Le muguet fleure bon.
Son nom fut donné aux jeunes galants dès le XVIe s., parce qu'ils se
parfumaient avec des essences de muguet. Mais ceux-ci pouvaient fort
bien rendre des visites muguettes, passer des muguets qui étaient des
billets doux. Mugueter, c'était donc courtiser, faire le galant, se
montrer agréable ; la muguetterie une forme de badinage. Le muguet, aux
siècles classiques, semble encore rappeler vivement la sexualité par son
odeur et par sa prétendue innocence.
Or le nom du muguet vient de la noix muscade, d'une odeur très marquée.
Et fort étrangement, l'idée du « musc » évoque bien plus par son sens
moderne, et grâce à Baudelaire, la senteur animale, fauve, sexuelle
alors que le muguet aujourd'hui semblera lilial, marial, vierge -- il
faut noter que dans l'Est de la France, c'est un synonyme du lilas. La
fleur est moins banale, marronnière qu'on ne le croirait ; son
ambivalence est encore plus forte lorsque la politique s'en mêle.
Le muguet blanc des anciens muscadins -- les jeunes royalistes qui
arboraient un brin de muguet sous le Directoire tout en maniant la canne
afin d'assommer les partisans de la Gueuse -- a été repris par les
Rouges afin de rappeler un massacre d'ouvriers à Chicago il y a plus de
cent ans, mais sans arborer le drapeau rouge de sang, et ce ne seront
pas des cerises que l'on offrira lors de la fête du travail : elles ne
sont pas vraiment encore de saison. Inversion des symboles.
Dominique
> Le muguet blanc des anciens muscadins -- les jeunes royalistes qui
> arboraient un brin de muguet sous le Directoire tout en maniant la canne
> afin d'assommer les partisans de la Gueuse -- a été repris par les
> Rouges afin de rappeler un massacre d'ouvriers à Chicago il y a plus de
> cent ans, mais sans arborer le drapeau rouge de sang, et ce ne seront
> pas des cerises que l'on offrira lors de la fête du travail : elles ne
> sont pas vraiment encore de saison. Inversion des symboles.
D'où tenez-vous qu'il y aurait un rapport entre le muguet porte-bonheur
et la « journée internationale du travail », la date du premier mai
excepté ?
Une discussion en cours sur news:europa.general (fil de discussion
débutant par l'article <news:9clnq6.3...@pottok.org>) semble au
contraire indiquer que cette tradition d'offrir du muguet le jour du
premier mai est une tradition purement française, alors que les
commémorations syndicalo-politiques qui ont lieu le même jour sont,
elles, internationales.
--
PhV
> Dominique Didier a brillamment écrit dans son article :
>
> > Le muguet blanc des anciens muscadins -- les jeunes royalistes qui
> > arboraient un brin de muguet sous le Directoire tout en maniant la canne
> > afin d'assommer les partisans de la Gueuse -- a été repris par les
> > Rouges afin de rappeler un massacre d'ouvriers à Chicago il y a plus de
> > cent ans, mais sans arborer le drapeau rouge de sang, et ce ne seront
> > pas des cerises que l'on offrira lors de la fête du travail : elles ne
> > sont pas vraiment encore de saison. Inversion des symboles.
>
> D'où tenez-vous qu'il y aurait un rapport entre le muguet porte-bonheur
> et la « journée internationale du travail », la date du premier mai
> excepté ?
D'un ouvrage dont il a oublié de donner les références [ en fait, il l'a fait
exprès, espèce
d'incurieux ! ] ou d'une imagination trop fertile...
Isabelle
Pas tout à fait :
1. On offre également du muguet le premier mai en dehors de l'hexagone (en
Belgique notamment)
2. La Fête du travail se célèbre le premier lundi de septembre aux
États-Unis et au Canada (Labour Day).
Le premier mai ici est un jour strictement comme les autres.
Cordialement de Vancouver,
J.-M.
