agitations multiples pour nous dire
> que la vie est une vaste blague, et tombe la guillotine!! La 7ème et
> son Finale schizophrénique (le do majeur le plus "tragique" de toute
> la musique!) ou encore la 9ème s'éteignant dans une solitude
> désertique.
La 7eme et sa mandoline (?) flippante en diable...
> La musique de Mahler correspond parfaitement à l'ambiance et aux
> courants culturels de la Vienne du début de siècle: Gustav Klimt,
> Sigmund Freud, l'expressionnisme, etc.
C'est ce que j'avais en tête. Vienne et fin de siècle : plus décadent 
que ça, je ne vois pas.
costaclt
> La vraie décadence, c' est de se flinguer, le reste c' est de la branlette
> pour esthètes.
Non, la vraie décadence, c'est la vieillesse et le bide.
>>La 9eme, je la trouve plus franchement dysphorique.
> Y a un rapport avec Dresdes ? (14/15 feb 1945).
Ah putain, je ne trouve pas le rapport. Les bombes au phosphore ?
costaclt
> Pour préciser mon projet, je pense faire mon mémoire de master sur les
> manifestations de la mort dans la littérature décadente avec comme idée
> majeure l'esthétisation de la mort : le recours à l'esthétique comme moyen
> de retrait et d'élévation au dessus du monde, avec l'influence des théories
> de Schopenhauer dans les années 1880. 
Ceci dit, je ne vois pas à quel moment de l'histoire des arts, la mort 
n'aurait pas été esthétisée.
Schopenhauer : alors Wagner donc.
costaclt
>> Bruckner ne 'vient' pas de Wagner mais de Haydn, Mozart et Beethoven. 
>
>Ben, je t'assure que je ne l'entends pas du tout comme ça. Du Wagner, 
>surtout du Wagner. A-priori, je ne dois pas être le seul : ce que j'ai 
>pu lire sur Bruckner va presque toujours dans ce sens. Tiens, au pif 
>google : 
>http://www.musicalis.fr/v1/Cours/GDC_DET_Dictionnaire.asp?file=auteurs/bruckner.htm
Des poncifs pas très probants...
On y cause de l'influence de Wagner sur l'orchestration brucknérienne.
J'attends encore qu'on me montre où?? 
D'un point de vue strictement analytique on peut franchement constater
plus de différences que de parentés sur ce seul paramètre.
On peut dire qu'il y a une plus que 'vague ressemblence' entre eux en
relevant chez l'un comme chez l'autre de grands 'thèmes cuivrés'. 
Mais ça s'arrête là.
Ce n'est parce que Bruckner utilise 4 "Wagner-Tuben" que ça en devient
automatiquement du Wagner.
Je pense que l'influence wagnérienne est plutôt observable sur le plan
humain. Cette "amitié" a d'ailleurs valu à Bruckner des ennuis
mémorables et regrettables avec la critique viennoise... 
Stupides querelles idéologiques dans lesquelles le malheureux a été
embarqué bien malgré lui - en fait il n'y a jamais personnellement
participé, ce sont ses 'disciples' qui, probablement en toute bonne
foi, répondaient à sa place!
>Entre parenthèses, il existe quelque chose de bien à lire sur Bruckner ? 
>Enfin, dans le genre dense ? J'ai un peu cherché, il y a un petit 
>bouquin chez Actes Sud, deux bouquins parus pendant la guerre et rien 
>d'autre semble-t-il. En allemand, j'ai trop de mal. En anglais, ça coûte 
>encore le prix d'un rein.
En français, je n'en connais pas.
Langevin peut-être, mais bof... Ca date.
>> Bruckner écrit des symphonies, de la musique "absolue" ayant pour
>> modèle la symphonie classique viennoise. 
>> Wagner est un littéraire et un intellectuel écrivant pour le théâtre.
>
>Wagner est le phare :)
Le phare de la symphonie viennoise? Tu déconnes là?
>> Le langage de Bruckner est régulièrement périodique, cyclique; celui
>> de Wagner pas du tout.
>
>Comment ça pas cyclique chez Wagner ?
Exactement.
Wagner écrit une musique de mutation et de métamorphose permanente, il
casse la périodicité (potentielle) de ses idées pour toujours glisser
vers autre chose. En ça, Wagner annonce Debussy.
Bruckner par contre évolue dans des carrures et une périodicité
rythmique très proche d'un Beethoven dont il a hérité pourrait-on dire
un aspect répétitif et têtu. Il expose des idées, revient dessus
(développement, traitement des cellules et motifs), les réexpose.
En quelque sorte Wagner est un peintre et Bruckner un architecte.
>> Tout les oppose stylistiquement, pourquoi les rapprocher?
>> Il n'y a pas plus de parenté entre Bruckner et Wagner qu'entre
>> Bruckner et Liszt.
>
>Moi, je l'entends comme ça. La 4eme, c'est pas du Wagner ?
Bé non, c'est du Bruckner!
Ou alors peut-être par Karajan, Tennstedt, Haitink ou Maazel? ;-)
>> La dimension "religieuse", je ne la perçois pas particulièrement en
>> écoutant cette musique. Ca ne m'a jamais frappé comme étant une
>> évidence incontournable.
>
>C'est depuis le Te Deum que je me suis fait une fixette sur ça.
On parle des symphonies ou du Te Deum?
>> C'est une chose, je crois, qu'on est tenté de dire et de penser à
>> cause de la connaissance biographique qu'on a du compositeur (souvent
>> exagérément caricaturale, d'ailleurs...)
>
>C'est fort possible. Allez : hautement probable !
On se fout complètement de la libido de monsieur Anton Bruckner ou de
sa (soi disant) cagoterie...
Perso, il n'y a que sa musique qui m'intéresse.
>[Mahler]
>La 7eme et sa mandoline (?) flippante en diable...
Sa symphonie la plus véritablement audacieuse et expérimentale, mais
aussi la moins "égotique" je pense.
La symphonie "Des Milles", c'est juste histoire d'inverser la vapeur
et de se remettre de ses propres audaces et fêlures schizophréniques
par une sorte d'hommage à Bach.
La 9ème, c'est la décrépitude et la désolation totale...
>> La musique de Mahler correspond parfaitement à l'ambiance et aux
>> courants culturels de la Vienne du début de siècle: Gustav Klimt,
>> Sigmund Freud, l'expressionnisme, etc.
>
>C'est ce que j'avais en tête. Vienne et fin de siècle : plus décadent 
>que ça, je ne vois pas.
Et le rapport avec Bruckner symphoniste, je le vois toujours pas?
Sébastien
> Tu parles de l'homme ou de sa musique là?
Il parle de ce qu'il croit connaître. Surtut que le reste, il ne connaît
absolument pas...
> Quand je parlais de carricatures...
Voilà une caRicature qui ne manque pas d'air en tout cas...
> >Et en plus, il ne l'achève pas ce salaud !
>
> Le Finale était en vérité quasiment terminé...
Tout est dans le "en vérité quasiment".
> "Le matériel du finale n'a malheureusement pas été transmis d'un seul
> tenant, les personnes chargées de la succession de Bruckner ayant fait
> preuve de négligence de même que les différents propriétaires (avant
> tout Franz Schalk et Ferdinand Löwe ou leurs héritiers) qui firent don
> ou vendirent certaines pages. Aujourd'hui le manuscript du finale est
> dispersé dans le monde entier, aux mains de personnes qui peut-être
> bien même, n'en savent rien."
Merdeuuuu !
C'était ça, alors, les feuilles avec lesquelles je me suis... hum !
Amicalement,
Henri - hum!
Et puis aussi penser aux projets de Debussy pour des nouvelles de Poe : 
le diable dans le beffroi, la chute de la maison Husher et je sais plus 
quoi (mais d'autres te diront). Mais là on est plus dans le passage 
dans un étrange un peu morbide que dans vraiment le rapport à la mort.
Népo
-- 
Au début de l'année 3156, un éléphanteau jauni et tumescent s'extirpe 
goulument des envahissantes inquisiteuses des ancêtres
© news://news.zoo-logique.org/cadavres-exquis
C'est encore plus avec l'école de Vienne que ça décade pour de bon et à 
répétition. Y aurait-il un décalage là encore entre courant littéraire 
et courant musical ?
Népo
-- 
Hier après-midi le phémonénal macaroni de Giacomo Casanova volera 
minutieusement le babiroussa protubérant et glacé au fond de la grotte.
© news://news.zoo-logique.org/cadavres-exquis
Et peut-être Berg plus particulièrement. C'est assez systématique 
(Wozzeck et Lulu pour commencer). J'avais lu un bouquin de chais plus 
qui revenait sans cesse au rapport entre l'esthétique de Berg et 
l'Homme sans qualité de Musil... Pas réussi à dépasser la moitié du 1er 
tome de ce bouquin, tiens.
Népo - ai dévoré le désarrois de l'élève Törless
-- 
De déconcertants embarcadères alternatifs se flagelent joyeusement dans 
une soute à bagage.
© news://news.zoo-logique.org/cadavres-exquis
> Il parle de ce qu'il croit connaître. Surtut que le reste, il ne connaît
> absolument pas...
Il y en a bien qui croient avoir une personnalité :DD
costaclt
> Il y en a bien qui croient avoir une personnalité :DD
Comme ceux qui, par exemple, reprennent les "arguments" de l'argentin ?
Amicalement,
Henri - impersonnel
>Il parle de ce qu'il croit connaître. Surtut que le reste, il ne connaît
>absolument pas...
C'est pas justement un 'argument' de Daniel-Fausto ça?
Sébastien
Jette donc un coup d'oeil sur le livre de François Sabatier : Miroirs de la
musique tome 2 (La musique et ses correspondances avec la littérature et les
beaux-arts 1800-1950). Fayard
> Par ailleurs, j'ai découvert il y a peu de temps la /Danse Macabre/ de C.
> Saint Saëns :
> Mais en en parlant à un prof musicologue de ma fac, il n'a pas vraiment
été
> d'accord avec mes "impressions"... sans vraiment m'en dire plus.
Je ne pense pas qu'effectivement Saint-saêns entre dans ce cadre. Il faut se
méfier des titres. Plus bas, Alain parle de la Valse Triste de Sibélius,
effectivement, ça pourrait mieux coller. Côté, morbide, je ne vois pas a
priori grand chose, sauf peut-être certaines musiques de Mahler, le Pierrot
Lunaire de Schönberg, et pourquoi pas les Oiseaux Tristes de Ravel mais ce
n'est déjà plus la fin du XIX ème.
Cenvin
> C'est pas justement un 'argument' de Daniel-Fausto ça?
Voire, "des" DFA. Car, amha, il y avait au moins deux personnes derrière 
l'ordinateur. Le dernier message à Tournier, c'était "Quand on ne peux 
pas mordre, on lèche". Au final, il a mordu celui qui ne s'y attendait pas.
costaclt
Élodie GADEN a écrit :
> Bonjour,
> 
> Je suis étudiante en lettres modernes et je m'intéresse beaucoup à la
> période "décadente" de la fin XIXème. En littérature, (chez Laforgue,
> Schwob ou encore Huysmans) il s'agit d'une esthétique marquée par des
> colorations morbides, une certaine complaisance à l'égard du macabre,
> (esthétisation de la mort par exemple), une ironie grincante...  
