En théorie, le R roulé (à la différence du r semi-grasseyé que nous
prononçons à Paris) a disparu de la prononciation parisienne aux
alentours du XVIIIe siècle ; d'abord de la cour, puis des bourgeois
désirant imiter la cour, puis du peuple.
Pour retrouver la prononciation parisienne du début du siècle, il faut
plutôt écouter Arletti. Il n'y a rien de roulé dans « atmosphère » ! ;)
Vincent
Voyez comme on est en retard, il n'y a même pas trente ans, on
le prononçait encore dans les campagnes de haute Bretagne, et à
mon avis, si on cherche bien, on doit encore trouver quelques
personnes qui le pratiquent, ce r apical.
>
> Pour retrouver la prononciation parisienne du début du siècle, il faut
> plutôt écouter Arletti. Il n'y a rien de roulé dans « atmosphère » ! ;)
Pourrr sûrrr.
> Voyez comme on est en retard, il n'y a même pas trente ans, on
> le prononçait encore dans les campagnes de haute Bretagne, et à
> mon avis, si on cherche bien, on doit encore trouver quelques
> personnes qui le pratiquent, ce r apical.
La prononciation roulée du R couRt encoRe, particulièrement dans le
sud-ouest ou, par extension, en pays occitan. Je ne savais pas pour la
basse Bretagne, mais je subodore, à l'instar de l'occitan, une influence
du substrat celtique.
À ce sujet, on pense que ce fameux substrat celtique, ici gaulois, est à
l'origine de l'évolution (palatalisation) du u latin [u] vers le u
français [y]. Merci donc aux gaulois de nous avoir légué une voyelle que
nos cousines romanes ne possèdent pas !
V.
Vous parlez de deux choses différentes, il me semble.
Rouler les R est une chose, les prononcer avec la pointe de la langue
ou en arrière en est une autre.
Il n'existe en français qu'un seul phonème R, qui était autrefois
apical, et qui est devenu presque partout uvulaire, ou postérieur.
Mais pour chacune de ces réalisations, le son peut être tenu ou non.
C'est ce qui distingue le r apical espagnol du r apical anglais, très
amuï. En expagnol, comparez aussi "perro" et "pero".
C'est ce qui distingue aussi le R uvulaire de nos chanteurs du début
du siècle passé, jusqu'à Piaf, Brel, Brassens, de notre R (figuré en
NPI par un R retourné) qui est de plus en plus léger, au point que
dans quelque générations les francophones pourraient parler comme les
"Inc'oyables" et les "Me'veilleuses" de l'Empi'e, mais sans le faire
exprès.
À la même époque les cantatrices utilisaient un r apical roucoulé,
même dans le répertoire français.
Notre R français moderne (uvulaire) existe en allemand (en concurrence
avec r), et en arabe où il est un phonème distinct, je crois. J'ai
même entendu (rarement) des hispanophones l'utiliser en espagnol.
Je ne sais s'il existe dans d'autres langues.
D'aut'es plus savants pou''aient-il m'éclai'er ?
> Notre R français moderne (uvulaire)
>
> D'aut'es plus savants pou''aient-il m'éclai'er ?
>
Nou zôt', icitt en Guadeloupe, n'avons pas ce genw de pwoblème...
Manu
Qui incluait et continue à inclure toute la gamme, d'apical a
uvulaire. Duclos parlait bien français, ce me semble.
Juste une question de terme adéquat. Ce qui fait d'un phonème un
phonème, par définition, est le fait de l'accord des locuteurs sur la
gamme possible de variation, et la reconnaissance de rálisations
différentes de la leur.
> Juste une question de terme adéquat. Ce qui fait d'un phonème un
> phonème, par définition, est le fait de l'accord des locuteurs sur la
> gamme possible de variation, et la reconnaissance de rálisations
> différentes de la leur.
Je ne suis pas tout à fait d'accord. Si vous évoquez "la gamme possible
de variation", il s'agit alors d'un archi-phonème. Un exemple est
l'archi-phomène français A, qui "regroupe" le a ouvert et le a fermé.
PPHN
A Hay, A Hay, A Hay
C'est la haute Bretagne, pas la basse Bretagne.
Je ne sais pas pourquoi, mais les gens, en général
ignorent l'existence de deux Bretagne (s?). Même
certains bretons l'ignorent car ils vivent dans
leur partie sans connaitre l'existence de l'autre.
Cela me rappelle le livre sur les fourmis que
je suis en train de lire, mais là, ça devient
carrément HC.
> À ce sujet, on pense que ce fameux substrat celtique, ici gaulois, est à
> l'origine de l'évolution (palatalisation) du u latin [u] vers le u
> français [y]. Merci donc aux gaulois de nous avoir légué une voyelle que
> nos cousines romanes ne possèdent pas !
Mais pourtant nos cousins germains le possèdent
aussi, serait-ce un héritage des Francs ?