> Philippe Vigeral <p...@pottok.org> wrote in message
> > Une discussion en cours sur news:europa.general (fil de discussion
> > débutant par l'article <news:9clnq6.3...@pottok.org>) semble au
> > contraire indiquer que cette tradition d'offrir du muguet le jour du
> > premier mai est une tradition purement française, alors que les
> > commémorations syndicalo-politiques qui ont lieu le même jour sont,
> > elles, internationales.
> Pas tout à fait :
> 1. On offre également du muguet le premier mai en dehors de l'hexagone (en
> Belgique notamment)
> 2. La Fête du travail se célèbre le premier lundi de septembre aux
> États-Unis et au Canada (Labour Day).
>
> Le premier mai ici est un jour strictement comme les autres.
Sauf pour ceux qui gardent encore quelques vestiges de leur héritage
scandinave et qui laissent des 'May baskets' pour leurs amis.
De toute façon, nos 'lilies of the valley' ne sont pas encore de saison.
Vous avez aussi raison pour la fête de travail...pas beau copier sur les
cocos, vous savez.
JLL
Ici aussi. De plus, c'est l'automne, déjà bien avancé.
Marion
--
Marion Gevers,
Newcastle, NSW, Australia
mar...@eepjm.newcastle.edu.au
Mon agenda de bureau indique, à la date du 1er mai :
Fête du Travail en Afrique du Sud, en Allemagne et en Autriche («
Maifeirtag »), en Belgique, en Espagne (« Fiesta del Trabajo »), en
France, en Grèce, en Italie (« Fiesta del Lavoro »), au Luxembourg, en
Pologne, au Portugal, en Suède. Il fait également mention d'un « Labour
Day » que je ne retrouve toutefois pas dans la liste des fêtes chômées
du Royaume-Uni.
--
©lõ
> Marion Gevers wrote:
> >
> > Le Tue, 1 May 2001 09:49:41 -0700, Jean-Marie Munier a écrit :
> > >
> > >Le premier mai ici est un jour strictement comme les autres.
> >
> > Ici aussi. De plus, c'est l'automne, déjà bien avancé.
[...]
> Il fait également mention d'un « Labour Day » que je ne retrouve
> toutefois pas dans la liste des fêtes chômées
> du Royaume-Uni.
Le « Labour Day » est canadien et « états-unien »[ pourquoi pas « Labor Day
» ? ] (premier lundi de septembre).
[ Vous avez tort de ne pas lire les interventions de Jean-Marie Munier. ].
Isabelle
Vous voulez bien arrêter de retourner le fer dans la plaie, Clotilde ??
>Il fait également mention d'un « Labour
>Day » que je ne retrouve toutefois pas dans la liste des fêtes chômées
>du Royaume-Uni.
Je crois qu'aux États-Unis, on parle d'un "Labour Day" le 1er mai,
mais sans en faire un jour férié.
>> Philippe Vigeral a écrit :
Je vous trouve bien sévère. Pour une fois que Dominique Didier fait
preuve d'inventivité ! Personnellement, je l'encourage résolument dans
cette voie...
> Je vous trouve bien sévère. Pour une fois que Dominique Didier fait
> preuve d'inventivité ! Personnellement, je l'encourage résolument dans
> cette voie...
Espèce de pousse-au-crime !
Isabelle
Philippe Vigeral a écrit :
Il me semble qu'on a eu une discussion analogue l'année dernière à la même
époque, où l'on avait dit qu'au départ de ces fêtes du premier mai, on portait
plutôt "la rouge églantine". Le muguet serait une tradition pétainiste, si
j'en crois :
http://fotresor.multimania.com/cir0017.htm
>
> Il me semble qu'on a eu une discussion analogue l'année dernière à la même
> époque
Bonne mémoire.
> , où l'on avait dit qu'au départ de ces fêtes du premier mai, on portait
> plutôt "la rouge églantine".
Ou le « rouge coquelicot »...
Isabelle
Isabelle Depape Hamey a écrit :
> DB a écrit :
Même que vous m'aviez dit avoir déjà vu des coquelicots dans la campagne
toulousaine alors qu'ils sont encore loin d'éclore sous nos frimas parisiens !
Ai-je vraiment écrit « dans la campagne toulousaine » ? Cette année, les
coquelicots
sont beaucoup plus timides que d'habitude. Les « frimas » n'ont pas épargné
Toulouse...