> 
> Or, je m'interroge maintenant sur ce phénomène "fin de siècle" dans les
> autres arts : en peinture avec Gustave Moreau ou W. Wojtkiewicz en Pologne. 
> Mais il me manque cruellement les connaissances nécessaires pour ce qui est
> de la musique de cette période. 
> 
> Est-ce qu'il existe dans l'histoire de la musique une période équivalente
> (pas forcément chronologique, mais au moins dans les thèmes mentionnés ci
> dessus) ?  
> 
> Par ailleurs, j'ai découvert il y a peu de temps la /Danse Macabre/ de C.
> Saint Saëns : je ne connais pas du tout ce musicien, mais en écoutant et en
> ré-écoutant cette /Danse Macabre/, j'ai vraiment /l'impression/ qu'il y a
> une démarche similaire à celle des auteurs que je connais (comme si
> certaines notes manifestaient l'ironie, le morbide, et un certain
> désenchantement). 
> Mais en en parlant à un prof musicologue de ma fac, il n'a pas vraiment été
> d'accord avec mes "impressions"... sans vraiment m'en dire plus.
> 
> Qu'en pensez-vous pour St Saëns, mais aussi pour d'autres musiciens ? 
> 
> Merci d'avance,
> Elodie
Beaucoup de pièces peuvent correspondre avec ta définition, au moins en 
partie.
La Pavae Op 50 (dans la version avec choeur) par exemple : l'ironie 
semble sifficilement déelable dans ce morceau, mais la mrobidité et le 
désenchantement me paraissent assez évidents.
La 1°ère Gymnopédie, d'Erik Satie, dont le mouvement est "lent et 
triste", me paraît correspondre.
Ce ne sont que dex exemples qui me viennent à l'esprit.
Il m'ne vient un autre : la SUite Bergamasque, de Debussy, dont 
l'imitation de la musique de Fauré me paraît trop consciente pour ne pas 
être ironique, et dont la mélancolie me paraît bien typique de cette fin
du XIX° siècle.
Cette notion "fin de siècle" me paraît tout de même assez associée à 
l'art français.
apoutsi@k
Bien sûr que ça te reviendra. On n'en doute pas une seconde, quand on
constate ce que tu peux échafauder à une  pause café...
Amicalement,
jean-pierre
> Non, la vraie décadence, c'est la vieillesse et le bide.
pé trois petits points, ça y est, je commence à être un poil décadent ,
sur la pente fatale, le début de l'éternité.
> Ah putain, je ne trouve pas le rapport. Les bombes au phosphore ?
dysphorique, c' est quoi ?...dysentrique heureux?...dyspeptique traité au
phosphore?
sinon Arte le vendredi 11/02/05 à 22h30, extincteur recommandé.
jp - j' ai des frocs taille 40 à vendre. :o\
>
> costaclt
> Pour se reposer,tout en restant dans l'ambiance "La décadanse" de S.
> Gainsbourg.
enterré au Montparnasse avec Philippe Léotard, qui entre autres
exploits a survécu à DEUX comas alcooliques; toujours dans les mêmes
lieux, reposent Huysmans et Saint-Saens, et aussi Jean Seberg dont je vais
, oh merveilles de la géodésie, fournir les coordonnées GPS :
GPS coordinates: 48.83899, 2.32713 (hddd.dddd)
fini le temps où on tournait comme un con avec son pot de chrysanthèmes,
un coup d' oeil sur le génial accessoire et en deux coups les gros vous
voilà auprès du monument.
jp - pour les cendres, c'est pas au point.
>
> costaclt
> dysphorique, c' est quoi ?...dysentrique heureux?...dyspeptique traité au
> phosphore?
Dysphorique, en gros déprimé. Mais avec opposition constituée à 
l'euphorie. Le décadent n'est pas "déprimé", il s'oppose directement. 
Pour plus de renseignement : Aljerdas Greimas et la sémiotique. Je ne 
crois pas qu'il soit abonné au forum...
Sans déconner, c'était quoi le rapport avec Dresde ?
costaclt
> enterré au Montparnasse avec Philippe Léotard, qui entre autres
> exploits a survécu à DEUX comas alcooliques; toujours dans les mêmes
> lieux, reposent Huysmans et Saint-Saens, et aussi Jean Seberg dont je vais
> , oh merveilles de la géodésie, fournir les coordonnées GPS :
Pff. Villeret les a enfoncés. Et attends Dutronc ou Higelin.
> fini le temps où on tournait comme un con avec son pot de chrysanthèmes,
> un coup d' oeil sur le génial accessoire et en deux coups les gros vous
> voilà auprès du monument.
Ah bon ? Je finirais peut-être par aller voir la tombe de mes 
grands-parents si ça se trouve. Car se farcir des rangées de tombes plus 
laides les unes que les autres, hein... Je ne suis pas Eli Wallach.
costaclt -le bon
lol, on dirait dfa, qui des fois faisait une fixette, quand il n'était
pas sûr d' avoir compris...je te laisse choisir, le phosphore je crois;
ah oui, depuis que je viens ici j 'ai toujours un dico près de moi.
Amicalement.
jp - le rapport avec Judge Dredd, non je vois pas.
>
> costaclt
> C'est pas justement un 'argument' de Daniel-Fausto ça?
Oh non ! c'est beaucoup trop subtil pour lui...
Amicalement,
Henri - subtil
> Voire, "des" DFA. Car, amha, il y avait au moins deux personnes derrière
> l'ordinateur. Le dernier message à Tournier, c'était "Quand on ne peux
Ton orthographe est on ne peuT plus défaillante sur ce coup...
Amicalement,
Henri - peuh!
> Et on revient fondamentalement à ce mouvement de valse, mouvement
> complexe et ambigu : l'on y trouve souvent Eros et Thanatos
> intimement mêlés comme deux faces d'une même réalité (Sibelius,
> Berlioz, Chostakovitch). Images qui me viennent à l'esprit  : le
> tourbillon de l'eau de la bonde de la douche et de la vie qui fuit
> dans l'oeil de la femme qui se fait assassiner dans "Psychose", le
> Tourbillon chanté par Jeanne Moreau dans "Jules et Jim".
Dans les "Sentiers de la gloire" de Stanley Kubrick, les officier français
en 14-18 dansent sur des valses viennoises. C'est à Vienne, en haut de la
grande roue du Prater, qu'Orson Wells, le "3ème homme" parle de la mort.
Inoubliable musique d'Anton Karras.
-- 
Alain
Dvorak et la musique tchèque : http://www.musicabohemica.org/
Souvenirs des Carpates : http://perso.wanadoo.fr/alain.cf/musiqueroumaine/
> Ton orthographe est on ne peuT plus défaillante sur ce coup...
La netiquette interdit tout commentaire sur ce sujet.
costaclt
>Henri Tournier a écrit :
>
>
>> Ton orthographe est on ne peuT plus défaillante sur ce coup...
>
>La netiquette interdit tout commentaire sur ce sujet.
Arrète, c'est le seul traid de personalité propre a Henri:
"khonrrecteur ortografique". Lèsson lui aux moin sa ;-)))
Sébastien
-- 
Cordialement
G.H.
http://musibiol.net/musique
> Des poncifs pas très probants...
> On y cause de l'influence de Wagner sur l'orchestration brucknérienne.
> J'attends encore qu'on me montre où?? 
> D'un point de vue strictement analytique on peut franchement constater
> plus de différences que de parentés sur ce seul paramètre.
J'ai sous les yeux un bouquin "La musique symphonique" sous la dir de 
Tranchefort. La parenté Wagner/Bruckner est très marquée. Dès la 
première symphonie d'ailleurs. C'est vrai qu'il y a un mélange dans le 
texte entre le biographique (Bruckner ébloui par Wagner, lui dédiant la 
troisième symphonie, allant sur sa tombe au moment de la Neuvième etc.) 
et le musical.
> On peut dire qu'il y a une plus que 'vague ressemblence' entre eux en
> relevant chez l'un comme chez l'autre de grands 'thèmes cuivrés'. 
> Mais ça s'arrête là.
> Ce n'est parce que Bruckner utilise 4 "Wagner-Tuben" que ça en devient
> automatiquement du Wagner.
Du coup, me voilà reparti à écouter et à tenter de m'y repérer. J'ai 
beaucoup de mal jusqu'à la 5eme symphonie inclue. J'alterne avec les 
versions Wand, Karajan et Davis. Ce sont les versions Wand qui me pèsent 
le plus. Curieusement, jusqu'à la 5eme, j'entends davantage de Beethoven 
   que de Wagner...
Dès la 6eme, c'est surtout Wagner qui l'emporte jusqu'à la 9eme donc.
> Je pense que l'influence wagnérienne est plutôt observable sur le plan
> humain. Cette "amitié" a d'ailleurs valu à Bruckner des ennuis
> mémorables et regrettables avec la critique viennoise... 
C'est quoi cette histoire ?
> En français, je n'en connais pas.
> Langevin peut-être, mais bof... Ca date.
C'est très curieux. La bibiographie est vide alors que Bruckner a tout 
de même une certaine popularité. C'est Mahler qui a raflé la mise sur 
son passage ?
> Le phare de la symphonie viennoise? Tu déconnes là?
Non, le modèle général. Tout tourne autour de lui. C'est presque amusant 
: personnage détesté et souvent détestable, les autres compositeurs se 
positionnent par rapport à Wagner (et non par rapport à Verdi par 
exemple). Je n'ai pas encore lu de textes denses sur l'influence 
musicale de Verdi dans la musique du XXeme siècle. Sur Wagner, il n'y a 
que ça.
> Exactement.
> Wagner écrit une musique de mutation et de métamorphose permanente, il
> casse la périodicité (potentielle) de ses idées pour toujours glisser
> vers autre chose. En ça, Wagner annonce Debussy.
Là, je comprends mieux.
> Bruckner par contre évolue dans des carrures et une périodicité
> rythmique très proche d'un Beethoven dont il a hérité pourrait-on dire
> un aspect répétitif et têtu. Il expose des idées, revient dessus
> (développement, traitement des cellules et motifs), les réexpose.
C'est même labyrinthique comme façon de composer. Personnellement, c'est 
une gène dans l'écoute. Même la très populaire 5eme, je n'arrive pas 
toujours à voir où il veut en venir.
Je ne sais d'ailleurs pas si on peut évoquer un héritage post-bruckner. 
A part Mahler, et encore, le biographique risquant de tromper l'écoute.
> On parle des symphonies ou du Te Deum?
Bruckner ne voulait-il pas que le Te Deum soit placé à la fin de sa 9eme ?
> Et le rapport avec Bruckner symphoniste, je le vois toujours pas?
C'était juste une parenthèse au départ sur l'utilisation, par un 
cinéaste qui ne filmait que pour la décadence, de la 7eme de Bruckner 
(et qui aurait bien voulu utiliser d'autres symphonies si la Warner 
avait accepté)pour son cycle "décadence chez les allemands".
