Comment l’Europe concourt à l’occupation de la Palestine

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Dec 26, 2010, 4:16:36 AM12/26/10
to ARNif
Comment l’Europe concourt à l’occupation de la Palestine

Une interview de David Cronin

Publié le : samedi 25 décembre
Mots-clés : international; Israël; Palestine; Union Européenne
Source : silviacattori.net


Dans son nouveau livre « L’alliance de l’Europe avec Israël : son
concours à l’occupation » (« Europe’s Alliance with Israel : Aiding
the Occupation »), le journaliste David Cronin retrace les dédales de
la relation de l’État d’Israël avec des institutions comme l’Union
Européenne et l’OTAN. Ce faisant, il révèle la mauvaise foi de
l’Europe dans ses prétentions à être une force neutre soutenant les
droits élémentaires du peuple palestinien. Il répond ici aux questions
de Sarah Irving.

Sarah Irving : Jusqu’ici vous vous êtes intéressé aux institutions et
aux affaires de l’Europe. Pourquoi avez-vous décidé d’écrire un livre
sur les relations de l’Europe avec Israël et la Palestine ?

David Cronin : Pour deux raisons. D’abord, comme membre d’une «
Mission pour la Paix » européenne je suis allé en 2001 en Israël et
dans les Territoires palestiniens occupés, peu après les attaques du
11 septembre 2001 aux États-Unis. Je me souviens en particulier
d’avoir assisté à une conférence de presse que (l’ancien premier
ministre israélien) Ariel Sharon donnait à l’hôtel du Roi David à
Jérusalem et d’avoir été profondément choqué par son arrogance et ses
propos au vitriol. Il a commencé par accueillir les personnes
présentes dans quelque chose comme - je ne me rappelle pas ses mots
exacts – « la capitale éternelle du peuple juif depuis 3000 ans » sans
reconnaître d’aucune façon qu’elle était aussi la capitale des deux
autres grandes religions monothéistes du monde. Il a dit qu’il se
réjouissait chaque fois qu’un Palestinien se faisait sauter dans un
attentat suicide, parce que, ce faisant, les Palestiniens se
détruisaient eux-mêmes. Cela m’a scandalisé. Une autre chose m’a
énormément surpris : il a accusé l’Europe de financer « le terrorisme
palestinien ». Je n’avais encore jamais entendu dire cela. C’était
complètement nouveau pour moi.

Je suppose que j’étais un peu crédule en pensant qu’il n’y a pas de
fumée sans feu, et en en retirant l’impression que l’Union Européenne
(UE) soutenait les Palestiniens. Chris Patten était le responsable de
la Commission des Affaires Extérieures de l’Europe à l’époque et il
présentait très adroitement l’Europe comme « un honnête intermédiaire
» en insistant sans cesse sur le fait que l’UE faisait tout ce qu’elle
pouvait pour faire avancer « le processus de paix » ; il soulignait
que l’UE était le plus grand donateur de l’Autorité Palestinienne et
qu’elle aidait à développer un État palestinien embryonnaire. J’ai
pris beaucoup de ces affirmations pour argent comptant.

Le tournant pour moi a été tout à fait banal. J’assistais à une
conférence organisée par un des Comités de l’ONU sur la Palestine au
Parlement Européen de Bruxelles en 2007, et une session traitait des
relations de l’UE avec Israël. Pour la première fois j’ai pris
conscience de l’autre version des faits et j’ai reçu une information
solide sur la profondeur de la collusion entre l’UE et Israël. Je fus
frappé par le fait qu’il y a beaucoup d’écrits - les travaux de Noam
Chomsky etc... - sur la relation des États-Unis avec Israël mais rien,
à part quelques publications académiques, sur la relation entre
l’Europe et Israël. J’ai donc pensé que, puisque personne d’autre
n’allait écrire un livre sur ce sujet, il fallait que je le fasse.

Sarah Irving : Quel est, à votre avis, le plus puissant « levier » qui
peut expliquer l’attitude de l’Europe ? Vous identifiez différents
éléments dans votre livre : la culpabilité engendrée par l’Holocauste,
des intérêts économiques, l’influence des États-Unis ; quelles sont
les influences principales dans ce jeu de forces capitalistes et
politiques ?

David Cronin : C’est la combinaison de différents facteurs. Henry
Kissinger a dit un jour que l’UE ne serait jamais un acteur
significatif au Moyen Orient. Il ne fait aucun doute les États-Unis
demeurent l’acteur principal dans la politique mondiale en dépit de
l’ascension de la Chine, mais l’UE est loin de n’avoir aucun pouvoir.
Elle est le partenaire commercial principal d’Israël et c’est elle qui
consent le plus d’aide à l’Autorité Palestinienne, ce qui lui donne un
pouvoir économique important.