Isabelle
Voilà ce que vous écriviez le 2 ou 3 mai 2000, dans le fil intitulé "Ruiné" :
> >Parfois, je vous plains d'habiter "par chez vous" ! Par chez moi, les coquelicots
> >ont commencé à fleurir il y a au moins un mois. J'en ai d'ailleurs vus pas plus
> >tard que ce matin et ils étaient superbes...
>
Au Canada, les graphies « our » (orthographe britannique) et « or »
(orthographe étasunienne) dans la terminaison de mots tels que colo(u)r,
flavo(u)r, hono(u)r, labo(u)r, etc. sont également acceptées mais la graphie
« our » est préférée et nettement plus commune.
Cordialement,
J.-M.
> Je crois qu'aux États-Unis, on parle d'un "Labour Day" le 1er mai,
> mais sans en faire un jour férié.
Non, pas du tout. Notre "Labor Day" (orthographié à l'anglo-américain --
et donc sans 'u') est bien le premier lundi de septembre comme a dit
Jean-Marie (je le sais ; je suis née un premier lundi de septembre et
comme tout bébé, un jour de travail pour sa maman. Disons que ma
naissance a été officiellement reconnue de telle. ;-)
Peut-être que le "Labour Day" de l'agenda de Clõ est en Inde, ou en
Afrique du Sud ?
JLL
>
> Voilà ce que vous écriviez le 2 ou 3 mai 2000, dans le fil intitulé "Ruiné" :
>
> > >Parfois, je vous plains d'habiter "par chez vous" ! Par chez moi, les coquelicots
> > >ont commencé à fleurir il y a au moins un mois. J'en ai d'ailleurs vus pas plus
> > >tard que ce matin et ils étaient superbes...
>
Eh bien, j'ai le plaisir de vous annoncer qu'ils ont fleuri. Je les ai vus ce matin, au
même endroit qu'il y a tout juste un an...
Isabelle
Isabelle Depape Hamey a écrit :
> DB a écrit :
Ça doit être quelqu'un qui les plante, pour faire croire au printemps !
Vu le déluge qui inonde Paris à l'heure où j'écris, je pense que je vous parlerai des
nénufars et des lotus dans quelques jours.
> Ça doit être quelqu'un qui les plante, pour faire croire au printemps !
> Vu le déluge qui inonde Paris à l'heure où j'écris, je pense que je vous parlerai des
> nénufars et des lotus dans quelques jours.
Votre « nénufars » m'a conduite à vérifier dans le PR et celui-ci dit : « on a écrit nénufar
». Qui est ce « on », depuis quand écrit-on « nénuphar » et pourquoi?
Isabelle
Isabelle Depape Hamey a écrit :
> DB wrote:
On a toujours écrit "nénufar", et c'est ainsi que le mot apparaît dans le Littré, jusqu'à ce que
la mode des nymphéas pousse les pédants à écrire "nénuphars" sans autre raison que le caractère
décoratif et exotique du "ph". On ignore pourquoi les dictionnaires ont emboîté le pas. La
graphie primitive a été restaurée dans le projet de réforme maudit, et de très honnêtes gens en
ont été bouleversés, qui croyaient que "nénuphars" s'était écrit ainsi depuis que le monde est
monde, et que de l'écrire avec un "f" était une atteinte incroyable à la beauté et à l'intégrité
de la langue française, et même à la fleur elle-même qui n'en serait plus aussi belle. Ce mot
symbolise parfaitement l'attachement de chacun à ce qu'il a appris dans son enfance.
Naturellement, en dehors de ce forum, j'écris "nénuphar" !
>On a toujours écrit "nénufar", et c'est ainsi que le mot apparaît dans le Littré, jusqu'à ce que
>la mode des nymphéas pousse les pédants à écrire "nénuphars" sans autre raison que le caractère
>décoratif et exotique du "ph".
Ou la (fausse) étymologie grecque -- sujet qui fut disputé ici.