Personnellement, je n'avais jamais perçu Bruckner comme un décadent. Il 
y a une volonté de construction positive tout le temps. En revanche, à 
propos de la 9eme, tous les rappels qui sont faits sur les thèmes des 
oeuvres antérieures, cette façon - que moi j'entends - de se refixer sur 
  Wagner, me tentaient pour la décrire comme décadente, cette fameuse 
symphonie. De plus, elle me fait penser aux développements ultérieurs 
qu'on va trouver chez les gros décadents de l'Ecole de Vienne.
costaclt
> La netiquette interdit tout commentaire sur ce sujet.
Il est plaisant de te voir appeler la nétiquette à la rescousse quand ça
t'arrange bien...
Amicalement,
Henri
> Arrète, c'est le seul traid de personalité propre a Henri:
> "khonrrecteur ortografique". Lèsson lui aux moin sa ;-)))
Est-il bien nécessaire de te forcer ainsi ?
Amicalement,
Henri
Elodie
Moi, y a un truc qui me gêne, dans cette histoire de décadence: je ne vois
pas pourquoi on associe décadence et morbidité, si ce n'est parce que le fil
a été initié sur cette dualité par Elodie (elle n'y est pour rien, la pôvre,
c'est pratiquement un sujet imposé)..
Mais, personnellement, je ne vois pas ce qu'il peut y avoir de décadent à
regarder la mort en face. C'est le refus de la regarder qui me semble
décadent.
Du coup, je ne vois pas ce que la musique de l' école de Vienne peut avoir
d'intrinsèquement décadent. C'est *nous* et notre culture judéo-chrétienne
qui voyons de la décadence là-dedans.
Désolé mais moi, je ne vois *aucune* décadence chez Debussy, Berg ou Webern
(ou autres). De la complaisance morbide, oui, sans doute, mais de décadence,
point...
Jazzmicalement,
Jean Toulet - EtBoireUnPetitCoup,C'EstDécadent?
>J'ai sous les yeux un bouquin "La musique symphonique" sous la dir de 
>Tranchefort. La parenté Wagner/Bruckner est très marquée.
Où? Quel(s) passage(s? Dans quelle(s) symphonie(s)?
Je parle bien ici de stricte analyse et non pas de poncifs faciles
répétés et transmis en toute méconnaissance de cause ;-)
>Dès la première symphonie d'ailleurs.C'est vrai qu'il y a un mélange dans le 
>texte entre le biographique (Bruckner ébloui par Wagner, lui dédiant la 
>troisième symphonie, allant sur sa tombe au moment de la Neuvième etc.) 
>et le musical.
Mis à part l'hommage anecdotique à Wagner dans l'Adagio de la 7ème, je
n'en perçois aucun.
Pour moi, l'univers musical de Bruckner est "intrinsèquement" bien
plus proche de Schubert ou Beethoven, voire même de Dvorak.
Bruckner a quelque chose de plus direct et plus archaïque que Wagner,
ce dernier étant orchestralement beaucoup plus sophistiqué,
recherchant des effets de couleur ou de somptuosité assez raffinés.
C'est une musique qui établit et dépeint des paysages "psychologiques"
lié à l'action et aux personnages.
Bref, Wagner a composé la première musique de film, en fait ;-)
 
Bruckner est plus abstrait, absolu en un sens (il compose des "
symphonies "), principalement intéressé par la forme, l'architecture,
les développements, la force des harmonies, des progressions et du
discours. Beethovenien quoi!
>> On peut dire qu'il y a une plus que 'vague ressemblence' entre eux en
>> relevant chez l'un comme chez l'autre de grands 'thèmes cuivrés'. 
>> Mais ça s'arrête là.
>> Ce n'est parce que Bruckner utilise 4 "Wagner-Tuben" que ça en devient
>> automatiquement du Wagner.
>
>Du coup, me voilà reparti à écouter et à tenter de m'y repérer. J'ai 
>beaucoup de mal jusqu'à la 5eme symphonie inclue. J'alterne avec les 
>versions Wand, Karajan et Davis.
Karajan et Davis, je ne les recommanderais pas...
Wand avec Berlin ou le Ndr, j'aime beaucoup!
En revanche son tout premier enregistrement avec le Kölner Rundfunk je
le trouve assez brutal et indifférencié, l'orchestre prosaïque.
Pour la 5ème: Jochum/Emi, Abbado, van Beinum ou le dernier Harnoncourt
pourront peut-être enfin t'ouvrir les portes de l'oeuvre?
Mais, je ne sais pas si tu tiens compte des conseils discographiques
que je te donne? ;-)
Ca peut pourtant changer complètement la perception et l'éclairage sur
une oeuvre (cfr. Thomson and Bax for example)
Evidemment, les disques coûtent chers, mais tu dois bien avoir une
médiathèque pas trop désoeuvrée du côté de Marseille, non ? 
> Ce sont les versions Wand qui me pèsent 
> le plus. Curieusement, jusqu'à la 5eme, j'entends davantage de Beethoven 
> que de Wagner...
>Dès la 6eme, c'est surtout Wagner qui l'emporte jusqu'à la 9eme donc.
Oui, il y a une part de vrai en ce sens qu'à partir de la 6ème
symphonie, Bruckner affine son orchestration qui devient plus
luxuriante et souple. Disons plutôt que c'est son style qui évolue
sans pour autant se wagnériser car la structure des premières
symphonies reste bien présente dans les dernières. 
Il cherche à "séduire" Vienne la capricieuse, d'où son succès avec la
7ème...
>> Je pense que l'influence wagnérienne est plutôt observable sur le plan
>> humain. Cette "amitié" a d'ailleurs valu à Bruckner des ennuis
>> mémorables et regrettables avec la critique viennoise... 
>
>C'est quoi cette histoire ?
Tu ne connais pas ces histoires de querelles entre le 'clan' Wagner et
le 'clan' Brahms?
>> En français, je n'en connais pas.
>> Langevin peut-être, mais bof... Ca date.
>
>C'est très curieux. La bibiographie est vide alors que Bruckner a tout 
>de même une certaine popularité. C'est Mahler qui a raflé la mise sur 
>son passage ?
Non. 
Bruckner est sans doute trop moderne et génial pour les français
;-)))))
>> Le phare de la symphonie viennoise? Tu déconnes là?
>
>Non, le modèle général. 
Pour la symphonie? Certainement pas. Wagner n'a eu aucune influence
stylistique sur les grands symphonistes contemporains - s'entend
compositeurs 'de' symphonies : Schumann, Mendelssohn, Berlioz, Brahms,
Dvorak et... Bruckner.
>> Bruckner par contre évolue dans des carrures et une périodicité
>> rythmique très proche d'un Beethoven dont il a hérité pourrait-on dire
>> un aspect répétitif et têtu. Il expose des idées, revient dessus
>> (développement, traitement des cellules et motifs), les réexpose.
>
>C'est même labyrinthique comme façon de composer. Personnellement, c'est 
>une gène dans l'écoute. 
Ce n'est pas un labyrinthe, Bruckner emploie les formes classiques
héritées de Beethoven et Schubert, quelque peu élargies certes mais
pareilles: forme sonate, forme Lied, scherzo/trio.
En revanche, Mahler me semble moins clair formellement car beaucoup
plus éclaté et multidirectionnel.
>Même la très populaire 5eme,
La 5ème n'est pas "populaire" comme peuvent l'être la 4ème ou la 7ème.
Cette 5ème est, avec la 9ème, sa symphonie la plus difficile et
exigeante.
>je n'arrive pas toujours à voir où il veut en venir.
"La fin est dans le début" dixit Sergiu Celibidache
L'ascension de l'Himalaya ;-)
>Je ne sais d'ailleurs pas si on peut évoquer un héritage post-bruckner.
C'est normal qu'il n'y ait pas eu "d'héritage post-bruckner" immédiat
puisque cette musique a d'abord été sporadiquement livrée au public
pendant plusieurs décennies sous sa forme complètement déformée et
édulcorée (les 'versions' Schalk et Löwe, les 'bienveillants'
disciples)
On a seulement commencé à le découvrir véritablement, en gros, après
la seconde guerre mondiale.
>> On parle des symphonies ou du Te Deum?
>
>Bruckner ne voulait-il pas que le Te Deum soit placé à la fin de sa 9eme ?
Comme conclusion de substitution au cas il passerait l'arme à gauche
avant d'avoir achevé le vrai finale. Ce souhait n'est d'ailleurs
quasiment jamais respecté.
>> Et le rapport avec Bruckner symphoniste, je le vois toujours pas?
>
>C'était juste une parenthèse au départ sur l'utilisation, par un 
>cinéaste qui ne filmait que pour la décadence, de la 7eme de Bruckner 
>(et qui aurait bien voulu utiliser d'autres symphonies si la Warner 
>avait accepté) pour son cycle "décadence chez les allemands".
Donc, si je comprends bien, tu parlais plutôt de l'utilisation de la
musique de Bruckner dans un contexte cinématographique traitant un
sujet "décadent", mais pas de la musique de Bruckner à proprement
parler.
>Personnellement, je n'avais jamais perçu Bruckner comme un décadent. Il 
>y a une volonté de construction positive tout le temps. 
Exactement.
Sauf dans la 9ème, le style prend un tournant assez inattendu et
visionnaire, beaucoup plus ardu et austère, moins séduisant que les
7ème et 8ème symphonies. Avec cette 8ème, Bruckner est parvenu à
l'apogée de la symphonie "viennoise", la 9ème c'est par contre une
toute autre et nouvelle perspective...
>En revanche, à propos de la 9eme, tous les rappels qui sont faits sur les thèmes des 
>oeuvres antérieures, cette façon - que moi j'entends - de se refixer sur 
>Wagner, me tentaient pour la décrire comme décadente, cette fameuse 
>symphonie. 
Je n'y vois toujours pas plus l'ombre de Wagner que dans les autres...
J'y ressens plutôt un nouveau projet, une nouvelle ambition mais aussi
un doute, une lutte qui ne faisait pas l'objet des symphonies
précédentes. Cette 9ème est peut-être la plus " métaphysique " de ses
symphonies (voilà qui va plaire à Pol et Nique ta mère ;-)
>De plus, elle me fait penser aux développements ultérieurs 
>qu'on va trouver chez les gros décadents de l'Ecole de Vienne.
Préfigurateur, en quelque sorte...
Cependant Schönberg, Berg ou Webern connaissaient bien l'oeuvre
symphonique de Mahler, mais certainement pas celle de Bruckner.
Sébastien
> Il est plaisant de te voir appeler la nétiquette à la rescousse quand ça
> t'arrange bien...
Tu confonds chartre et netiquette.
costaclt
> Mais, personnellement, je ne vois pas ce qu'il peut y avoir de décadent à
> regarder la mort en face. C'est le refus de la regarder qui me semble
> décadent.
Mais justement : la décadence consiste à ne pas regarder la mort en 
face. En l'érotisant.
> Du coup, je ne vois pas ce que la musique de l' école de Vienne peut avoir
> d'intrinsèquement décadent. C'est *nous* et notre culture judéo-chrétienne
> qui voyons de la décadence là-dedans.