L’association entre l’UE et Israël est basée sur l’accord qui a pris
effet en 2000 ; l’article 2 de l’accord stipule qu’il est conditionné
au respect des droits de l’homme. Les fonctionnaires européens
prétendent que la clause des droits de l’homme n’est pas contraignante
mais il y a des hommes de loi pour dire que l’UE elle-même la qualifie
d’« élément essentiel ». Elle est clairement contraignante légalement
et l’UE a l’obligation d’invoquer cette clause et de punir Israël si
nécessaire quand il dépasse les limites. Pour moi le problème est la
lâcheté de nos politiciens qui n’ont pas la volonté politique
d’affronter le pouvoir hégémonique des Étasuniens ou des Israéliens
dans les affaires internationales.

Israël a développé des relations étroites avec l’UE et l’OTAN ; la
même stratégie est à l’œuvre dans les deux cas, et parfois ce sont les
même personnes qui dirigent le processus. Tzipi Livni, quand elle
était Ministre des Affaires Etrangères (d’Israël) a compris qu’il
pouvait être dangereux pour Israël de dépendre uniquement des États-
Unis. Elle et ses conseillers ont compris qu’il y avait d’autres
pouvoirs qui émergeaient dans le monde. Ils ont obtenu, en novembre
2008, des accords pour améliorer les relations d’Israël avec, tout à
la fois, l’UE et l’OTAN. Gabi Ashkenazi, le chef de l’armée
israélienne, a rendu visite à l’OTAN plusieurs fois et Israël a
participé à des exercices militaires avec l’OTAN. En juillet 2010,
plusieurs soldats israéliens furent tués dans un accident
d’hélicoptère en Roumanie. Les médias n’y ont accordé que peu
d’attention mais cela montre à quel point Israël est impliqué dans les
affaires de l’UE et de l’OTAN.

Sarah Irving : Votre livre parle beaucoup du profit qu’Israël tire de
cette relation. Mais quel profit en tire l’UE ?

David Cronin : C’est une bonne question parce qu’il n’est pas avéré
que ce soit vraiment l’intérêt de l’UE de faire, comme elle l’a fait,
copain-copain avec Israël. Il y a une école de pensée – avec laquelle
je sympathise - qui défend l’idée que l’UE ferait mieux d’oublier
Israël et de concentrer ses efforts à améliorer ses relations avec les
états arabes. Mais les facteurs décisifs sont les opportunités
commerciales et économiques.

En 2000, selon l’Agenda de Lisbonne [1], l’UE s’était fixé comme
objectif officiel de devenir, dans monde, l’économie la plus avancée
basée sur l’information. Mais pendant que les Européens en parlaient,
les Israéliens s’y sont mis et l’ont fait. Intel est en train de
mettre au point la prochaine génération de puces d’ordinateurs en
Israël. Un grand nombre de développements « sexy » sur Internet y ont
été développées. Les Israéliens consacrent 5% de leur PIB à la
recherche technologique, environ deux fois plus que les Étasuniens.
L’Agenda de Lisbonne avait fixé un objectif de 3% qui n’a pas été
atteint. Donc l’aspect le plus important des relations entre l’UE et
Israël est la coopération scientifique. Les Israéliens font partie du
Programme de Recherche Scientifique de l’UE depuis les années 1990.
J’ai vu quelques chiffres la semaine dernière selon lesquels les
Israéliens participent à 800 projets de recherche scientifique pour
une valeur de quelques 4,3 milliards d’Euros entre 2007 et 2013. La
bureaucratie de l’UE a le sentiment qu’il faut avoir de bonnes
relations avec les Israéliens à cause de leur supériorité
scientifique.

Le problème est qu’une bonne partie des triomphes scientifiques dont
Israël est si fier a un lien étroit avec l’occupation. Comme je le
signale dans mon livre, Elbit (la firme qui fabrique des drones
utilisés contre Gaza) et l’Industrie de l’Aviation Israélienne
figurent parmi les bénéficiaires des subventions de l’UE pour la
recherche scientifique. Un contribuable européen contribue donc à
développer l’industrie de guerre israélienne.

Sarah Irving : Au dernier sommet de l’OTAN, un nouveau programme de
missiles de défense a été annoncé, pour la première fois en
collaboration avec la Russie, qui doit apparemment être opéré à partir
de navires étasuniens basés en Méditerranée. Quelles implications cela
a-t-il pour les relations entre Israël et l’OTAN ?