L'Académie l'a écrit « nénufar » jusqu'en 1878 (7e éd. du D. Ac.) ;
la modification intervint dans la 8e éd. (1932-1935).
>Ce mot
>symbolise parfaitement l'attachement de chacun à ce qu'il a appris dans son enfance.
Au nom de quoi on veut l'imposer à l'enfance des autres... ;-)
>Naturellement, en dehors de ce forum, j'écris "nénuphar" !
C'est l'usage actuel ! ;-)
Luc Bentz
languef...@chez.com
http://www.chez.com/languefrancaise/
http://www.langue.fr.st/
--
« N'oubliez pas que que tout ce que vous lisez n'est que le résultat
de l'excitation, par des électrons, d'atomes de terres rares
déposés en couches minces sur un écran de verre. Pas de quoi s'exciter soi-même. »
(Tatie Francette - http://tatie.citeweb.net)
joye a écrit :
>
> je le sais ; je suis née un premier lundi de septembre et
> comme tout bébé, un jour de travail pour sa maman
Paraîtrait que ce jour était un Vendredi 13 ?
>Vu le déluge qui inonde Paris à l'heure où j'écris, je pense que je vous parlerai des
>nénufars et des lotus dans quelques jours.
Vous ne faites pas de « catleyas » ?
Dominique
Dominique Didier a écrit :
J'ai cité les nénufars et les lotus (les loti ?) parce que leurs fleurs peuvent flotter
sur l'eau qui va bientôt submerger Paris. Les catleyas ne poussent que sur les poitrines
proustiennes.
Dans cette orthographe seulement... Plaignez-vous, j'ai traversé
aujourd'hui la plaine champenoise et j'ai eu l'impression de découvrir
des rizières parmi les champs de luzerne et de colza ou le bayou
lorsqu'un bois approchait. Pour « lotus », l'on pourrait raffiner en
faisant un pluriel en « lôtoi » -- le grec est si chic et l'on ne
saurait apprendre assez de règles étrangères au français. Et le pluriel
arabe de « nénufar » quel est-il ? Il faudrait aussi le respecter afin
de ne pas froisser les celtifiés.
Dominique
Dominique Didier a écrit :
>
> Et le pluriel arabe de « nénufar » quel est-il ?
C'est du persan. Inanimé : pluriel à priori en « -hâ ».
Luc Bentz a écrit :
> DB a écrit :
>
> >On a toujours écrit "nénufar", et c'est ainsi que le mot apparaît
> >dans le Littré, jusqu'à ce que la mode des nymphéas pousse
> >les pédants à écrire "nénuphars" sans autre raison que le caractère
> >décoratif et exotique du "ph".
>
> Ou la (fausse) étymologie grecque -- sujet qui fut disputé ici.
> L'Académie l'a écrit « nénufar » jusqu'en 1878 (7e éd. du D. Ac.) ;
> la modification intervint dans la 8e éd. (1932-1935).
Pourtant, le latin médiéval... :
§
nénuphar [nenyfar] n. m.
. XIIIe; lat. médiév. nenuphar, de l'ar. nînûfar
§
Michel Guillou a écrit:
> Luc Bentz écrivait :
>
> > Ou la (fausse) étymologie grecque -- sujet qui fut disputé ici.
>
> Huh.
>
> « Car le nénuphar qui a sa matrice en l'eau ne germera jamais sur la
> terre... » (Guy de La Brosse) ou, du même, « ... il y a des plantes
> rafraîchissantes sans être acides, telles que sont ... le nénuphar, le
> pourpié... ».
>
> Tout ça en 1628, in « De mla
Vous voyez bien qu'on multipliait les lettres inutiles à l'époque !
> nature, vertu et utilité des plantes ».
>
> --
> Michel Guillou
Des coquelicot au 1er mai ? Certainement pas en Région parisienne
(et c'est une fleur fragile, qui ne "tient" pas et fane
rapidement).
Quant au muguet sa vente était libre et autorisée le 1er mai - à
Paris - donc avant 1939 (et le régime Pétain).
Libre aussi la vente du buis le jour des Rameaux (et à la
Toussaint quandd il était garanti béni du jour des rameaux
précédents. (ces activités faisaient partie des petits métiers
!).