Il n'y a pas souhait de regarder les choses telles qu'elles sont (une 
mort "animale"). Il n'y a pas non plus la volonté de consolation par la 
bondieuserie. Il ne reste donc que l'érotisation. Chez Berg et Strauss 
particulièrement il me semble. Chez Mahler, c'est carrément une seconde 
nature.
> Désolé mais moi, je ne vois *aucune* décadence chez Debussy, Berg ou Webern
> (ou autres). De la complaisance morbide, oui, sans doute, mais de décadence,
> point...
Il faut envisager aussi le souhait de dépasser un mode de composition - 
l'Ecole de Vienne comme Debussy. Ils n'ont pas une postérité très forte. 
  Il me semble que c'est chez le moins décadent, Webern, que les 
compositeurs ont le plus cherché à développer leur inspiration. Le côté 
"décadent", c'est peut-être le regard a postériori qu'on peut porter sur 
leur (relatif) échec.
costaclt
Oh, quand même, dans les 3ème et 4ème symphonies, l'admiration de Dvorak
pour Wagner s'entend nettement.
>> Pour la symphonie? Certainement pas. Wagner n'a eu aucune influence
>> stylistique sur les grands symphonistes contemporains - s'entend
>> compositeurs 'de' symphonies : Schumann, Mendelssohn, Berlioz, Brahms,
>> Dvorak et... Bruckner.
>
>Oh, quand même, dans les 3ème et 4ème symphonies, l'admiration de Dvorak
>pour Wagner s'entend nettement.
???
J'aurais éventuellement,plutôt pensé aux deux premières symphonies.
N'y aurait-il pas confusion entre orchestration "cuivrée" - je veux
parler plus précisément de l'émancipation du groupe des trombones dans
l'orchestre romantique, et une réelle influence wagnérienne sur le
plan stylistique? 
Harmoniquement, les 4 premières symphonies de Dvorak sont encore assez
'simples', rudimentaires.
Je n'y retrouve pas les harmonies de Tannhaüser, de Lohengrin et
encore moins de Tristan?
A la rigueur j'y entends plutôt Carl Maria von Weber, voire même
peut-être Berlioz que Wagner.
Sébastien
> Moi, y a un truc qui me gêne, dans cette histoire de décadence: je ne vois
> pas pourquoi on associe décadence et morbidité
Ce qu'on a appelé la musique "décadente" (Entartete Musik) concerne 
celle écrite par des compositeurs sz la fin du XIXème-début du XXème 
siècle, juifs pour la plupart, interdits par les nazis, et dont la 
plupart ont fini leurs jours dans les camps de 
concentration/extermination...
Quelques rares d'entre eux sont parvenus à émigrer à l'étranger 
(Suisse, É-U)...
La "morbidité" a donc dans ce cas toutes les raisons d'y être associée 
! ...
Melmoth - décadent
> ???
> J'aurais éventuellement,plutôt pensé aux deux premières symphonies.
>
> N'y aurait-il pas confusion entre orchestration "cuivrée" - je veux
> parler plus précisément de l'émancipation du groupe des trombones dans
> l'orchestre romantique, et une réelle influence wagnérienne sur le
> plan stylistique?
Non. L'influence wagnérienne sur Dvorak en général et ces deux symphonies en
particulier, est depuis longtemps connue et étudiée par les musicologues
spécialistes de Dvorak, comme Otakar Sourek, Jarmil Burghauser, etc. et
Michael Beckerman aux États-Unis (dont je ne peux, une nouvelle fois, que
chaleureusement recommander les ouvrages). Ces deux oeuvres présentent des
références à Tannhäuser, Lohengrin, voire à Rienzi. Il faut rappeler que le
thème initial du finale de la 3ème symphonie reprend le thème principal de
l'opéra Le Roi et le Charbonnier, première version... une partition qui fut
précisément réécrite car jugée trop "wagnérienne" par son auteur. Quant à
l'Andante de la symphonie n° 4, il fait fichtrement penser, dans son thème
principal, à l'ouverture de Tannhäuser. Ouverture que Dvorak a joué quelques
années auparavant dans un orchestre dirigé par Wagner en personne...
Tout cela n'est pas un hasard. Ces oeuvres sont écrites à une époque (1870 -
1875) où l'influence de Wagner est omniprésente. Dvorak, parmi d'autres, est
fasciné par le génie allemand et la mélodie infinie... une fascination qui
s'entend aussi (et surtout ?) dans ses quatuors de jeunesse, expérimentaux
et surprenants.
Au sujet de la quatrième symphonie : à son mouvement lent délicat et
intensément lyrique succède un "allegro feroce" brutal et presque parodique,
une sorte de marche de village entêtante avec timables, cymbales et
sonorités grondeuses.
Question  : ce contraste violent me semble être, historiquement, la première
tentative d'écriture grotesque dans une symphonie romantique. Mahler est
encore loin... la symphonie de Dvorak date du début de 1874. Et je ne vois
rien de comparable chez les grands symphonistes d'avant cette époque. Y
a-t-il un historien de la musique dans le forum ?
>Non. L'influence wagnérienne sur Dvorak en général et ces deux symphonies en
>particulier, est depuis longtemps connue et étudiée par les musicologues
>spécialistes de Dvorak, comme Otakar Sourek, Jarmil Burghauser, etc. et
>Michael Beckerman aux États-Unis (dont je ne peux, une nouvelle fois, que
>chaleureusement recommander les ouvrages). Ces deux oeuvres présentent des
>références à Tannhäuser, Lohengrin, voire à Rienzi. Il faut rappeler que le
>thème initial du finale de la 3ème symphonie reprend le thème principal de
>l'opéra Le Roi et le Charbonnier, première version... une partition qui fut
>précisément réécrite car jugée trop "wagnérienne" par son auteur. 
Je reste totalement dubitatif concernant la 3ème symphonie...
J'ai réécouté Kertesz et ai trouvé cette musique vraiment très...
weberienne et pas du tout wagnérienne!
Ou alors effectivement le tout jeune Wagner de Rienzi et des Fées
influencé fortement par C M von Weber.
Les harmonies et modulations de cette symphonie sont encore très
'classiques'.
De plus, citation de thèmes ou de motifs d'un autre compositeur n'est
pas forcément synonyme de traitement similaire.
>Quant à l'Andante de la symphonie n° 4, il fait fichtrement penser, dans son thème
>principal, à l'ouverture de Tannhäuser. Ouverture que Dvorak a joué quelques
>années auparavant dans un orchestre dirigé par Wagner en personne...
Oui, en effet, pour le mouvement lent! 
J'avoue que je connaissais pas suffisamment bien cette symphonie, et
l'andante a en effet des 'airs' de Tannhaüser par les couleurs
orchestrales et certaines harmonies. Mais Dvorak semble s'essayer
plutôt maladroitement à reprendre certains 'clichés' et enchaînements
de Wagner. Je trouve que ça sent le jeune compositeur cherchant ses
marques... A partir de la 5ème symphonie il me semble que ces
'gaucheries expérimentales' ont disparues et que Dvorak a trouvé "son"
vrai style.
Les autres mouvements de la 4ème symphonie par contre ne m'ont pas
paru caractérisés par cette même 'influence' wagnérienne.
L'andante me semble être une exception. 
Qu'en dis-tu?
>Au sujet de la quatrième symphonie : à son mouvement lent délicat et
>intensément lyrique succède un "allegro feroce" brutal et presque parodique,
>une sorte de marche de village entêtante avec timables, cymbales et
>sonorités grondeuses.
>Question  : ce contraste violent me semble être, historiquement, la première
>tentative d'écriture grotesque dans une symphonie romantique. Mahler est
>encore loin... la symphonie de Dvorak date du début de 1874. Et je ne vois
>rien de comparable chez les grands symphonistes d'avant cette époque.
La Symphonie Fantastique de Berlioz.
Sébastien
> Je reste totalement dubitatif concernant la 3ème symphonie...
> J'ai réécouté Kertesz et ai trouvé cette musique vraiment très...
> weberienne et pas du tout wagnérienne!
> Ou alors effectivement le tout jeune Wagner de Rienzi et des Fées
> influencé fortement par C M von Weber.
> Les harmonies et modulations de cette symphonie sont encore très
> 'classiques'.
>
> De plus, citation de thèmes ou de motifs d'un autre compositeur n'est
> pas forcément synonyme de traitement similaire.
La question posée était celle de l'influence stylistique.
D'un éminent musicologue tchèque : "Dans ces compositions (du début des
années 1870) Dvorak s'est trouvé prisonnier de la magie de la musique de
Wagner qu'il connaissait bien. (...) Cette musique nouvelle enchanta
tellement Dvorak qu'il succomba momentanément à son influence. Dans la
troisième symphonie cet enchantement est très sensible".
D'André Lischké : "L'Allegro moderato initial, avec son mélange de véhémence
chevaleresque et de lyrisme, tient beaucoup de Lohengrin. (...) Le finale
Allegro vivace, vif et brillant, retouve Wagner, - avec des références,
aisément reconnaissables, à des fragments de Tannhäuser."
D'Harry Halbreich : "Témoin de la phase romantique et wagnérienne du
développement du compositeur (le finale comporte des allusions assez nettes
à Tannhäuser), l'oeuvre séduit par son ample lyrisme... Dans ce sain
déchaînement de joie dionysiaque, les allusions wagnériennes se mêlent aux
seuls accents véritablement tchèques que l'on puisse trouver dans cette
oeuvre (3ème symphonie) pleine de sève."
4ème symphonie :
> Oui, en effet, pour le mouvement lent!
ah, quand même !
> J'avoue que je connaissais pas suffisamment bien cette symphonie, et
> l'andante a en effet des 'airs' de Tannhaüser par les couleurs
> orchestrales et certaines harmonies. Mais Dvorak semble s'essayer
> plutôt maladroitement à reprendre certains 'clichés' et enchaînements
> de Wagner. Je trouve que ça sent le jeune compositeur cherchant ses
> marques... A partir de la 5ème symphonie il me semble que ces
> 'gaucheries expérimentales' ont disparues et que Dvorak a trouvé "son"
> vrai style.
> Les autres mouvements de la 4ème symphonie par contre ne m'ont pas
> paru caractérisés par cette même 'influence' wagnérienne.
> L'andante me semble être une exception.
> Qu'en dis-tu?
oui, moi aussi je ne perçois l'influence de Wagner que dans ce mouvement
lent.
>> Question  : ce contraste violent me semble être, historiquement, la
>> première tentative d'écriture grotesque dans une symphonie
>> romantique. Mahler est encore loin... la symphonie de Dvorak date du
>> début de 1874. Et je ne vois rien de comparable chez les grands
>> symphonistes d'avant cette époque.
>
> La Symphonie Fantastique de Berlioz.
Pour la musique à programme, sans doute... mais pour la symphonie en tant
que "musique pure" ?
> Où? Quel(s) passage(s? Dans quelle(s) symphonie(s)?
> Je parle bien ici de stricte analyse et non pas de poncifs faciles
> répétés et transmis en toute méconnaissance de cause ;-)
Dès que j'ai le temps, je scanne un bout de ce truc, tu me diras ce que 
tu en penses.
> C'est une musique qui établit et dépeint des paysages "psychologiques"
> lié à l'action et aux personnages.