Stricto sensu, vous commettez une imprécision. A est la voyelle la plus
ouverte, et, à ce titre, elle ne connaît pas de réalisation ouverte ou
fermée, mais des réalisations antérieures/postérieures, qui sont
neutralisées en français « du sud » (où l'on ne prononce qu'un a
antérieur), mais aussi en franco-provençal, où l'on a tendance à ne
prononcer que des a postérieurs (*châlet, par exemple). Ceci étant dit,
vous avez raison, l'opposition a antérieur / a postérieur est pertinente
en français d'oïl, par exemple dans la paire minimale pâte/patte.
V.
> Mais pour chacune de ces réalisations, le son peut être tenu ou non.
> C'est ce qui distingue le r apical espagnol du r apical anglais, très
> amuï. En expagnol, comparez aussi "perro" et "pero".
Je ne savais pas que le [r] anglais tendait à l'apical (sauf en Écosse).
Pour moi, le [r] anglais est aussi postérieur que le ł polonais peut
l'être à notre [l], c'est-à-dire un son proche de [w]. Au pire, certains
[r] américains sont rétroflexes, tout comme en tamoul ou en hindi (ce
dernier ayant hérité ces voyelles du premier).
Je reviendrai ce soir sur l'amuïssement des [r], un phénomène courant en
français à différentes époques (-er prononcé [e], doublet chaire/chaise
et bésicles).
> Notre R français moderne (uvulaire) existe en allemand (en concurrence
> avec r), et en arabe où il est un phonème distinct, je crois. J'ai même
> entendu (rarement) des hispanophones l'utiliser en espagnol.
Il existe aussi en italien, où l'on parle de la « erré mocha »
(transcription en français), c'est-à-dire « le r doux », caractéristique
de la zone émiliromagnole.
V.
> C'est la haute Bretagne, pas la basse Bretagne.
Oops. Désolé.
> Mais pourtant nos cousins germains le possèdent
> aussi, serait-ce un héritage des Francs ?
Possible, mais il est aussi possible que ce soit une évolution régulière
du [r] roulé apical.
Plus ce soir, quand j'aurais mes grimoires à portée de main.
V.
Il n'y tend pas, il en vient.
Et le nôtre suit...
Quant au r écossais, il est plus ou moins resté ce qu'il était.
> Pour moi, le [r] anglais est aussi postérieur que le ł polonais peut
> l'être à notre [l], c'est-à-dire un son proche de [w]. Au pire, certains
> [r] américains sont rétroflexes, tout comme en tamoul ou en hindi (ce
> dernier ayant hérité ces voyelles du premier).
>
> Je reviendrai ce soir sur l'amuïssement des [r], un phénomène courant en
> français à différentes époques (-er prononcé [e], doublet chaire/chaise
> et bésicles).
>
>> Notre R français moderne (uvulaire) existe en allemand (en concurrence
>> avec r), et en arabe où il est un phonème distinct, je crois. J'ai
>> même entendu (rarement) des hispanophones l'utiliser en espagnol.
>
>
> Il existe aussi en italien, où l'on parle de la « erré mocha »
> (transcription en français), c'est-à-dire « le r doux », caractéristique
> de la zone émiliromagnole.
Merci, je l'ignorais.
>
> V.
Pourtant les Grands-Bretons, eux, n'ont pas évolué ainsi.
>
> Plus ce soir, quand j'aurais mes grimoires à portée de main.
>
> V.
>> Possible, mais il est aussi possible que ce soit une évolution
>> régulière du [r] roulé apical.
> Pourtant les Grands-Bretons, eux, n'ont pas évolué ainsi.
C'est pour cela qu'on parle de la perfide Albion ! :)
Cet archi est hors de la définition de base, et en fait s'oppose en
partie au concept de phonème. Qui est le seul point fixe permettant le
regroupement en classes abstraites définissant les sons d'un langage à
partir d'une collection hétéroclite de sons personnels, régionaux et
sociaux. Quand un phonème est identifié pour le *français, il inclut
tous les locuteurs, des régions polaires à l'Equateur.
Maintenant, si vous voulez distinguer différents [a] e différents
[eE], vous pourriez définir des phonèmes *régionaux. J'ai 2 [a] et 3
[e] mais cela ne m'empêche point de communiquer avec ceux qui n'en ont
qu'un.
Aussi, quand dire que l'absence de 2 [a] différents sur le territoire
entier des locuteurs n'empêche pas de les compter comme 2 phonèmes
distincts est absurde. En logique cela ne veut rien dire dáutre que la
distinction phonémique, entre pâte et patte par exemple, s'est perdue
et ne vaut plus qu'au niveau dialectal.
> Pourquoi est-ce qu'à votre avis les chanteurs de l'entre deux guerres
> roulaient les R ? (...) Il semble qu'après guerre cette mode, s'il s'agit
> de cela, ait disparu (cf Piaf)
Cela vient, je pense, de la musique classique. Mais je ne suis pas
spécialiste du tout de chant classique, donc si quelqu'un d'autre peut
confirmer...
--
Mathias Rocher
michelmanu
> Thibaud a écrit :
Quel bonheu' !
(Y a moyen d'immigwer ?)
