![]() | ![]() |
Ariel Henry, accusé d’avoir muselé les commentaires sur les médias sociaux de l’État haïtien, notamment le compte Twitter de la Primature, perd le soutien des manifestants qui ne le reconnaissent plus comme chef du gouvernement. Ils dénoncent également l’impuissance de la police face aux gangs armés « soutenus par le pouvoir en place ».
Des manifestations d’une ampleur sans précédent ont éclaté à travers Haïti ce lundi, plongeant les grandes villes dans le chaos et suscitant des affrontements tendus entre les manifestants et les forces de l’ordre, officiellement alignées sur le pouvoir de facto en place, dénonce-t-on. Au cœur de ces troubles, la demande insistante de la démission du Premier Ministre Ariel Henry, nommé par un tweet du Core Group.
Les rapports des médias locaux, des réseaux sociaux et correspondants de presse signalent des fermetures massives, touchant banques, écoles et agences gouvernementales des régions nord et sud jusqu’à l’Artibonite et le Plateau Central. Les rues ont été investies par des milliers de manifestants bloquant les axes principaux avec des pneus enflammés, paralysant ainsi les transports publics.
À Hinche, l’arrivée remarquée d’agents étatiques fortement armés de l’environnement, sous la direction du Commandant Joseph Jean Baptiste, a été accueillie par des acclamations de la part des protestataires réclamant avec véhémence la démission d’Henry. Le Commandant Baptiste a publiquement exprimé sa position, déclarant : « Je veux qu’Ariel se tienne devant mes balles, pour qu’elles passent à travers lui », suscitant les acclamations de la foule.
La Brigade de Sécurité des Aires Protégées, dont font partie ces agents, est sous le feu des projecteurs gouvernementaux à la suite de récents affrontements avec la police dans le nord d’Haïti.
Des manifestations de moindre ampleur ont également eu lieu dans la capitale, Port-au-Prince, où des dizaines de personnes se sont rassemblées devant la Primature. Les forces de l’ordre ont réagi en utilisant des gaz lacrymogènes pour disperser la foule. Notamment, parmi les manifestants, figurait l’ancien Premier Ministre de facto Tèt Kale 2, Dr Claude Joseph, capturé en vidéo en train de s’essuyer le visage alors que ses partisans scandaient : « Nou pap kanpe ! »
L’anticipation monte en vue d’au moins trois jours de manifestations jusqu’à mercredi, avec le 7 février comme date butoir pour la démission d’Henry, sans mandat légitime et constitutionnel. Cette date revêt une importance historique en Haïti, rappelant le 7 février 1986, jour où l’ancien dictateur-défunt Jean-Claude Duvalier a fui en France, et le 7 février 1991, jour où Jean-Bertrand Aristide, premier président démocratiquement élu du pays, a prêté serment.
Le premier ministre Ariel Henry est actuellement mis sous pression par certains acteurs de l’accord du 21 décembre 2022. Invité ce mardi 7 mars 2022 à l’émission « Le Rendez-vous avec Volcy Assad », l’ex député Antoine Rodon Bien-Aimé, leader du « Compromis historique », a exprimé ses profondes inquiétudes quant à l'application de ce document. Sa sortie coïncide avec celle de Mirlande Manigat ce matin qui a fait part de ses premières déceptions sur les ondes de Magik 9.
Le premier ministre Arlel Henry se trouve dans une zone de turbulences depuis la signature de l’accord du 21 décembre. Des signataires commencent à manifester leur mécontentement face aux « promesses non tenues » quant à son application.
« Le premier ministre m’avait donné des garanties que le remaniement ministériel serait fait dès la signature de l’accord et que dès décembre la problématique de l’insécurité allait être adressée, j’y croyais », explique Antoine Rodon Bien-Aimé à l’émission « Le Rendez-vous avec Volcy Assad » ce mardi.
Depuis la signature de l’accord du 21 décembre, seul le Haut Conseil de la Transition a été respectée. L’organe consultatif, l’évaluation du gouvernement devraient être faits dès l’installation du HCT. Ce qui peine à être appliqué, selon Bien-Aimé qui dit s'étonner que Ariel Henry n'ait pas respecté sa signature.
Voyant ce qui se dessine, des signataires de l’accord du 21 décembre ont mis sur pied un comité de suivi devant veiller au respect scrupuleux de l’accord. « Nous sommes très inquiets », confie l'ex-député de Cerca-Cavajal.
A. Rodon Bien-Aimé ne se présente pas comme un allié du pouvoir mais comme un homme politique ayant signé un accord politique pour, dit-il, prouver sa bonne foi. Il dit ne pas comprendre ce qui empêche le premier ministre de respecter sa parole.Â
« Eske Ariel Henry gen yon mò sou li ki fèl pa respekte okenn akò ? ( Est-ce qu’on a jeté un sort à Ariel Henry l’empêchant de respecter les accords », se demande ironiquement l'ex parlementaire ayant déjà brigué 3 mandats de député. « S’il est possédé, nous n’avons qu’à nous agenouiller et prier pour lui », dit-il, accordant encore le bénéfice du doute à Ariel Henry.Â
Hier, la Présidente du HCT, Mirlande Manigat s'est entretenue avec un groupe de signataires du document du Consensus National. Les discussions ont porté, entre autres, sur les retards enregistrés dans l’application de l’accord du 21 Décembre. Une rencontre à laquelle a participé Antoine Bien-Aimé.
L’ex dirigeante du RDNP est on ne peut plus préoccupée. Sur Magik9, elle a fait part de ses premières déceptions. Un mois après, le train du HCT n’a pas encore décollé. La situation est complexe et les raisons ne manquent pas pour justifier ses inquiétudes.
« Nous essayons de nous mettre en place. Là où nous sommes logés ne convient pas. C’est un immeuble particulier. Nous sommes au 5e étage du ministère du Commerce. Il y a des meubles mais il n’y pas de bureaux. On ne peut même pas trouver une feuille de papier. Nous avons des difficultés pour fonctionner comme institution. On ne peut pas recruter du personnel puisqu’on n’a pas encore de budget. Nous avons dû protester, arguant qu’on ne peut pas nous traiter de cette manière. Nous espérons que les personnes à qui nous nous adressons seront de bonne foi et que nous pourrons fonctionner bientôt comme n’importe quelle institution de l’Etat », a-t-elle fait savoir dans cette interview à Magik9. Des propos repris par le quotidien Le Nouvelliste.
Aussi, la présidente du Haut Conseil de la Transition déplore le fait que certains articles du consensus national pour une transition inclusive et des élections transparentes communément appelé accord du 21 décembre n’ont pas encore été appliqués surtout la question du remaniement ministériel. « Jusqu’à présent, le premier ministre n’a pas encore donné de signe qu’il va changer des ministres. En fonction des évaluations et des feed-back du public, la plupart des ministres devront partir. C’est ce qui a été conclu et publié dans le journal Le Moniteur. Nous attendons les premiers signes de l’application de cette disposition », a indiqué la constitutionnaliste.
Par: Daniel Zéphyr