David Cronin : Elles sont nombreuses. Si on parle de l’attaque de la
Flottille (qui transportait de l’aide à Gaza), légalement c’était une
attaque contre la Turquie. Le Mavi Marmara était un navire turc et la
Turquie, qui est membre de l’OTAN, a demandé que l’ONU se réunisse
d’urgence après l’attaque. Imaginez un instant que ce soit la Corée du
Nord qui ait fait cela : les feux de l’enfer se seraient déchaînés.
Mais c’était Israël. Alors, bien que l’OTAN ait condamné clairement
l’attaque, il n’y a eu aucune répercussion à long terme. Je crois même
que la Turquie n’a pas cessé sa collaboration militaire avec Israël et
que la Turquie a utilisé des armes israéliennes contre les Kurdes dans
le nord de l’Irak.

En ce qui concerne le nouveau concept stratégique de l’OTAN et son
système de défense antimissile, il y a eu beaucoup de discussions
relatives à une participation d’Israël. Je sais que de nombreux
responsables de l’OTAN se sont rendus en Israël et il y a eu des
entretiens dans la ville de l’aéroport, près de Tel Aviv, sur la
manière dont Israël pouvait collaborer à ce projet. Israël a développé
beaucoup de technologies qui intéressent fort l’OTAN, comme le système
d’interception de missiles baptisé Iron Dome, aussi les Israéliens
sont-ils considérés comme des experts, on les consulte, et il est tout
à fait probable qu’ils jouent un rôle actif dans le nouveau système de
défense qui excite tellement l’OTAN.

Sarah Irving : Des dirigeants, comme Nicolas Sarkozy en France,
parlent beaucoup du programme nucléaire iranien mais ne parlent pas de
celui d’Israël. Donnez-vous crédit à « l’option Samson », la théorie
selon laquelle les nations européennes sont parfaitement conscientes
de la menace que représentent les armes nucléaires israéliennes qui
pourraient détruire n’importe quelle capitale européenne presque sans
avertissement ?

David Cronin : Il faut parfois souligner l’évidence, mais le point le
plus important que la plupart des commentateurs malheureusement ne
voient pas, c’est le niveau effarant d’hypocrisie qui entoure ce
sujet. Nous savons qu’Israël possède une puissance nucléaire tout à
fait considérable et ne l’a jamais reconnu. A la différence de l’Iran,
ce pays n’a jamais signé le Traite de Non Prolifération Nucléaire et
n’autorise aucune inspection de ses installations, mais nous disons
aux Iraniens qu’il leur est interdit de développer des capacités
nucléaires alors que nous savons parfaitement qu’Israël les possède
déjà. Le deux poids deux mesures est flagrant. Pour ce qui concerne «
l’option Samson » je pense que c’est une chose que les dirigeants
européens ont probablement à l’esprit. Ce n’est pas un sujet que j’ai
moi-même approfondi, mais je ne rejette pas cette théorie.

Sarah Irving : Des chercheurs comme Daoud Hamoudi de Stop the Wall,
ont exprimé leurs sérieuses préoccupations concernant des zones
industrielles qui sont financées sous forme « d’aide » par les pays
européens. Cela fait des années que les colonies israéliennes
utilisent une main d’œuvre palestinienne sous-payée pour leurs
produits d’exportation. Les Zones Franches situées en Afrique Australe
ou en Amérique Centrale ont souvent été des endroits où les conditions
de travail des ouvriers étaient épouvantables et elles se sont en plus
révélé des sources de profit de courte durée car un pays concurrent
réussissait toujours à baisser encore plus ses coûts. Est-ce là un
avenir que nous pourrions voir en Palestine ?

David Cronin : Il faut se demander pourquoi l’UE soutient si ardemment
Mahmoud Abbas et Salam Fayyad. Leur légitimité démocratique est
quasiment nulle. Le mandat d’Abbas comme président élu a expiré. L’UE
se présente comme une instance qui soutient les principes
démocratiques et - à juste titre - demande aux candidats à l’entrée à
l’UE de respecter certains standards, mais dès qu’il s’agit des
Territoires Palestiniens Occupés tout cela est oublié. L’UE a décidé
d’ignorer les résultats de l’élection démocratique de 2006 parce que
les Palestiniens, aux yeux de l’UE et des États-Unis, avaient « mal
voté ».