L'Oursonne.
Le loti est une fleur des îles du Pacifique dont Julien Viaud
s'est inspiré pour son pseudonyme de Pierre Loti.
> J'ai cité les nénufars et les lotus (les loti ?)
Nan, le pluriel de lotus, c'est Kleenex.
JLL
>« Car le nénuphar qui a sa matrice en l'eau ne germera jamais sur la
>terre... » (Guy de La Brosse) ou, du même, « ... il y a des plantes
>rafraîchissantes sans être acides, telles que sont ... le nénuphar, le
>pourpié... ».
>Tout ça en 1628, in « De mla nature, vertu et utilité des plantes ».
Oui mais dans une orthographe « rectifiée » ultérieurement, car vos
accents circonflexes et l'accent aigu avant la finale sont
surprenants. Il faudrait comparer avec l'édition originale dont la
graphie ne devait pas être celle-là !
« Nenuphar » était inconnu de la 2e éd. du Dictionnaire
francoislatin de Robert Estienne, présent dans l'édition posthume du
même ouvrage revue par Thierry (1564) avec une graphie « nenuphar »
(sans accent), également reprise dansl e Thresor de Jean Nicot
(1606). Mais, dès la première édition du Dictionnaire de l'Académie
(1694) jusqu'à celle de 1718, on trouvait « nenufar », l'accent
étant introduit en 1740 avec une forme « nénufar » présente jusqu'en
1878. (Source : D. hist. de l'orth. fr., sous la dir. de N. Catach,
Larousse).
.
> Et le pluriel
> arabe de « nénufar » quel est-il ? Il faudrait aussi le respecter afin
> de ne pas froisser les celtifiés.
Au cas où tvous feriez allusion à mon pluriel de fest-noz, je tiens à
préciser que je ne suis pas celtifiée conforme... :-)
--
Fanette
Michel Guillou a écrit:
> Luc Bentz écrivait :
>
> > Ou la (fausse) étymologie grecque -- sujet qui fut disputé ici.
>
> Huh.
>
> « Car le nénuphar qui a sa matrice en l'eau ne germera jamais sur la
> terre... » (Guy de La Brosse) ou, du même, « ... il y a des plantes
> rafraîchissantes sans être acides, telles que sont ... le nénuphar, le
> pourpié... ».
>
> Tout ça en 1628, in « De mla nature, vertu et utilité des plantes ».
>
Comme le dit Littré, c'est l'usage des botanistes (mais pas seulement eux,
comme le montre au moins un exemple de Chateaubriand).
Mais Ronsard écrit "Le blanc neufart à la longue racine" et Balzac écrit
"nénufar".
On a trouvé aussi les variantes "neufar", "neuphar", "nuphar".
En fait, "nénuphar" a toujours coexisté avec "nénufar", mais c'est ce
dernier seulement qui eut le privilège d'être dans le dictionnaire de
l'Académie jusqu'à l'édition de 1935 où l'Académie opta pour le "ph".
Dominique Didier a écrit:
> Et le pluriel
> arabe de « nénufar » quel est-il ? Il faudrait aussi le respecter afin
> de ne pas froisser les celtifiés.
>
Avant d'employer le pluriel arabe de "nénufar", il faudrait déjà employer le singulier, qui
est plus souvent, en arabe moderne, "niloufar" ou "noufar". Le pluriel d'ailleurs ne semble
pas s'employer. On ne dit pas en arabe qu'il y a "des" nénuphars" mais plutôt qu'il y a "du"
nénuphar.
> Curieusement, le nom scientifique du nénuphar est « nuphar » ainsi
> orthographié. Notre « lis des étangs » est ainsi appelé « nuphar
> luteum » par les botanistes, qui mélangent volontiers grec et latin.
>
> Bonnier et de Layens signalent, dans l'édition de 1964 de leur Flore
> que j'ai entre les mains, que ce mot de « nuphar » vient de l'arabe
> « niloufar » !
>
> À n'y rien comprendre...