> Bref, Wagner a composé la première musique de film, en fait ;-)
Je ressens cela aussi. Et en plus, ça m'est agréable :)
> Bruckner est plus abstrait, absolu en un sens (il compose des "
> symphonies "), principalement intéressé par la forme, l'architecture,
> les développements, la force des harmonies, des progressions et du
> discours. Beethovenien quoi!
Je ne sais pas pourquoi. J'ai vraiment des difficultés sur les 5 
premières symphonies en gros. Je me fixe sur le thème principal ou sur 
un thème séduisant, j'essaie de suivre le développement, mais je trouve 
ça tortueux.
En fait, je peux avoir le même problème avec Elgar (en moins rude 
toutefois). Je vais d'abord m'attacher au larghetto de la deuxième 
symphonie (d'ailleurs, il est de quelle inspiration ce larghetto ?)et je 
peine un peu sur les autres mouvements.
> Mais, je ne sais pas si tu tiens compte des conseils discographiques
> que je te donne? ;-)
> Ca peut pourtant changer complètement la perception et l'éclairage sur
> une oeuvre (cfr. Thomson and Bax for example)
> Evidemment, les disques coûtent chers, mais tu dois bien avoir une
> médiathèque pas trop désoeuvrée du côté de Marseille, non ? 
C'est surtout une question de temps et de disponibilité en stock. Je 
gare la bagnole, je fonce à la Fnac et je repars. En ce moment, Inbahl a 
du passer un accord de grande envergure avec la Fnac : il n'y a que lui 
qui trône pour Bruckner !
Davis, je l'aime bien. Je trouve ça très fluide. Bon, peut-être 
wagnérien justement. Wand, ça m'agace. Très haché. Il enfonce le clou 
sur les passages que justement je ne comprends pas chez Bruckner. La 
5eme, c'est le parcours du combattant.
> Tu ne connais pas ces histoires de querelles entre le 'clan' Wagner et
> le 'clan' Brahms?
Oui, j'ai eu peur que ça soit encore autre chose.
> Pour la symphonie? Certainement pas. Wagner n'a eu aucune influence
> stylistique sur les grands symphonistes contemporains - s'entend
> compositeurs 'de' symphonies : Schumann, Mendelssohn, Berlioz, Brahms,
> Dvorak et... Bruckner.
Je me rends compte de l'influence très forte des premières lectures. H. 
Barrault, Boulez : ca partait de Wagner et ensuite Debussy, Bartok, 
Stravinsky et l'Ecole de Vienne. Le reste n'existait pas. Boulez les 
vouait à l'enfer. Il ne les dirigeait même pas ou alors avec affichage 
de son dégoût (La Fantastique de Berlioz, la 10 eme de Mahler etc). J'ai 
plutôt suivi ce cheminement en gros.
> Donc, si je comprends bien, tu parlais plutôt de l'utilisation de la
> musique de Bruckner dans un contexte cinématographique traitant un
> sujet "décadent", mais pas de la musique de Bruckner à proprement
> parler.
Oui, c'était juste dans une parenthèse d'ailleurs.
> Cependant Schönberg, Berg ou Webern connaissaient bien l'oeuvre
> symphonique de Mahler, mais certainement pas celle de Bruckner.
Je ne me souviens pas avoir lu effectivement grand-chose là-dessus. Je 
me demande si dans la correspondance Adorno-Berg, ils n'en parlent pas 
au moins un peu de Bruckner.
Mahler parlait de Bruckner, l'Ecole de Vienne de Mahler mais il n'y a 
pas eu transitivité. Curieux. De Wagner par contre, ils en parlaient tous !
Dans le genre question idiote, j'en ai une bonne. Je crois que Bruckner 
n'a jamais entendu sa 5eme (ou une autre, peu importe, mais pas la 
dernière juste avant de claquer). Et il ne trouve personne pour la 
jouer. Comme Mahler avec sa 8eme je crois. Comment expliquer cette 
histoire de fou ?
costaclt
> Tu confonds chartre
Il y a à "ChartReS" une très belle cathédrale avec un très bel orgue, qui se
dresse au milieu des blés...
"Étoile de la mer voici la lourde nappe
Et la profonde houle et l'océan des blés
Et la mouvante écume et nos degrés comblés,
Voici votre regard sur cette immense chape..."
Pour "charte", c'est plutôt une école.
Amicalement,
Henri - nétiqueté
> Sébastien Letocart a écrit :
>
>> Bruckner ne 'vient' pas de Wagner mais de Haydn, Mozart et Beethoven. 
>
>
> Ben, je t'assure que je ne l'entends pas du tout comme ça. Du Wagner, 
> surtout du Wagner. 
Bruckner admire beaucoup Wagner et incorpore son influence mais 
construction, orchestration et
surtout inspiration lui restent propres.
>> Bruckner écrit des symphonies, de la musique "absolue" ayant pour
>> modèle la symphonie classique viennoise. Wagner est un littéraire et 
>> un intellectuel écrivant pour le théâtre.
>
> Wagner est le phare :)
Beethoven est le modèle. Mozart est l'origine de la formation musicale 
de Bruckner.
>> Tout les oppose stylistiquement, pourquoi les rapprocher?
>> Il n'y a pas plus de parenté entre Bruckner et Wagner qu'entre
>> Bruckner et Liszt.
>
>
> Moi, je l'entends comme ça. La 4eme, c'est pas du Wagner ?
>
Non, c'est du Bruckner.
>
>> La dimension "religieuse", je ne la perçois pas particulièrement en
>> écoutant cette musique. Ca ne m'a jamais frappé comme étant une
>> évidence incontournable.
>
La dimension religieuse est présente de manière très concrète à certains 
moments dans les symphonies
mais elle n'est pas une constante de tous les instants.
> C'est depuis le Te Deum que je me suis fait une fixette sur ça.
La musique religieuse de Bruckner contient en effet une certaine 
dimension religieuse.
>> Elle est sans doute moins "affirmative" que les symphonies
>> précédentes. 
>
La 9ème devait se terminer de facon tout aussi affirmative que les 
autres symphonies de Bruckner.
C'est la seule raison pour le choix du Te Deum comme finale de remplacement.
>> Cependant, la brèche est déjà ouverte dans la 8ème avec
>> son premier mouvement qui se termine dans la désolation d'une nuance
>> pianissimo et non plus dans un fff.
>
Le premier movement se termine de manière très affirmative dans la 
première version de
l'oeuvre (1887 - écouter Tintner chez Naxos). Un ami brucknérien voit 
dans cette conclusion
originale du 1er mvt l'idéalisation du triomphe plus relativisé de la 
fin de Finale.
Je ne trouve aucun aspect "fin de siècle" dans Bruckner.
Lionel Tacchini.
> Je ne trouve aucun aspect "fin de siècle" dans Bruckner.
Est-ce que tu perçois une progression continue chez Bruckner ? Dans le 
sens où il construit un dispositif dans la première (je n'évoque pas la 
symphonie 0) et le poursuit, de manière logique (un peu scientiste si on 
veut), jusqu'à la 9eme inclue ?
Personnellement, j'ai l'impression qu'il se passe quelque chose de 
violent à partir de la 6eme, et qu'une cassure intervient dans la 9eme.
Sinon, comment situer l'héritage de Bruckner ? Est-ce qu'on peut 
considérer qu'il offre une transition vers l'Ecole de Vienne ?
costaclt
Le schéma général de la symphonie chez Bruckner est dans ses grandes
lignes fixé dès le début:
I. Forme sonate trithématique
II. Forme 'Lied' A-B-A-B-A
III. Scherzo (forme sonate)/Trio/Scherzo da capo
IV. Forme sonate trithématique.
Le plan tonal des mouvements ne varie pas non plus.
>Personnellement, j'ai l'impression qu'il se passe quelque chose de 
>violent à partir de la 6eme,
De violent ou de radical, certainement pas.
Bruckner à partir de la 6ème passe d'une orchestration assez
tranchée et pragmatique à plus de souplesse.
Cette évolution est d'ailleurs aisément observable à travers les
différents états et révisions qu'a connu la 4ème symphonie.
>et qu'une cassure intervient dans la 9eme.
Oui, un tournant stylistique assez inattendu et très novateur.
>Sinon, comment situer l'héritage de Bruckner ? Est-ce qu'on peut 
>considérer qu'il offre une transition vers l'Ecole de Vienne ?
Non, puisque, comme il a déjà été dit, les trois viennois ne
connaissaient pas la musique de Bruckner, ou si peu...
La "transition" avec la seconde école de Vienne, si on tient
absolument à en déterminer une, passe par Mahler et le Strauss
d'Elektra et Salome.
Sébastien
>>> Elle est sans doute moins "affirmative" que les symphonies
>>> précédentes. 
>>
>La 9ème devait se terminer de facon tout aussi affirmative que les 
>autres symphonies de Bruckner.
Sa conclusion oui, mais le cheminement (les 3 mouvements achevés) vers
cette fin n'est pas aussi aisé et "affirmatif" que dans les symphonies
précédentes. 
La 9ème est pour moi une oeuvre de doute, de remise en question et de
conquête ardue.
Sébastien
>> De plus, citation de thèmes ou de motifs d'un autre compositeur n'est
>> pas forcément synonyme de traitement similaire.
>
>La question posée était celle de l'influence stylistique.
Précisément.
Il y a une différence fondamentale je pense entre "faire des citations
de..." tout en les traitant dans son style propre et, par contre, une
'véritable' influence qui est de l'ordre de l'appropriation de
mécanismes caractéristiques de la patte d'un autre compositeur afin de
les utiliser et les intégrer dans sa propre musique (ce qui est
manifestement le cas unique avec ce mvmt lent de la 4ème de Dvorak)
Pour en revenir à notre question initiale, on pourrait tout aussi bien
évoquer la mouture de 1873 de la 3ème symphonie de Bruckner émaillée
précisément de "citations" wagnériennes (surtout la Walkyrie) allant
même jusqu'à reprendre les enchaînements harmoniques de Wagner (fin du
développement du 1er mvmt par ex., cordes divisées, "le sommeil de
Brünhilde").
Cependant, même ici, l'orchestration et le contexte sont tellement si
différents (ne fus-ce que la cadre rythmique rigoureux tellement loin
des méandres wagnériens), tout cela est traité d'une manière si
authentiquement brucknérienne qu'il est vraiment difficile, malgré ces
indiscutables emprunts thématiques, d'y entendre, à proprement parler,
une "influence". On y entend plus volontiers Beethoven ou Schubert.
>D'un éminent musicologue tchèque : "Dans ces compositions (du début des
>années 1870) Dvorak s'est trouvé prisonnier de la magie de la musique de
>Wagner qu'il connaissait bien. (...) Cette musique nouvelle enchanta
>tellement Dvorak qu'il succomba momentanément à son influence. Dans la
>troisième symphonie cet enchantement est très sensible".
>
>D'André Lischké : "L'Allegro moderato initial, avec son mélange de véhémence
>chevaleresque et de lyrisme, tient beaucoup de Lohengrin. (...) Le finale
>Allegro vivace, vif et brillant, retouve Wagner, - avec des références,
>aisément reconnaissables, à des fragments de Tannhäuser."
