On 08.04.2015 14:50, Julien barma wrote:
> Le mercredi 8 avril 2015 13:55:18 UTC+2, Lionel Tacchini a écrit :
>> On 08.04.2015 13:46, MELMOTH wrote:
>>> À chaque époque sa *perception* et sa "conception" des oeuvres
>>> de Musiques...
>>
>> Il ne s'agit pas d'une perception mais d'une illusion,>
>
> Les deux mots ne s'opposent pas...tu procèdes par opposition
> sémantique, ce qui dans ton sens , est systématique... Une illusion
> est forcément le fruit d'une perception ( Sig.fREUD°
C'est exact mais l'illusion est une extrapolation de la perception, qui
elle-même peut être faussée. Je ne procède donc pas par opposition,
c'est une correction.
Le néophyte entendant l'andante du concerto de Mozart par Pollini,
percevra "andante" comme l'indication d'un mouvement lent:
https://www.youtube.com/watch?feature=player_detailpage&v=7O53goqtY60#t=823
S'il ne comprend pas l'Italien, il généralisera facilement sans se poser
trop de question et prendra "adagio" comme une indication encore plus
lente. J'ai même pensé un temps que le mot puisse être apparenté à
l'adage français et demandât un ton sentencieux, c'est dire à quoi on se
raccroche pour justifier une distorsion que l'on croit ne pas en être
une. Et pour cause, quelle raison aurais-je eu, découvrant la musique,
de penser que tous ces gens se fourvoyaient joyeusement dans la plus
grande indifférence d'un monde critique tout aussi dévoyé.
Je me suis quand même demandé, en découvrant "largo" et "lento" à quoi
pouvais bien rimer tout cette diversité synonymique.
Et puis il y eut l'"adagissimo" du shtroumphoniste, mais comme il
faisait déjà n'importe quoi partout ailleurs, il n'y avait pas lieu de
s'étonner.
Se laissant gagner par l'atmosphère des interprétations ainsi déformées
et l'ambiance des commentaires entourant la musique en général, notre
néophyte pourra se laisser aller à l'illusion que cette musique se
veuille profondément affectée, que le concerto dit "L'Empereur" soit une
œuvre de grandeur et que chaque modulation d'un concerto de Mozart soit
chargée par nature d'autant de mystère ou de confidence personnelle que
son Requiem ou que la symphonie "Fantastique" du morphineux délirant
L'illusion donc, est la tentative extrapolée d'explication d'une
perception faussée.
>>> Un mélomane/musicien *averti* de toutes ces problématiques
>>> écoutera donc _avec le MÊME intérêt_ des interprétaions
>>> complètement différentes, et /apparemment/ antinomiques...
>>
>> Le terme d'interprétation est faux. Interpréter, c'est chercher à
>> comprendre.
>
> Encore une fois...et encore pourquoi... le fait d'interpreter en
> cherchant à comprendre ( comme en linguistique, en
> économie)invaliderait-il le propos de Melmoth?
L’intérêt pour une explication ne saurait être le même que pour une
invention, à moins de ne pas faire la différence.
L'invention née de la dérive d'une tradition perd en cohérence, le
mensonge perd en crédibilité et on se retrouve devant un mauvais film
avec des trucs qui clochent mais des effets réussis.
Il faut de très grands menteurs pour y construire une nouvelle cohérence
jusqu'à offrir presque une œuvre parallèle. Celibidache était l'un
d'entre eux. Furtwängler aussi.
> Quant au *même* intérêt, il est bien sur caractéristique de
>> celui qui l'apporte, écoutant le bonimenteur avec le même respect
>> que celui qui sait de quoi il parle.
>
> Et arrives aussi facilement à délimiter le bonimenteur, que celui
> qui(...)? T'es un as alors.
Non bien sur. Enfin pas tout de suite, pas toujours, mais toujours plus
et toujours mieux, ce qu n'est pas forcément un avantage. J'ai cru à la
profondeur divine des sarabandes comme j'ai cru, enfant, au Père Noël.
Et puis je ne vois aujourd'hui dans les deux qu'une illusion que l'on se
raconte. Avec la différence, bien sur, que la musique est dès le départ
une illusion, un mensonge. Transformer une sarabande, ce n'est que
mentir autrement.
> Tu peux savoir de quoi tu parles, et délivrer des fariboles...
Et on peut dire les pires conneries sincèrement, c'est évident.
Laissons de coté la sincérité, ce n'est pas ce qui m'intéresse ici.
--
Lionel Tacchini