Sujet abordé ici même en juin 1999. Voici un petit condensé de ce que
j'écrivais :
« Nénuphar » vient de l'égyptien ancien. Au Nouvel Empire (à partir de
la XVIIIème dynastie, après 1570-1550 environ), on appelait les
lotus/nympheas/nénuphars « nanoufar », c'est-à-dire « les belles ».
Le mot nous a été transmis par les Arabes.
La racine trilitère « nfr » signifie beau. L'hiéroglyphe nfr figure une
sorte de vase ovale surmonté d'une croix dont la branche verticale est
nettement plus longue que la branche horizontale (quelquefois il y a
deux branches horizontales). D'aucuns y ont vu une représentation
stylisée du coeur, de la trachée et des bronches. Quand il s'agit d'un
pictogramme (et pas d'un phonogramme, ce qui est aussi possible),
« nfr » a le sens de beau -- ou belle : Néfertiti, par exemple.
Il existait à cette époque deux espèces de lotus égyptiens,
bien distinctes dans les dessins. 1) Le lotus blanc (Nymphaea lotus) :
feuilles à bord dentelé, boutons arrondis et pétales étalés; odeur forte
et médiocrement appréciable. 2) Le lotus bleu (Nymphaea cerulea) :
feuilles au bord linéaire, boutons effilés en pointe, pétales étroits et
aigus; parfum suave et doux. A l'époque tardive une troisième espèce,
assez massive (Nymphaea nelumbo), fut introduite en provenance des
Indes ; elle figure souvent sur les monuments de l'époque hellénistique.
Les Égyptiens consommaient les rhizomes farineux des différents lotus.
(Source : Dictionnaire de la civilisation égyptienne, Paris, Hazan,
1959 -- tenir compte de la date car les appellations botaniques ont
peut-être changé depuis).
DB avait observé :
> Il y a controverse. Contrairement à l'hypothèse égyptienne rapportée
> par Nina Catach, le Robert historique ainsi que le Que sais-je n° 866
> "Les noms des plantes" (1968) rattachent le mot, par l'intermédiaire
> de l'arabe "ninufar" ou "nilufar", au persan "nilufar", lui-même
> emprunté au sanscrit "nilautpala" "lotus bleu", composé de "nila"
> (bleu noir) et "utpala" (fleur de lotus). De ce dernier nom doit
> pouvoir se rapprocher le nélombo, qui est le lotus sacré des
> Hindous.
Et j'avais répondu que le nom égyptien « nanoufar » (les belles)
remontait au Nouvel Empire (de 1570-1550 environ à peu après 1100)
et qu'il était est donc antérieur à l'introduction de l'espèce Nymphaea
nelumbo en Égypte. Ce n'est pas déterminant quant à l'origine du mot
actuel, mais semble indiquer que le mot égyptien n'a pas été forgé en
référence au persan. C'est peut-être l'inverse qui s'est produit, car le
mot sanscrit (et les deux composés cités par DB) est assez différent
du mot persan.
DB :
> Quant à la forme "nuphar" des botanistes, elle viendrait d'une
> variante arabe "nufar", obtenue par troncation de "ninufar" ou
> "nilufar". Cette variante arabe a peut-être subi l'influence
> égyptienne de la racine "nfr" que vous avancez (peut-être par
> l'intermédiaire du copte).
BL :
S'il y a bien eu passage de l'égyptien à l'arabe, c'est en effet plus
que probablement par l'intermédiaire du copte.
Amicalement,
Bernard
Montcalm a écrit :
>
> Sujet abordé ici même en juin 1999. Voici un petit condensé de ce que
> j'écrivais :
>
> « Nénuphar » vient de l'égyptien ancien.
La suite montre qu'il s'agirait plutôt du moyen ou néo- égyptien.
Mais je « chipotte », vous utilisez « ancien » dans le sens
d'« ancien », pas d'« ancien », ami !
> Au Nouvel Empire (à partir de
> la XVIIIème dynastie, après 1570-1550 environ),
Environ, et sous réserves, ~1539.
> on appelait les
> lotus/nympheas/nénuphars « nanoufar », c'est-à-dire « les belles ».