>
>D'Harry Halbreich : "Témoin de la phase romantique et wagnérienne du
>développement du compositeur (le finale comporte des allusions assez nettes
>à Tannhäuser), l'oeuvre séduit par son ample lyrisme... Dans ce sain
>déchaînement de joie dionysiaque, les allusions wagnériennes se mêlent aux
>seuls accents véritablement tchèques que l'on puisse trouver dans cette
>oeuvre (3ème symphonie) pleine de sève."
Tous ces commentaires sont bien intéressants rejoignent en fait ce que
je viens d'exposer concernant la première mouture de la 3ème symphonie
de Bruckner.
Des trois auteurs que tu as cité ici, seul le premier me semble ne pas
faire de différence entre citation et influence.
Par contre Lischké ou Hallbreich utilisent plutôt des mots tels que
"références", "fragments", "allusions", bref des évocations de thèmes,
ou plutôt de bribes, motifs, cellules rappelant Tannhäuser (en effet,
le Finale de la 3ème, traits de violons évoquent la Bacchanale de
Tannhäuser) ou Lohengrin dont Dvorak fait une utilisation parcellaire
sentant plus l'hommage juvénile que l'influence viscérale. 
L'ombre de Brahms sur Dvorak est selon moi beaucoup plus marquante et
clairement identifiable techniquement.
>4ème symphonie :
>> Oui, en effet, pour le mouvement lent!
>
>ah, quand même !
Ben voui :-)
>> Les autres mouvements de la 4ème symphonie par contre ne m'ont pas
>> paru caractérisés par cette même 'influence' wagnérienne.
>> L'andante me semble être une exception.
>> Qu'en dis-tu?
>
>oui, moi aussi je ne perçois l'influence de Wagner que dans ce mouvement
>lent.
Ah, tiens donc!! ;-)
Ces quelques précisions dvorakiennes faites ne remettent cependant pas
en question ce que je disais initialement: Wagner a eut une
'influence' très limitée, voire même nulle sur ses principaux
contemporains symphonistes, et donc Bruckner.
Sébastien
>Dans le genre question idiote, j'en ai une bonne. Je crois que Bruckner 
>n'a jamais entendu sa 5eme (ou une autre, peu importe, mais pas la 
>dernière juste avant de claquer).
Bruckner a entendu sa 5ème symphonie interprétée par deux de ses
disciples en réduction pour deux pianos.
>Et il ne trouve personne pour la jouer. 
>Comme Mahler avec sa 8eme je crois. Comment expliquer cette 
>histoire de fou ?
Vois pas de quoi tu parles?
La 6ème peut-être? Dont on a joué du vivant de Bruckner que les deux
mouvements centraux.
La musique de Bruckner n'était pas forcément très apprécié par
l'orchestre Philharmonique de Vienne sans doute acquis à la cause
brahmsienne.
Sébastien
> Bruckner a entendu sa 5ème symphonie interprétée par deux de ses
> disciples en réduction pour deux pianos.
> Vois pas de quoi tu parles?
En fait de ça justement : je lis quelquefois que tel compositeur n'a 
jamais entendu telle ou telle de ses oeuvres. Bruckner, sa 5eme (ou 
alors seulement en réduction), Mahler et sa 8eme (il me semble...) etc.
Bon, c'est vrai que pour le 19eme, la symphonie, personne n'y croit plus 
tellement. Beethoven a écrasé le genre. Wagner en remet une couche en 
affirmant qu'on ne peut continuer sans ajoindre à la musique un autre 
art etc. Il semble que la fin du 19 eme, paradoxalement, ne mise pas une 
bille sur la symphonie, alors que a postériori, il sera plutôt apprécié 
pour ses symphonies.
Mais voila : comment expliquer à la fois le relatif succès d'un 
compositeur et le fait qu'il ne parvienne même pas à faire créer une de 
ses symphonies ? Bruckner a du succès avec sa 4eme. Et la cinquième, il 
ne l'entendra jamais !
C'était une histoire de pognon ?
costaclt
> Semblant...
Bon, on s'en fout un peu (j'ai mangé trop de boeuf, c'est tout).
Ca ne répond pas à ma question.
Au fait, c'est laquelle que Mahler n'a jamais entendu ?
costaclt
>Au fait, c'est laquelle que Mahler n'a jamais entendu ?
Les deux dernières...
Sébastien
>Bon, c'est vrai que pour le 19eme, la symphonie, personne n'y croit plus 
>tellement. 
?? 
La symphonie était, avec le quaturor à cordes, considérée comme la
forme d'expression la plus élevée de la pensée musicale. *
>Beethoven a écrasé le genre.
A fait "fleurir" le genre, plutôt. 
A combien de compositeurs a-t-il donné l'envie de poursuivre le genre
à ton avis?
>Wagner en remet une couche en affirmant qu'on ne peut continuer sans 
>ajoindre à la musique un autre art etc.
Wagner a dit ça parce qu'il n'a pas été un grand symphoniste.
Brahms et Bruckner ont prouvé le contraire.
 
>Il semble que la fin du 19 eme, paradoxalement, ne mise pas une 
>bille sur la symphonie, alors que a postériori, il sera plutôt apprécié 
>pour ses symphonies.
Voir ma réponse plus haut... *
>Mais voila : comment expliquer à la fois le relatif succès d'un 
>compositeur et le fait qu'il ne parvienne même pas à faire créer une de 
>ses symphonies ? Bruckner a du succès avec sa 4eme. Et la cinquième, il 
>ne l'entendra jamais !
Le succès de la 4ème était, comme tu l'as dis, on ne peut plus
"relatif"...
C'est à partir de la 7ème qu'une certaine reconnaissance, plus solide,
semble enfin naître. 
Ce qui n'empêchera pas par après des déboires avec Hermann Levi le
chef qui rejetta la 8ème symphonie...
>C'était une histoire de pognon ?
Pour Bruckner, c'était surtout une question de "bataille" idéologique
et esthétique dans laquelle, je l'ai déjà signalé, il a été embarqué
malgré lui à cause de sa sympathie ouverte pour Wagner. 
D'où l'attitude du Philharmonique de Vienne taxant sa musique
"d'injouable" ou, lorsque malgré cela une symphonie était enfin créée,
les invectives monstrueuses et imbéciles des critiques de l'époque
(Edouard Hanslick en tête)
Ai-je répondu à ta question?
Sébastien
Sébastien:
> A fait "fleurir" le genre, plutôt. 
> A combien de compositeurs a-t-il donné l'envie de poursuivre le genre
> à ton avis?
Costaclt:
>> Wagner en remet une couche en affirmant qu'on ne peut continuer sans 
>> ajoindre à la musique un autre art etc.
Sébastien:
> Wagner a dit ça parce qu'il n'a pas été un grand symphoniste.
> Brahms et Bruckner ont prouvé le contraire.
Wagner a composé au moins une symphonie, je l'ai découverte il ya peu 
sur un CD apex. Je ne me suis pas senti obligé de l'écouter une seconde 
fois. Cependant peut-être ai-je été trop superficiel: je lis dans le 
livret:
"la Symphonie en ut majeur de Wagner est l'un des témoignage du culte 
qu'il (Wagner) vouait à Beethoven. C'est au cours de l'été 1832, alors 
qu'il venait tout juste de fêter ses dix-neuf ans, que Wagner s'attela 
à cette page symphonique.[...] Concue en 4 mouvements, la Symphonie en 
ut majeur s'ouvre par une introduction lente dont les premiers coups 
laissent clairement percevoir ce qu'elle doit à Beethoven. Le deuxième 
mouvement, doté d'une veine mélodique ressemblant aux mouvements lents 
des Cinquième et Septième Symphonies de Beethoven, témoigne de l'impact 
de son mentor. Wagner admettait lui-même que ce mouvement n'aurait 
jamais vu le jour sans ces deux mouvements lents de Beethoven.[...) Le 
finale se teinte des couleurs tant mozartiennes que beethovéniennes. On 
y découvre aussi une gaîté qui rappelle plutôt cet autre contemporain 
de Wagner, Félix Mendelssohn."
c'est signé Kimo Korhonen
à ma seule écoute, je n'ai pas entendu tout cela, je n'étais peut-être 
pas assez attentif...
Meledor, en revenant de Nantes
-- 
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> Précisément.
> Il y a une différence fondamentale je pense entre "faire des citations
> de..." tout en les traitant dans son style propre et, par contre, une
> 'véritable' influence qui est de l'ordre de l'appropriation de
> mécanismes caractéristiques de la patte d'un autre compositeur afin de
> les utiliser et les intégrer dans sa propre musique (ce qui est
> manifestement le cas unique avec ce mvmt lent de la 4ème de Dvorak)
Précisément.
Tu parlais d'influence stylistique sans plus de précision. Le style
d'écriture de Dvorak a-t-il été influencé par Wagner dans cette période, qui
a vu naître les symphonies 3 et 4, oeuvres qui portent l'empreinte de cette
influence ? Toutes les études que j'ai pu consulter à ce sujet disent que
oui. Si tu m'en montres une qui dit l'inverse je serai très vivement
intéressé. Donc, jusqu'à preuve du contraire, influence wagnérienne il y a.
> Tous ces commentaires sont bien intéressants rejoignent en fait ce que
> je viens d'exposer concernant la première mouture de la 3ème symphonie
> de Bruckner.
>
> Des trois auteurs que tu as cité ici, seul le premier me semble ne pas
> faire de différence entre citation et influence.
Toutes ces citations vont dans le même sens : Dvorak était subjugué par
l'art de Wagner, son écriture s'en ressent, à la fois par l'emprunt de
thèmes et son style de l'époque. T'en veux une autre ? je tends la main,
prends un bouquin au hasard, j'ouvre au pif et paf ! sur quoi je tombe ?
"... Dvorak est certes influencé aussi ... par l'art wagnérien à travers
certaines mélodies sans fin de la 3ème symphonie.". Influencé. Wagner. 3ème
symphonie. Tout y est, n'oubliez pas votre monnaie, nous remercions au
passage Marie-Claire Beltrando-Patier et son Histoire de la Musique,
collection Marc Honegger, Bordas, disponible chez moi sur la petite étagère
près du PC.
> Par contre Lischké ou Hallbreich utilisent plutôt des mots tels que
> "références", "fragments", "allusions", bref des évocations de thèmes,
> ou plutôt de bribes, motifs, cellules rappelant Tannhäuser (en effet,
> le Finale de la 3ème, traits de violons évoquent la Bacchanale de
> Tannhäuser) ou Lohengrin dont Dvorak fait une utilisation parcellaire
> sentant plus l'hommage juvénile que l'influence viscérale.
Non, c'est bien plus qu'un hommage : Dvorak était fou de la musique de
Wagner, c'est très clair dans le premier extrait que j'ai cité. Les deux
autres ne font que confirmer un fait notoire. Au passage, un simple coup
d'oeil sur la correspondance de cette époque nous révèle l'admiration de
Dvorak pour la "nouvelle musique" et Franz Liszt.
> L'ombre de Brahms sur Dvorak est selon moi beaucoup plus marquante et
> clairement identifiable techniquement.
