Syllabaire

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Pierre Géhant

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Jul 27, 2022, 2:56:19 PM7/27/22
to alem...@googlegroups.com
Bonjour à tous,

Merci pour le phonographe et pour ce groupe en général que j'ai taggé "phonogrammatisme phonémique". Mon tag à moi c'est: "phonogrammatisme syllabique".

L'usage, dans les IME, est souvent basé sur ce qu'ils appellent des "pictogrammes". Un symbole-mot de Charles Bliss, bien qu’il soit qualifié de « pictogramme », constitue certes un aide-mémoire fort utile. En revanche, ce symbole est une représentation picturale, qui, à l’inverse d’un pictogramme, n’est que très faiblement conventionnelle. La dimension spécifique d’un symbole avec un et un seul sens, celui qui a servi au tout départ, présente donc des analogies avec la notion de sémasiographie.

Une sémasiographie est très peu généralisable. Hormis ceux qui étaient présents au moment où le signe a été créé, nul ne peut comprendre le sens qui est réellement attribuable à cette représentation picturale. Par ailleurs, en dehors des sémiographies, il convient de noter que les chinois utilisent des logogrammes qui correspondent à des monosyllabes, en ce sens, ces symboles ont eux aussi un lien avec l’oralité. Le logogrammatisme pur n’existe pas pour écrire des langues ordinaires. En Occident, l’écriture est phonogrammatique : elle transcrit des unités de parole. Le syllabisme a précédé, historiquement, l’apparition des alphabets. Cf. Séminaire ATILF : Daniel Zagar : La structure interne des écritures. Comment les Chinois ont inventé l’écriture ? (2019, mai 24). Vidéothèque de l’UL. https://ultv.univ-lorraine.fr/video/5003-seminaire-atilf-daniel-zagar-la-structure-interne-des-ecritures-comment-les-chinois-ont-invente-lecriture/

C'est à destination des enfants les plus entravés que je formule une proposition originale (PJ). Il ne s'agit pas d'outiller les seuls "déficitaires" à grand renfort de numérique pour compenser le handicap, il s'agit plutôt de faire du déficit de communication un problème qui concernerait tous les enfants.

Vos critiques affutées sont évidemment les bienvenues!

Bien à vous,


Pierre G.


PS: Robert Jeannard a formé à Mayotte et nous nous y sommes croisés lorsque je débutais à l'IFM (pas de U!!). J'ai enseigné à des enfants non francophones. Les deux dernières années, j'avais surtout des enfants non-verbaux en prise en charge individuelle.
Présentation Syllabaire.pdf

SYLVAIN COULANGE

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Aug 4, 2022, 6:16:46 AM8/4/22
to Apprentissage des Langues Et Multimodalité, ALEM
Bonjour Pierre, bonjour à tous,

c'est une proposition intéressante qui a le mérite de donner plus d'importance à la syllabe qu'aux phonèmes. C'est probablement plus proche de ce qui se passe dans notre tête quand on prononce des mots, surtout en langue étrangère. Là où le phonème paraît plus abstrait, une brique qu'on ne manipule peut-être pas tant que ça dans notre tête, moins que les syllabes préfabriquées probablement. Ou alors c'est une déformation de ma perception influencée par le japonais, où c'est effectivement des syllabes (ou plus précisément des mores) qui sont les briques fondamentales de la langue, et pas les phonèmes. En japonais, /ka/ = 1 son, /ki/ en est un autre.

Mais là où le japonais totalise une cinquentaine de syllabes (mores) possibles, le français en compte.... beaucoup. Ce qui m'amène à penser que travailler sur le système syllabique en français rend la chose plus complexe qu'avec le système phonémique, non ? Si la granularité est plus petite, cela permet d'avoir moins de briques fondamentales dans le système, et le manipuler plus facilement. Même si on ne fait que construire des syllabes préfabriquées, voire des mots préfabriqués, qui seront les véritables briques fondamentales du langage lorsqu'on utilise la langue. Enfin c'est simplement des intuitions, je ne m'appuie sur rien de scientifique pour avancer ça...