Le cas de Salam Fayyad est particulièrement troublant. Voilà un gars
qui n’est pas populaire du tout dans son pays mais que l’Occident
adore. Il faut se demander pourquoi, et la seule réponse que je puisse
trouver c’est qu’il est complètement imprégné de la vision néolibérale
qui règne à Washington et à Bruxelles. Il a travaillé à la Banque
Mondiale et au FMI et, comme je le souligne dans mon livre, le papier
qu’il a écrit : « Vers un État palestinien » ressemble beaucoup aux
programmes d’ajustement structurel que le FMI a imposés à la plus
grande partie de l’Afrique dans les années 1980 et se prépare à
imposer à mon propre pays, l’Irlande. On parle ici de réduire les
salaires des fonctionnaires et les dépenses en général sauf - et c’est
significatif - les dépenses de sécurité, et de faire du secteur privé
le moteur de la croissance. Et donc votre analyse est tout à fait
exacte, l’idée est de faire de la Palestine un atelier de misère au
bénéfice d’Israël.

Sarah Irving : Vous avez écrit pour Electronic Intifada un article sur
la participation de l’UE à l’entraînement des forces de sécurité de
l’Autorité Palestinienne, censées s’inscrire dans la perspective de la
construction d’un État palestinien. À quoi ressemble, à votre avis, la
vision européenne d’un État palestinien ? Parlons-nous d’un tout petit
État doté d’un système de sécurité draconien et d’un régime économique
néolibéral ?

David Cronin : Je ne crois pas que j’emploierais ici le mot « vision
» ; je ne suis pas sûr que l’UE ait une vision. La « solution de deux
États » est une sorte de mantra pour l’UE mais je ne pense pas qu’elle
se soit demandé sérieusement ce que cela signifie. Les accords d’Oslo
avec tous leurs défauts avaient au moins le mérite de parler de Gaza
et de la Cisjordanie comme d’une seule entité, mais à l’heure actuelle
il est devenu presque impossible à un Palestinien de voyager d’un
territoire à l’autre et Israël contrôle une trop grande partie de la
Cisjordanie pour qu’il soit possible de mettre en œuvre la solution de
deux États d’une façon viable. Je pense que les représentants de l’UE
se cachent derrière la rhétorique en ce moment. Ils ne présentent
aucune pensée stratégique à long terme indiquant où ils veulent aller,
à part de renforcer leur relation avec Israël aux dépens des
Palestiniens.

Il faut se rappeler que l’UE présente la mission de la police COPPS
(la mission d’entraînement de l’UE en Cisjordanie) comme la
préparation d’une force de police en vue d’un État palestinien
indépendant, mais ces policiers n’ont aucune autorité pour arrêter des
colons israéliens et n’ont pas le droit d’aller dans le secteur C (la
partie de Cisjordanie où, selon les accords d’Oslo, Israël garde le
pouvoir de faire respecter la loi, et le contrôle des constructions et
des projets). Plus de 60% de la Cisjordanie n’est pas sous la
juridiction de cette force de police. Il y a aussi beaucoup de preuves
que l’UE ferme les yeux sur les exactions perpétrées par la police
palestinienne. Il y a des preuves de torture recueillies par les
organisations des droits de l’homme palestiniennes, et il est donc
assez dégoûtant que l’UE présente son action comme une aide
bienveillante aux Palestiniens.

Sarah Irving : Un des problèmes avec les livres, c’est qu’ils peuvent
être dépassés aussitôt sortis de presse. Y a-t-il de nouveaux
développements majeurs que vous voudriez mentionner dans les relations
entre l’UE et Israël ?

David Cronin : La chose principale est qu’à l’automne 2010, Kathy
Ashton, la responsable de la politique étrangère de l’UE a recommandé
qu’Israël soit élevé au rang de « partenaire stratégique ». Ce que ça
signifie exactement n’est pas encore clair, mais il semble qu’Israël
serait considéré à l’égal de la Chine ou des États-Unis dans l’échelle
des priorités officielles de l’UE.

Ashton a été un désastre dans sa relation avec Israël. Pour être
honnête, elle a fait quelques fortes déclarations sur Jérusalem et
l’expansion des colonies israéliennes, et aussi sur la peine de prison
infligée au (militant de base) Abdullah Abu Rahmeh qui a surpris
certaines personnes. Mais pour le reste, elle a traité les Israéliens
avec des gants. Elle est allée plusieurs fois à Gaza mais elle a
refusé de rencontrer le Hamas ; elle a essayé de présenter les
missions comme uniquement humanitaires et a minimisé leur portée
politique. Quoi que vous pensiez du Hamas, il a gagné une élection qui
a été reconnue comme libre et honnête par les observateurs de l’UE eux-
mêmes en 2006.