C'est un autre sujet. Là aussi bien des études existent qui parlent de
l'influence réciproque entre Brahms et Dvorak. Mais cela ne retire rien à
l'influence de Wagner.
>> 4ème symphonie :
>>> Oui, en effet, pour le mouvement lent!
>>
>> ah, quand même !
>
> Ben voui :-)
Dont acte.
>>> Les autres mouvements de la 4ème symphonie par contre ne m'ont pas
>>> paru caractérisés par cette même 'influence' wagnérienne.
>>> L'andante me semble être une exception.
>>> Qu'en dis-tu?
>>
>> oui, moi aussi je ne perçois l'influence de Wagner que dans ce
>> mouvement lent.
>
> Ah, tiens donc!! ;-)
... et ce seul fait suffit à contredire ta phrase comme quoi il n'y aurait
eu (je cite) "aucune influence stylistique".
> Ces quelques précisions dvorakiennes faites ne remettent cependant pas
> en question ce que je disais initialement: Wagner a eut une
> 'influence' très limitée, voire même nulle sur ses principaux
> contemporains symphonistes, et donc Bruckner.
Sauf que ce n'est pas ce que tu disais initialement : entre "aucune
influence" et "influence très limitée" il y a un monde... voire un Nouveau
Monde.
>> Précisément.
>> Il y a une différence fondamentale je pense entre "faire des citations
>> de..." tout en les traitant dans son style propre et, par contre, une
>> 'véritable' influence qui est de l'ordre de l'appropriation de
>> mécanismes caractéristiques de la patte d'un autre compositeur afin de
>> les utiliser et les intégrer dans sa propre musique (ce qui est
>> manifestement le cas unique avec ce mvmt lent de la 4ème de Dvorak)
>
>Précisément.
>Tu parlais d'influence stylistique sans plus de précision. 
Ce n'est pas exact. 
Mon propos initial partait de la relation entre Wagner et Bruckner,
autrement dit, déterminer si Bruckner avait été fondamentalement et
donc stylistiquement influencé par Wagner. Ce que je nie
impertubablement.
>Le style d'écriture de Dvorak a-t-il été influencé par Wagner dans cette période, qui
>a vu naître les symphonies 3 et 4, oeuvres qui portent l'empreinte de cette
>influence ? Toutes les études que j'ai pu consulter à ce sujet disent que
>oui. Si tu m'en montres une qui dit l'inverse je serai très vivement
>intéressé. Donc, jusqu'à preuve du contraire, influence wagnérienne il y a.
Non. C'est faux. 
Dvorak cite Wagner, en fait une sorte de pastiche unique et plutôt
malhabille dans le mouvement lent de sa 4ème symphonie, mais il n'y a
pas plus d'influence wagnérienne chez Dvorak que chez Bruckner, et
pourtant l'un comme l'autre l'admiraient profondément.
Il suffit pour cela d'ouvrir ses oreilles, et se faisant, tu reconnais
toi-même ne le percevoir "que" dans l'andante de la 4ème symphonie...
Nombre de musicologues ont écrit sur Bruckner en simplifiant et sans
faire parfois des nuances importantes, pourquoi pas aussi pour Dvorak?
Influence stylistique signifie bien plus que citer un thème ou
reprendre quelques bribes ou gestes d'un autre compositeur. 
Ce que j'appelle influence stylistique, à "proprement parler", c'est,
par exemple, entendre combien Haydn et Mozart suittent dans les l'op.
18 de Beethoven. 
Là, grammaticalement, il s'agit indiscutablement "d'influences
stylistiques", car pleinement digérées et réintégrées au langage.
>> Des trois auteurs que tu as cité ici, seul le premier me semble ne pas
>> faire de différence entre citation et influence.
>
>Toutes ces citations vont dans le même sens : 
Oui, dans le sens de l'admiration pour.. pas de l'influence. 
Pour tout dire, on en train d'ergoter sur la signification précise du
mot "influence" en musique.
>Dvorak était subjugué par l'art de Wagner, son écriture s'en ressent, 
>à la fois par l'emprunt de thèmes et son style de l'époque.
Hormis ce fameux mvmt lent de la 4ème, je ne trouve pas "du tout".
>> Par contre Lischké ou Hallbreich utilisent plutôt des mots tels que
>> "références", "fragments", "allusions", bref des évocations de thèmes,
>> ou plutôt de bribes, motifs, cellules rappelant Tannhäuser (en effet,
>> le Finale de la 3ème, traits de violons évoquent la Bacchanale de
>> Tannhäuser) ou Lohengrin dont Dvorak fait une utilisation parcellaire
>> sentant plus l'hommage juvénile que l'influence viscérale.
>
>Non, c'est bien plus qu'un hommage : Dvorak était fou de la musique de
>Wagner, c'est très clair dans le premier extrait que j'ai cité. Les deux
>autres ne font que confirmer un fait notoire. Au passage, un simple coup
>d'oeil sur la correspondance de cette époque nous révèle l'admiration de
>Dvorak pour la "nouvelle musique" et Franz Liszt.
Tu me parles à nouveau de l'admiration de Dvorak pour Wagner - ce que
je n'ai jamais contesté; mais pas fondamentalement d'infuences
stylistiques.
>>> oui, moi aussi je ne perçois l'influence de Wagner que dans ce
>>> mouvement lent.
>>
>> Ah, tiens donc!! ;-)
>
>... et ce seul fait suffit à contredire ta phrase comme quoi il n'y aurait
>eu (je cite) "aucune influence stylistique".
Contredire, non; étant donné que cela relève de l'anecdotique et de
l'exception.
J'ai en effet recalibré et renuancé ma phrase parce que au moment où
j'écrivais "aucune influence stylistique chez..." pour Dvorak je
songeais surtout aux symphonies de maturité n°5 à 9, n'ayant pas eu de
souvenir vraiment estomaqué de wagnérisme débordant dans les 4
premières. 
Après réécoute plus attentive, seule la 4ème symphonie fait donc
épisodiquement exception...
Sébastien
> La symphonie était, avec le quaturor à cordes, considérée comme la
> forme d'expression la plus élevée de la pensée musicale. *
Pas pour les compositeurs. Après Beethoven, c'est panique à bord.
Schubert n'ose pas. Ses premières symphonies sont du classicisme bon teint.
Schumann, ben il n'y arrive pas non plus. Même ses adorateurs 
reconnaissent qu'il n'est pas à l'aise du tout.
Mendelsohnn, ça ne marche pas non plus (il le reconnaît lui-même !).
Brahms, je crois qu'il attend au moins 20 ou 25 ans avant d'en tenter une.
Berlioz, on ne sait plus trop si c'est du poème symphonique, de l'opéra 
déguisé.
Avec ça, Wagner déclare en gros la symphonie morte. Pour ne pas parler 
de l'oeuvre d'art totale (ce qui fusille l'opéra italien au passage) 
chère à ses yeux.
Paradoxalement, c'est grâce à Wagner que Mahler et Bruckner, enfin il me 
semble, vont relever le gant. Déjà, sur la longeur ;)
> A fait "fleurir" le genre, plutôt. 
> A combien de compositeurs a-t-il donné l'envie de poursuivre le genre
> à ton avis?
Sur le genre "symphonique" ? A la fois à tous (tout le monde rêvait de 
continuer) et à personne : comment atteindre sa cheville ? Je ne vois 
que les Bruckner/Mahler pour tenter le coup, mais en passant par Wagner. 
  Je ne dis pas qu'ils vont forcément adopter le style de Wagner (mais 
j'ai des doutes sur certaines symphonies de Bruckner), mais il est 
certain que le discours de Wagner sur la musique est incontournable pour 
eux.
Pour imager, je me suis toujours fait une idée de Wagner comme étant un 
Boulez avant la lettre : un idéologue dont le talent est incontestable, 
un homme qui sait ce qu'est le pouvoir, et enfin un poseur d'anathèmes 
qui vont, pendant un certain temps, verrouiller le système sous prétexte 
de le libérer.
> Wagner a dit ça parce qu'il n'a pas été un grand symphoniste.
> Brahms et Bruckner ont prouvé le contraire.
Ils ont été très contestés l'un et l'autre, à leur époque (et peut-être 
  encore maintenant). Ils ne se comprenaient pas d'ailleurs (cf leur 
fameux déjeuner). Je crois que le clan d'Indy ne les supportait pas 
d'ailleurs ?
Dans le contexte de l'époque, je crois que Wagner était simplement bien 
plus malin. Il savait que les autres compositeurs ne tiendraient pas le 
choc pour continuer après Beethoven. Plutôt que de tenter le coup, il 
s'est jeté sur l'opéra. Lizst par exemple : question symphonies, ça ne 
se bouscule pas. C'est plutôt le concerto qui est peut-être un terrain 
moins écrasé par Beethoven. (Ecrasé de son talent, j'entends...).
>>Il semble que la fin du 19 eme, paradoxalement, ne mise pas une 
>>bille sur la symphonie, alors que a postériori, il sera plutôt apprécié 
>>pour ses symphonies.
Je cherche des stats, mais il semblerait que le siècle le plus 
anecdotique pour le nombre de symphonies, c'est bien le 19eme. Le 18 et 
le 20 eme ont le dessus. En revanche, il est vrai que dans les bacs des 
disquaires, ça ne se voit pas trop pour le 20eme.
> Pour Bruckner, c'était surtout une question de "bataille" idéologique
> et esthétique dans laquelle, je l'ai déjà signalé, il a été embarqué
> malgré lui à cause de sa sympathie ouverte pour Wagner. 
> D'où l'attitude du Philharmonique de Vienne taxant sa musique
> "d'injouable" ou, lorsque malgré cela une symphonie était enfin créée,
> les invectives monstrueuses et imbéciles des critiques de l'époque
> (Edouard Hanslick en tête)
> Ai-je répondu à ta question?
Oui. Je l'avais oublié le terrible Hanslick !
costaclt
>>Le style d'écriture de Dvorak a-t-il été influencé par Wagner dans cette période, qui
>>a vu naître les symphonies 3 et 4, oeuvres qui portent l'empreinte de cette
>>influence ? Toutes les études que j'ai pu consulter à ce sujet disent que
>>oui. Si tu m'en montres une qui dit l'inverse je serai très vivement
>>intéressé. Donc, jusqu'à preuve du contraire, influence wagnérienne il y a.
> Non. C'est faux. 
> Dvorak cite Wagner, en fait une sorte de pastiche unique et plutôt
> malhabille dans le mouvement lent de sa 4ème symphonie, mais il n'y a
> pas plus d'influence wagnérienne chez Dvorak que chez Bruckner, et
> pourtant l'un comme l'autre l'admiraient profondément.
Vous allez finir par me faire faire des frais tous les deux !
Je ne connais pratiquement pas Dvorak, je le voyais comme un optimiste 
irritant. J'ai aperçu un coffret Brillant sur Dvorak : ça vaut le coup 
pour commencer ?
costaclt
> Ce n'est pas exact.
> Mon propos initial partait de la relation entre Wagner et Bruckner,
> autrement dit, déterminer si Bruckner avait été fondamentalement et
> donc stylistiquement influencé par Wagner. Ce que je nie
> impertubablement.
Sans doute, sans doute.