Pèire-Pau Hay-Napoleone
> mb a écrit :
>> rálisations
> Je suis sûr que du côté de www.correcteur-sdb.be, le mot est inconnu.
Il faudra que je mette mon sitajour.
Et pourtant, ils en ont vues des vertédépamûres dans leur longue vie,
les correcteurs.
«du côté dewww.correcteur-sdb.be» m'a d'abord fait penser à la loi de
Skitt, qui veut que tout message de correction d'erreurs en contienne
une du même genre. Mais en fait, c'est dû à la manipulation par Gougle
à qui un de vosespaces neplaîtpas au moment de répondre.
Il semble donc que le substrat celtique tende à orienter le R vers sa
variante apicale [r] (Écosse et Bretagne). Quid au Pays de Galles et en
Irlande ?
>> Je reviendrai ce soir sur l'amuïssement des [r], un phénomène courant
>> en français à différentes époques (-er prononcé [e], doublet
>> chaire/chaise et bésicles).
Or donc, voici ce que dit à ce dit à ce sujet (R final) [Brunot &
Bruneau] : «
Le r s'était amuï comme les autres consonnes. Les infinitifs du
premier groupe, les noms et adjectifs terminés en -ier, -cher ou -ger
(cerisier, boucher, boulanger…) ont conservé cette ancienne prononciation.
Dans tous les autres cas, le r final a été rétabli à des époques
différentes. Au XVIIe siècle, Richelet disait un tiroi(r) pour un tiroir
; dans miroir, mouchoir « rien n'est plus choquant, commente un
grammairien, que de faire sonner la consonne finale ». D'après Andry de
Boisregard (1689), il était distingué de prononcer courir [curi] ou
mourir [muri] (Thurot, t. II, p. 154 & 162). Au XVIIIe siècle, cette
prononciation était devenue vulgaire ; le grammairien Moulis (1761)
recommande « qu'on se garde de supprimer le r, comme les bourgeois de
Paris, et de dire dortoi ou tiroi » (Thurot, t. II, p. 150).
Il y avait eu un mouvement d'hypercorrection : à Paris, le « vulgaire
» disait « au lieur de » : « cela sent un peu l'artisan et la boutique »
jugea le grammairien Dumas (1733) (Thurot, t. II, p. 147). Cette erreur
a disparu au XIXe siècle.
Les adjectifs de type joueur, prononcé [juœ] ont été assimilés aux
adjectifs de type heureux, et ont prit un féminin en -euse. Fénelon
écrit : « Il était encore plus querelleux […] » (Télémaque, XII).
»
Quant à chaise/chaire, si je me souviens bien, au XIIIe siècle, une
mutation, issue du Languedoc, a fait évoluer la prononciation du [r]
intervocalique en [z] (sorte de « zetacisme »). Ce « tic » a gagné
jusqu'à la Capitale où l'on disait quelque chose comme « Mon mazi est à
la porte de Pazi ». Mais cette prononciation n'a pas réussi à s'imposer
dans la population dominante (nobles et bourgeois) et a fini par
régresser et disparaître. Il en reste juste le doublon chaise/chaire <
latin /cathedra/ et bésicles < */bericle/ < grec berycles.
V.
adjectifs de type heureux, et ont pris un féminin en -euse. Fénelon
écrit : « Il était encore plus querelleux […] » (Télémaque, XII).
»
Quant à chaise/chaire, si je me souviens bien, au XIIIe siècle, une
mutation, issue du Languedoc, a fait évoluer la prononciation du [r]
intervocalique en [z] (sorte de « zetacisme »). Ce « tic » a gagné
jusqu'à la Capitale où l'on disait quelque chose comme « Mon mazi est à
la porte de Pazi ». Mais cette prononciation n'a pas réussi à s'imposer
dans la population dominante (nobles et bourgeois) et a fini par
régresser et disparaître. Il en reste juste le doublon chaise/chaire <
latin /cathedra/ et bésicles < */bericle/ < grec berycles. Source (si ma
mémoire ne me faut pas) : [W. von Wartburg, Introduction à la linguistique].
V.
En fait, le titre de l'ouvrage est : « Problèmes et méthodes de la
linguistique ». L'anecdote du « zétacisme » se trouve en p. 42.
V.
> «du côté dewww.correcteur-sdb.be» m'a d'abord fait
> penser à la loi de Skitt, qui veut que tout message
> de correction d'erreurs en contienne une du même
> genre.
Vous me remémorez ma loi favorite, celle de Hofstadter :
« Tout travail prend plus de temps que ce qu'on a prévu,
même si on a tenu compte de la loi de Hofstadter. »
--
Pierre Hallet.
Site (dont FAQ) du forum fllf : <http://www.langue-fr.net>.
Vs
> > Nou zôt', icitt en Guadeloupe, n'avons pas ce genw de pwoblème...
>
> Quel bonheu' !
> (Y a moyen d'immigwer ?)
Pa ni pwoblem' : tu fais une demande, et dans un an t'y es...
A++
--
Chwistian