Il est inconcevable que Kathy Ashton se rende n’importe où dans le
monde et refuse de rencontrer les leaders politiques locaux. Quand
elle était à Jérusalem cet été, elle a donné une conférence de presse
conjointe avec (le ministre israélien des affaires étrangères Avigdor)
Lieberman et le seul prisonnier pour lequel elle a exprimé son
intérêt, du moins en public, a été Gilad Shalit. Elle a totalement
ignoré le fait que, chaque année, Israël emprisonne 700 enfants
palestiniens, le plus souvent pour avoir seulement jeté des pierres,
et qui subissent souvent des abus en prison. Mais, dans sa sagesse,
Kathy Ashton ne semble pas s’intéresser aux abus infligés aux enfants
palestiniens ; elle trouve plus intéressant le sort d’un soldat - qui
doit certainement être traité avec humanité et libéré - mais qui
participait à une occupation militaire brutale.

Sarah Irving : Vous terminez votre livre en disant que l’UE offre des
opportunités à ceux qui militent pour la souveraineté palestinienne.
Quelles sont à votre avis les tactiques les plus efficaces ? Cela
vaudrait-il la peine de prendre les membres du Parlement Européen pour
cibles ?

David Cronin : Je vais répondre d’abord à la seconde question. J’étais
opposé au Traité de Lisbonne mais un de ses bons côtés est qu’il a
donné plus de pouvoir au Parlement Européen qui, malgré toutes ses
imperfections, est une instance directement élue. Je ne suis pas
beaucoup entré dans le détail dans le livre mais, des trois
principales institutions de l’UE - le Conseil des Ministres, la
Commission Européenne, et le Parlement - c’est le Parlement qui a été
le moins malléable. Malgré des pressions très fortes, la majorité des
membres du Parlement a soutenu le rapport Goldstone sur l’attaque de
Gaza de 2008-2009. Plus récemment, le Parlement Européen a bloqué un
accord technique qui aurait rendu plus facile pour les biens
industriels israéliens de se conformer aux règles de l’UE, par
l’harmonisation des normes. C’est un sujet assez ennuyeux et pas du
tout excitant, mais le Parlement Européen ou en tous cas un de ses
comités a posé des questions inhabituelles et a retardé le passage en
force de cet accord.

Le Parlement n’est sans doute pas capable de geler toutes relations
avec Israël, mais il peut certainement lui rendre la vie plus
difficile. Il revient définitivement aux citoyens de l’UE de faire
pression sur les membres du Parlement Européen pour les forcer à
résister au lobby israélien. Israël se livre à un lobbying intense et
il existe un réseau « d’amis d’Israël » qui transcende les partis. Il
est donc très important que le Mouvement de Solidarité avec la
Palestine contre-attaque ce lobby riche et secret qui essaie
d’influencer des institutions clé.

Pour répondre à l’autre question, et pour le dire très simplement et
peut-être grossièrement, les gens ordinaires ne peuvent pas attendre
que leurs politiciens et leurs fonctionnaires prennent des mesures
contre Israël. C’est pourquoi, à mon sens, il faut soutenir la
campagne de boycott, désinvestissement et sanctions (BDS). Mais nous
ne devons pas oublier que c’est un moyen tactique, non une stratégie
complète et qu’il faut utiliser des moyens tactiques complémentaires.
Israël investit beaucoup de temps, d’énergie et d’argent pour faire
croire qu’elle est « la seule démocratie du Moyen Orient », et le
Mouvement de Solidarité avec la Palestine se doit de mobiliser toutes
ses ressources pour contrer cette propagande biaisée.

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Sarah Irving est un écrivain freelance. Elle a travaillé ave le
Mouvement de Solidarité Internationale en Cisjordanie occupée en
20001-02 et avec Olive Co-op, pour promouvoir le commerce équitable
des produits palestiniens et y a fait des visites de solidarité en
2004-06. Elle écrit maintenant à temps complet sur plusieurs sujets,
dont la Palestine. Son premier livre : « Gaza sous les bombes » co-
écrit avec Sharyn Lock a été publié en janvier 2010. Elle travaille en
ce moment à une nouvelle édition du guide de la Palestine Bradt et à
une biographie de Leila Khaled.

David Cronin, né à Dublin en 1971, est le correspondant à Bruxelles de
l’agence de presse Inter Press Service. Il a d’abord occupé cette
fonction pour le quotidien irlandais The Sunday Tribune après avoir
travaillé comme chargé de recherches et attaché de presse auprès du
Parlement européen. Entre 2001 et 2006, il collabore à European Voice,
hebdomadaire du groupe The Economist. Le livre de David Cronin «
Europe’s Alliance with Israel : Aiding the Occupation » est publié par
Pluto Press (2010).

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