Résumé de l'affaire : c'est la phrase à l'origine de nos échanges, je cite
"Wagner n'a eu aucune influence stylistique sur les grands symphonistes
contemporains - s'entend compositeurs 'de' symphonies : Schumann,
Mendelssohn, Berlioz, Brahms, Dvorak et... Bruckner."
que j'ai quotée et discutée, et que ma part j'estime comme étant fausse,
étant donné qu'il existe au moins un exemple d'influence stylistique,
reconnue comme telle dans la littérature (voir épisodes précédents). Une
pointe de nuance dans la formulation, comme tu l'as fait récemment (où tu
parles "d'influence très limitée" au lieu d' "aucune influence") est très
bienvenue.
>> Le style d'écriture de Dvorak a-t-il été influencé par Wagner dans
>> cette période, qui a vu naître les symphonies 3 et 4, oeuvres qui
>> portent l'empreinte de cette influence ? Toutes les études que j'ai
>> pu consulter à ce sujet disent que oui. Si tu m'en montres une qui
>> dit l'inverse je serai très vivement intéressé. Donc, jusqu'à preuve
>> du contraire, influence wagnérienne il y a.
>
> Non. C'est faux.
Je serai prêt à te croire le jour où tu m'auras convaincu avec cette preuve
du contraire que je sollicite : une étude musicologique qui démontre
l'absence d'influence de Wagner sur Dvorak.
> Dvorak cite Wagner, en fait une sorte de pastiche unique et plutôt
> malhabille dans le mouvement lent de sa 4ème symphonie, mais il n'y a
> pas plus d'influence wagnérienne chez Dvorak que chez Bruckner, et
> pourtant l'un comme l'autre l'admiraient profondément.
Comparaison n'est pas raison. Ce qui est peut-être vrai pour Bruckner ne
l'est pas pour Dvorak.
> Il suffit pour cela d'ouvrir ses oreilles, et se faisant, tu reconnais
> toi-même ne le percevoir "que" dans l'andante de la 4ème symphonie...
Je n'ai jamais dit autre chose sur cette symphonie, et cela suffit à
contredire ton affirmation initiale (bis).
> Nombre de musicologues ont écrit sur Bruckner en simplifiant et sans
> faire parfois des nuances importantes, pourquoi pas aussi pour Dvorak?
N'est-ce pas plus simple de penser que tous les musicologues ayant étudié le
dossier sont parvenus à la même conclusion ?
> Oui, dans le sens de l'admiration pour.. pas de l'influence.
> Pour tout dire, on en train d'ergoter sur la signification précise du
> mot "influence" en musique.
Peut-être as-tu une acception trop restrictive du mot "influence", car
l'extrait de l'Histoire de la Musique cité dans mon précédent message
(Wagner  - influence - 3ème symphonie de Dvorak) est d'une absolue clarté.
Allez, rien que pour toi, encore une citation : "le langage wagnérien est en
effet perceptible dans les symphonies (du jeune Dvorak)".
C'est Milan Slavicky qui a écrit ça. On peut penser que ce monsieur est dans
l'erreur depuis toujours, qu'il n'a jamais ouvert ses oreilles, que la bière
de Pilsen, les Becherovka de fin de soirée et les jolies blondes de la place
Venceslas ont définitivement altéré son ouïe, sa mémoire, ses facultés de
discernement et de raisonnement. Ou bien on peut aussi penser que ce
monsieur est l'une des plus grandes personnalités musicales de Bohême, qu'il
jouit d'un immense respect en tant que professeur, compositeur et
musicologue, qu'il est régulièrement invité à maintes manifestations
musicales à travers le monde, qu'il connaît son Wagner et son Dvorak
infiniment mieux que toi, moi et bien des intervenants de ce forum réunis,
et que lorsqu'il écrit pareille chose, ce n'est peut-être pas la dernière
des âneries.
>> Dvorak était subjugué par l'art de Wagner, son écriture s'en ressent,
>> à la fois par l'emprunt de thèmes et son style de l'époque.
>
> Hormis ce fameux mvmt lent de la 4ème, je ne trouve pas "du tout".
Mais ça viendra, j'en suis sûr. Il faudrait aussi parler de l'influence
wagnérienne dans la musique de chambre... les opéras... et j'en oublie...
> Tu me parles à nouveau de l'admiration de Dvorak pour Wagner - ce que
> je n'ai jamais contesté; mais pas fondamentalement d'infuences
> stylistiques.
L'une est à l'origine de l'autre. On aurait certes plus de mal à comprendre
l'influence de Wagner sur Dvorak si ce dernier avait dit pis que pendre de
l'Allemand, ou si cela était un épisode unique dans sa carrière. Or c'est
tout l'inverse.
> Contredire, non; étant donné que cela relève de l'anecdotique et de
> l'exception.
Peu importe cela, il suffisait d'un seul contre-exemple pour contedire ton
affirmation, et le mouvement lent de la 4ème symphonie est ce
contre-exemple.
> J'ai en effet recalibré et renuancé ma phrase parce que au moment où
> j'écrivais "aucune influence stylistique chez..." pour Dvorak je
> songeais surtout aux symphonies de maturité n°5 à 9, n'ayant pas eu de
> souvenir vraiment estomaqué de wagnérisme débordant dans les 4
> premières.
Oh, débordant ou pas, ce n'est pas la question.
> Après réécoute plus attentive, seule la 4ème symphonie fait donc
> épisodiquement exception...
Puisque cela est déjà acquis (en attendant mieux), je soumets à ta réflexion
ce passage :
"Bien que les biographes de Dvorak parlent du wagnérisme comme si c'était
une maladie redoutable dont le compositeur n'a pu échapper que petit à
petit, il est clair qu'il n'y a jamais échappé. En effet, nous verrons que
les graines plantées dans les années 1860 ont servi de base à la dernière
décennie de sa vie."
C'est dans le livre "New worlds of Dvorak". Plein de choses intéressantes
sur Dvorak, ses influences (dont Wagner, donc), son séjour américain.
L'auteur, Michael Beckerman, est professeur de musique à l'Université de New
York. Il est l'auteur de plus de cent publications. On opeut acheter les
yeux fermés, je rembourse si pas satisfait. (*)
-- 
Alain
Dvorak et la musique tchèque : http://www.musicabohemica.org/
Souvenirs des Carpates : http://perso.wanadoo.fr/alain.cf/musiqueroumaine/
(*) offre valable ce jour, jusqu'à 22:19
P.
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"Paul & Mick Victor" <b.suisseVo...@wanadoo.fr> a écrit dans le 
message de news: 4202a39f$0$19404$8fcf...@news.wanadoo.fr...
> "Élodie GADEN" <elodie...@free.fr> a écrit dans le message de news: 
> 42029446$0$27248$626a...@news.free.fr...
>> J'avais aussi quelque envie d'aller chercher du côté de Wagner avec le
>> Crépuscule des Dieux (le thème du renoncement) et la récupération de
>> Nietzsche (celui-ci a des thèses peut-être comparables à celles de
>> Schopenhauer).
>
> Pour la récupération de Nietzsche, tu peux aller voir du côté de "Ainsi 
> parlait Zarathoustra" de  Richard Strauss... Et puis faire un détour par 
> Mort et Transfiguration. Pour décader, ça décade...
> -----
> Paul & Mick Victor
> surhomme
> 
C'est gentil de revenir faire un tour parmi nous, ça faisait longtemps qu'on 
n'avait pas eu la triste occasion de lire tes khonneries, dunoeud.
-----
Paul & Mick Victor
accueillant
> Vous allez finir par me faire faire des frais tous les deux !
>
> Je ne connais pratiquement pas Dvorak, je le voyais comme un optimiste
> irritant.
et alors quoi, l'optimisme t'irrite peut-être ? pfeuh. Tu ne sais pas ce que
tu manques. Et puis tout n'est pas "optimiste" chez Dvorak. Tu entendras
plein de marches funèbres (eh oui), des oeuvres très noires (la cantate les
Chemises de Noces, l'ouverture Othello, des poèmes symphoniques, l'opéra
Rusalka...). Quant à l'optimisme il n'est jamais "béat" si c'est cela qui te
rebute.
> J'ai aperçu un coffret Brillant sur Dvorak : ça vaut le coup
> pour commencer ?
ben tu sais les coffrets, c'est pas mal mais c'est toi qui vois... le danger
est de commencer à écouter quelques CD et de laisser tomber le reste.
Maintenant vu les prix de chez Brilliant, pourquoi pas. Ya quoi dans ce
coffret ? les quatuors par les Stamitz j'imagine ? oui, bien. Les symphonies
par Kosler / Menuhin / P. Järvi ? Honnête. Quoi d'autre ? quel prix ?
> et alors quoi, l'optimisme t'irrite peut-être ? pfeuh. Tu ne sais pas ce que
> tu manques. Et puis tout n'est pas "optimiste" chez Dvorak. Tu entendras
> plein de marches funèbres (eh oui), des oeuvres très noires (la cantate les
> Chemises de Noces, l'ouverture Othello, des poèmes symphoniques, l'opéra
> Rusalka...). Quant à l'optimisme il n'est jamais "béat" si c'est cela qui te
> rebute.
Comme quoi, le stéréotype peut attaquer très tôt dans la vie. Je me 
souviens des "cours" au collège. Dvorak était torché en 5 mn. On nous 
mettait "Le nouveau monde" et basta. Déjà, entre les chants à la con, la 
flûte à bec et les concours de pets, Beethoven avait du mal à se faire 
entendre...
Ensuite, je n'ai plus trouvé de références à Dvorak dans ce que je 
lisais ou écoutais (Boulez-Xenakis-Stockhausen-Kagel et Ecole de Vienne, 
Mahler, Wagner, en gros).
Donc, stérétoytpe : Dvorak, musicien de second ordre, la bonne humeur 
niaise mise en musique.
> ben tu sais les coffrets, c'est pas mal mais c'est toi qui vois... le danger
> est de commencer à écouter quelques CD et de laisser tomber le reste.
En fait, le coffret est pratique car il propose une floppée de disques 
(je crois qu'il y en a 40), ce qui permet aussi quand on lit un ouvrage 
d'être à peu près sûr de pouvoir s'écouter la référence en question. Je 
voulais juste savoir pour la qualité (j'ai été assez déçu par celui sur 
Mozart).
Bon, une petite question au passage. La symphonie du "Nouveau Monde" : 
est-ce qu'on peut affirmer qu'il est réellement fait référence à un 
programme ? Ou disons, à une musique "descriptive".
On a accusé Bruckner (et Mahler, bien entendu encore davantage), de 
faire de temps en temps de la musique "à programme" ou 
"autobiographique". Sous prétexte qu'ils pouvaient donner un sous-titre 
évocateur.
Pourtant, si on ne le sait pas, ça ne me paraît pas toujours évident de 
deviner si la musique est "pure" ou "à programme". Si elle est "absolue" 
ou "biographique".
Est-ce que le discours même du compositeur est suffisant ? Il semble 
que, quelquefois, poussé à bout, il donne une piste "à programme", alors 
qu'en fait, un peu comme certains livrets d'opéras du 18eme, il s'en 
fout royalement.
Qu'en était-il de Dvorak ?
costaclt