Je me pose la question du véritable rôle de l'outil que vous proposez. S'il s'agit de rentrer dans l'écrit à partir de l'oral, comment arriver aux graphies de chaque son ? Y a-t-il comme sur l'image à la fin une brique pour chaque syllabe orthographique (prin, temps, ...) ?

sylvain


De: "Pierre Géhant" <pierre...@gmail.com>
À: "Apprentissage des Langues Et Multimodalité, ALEM" <alem...@googlegroups.com>
Envoyé: Mercredi 27 Juillet 2022 20:55:53
Objet: [ALeM] Syllabaire

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Alexandre DO

unread,
Aug 4, 2022, 12:28:26 PM8/4/22
to alem...@googlegroups.com
Bonjour Pierre,

Waouh ! quelle entrée en matière pour un premier message. 
Cela m'a beaucoup intéressé et aussi questionné. 
J'ai regardé attentivement la vidéo qui éclaire quelques notions que vous abordez dans votre message.
Puis j'ai lu votre pdf. 
On sent que ça repose sur une analyse approfondie mais je ne situe pas bien la demande. 
J'ai aimé la réflexion sur la granularité du traitement des graphèmes. Je vais moi même aller travailler en IME et je me demande si l'entrée par les phonèmes sera accessible pour certains enfants. Il y a bien une approche de la lecture par imprégnation syllabique qui existe chez les orthophoniste quand ils ont des patients qui ne peuvent rentrer dans la phonologie. Donner accès à des outils de CAA qui oralisent ce que l'enfant veut dire me parait important pour que son autonomie puisse dépasser le cercle de ses proches et/ou "accompagnateurs".

Plusieurs questions me viennent mais c'est encore très brouillon pour moi.
  • S'agit-il de créer un outil de CAA ? pour communiquer oralement ou à l'écrit ? Pour apprendre à écrire ou à lire ?
  • Est-ce que cela repose sur de la pratique ou bien est-ce un projet complétement théorique pour l'instant ?
Il me semble qu'il peut être difficile de démêler tout ceci à l'écrit mais nous pourrions faire une visio avec un petit groupe de personnes intéressées et expérimentées.
Je pense à Claire-Marie Agnus qui travaille au centre ressource Robert Laplane pour le handicap rare.


Alexandre 

Pierre Géhant

unread,
Aug 6, 2022, 5:58:45 AM8/6/22
to alem...@googlegroups.com
Sylvain,

Merci de ce retour. En français, il y a 3415 syllabes orales. Celles-ci sont recensées dans la base Manulex. Chacune de ces syllabes orales peut être intégrée à l'intérieur d'un arbre dont la racine est chaque fois une syllabe du babil. Sans doute peut-on faire cette simplification aussi pour toutes les autres langues non moraïques puisque les bébés doivent bien babiller partout sur Terre. Un des prolongements serait de rendre "interopérables" des Syllabaires de divers systèmes linguistiques. 

En effet, j'ai inscrit des lettres dans ma trame de fond mais en réalité, c'était surtout pour ne pas effrayer mes collègues éducatrices avec de l'API ou pire... avec des points disséminés dans l'espace de la feuille (cf. PJ). En effet, le Syllabaire n'est pas un contenu (contrairement au "Graphabet", à la fin). Pour vous répondre, il n'y a pas une brique a priori déjà présente. Le Syllabaire est un contenant. Puisqu'elles correspondent à l'oral, à la même syllabe babillée [TA], on peut donc mettre dans le même contant aussi bien "た" de 食べたい (ta-be-ta-ï ) en japonais que "TAR" de tar-te en français.

Ainsi, sans brique, il est vide au départ. Ensuite, l'outil peut servir d'aide-mémoire pour toutes les orthographes des mots rencontrés au cours de l'apprentissage. Les orthographes "allomorphes" sont "isotopiques", c'est à dire qu'elles sont dans le même contenant (ex: TEMPS et TANT sont superposés avec de la patafix). Les orthographes "allophones" sont voisines (ex: TAN et TA). En constituant un répertoire orthographique précoce, il est possible de commencer à accumuler de la matière pour réfléchir, dès le début de la maternelle, au fonctionnement de l'écrit.