J'ai bien un « naa:nu » [copte : « {e}nanou »], « beau ». Je ne
trouve pas de « nanufar ». Encore faudrait-il savoir utiliser un
dictionnaire égyptien.
> Le mot nous a été transmis par les Arabes.
>
> La racine trilitère « nfr » signifie beau. L'hiéroglyphe
« Le hiéroglyphe » : « h » aspiré(e).
« nefer » : en copte « noufe » [numéro des lettres dans l'ordre de
l'alphabet copte : 13, 15, 20, 26, 5]. Prononciation : [noufé], et non
[nufé] (?).
Environ, et sous réserves, ~1539 -- ~1089
> et qu'il était est donc antérieur à l'introduction de l'espèce
> Nymphaea nelumbo en Égypte. Ce n'est pas déterminant quant à
> l'origine du mot actuel, mais semble indiquer que le mot égyptien
> n'a pas été forgé en référence au persan.
Diable ! De quand datez-vous le persan, successeur du vieux-perse et
du perse ?..
> C'est peut-être l'inverse qui s'est produit, car le mot sanscrit
> (et les deux composés cités par DB) est assez différent du mot persan.
>
> DB :
> > Quant à la forme "nuphar" des botanistes, elle viendrait d'une
> > variante arabe "nufar", obtenue par troncation de "ninufar" ou
> > "nilufar". Cette variante arabe a peut-être subi l'influence
> > égyptienne de la racine "nfr" que vous avancez (peut-être par
> > l'intermédiaire du copte).
En copte, « nefer » = « noufe » [noufé] (?).
> BL :
> S'il y a bien eu passage de l'égyptien à l'arabe, c'est en effet plus
> que probablement par l'intermédiaire du copte.
Et si le français moderne a des mots latins, c'est en effet plus que
probablement par l'intermédiaire de l'ancien français...
Histoire probable de l'égyptien :
° égyptien archaïque (~3000 -- ~2400)
° ancien égyptien (~2400 -- ~2000)
° moyen égyptien (~1900 -- ~800)
° moyen égyptien classique (~800 -- ~500)
° néo-égyptien (~1700 -- ~700) ; très différent des « égyptiens »
précédents
° démotique (~500 -- 0)
° copte (300 -- 1400)
Les discontinuités sont dues, je suppose, au manque d'attestations.
> Amicalement,
>
> Bernard
Message très intéressant. I' y pas, il y a deux ans, vous étiez
nettement très moins con. C'est de m'avoir connu ?
Je cause, je cause, mais vous ne pouvez pas me répondre, chacun de
moi sait que vous me filtrez ; vous alliez même le proclamer en douce
chez « nzn », pauv' mec. De tous ceux que je connais sur ces
« babillards », tous sont, je pense, rachetables. Oui, même Guillou !
même Dichou ! [i' y aura du boulot, faut pas se leurrer] J'parle pas de
l'k, l'k, c't'un copain. Tous, sauf un : non, pas Roger Hanin dans « Li
grand pardon ». Le sac à merde.
Alors, Monique, toi qui es(t) arrivée jusque-là, je t'embrasse. Je
pense me réfugier sur « f.l.l.ch. ». Là-bas, ils sont d'un gentil !
C'était mes trois secondes de « blouze ». Agathe Ze Blouze.
Je conserve le message précédent. Il faudra consacrer une archive à
ce nénuphar/nénufar.
Luc Bentz
--
http://www.langue.fr.st/
« Nos modernes Josué littéraires crient vainement
à la langue de s'arrêter ; les langues ni le soleil
ne s'arrêtent plus. Le jour où elles "se fixent",
c'est qu'elles meurent. »
Victor HUGO (Préface de « Cromwell »)
nénuphar
oignon
huître
chausse-trape
>chausse-trape
Vous pouvez aussi écrire « j'irois parler le françois » si ça vous
chante : je suis tolérant sur l'usage.
>> Grognon a écrit :
>> chausse-trape
> Vous pouvez aussi écrire « j'irois parler le françois » si ça vous chante : je
> suis tolérant sur l'usage.
Non, non, la chausse-trape est admise bien plus tard que le françois !