A cet âge là, le phonème n'est pas encore très accessible. C'est d'ailleurs essentiellement avec des prénoms que j'ai travaillé et je dois avouer que mon recul expérientiel est aussi encore vraiment très limité. A titre d'exemple, la photo de la première page illustre un usage naissant qui n'a même pas encore dépassé un mois d'utilisation, en tout cas, pour ce qui concerne les élèves oralisants. Je vais essayer de préciser le rôle de l'outil dans la réponse au mail d'Alexandre.

Merci encore pour cette remarque sur la granularité interlangue.

Bien à vous,

Pierre
 

Syllabaire001.pdf

Alexandre DO

unread,
Sep 2, 2022, 9:47:29 AM9/2/22
to Apprentissage des Langues et Multimodalité (ALeM)

Bonjour,

je remets dans ce fil de discussion un message de Pierre Géhant pour éclairer sa proposition de syllabaire.

Alexandre

Bonjour à tous,

Un exemple vaut mieux que mille mots

exemple syllabaire P Géhant.png

Chaque point correspond à une syllabe orale. Les syllabes complexes sont assimilées aux syllabes "babillées".

Dans l’emplacement [FÉ], il est donc possible de faire cohabiter les syllabes orales suivantes (la phonétique est codée en XSAMPA):


fe


fje


fle


fRe


fRed


fwe

En effet, ces syllabes orales, mêmes celles qui sont complexes, se babillent toutes de la façon suivante: /fe/

Par conséquent, des syllabes orthographiées différentes peuvent être mitoyennes dans une même case du tableau. Voici des exemples:


/fe/ comme « coi.ffer » dont on retient « FFER »

/fje/ comme « am.pli.fier » dont on retient « FIER »

/fle/ comme « in.flé.chis » dont on retient « FLÉ »

/fRe/ comme « fré.miss.ment » dont on retient « FRÉ »

/fRed/ comme « Frédérique » dont on retient « FRÉD »

/fwe/ comme « ba.fouer » dont on retient « FOUER »


Ainsi, à aucun moment, il n’existe une archisyllabe universelle. Dans une approche constructiviste, l'archisyllabe peut prendre différentes formes. Sans doute que pour la classe de Frédérique, l’archisyllabe pour [FÉ] sera « FRÉD », alors qu'en revanche, dans une autre classe, cette syllabe inaugurale pourrait être « FRÉ » parce qu’une lecture d’album aura amené avec elle un "frémissement". La première orthographe rencontrée va donc dépendre de la vie de la classe.


Il s’agit davantage d'avoir un support où stocker des syllabes graphisées rencontrées au fur et à mesure des occasions de lecture, sans être toutefois encore au stade d’une conscience phonologique de type phonémique. Vers 3-4 ans, l’accumulation de matériel graphique servira peu à peu à matérialiser la réflexion graphophonologique. En effet, lorsque dans la classe du « frémissement » arrivera « Frédérique », les syllabes seront superposées, à l’aide de patafix, dans la même case [FÉ], (les étiquettes l'une sur l'autre). La distinction graphique permettra de reconnaître l’appartenance de l’orthographe à tel ou tel référé : soit « c’est l’écriture de frémissement », soit « c’est l’écriture de Frédérique ».


On est en petite et moyenne section… pas en CP, c’est donc une préparation et une réflexion sur les réalités de la langue écrite que je propose. Ce n’est pas un apprentissage de toutes les relations graphophonémique. Mais, contrairement à l’usage en vigueur, le Syllabaire n’est pas, lui, une entrave à l’apprentissage des relations non contenues dans l'a priorisme de l’alphabet.


Enfin, l'ambition est inclusive, ce serait un support à enseigner la parole mais je détaillerais cela plus tard.

Pierre G

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